Qu'elle douceur ce livre, qu'elle bonheur de poèsie . Que de délicatesse . Richesse dans les descriptions, l'auteur n'est pas avar de mots et c'est un vrai plaisir.
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Monsieur Palomar marche le long d'une plage déserte. Il rencontre de rares baigneurs. Une jeune femme est allongée sur le sable et prend le soleil les seins nus. Palomar, en homme discret, détourne son regard vers l'horizon marin. Il sait qu'en de pareilles circonstances, à l'approche d'un inconnu, les femmes souvent se hâtent de se couvrir, et cela ne lui semble pas bien : c'est dérangeant pour la baigneuse qui prenait tranquillement le soleil; le passant se sent un gêneur; le tabou de la nudité se trouve implicitement confirmé; enfin, le respect des conventions à moitié est source d'insécurité et d'incohérence dans le comportement, plutôt que de liberté et de franchise.
C'est pourquoi, dès qu'il voit se profiler de loin le nuage rose bronze d'un torse nu féminin, il se hâte de détourner la tête de façon que la trajectoire de son regard reste suspendue dans le vide et témoigne de son respect courtois pour l'invisible frontière qui enveloppe les personnes.
Le moi qui nage, de monsieur Palomar, est immergé dans un monde sans corps, intersections de champs de forces, diagrammes de vecteurs, faisceaux de lignes droites qui convergent, divergent, se brisent. Mais il reste un point en lui où tout existe d'une autre façon, comme un nœud, comme un caillot, comme un engorgement : la sensation précisément qu'on est là mais qu'on pourrait ne pas y être, en un monde qui pourrait ne pas y être mais qui est là.
Des ombres silencieuses bougent sur le sable ; un couple d'amoureux de détache de la dune, un pêcheur nocturne, un douanier, un batelier. Monsieur Palomar entend un murmure. Il regarde autour de lui : à quelques pas s'est formée une petite foule qui observe ses mouvements comme les convulsions d'un dément.
La contemplation des étoiles
Le fait est qu'il voudrait, plutôt que d'affirmer une vérité particulière, poser des questions, et il comprend que personne n'a envie de sortir des rails de son propre discours pour répondre à des questions qui, venant d'un autre discours, obligeraient à repenser les mêmes choses avec d'autres mots, et peut être même à se retrouver en territoire inconnu, loin des parcours établis. Il voudrait bien aussi que les questions lui viennent des autres: celles auxquelles il répondrait en disant les choses qu'il a le sentiment de pouvoir dire seulement si quelqu'un lui demandait, mais qu'il pourrait dire seulement si quelqu'un lui demandait de les dire. De toute manière, il ne vient à l'esprit de personne de lui demander quoi que ce soit.
Il mare è appena increspato e piccole onde battono sulla riva sabbiosa. Il signor Palomar è in piedi sulla riva e guarda un'onda. Non che egli sia assorto nella contemplazione delle onde. Non è assorto, perché sa bene quello che fa: vuole guardare un'onda e la guarda. Non sta contemplando, perché per la contemplazione ci vuole un temperamento adatto, uno stato d'animo adatto e un concorso di circostanze esterne adatto: e per quanto il signor Palomar non abbia nulla contro la contemplazione in linea di principio, tuttavia nessuna di quelle tre condizioni si verifica per lui. Infine on sono "le onde" che lui intende guardare, ma un'onda singola e basta: volendo evitare le sensazioni vaghe, egli si prefigge per ogni suo atto un oggetto limitato e preciso.
Christine Montalbetti Romans américains éditions P.O.L : où Christine Montalbetti tente de dire comment et pourquoi elle a écrit un roman de Donovan Gallagher et deux romans de Tom Lee Mulligan, trois romans américains qu'elle prétend aussi avoir traduits, et il est notamment question de ce que ça fait d'écrire masquée en écrivain américain, d'avoir un narrateur romancier, d'Italo Calvino et de Guillaume Musso, de "Journée américaine" et de "Plus rien que les vagues et le vent" , de discours direct et indirect, d'estampes japonaises et de conseils à un écrivain, à l'occasion de la parution de "Romans américains", dans la collection #formatpoche des éditions P.O.L le 5 mai 2022
- Donovan Gallagher "Ce qui s'est réellement passé à Stonebridge"
- Tom Lee Mulligan "Comment écrire un roman, selon Price"
- Tom Lee Mulligan "Runaway bay"
"Qui n'a pas rêvé d'être un écrivain américain ? Alors j'ai écrit un roman de Donovan Gallagher et deux romans de Tom Lee Mulligan. Disons que je les ai traduits.
"Ce qui s'est réellement passé à Stonebrige", Donovan Gallagher : Quand il débarque à Stonebridge, Roy Steven est persuadé qu'un fait divers va s'y produire. Il n'a pas tort, mais les choses vont se passer un peu différemment de ce qu'il avait imaginé…
"Comment écrire un roman, selon Price", Tom Lee Mulligan : Bryan décide sur un coup de tête d'écrire un roman. Il demande à son ami Price, un célèbre écrivain, une liste de conseils. Mais Price semble jouer un drôle de jeu, rapport à Carol.
"Runaway Bay", Tom Lee Mulligan : À Runaway Bay, il y a un lac, un bar, une épicerie, un garage, accessoirement un golf, et les pluies d'été du Texas. Jeff y mène sa petite vie tranquille jusqu'au jour où Montana arrive. Puis Sam."
à Paris le 26 avril 2022
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