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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce roman est une construction littéraire subtile et élaborée reposant sur une trame narrative simple : l'histoire d'un homme venu rejoindre un groupe de jeunes gens en villégiature dans un hôtel en bord de mer, se finissant par son suicide probable. Il me semble que le vrai sujet de ce roman est la littérature. A partir d'une intrigue ténue et par la magie de son écriture et de ses multiples références, Gracq nous montre comment peu à peu un roman prend forme. Pour cela, il s'attache à rendre singulier ce qui pour le commun des mortels n'est que banalité voire même indiscernable. Les éléments fournis par l'auteur au lecteur sont souvent peu aisément déchiffrables et ouvrent grand la porte des suppositions romanesques. Tout semble enveloppé ou isolé dans la brume. Et le lecteur est plongé dans l'incertitude. La construction du roman renforce ce sentiment : aux trois-quarts du livre, le journal écrit à la première personne par le premier narrateur Gérard fait place à un récit reconstitué par un nouveau narrateur indéterminé. Gracq joue avec le temps (le rythme du journal intime et la durée prolongée de ces vacances d'été) et avec l'espace. Dans les deux cas, la notion de vacance est importante. Souvent les personnages se retrouvent face au vide des grands espaces (typiquement face à la mer). Cette situation est selon moi une façon pour Gracq de montrer comment des personnages se retrouvent en situation d'échapper à la toile d'araignée de la vie non romanesque, comment ces personnages sont placés face à la tentation de l'évènement , face à l'exaltation d'une autre vie. Ce roman peut paraître parfois étrange et vide. Il est en tout cas soutenu par la langue magnifique de Julien Gracq.
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Beau ? Je ne saurais dire car l'auteur ne s'étend pas sur le physique d'Allan. Ténébreux ? Alors là oui ! Cet aspect de l'énigmatique Allan est développé à profusion, de la perception qu'en ont les autres personnages jusque dans ses mémorables discours. Doté d'une personnalité sombre mais magnétique, il arrive comme un cheveu sur la soupe et viens chambouler les habitudes d'un groupe de jeunes gens ayant développé une complicité lors de leur séjour dans un lieu de villégiature au bord de la mer. Le roman m'a semblé avant tout psychologique, explorant la dynamique du groupe de personnages. Ces camarades s'échangent des propos d'une profondeur inouïe. Il y a peu d'action, mais c'est très intense. La lecture est un peu ardue ; l'écriture de Julien Gracq, que je découvre avec ce livre, est cérébrale, d'un niveau relevé et hautement poétique. L'histoire m'a plu et je ressors admiratif de cette lecture.
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Mais comment fait-il? Comment fait ce cher Gracq pour nous surprendre une fois de plus par l'efficacité de son écriture? cela fait le troisième roman que je lis de ce génie, et je suis encore impressionné par sa plume. En un seul livre, en une seule histoire, vous trouvez tout à la fois un récit où chaque mot à son importance, une écriture où vous pourrez apprécier la plus belle des poésies; et un nuage sur lequel vous vous allongez en vous laissant simplement bercer, sans même chercher à comprendre où vous êtes et où vous allez.Faille dans le cadre spatio-temporel, Julien Gracq est jusqu'à présent le seul auteur capable de m'emballer de cette manière, de me surprendre encore et toujours, de me faire voyager aussi loin grâce aux mots. Entre poète et artiste, guide et auteur, c'est pour moi LA figure littéraire du XXème, même si tout le monde ne sera surement pas d'accord avec ça.
Vous l'aurez compris, n'hésitez pas une seule seconde à lire un de ces livres (et notamment celui-ci ou Au Chateau d'Argol), ne serait-ce que pour découvrir son écriture et son style si particulier, si envoûtant surtout.
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La phrase est un peu longue, mais tellement bien rythmée! le choix des mots révèle l'amour que porte Julien Gracq à la langue. On se laisse d'emblée happer par le charme un peu désuet de sa poésie. Dans une ville balnéaire à l'automne, le fantomatique narrateur traîne sa mélancolie. Les premières lignes offrent une sorte de travelling aux couleurs pastel qui part de la plage pour emprunter les avenues qui s'enfoncent dans les pins. L'écriture est très cinématographique, mais sans "chabadabada". L'atmosphère devient vite angoissante.
Julien Gracq situe son roman à Kérantec, toponyme imaginaire, mais évidemment en Bretagne. C'est le journal de Gérard qu'il nous livre, après le magnifique prologue, du 29 juin au 24 août. Gérard a un double féminin : Christel. A l'hôtel des Vagues, ils observent un groupe de jeunes gens turbulents, ils contemplent la plage du haut de la fenêtre de sa chambre pour l'un, et de son balcon pour l'autre, tel Palomar d'Italo Calvino qui de sa terrasse assiste au spectacle du monde. Leur attention va se trouver focalisée sur un homme extraordinaire, Allan. L'imminence d'une catastrophe est très vite annoncée. Comme dans les tragédies grecques, la course vers la mort ne peut être empêchée.
L'écriture de Julien Gracq dévoile un être au tempérament de feu sous une apparente retenue, elle est très sensuelle et s'attache par exemple souvent à décrire les parfums ambiants. Elle est aussi très sensible et pleine d'une poésie mélancolique. Au prétexte de souvenirs évoqués par son personnage, il confie, comme un secret, l'attachement qu'il a conçu pour un site des bords de Loire qu'il contemple du train, à son passage entre Angers et Nantes. On devine une grande part de projection de l'auteur et de son vécu intime dans ces pages de fiction. Il s'agit de son deuxième roman seulement, publié en 1945. le beau ténébreux, c'est bien évidemment Julien Gracq lui-même.
Le roman semble porter l'héritage des auteurs fin de siècle et baigne dans une atmosphère très sombre, souvent onirique. Les personnages, sans qu'on sache pourquoi, sont sur le fil du rasoir, au bord d'un gouffre. Quel profond désenchantement a pu dicter ces lignes d'où émane pareille désillusion? Sont-ce les effets de la guerre encore récente?
Aucun suspense ne soutient le récit puisque la fin est clairement énoncée au travers de rêves et de prémonitions des personnages. Si l'ouverture du roman est superbe, la troisième partie en revanche est plutôt pesante et grandiloquente. Elle est certainement moins appréciée du lecteur moderne.
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J'ai eu envie de lire ce livre parce qu'un autre livre en parlait, mais je ne sais plus lequel. de toute façon, peu de choses à jeter chez cet auteur, il s'agit davantage de choisir dans quel ordre on lira ses livres...

Ce que j'aime chez Gracq, c'est qu'on a l'impression de se trouver dans la peau et dans la cervelle de ses personnages, plus particulièrement ici celles de Gérard, le narrateur qui nous conte un fragment d'histoire de ce beau ténébreux, Allan, au travers d'un journal de vacances en Bretagne.

Une fois de plus, Gracq invente les lieux de l'intrigue... mais on ne s'en aperçoit que si on les cherche sur une carte. Les personnages sont tout aussi crédibles, quatre célibataires et deux couples en vacances dans cette petite station balnéaire, où ils prolongeront leur séjour bien au-delà de l'été... Comme souvent dans les romans, ils ont le loisir de s'attarder, de vivre jusqu'au bout ce qu'ils sentent ou pressentent, de laisser se dérouler les évènements jusqu'à leur dénouement, pour en tirer peut-être toutes les leçons, ou au moins les avoir vécu dans leur intégralité, même si leur mystère in fine reste en partie insondable...

Il est question ici de la condition humaine, du statut qu'on se donne ou que les autres veulent bien vous accorder par le regard qu'ils portent sur vous... sans vous protéger pour autant. Les six personnages, dont certains ne se connaissaient pas avant ce séjour, recréent une mini société où s'exprime toute la complexité des rapports humains. Comme toujours chez Gracq, les sentiments sont dénudés, exposés sans fard, dans leur grandeur comme dans leur trivialité, sans jugement de valeur non plus : juste l'humain aux prises avec l'habituelle difficulté à vivre, avec ses désirs et ses peurs, ses pulsions plus ou moins contrariées par les règles de la vie sociale.

Les paysages, toujours décrits avec minutie, forment un écrin pour l'âme, produisant ou accompagnant l'état d'esprit des personnages, on ne sait pas très bien quoi s'accorde à quoi...

Toute l'histoire tourne autour d'Allan Murchison, personnage haut en couleur qui concentre tous les regards dès qu'il pénètre quelque part, et dont on comprend mal ce qu'il est venu faire dans cette station balnéaire sans prétention, lui qui semble fait pour le faste. Admiration, jalousie, défiance, passion, il déchaîne les sentiments tout autant qu'il intrigue. On finira par savoir ce qu'il est venu faire ici, si bien pressenti par son ami Gregory qui a préféré fuir le théâtre des opérations. On ne saura pas vraiment pourquoi il en est arrivé là, même si on le pressent... Dans l'intervalle, on aura pu observer les réactions qu'il suscite, révélant un peu de la nature de chacun des protagonistes de l'histoire...

Lien : http://aimez-vous-lire.blogs..
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