SIMPLES, subst. masc. plur. : plantes médicinales utilisées telles qu'elles sont fournies par la nature.
Exemples : scolopendres et capillaires, passiflore et alchémille, prêle des champs, gentiane, millepertuis, laurier noble... et cetera !
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Yannick Grannec ! Par la magie de sa plume experte, téléportez-vous en l'an de grâce 1584, sur les terres provençales du baron Claude de Glandevêves, et demandez soeur Clémence, doyenne des bénédictines et herboriste en chef en l'abbaye de Notre-Dame du Loup.
Après passage devant la soeur tourière (chargée des relations avec les visiteurs) et pieuse génuflexion devant le reliquaire de Sainte-Vérane, empruntez en silence le déambulatoire, longez le jardin potager et le carré de culture des simples, traversez le cloître et poussez la porte de la grande salle capitulaire.
Si la mère abbesse vous y autorise, consultez le précieux codex ébauché par Gabrielle d'Estéron, la jeune novice du couvent, et procurez-vous à l'occasion l'une des mystérieuses décoctions qui font la réputation du monastère : le célèbre "aimable cordial de Sainte-Vérane" pour prévenir la calvitie, le "baume délicieux" contre les escarres, crevasses et brûlures, ou encore le "chaste vinaigre", pour qui "des songes lascifs voudra se préserver, baisser le pavillon par le diable hissé et garder la vertu par ses voeux professée..."
Prenez garde toutefois lors de votre expédition médiévale à n'enfreindre aucune règle du droit canon, à ne pas contrarier les plans de Jean de Solines, redoutable évêque de Vence et ministre du Saint-Siège apostolique, et plus encore à ne manifester aucun signe d'hérésie : le père Basile Montrachetti, inquisiteur, et monsieur Honoré d'Outremont, commissaire royal, auraient tôt fait de vous soumettre à la question !
Maintenant que j'ai un peu planté le décor, il est grand temps de vous dire tout le bien que j'ai pensé de ce formidable roman ! Bourré d'érudition et particulièrement bien documenté - comme en témoigne la copieuse liste de sources en fin d'ouvrage ! - il exhume pour nous toute une galerie de personnages terriblement bien croqués, du prélat corrompu aux moniales rigoristes et adeptes des mortifications en tous genres, en passant par le jeune vicaire ingénu ou la rebouteuse taxée de sorcellerie.
Manoeuvres et intrigues, jeux de pouvoir et d'ambition, querelles de clochers et manigances sur fond d'inquisition et de dissidence huguenote : dans
Les simples on ne s'ennuie pas !
On se régale même de cette écriture léchée, mâtinée de latin, de dictons anciens, de charmantes recettes et de tournures délicieusement moyennageuses. Une fois passé le premier temps d'adaptation, on se familiarise finalement assez vite avec la vie monastique à Notre-Dame du Loup, ses règles et ses traditions.
Le quotidien de la congrégation religieuse que nous dépeint
Yannick Grannec, fait de servitude et de frustrations, a quelque chose de terrifiant, et l'on s'attache bien vite à la doyenne Clémence, puits de sagesse et de science botanique.
Quel enchantement de l'entendre évoquer les vertus de ces plantes oubliées, "les herbes de la lune, qui aident le ventre des femmes ; les plantes du soldat, qui guérissent blessures et plaies ; les algides, qui éteignent le feu du corps ; les ardentes, qui le réveillent ; les angéliques, qui chassent les putridités ; les miséricordieuses, qui soulagent les tourments de la chair ; les consolantes, qui apaisent ceux de l'âme"...
Par sa voix l'auteur nous délivre une pharmacopée complexe et très fantaisiste. Si elle n'en fait pas la seule originalité, elle confère néanmoins au roman une saveur particulière et une certaine poésie, qui contraste avec l'obscurantisme et la barbarie de l'époque.
Ajoutons pour finir que
Yannick Grannec a eu la bonne idée de situer son intrigue sur une terre qui m'est chère et que je connais bien : elle borde son diocèse par le Var, l'Estéron et le Loup ! Ce fut donc un vrai plaisir de voyager en sa compagnie entre Vence, Grasse et Gréolières, le temps de ce pèlerinage épique sur le tombeau de Sainte-Vérane !