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EAN : 9782213013961
360 pages
Fayard (23/05/1985)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
La " Belle Epoque " ne le fut guère pour beaucoup de petites gens. Et notamment pour les travailleurs immigrés juifs. Fuyant les pogroms de Russie et de Pologne, ils espéraient, parvenus en France, atteindre un havre de paix, toucher au bout de leurs peines. Mais la communauté française de confession israélite, installée depuis longtemps, espérait que la France ne serait qu'une étape provisoire sur le chemin des Amériques dans le long voyage de ces coreligionnaires ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
La belle Epoque, de toute évidence, n'était pas « belle » pour tout le monde
« L'immigration juive s'inscrit dans un processus dont les conséquences dépassaient de loin le monde juif »

Dans son introduction, Nancy Green parle d'histoire, « insérer l'histoire de la diaspora dans l'histoire sociale et économique des pays d'accueil », de groupes sociaux constituant les communautés, d'histoire des travailleurs immigrés…

« Je me propose de réexaminer l'immigration juive des temps modernes, afin d'étudier les immigrants dans une autre perspective. Plutôt que de m'en tenir à des conflits entre autochtones et immigrés juifs, je préfère montrer que le mouvement ouvrier juif est la conséquence de la condition même d'immigré. Je m'intéresse donc aux immigrés juifs comme travailleurs et à leurs luttes socio-économiques avec leurs patrons eux-mêmes immigrés, bien plus qu'à leurs conflits politiques ou institutionnels avec la communauté juive française »

L'auteure aborde, entre autres, l'image mythique du juif errant, l'industrialisation de la France, l'industrie vestimentaire, le Pletzl (quartier Saint-Paul-le Marais à Paris), les conditions préexistantes à l'immigration, les adaptations des personnes migrantes, les politiques communautaires, les structures sociales des « étrangers », les relations entre la CGT et les sections yiddish, la solidarité d'intérêt entre les travailleurs…

Partir de la notion de travailleur/travailleuse ouvre des perspectives d'analyse que la seule notion d'immigré-e-s ne permet pas.

En premier lieu, la décision de partir, qui dépend « de l'interaction de facteurs à l'intérieur des pays de départ et d'arrivée », les nouveaux mondes de l'industrialisation, l'antisémitisme légal et les « pogroms secs », la « Zone de résidence », le déclin des activités commerciales et le développement du travail manuel et artisanal dans les manufactures, des millions d'immigrant-e-s juifs/juives… L'auteure insiste sur la situation des ouvriers-artisans, l'immigration des travailleurs qualifiés, la place des travailleurs de la confection, le contexte économique et socio-religieux, l'immigration comme « fuite devant ce qui était ressenti comme un milieu étriqué et replié sur lui-même »…

Nancy Green parle de l'attirance vers l'occident, de l'attrait de la France « Pour les Juifs, la révolution française avait une signification particulière », des rues « pavées d'or » d'Amérique, de la très faible attirance pour la Palestine… Et de la révolution industrielle et des besoins de main-d'oeuvre… Elle analyse pourquoi « l'immigration des tailleurs juifs à Paris, aussi bien qu'à New York et à Londres, n'était pas simplement fortuite ».L'auteure détaille le fonctionnement de la confection parisienne, le travail à domicile, les petits ateliers, le caractère saisonnier du travail, le système de sous-traitance, la place de « l'entrepreneur », l'éparpillement spatial de la chaîne de montage, la concurrence, la main d'oeuvre dont la place des femmes… Les passages sur « le choix » des travailleuses est d'une étonnante actualité !

Le second chapitre est consacré au « rôle de la communauté juive française » dans l'arrivée et l'accueil. Il faut aussi ajouter le transit vers les USA ou l'Argentine. Nancy Green parle des arrivant-e-s, des réactions de l'opinion publique, de la presse antisémite, du « peuple juif », « L'immigration des pays d'Europe centrale et orientale permit en tout cas de poser sans détour la question de l'homogénéité du peuple juif et de son rôle économique », des réactions de la « communauté juive française », du concept « d'intégration », de la « découverte des ouvriers juifs », des immigrés comme « étrangers, indigents ou révolutionnaires », des oeuvres philanthropiques, de la soupe populaire du Pletzl, « L'arrière-plan de xénophobie et d'antisémitisme, à la fin du XIXe siècle en France, ne pouvait que renforcer la sensibilité des juifs français à ce problème, qui finirent par faire leurs certains thèmes du discours antisémite : les juifs d'Europe centrale et orientale étaient, nous l'avons vu : sales, étrangers, pauvres et peut-être révolutionnaires ». L'unité « communautaire », indépendante des différents intérêts sociaux, est toujours une illusion…

J'ai notamment été intéressé par le chapitre « Lebn vi Got in Frankraykh ? S'installer », les développements sur le yiddish, « commun dénominateur de toutes les organisations immigrées qui verront le jour », la culture, la concentration géographique, les sous-groupes, la vie religieuse, les sociétés de secours mutuel, l'Asile israélite de Paris, « la vie politique des immigrés et les révolutionnaires professionnels », le Bund, l'influence anarchiste, l'expression des besoins de toute communauté « étrangère » ou minoritaire, « Finalement, la solidarité des immigrés, même si elle renforce l'attachement aux valeurs et aux coutumes traditionnelles, est aussi un moyen d'adaptation dans le processus d'installation »…

Je souligne les analyses sur les structures de l'emploi, la démographie, le recours au colportage, les « métiers juifs », le travail et les grèves, la place des casquettiers, les mises en accusation de la sous-traitance, de la sous concurrence ouvrière, du « façonnage », la naissance du « mouvement ouvrier juif ».

Nancy Green détaille le développement du syndicalisme, les sections syndicales des immigrés, la place de la Chambre syndicale des ouvriers casquettiers, les revendications sur le tarif unique, le contrôle de l'embauche, les bundistes…

Dans le chapitre VII, l'auteure analyse les relations entre « classe et communauté », le mouvement ouvrier et le mouvement des immigrés juifs, l'antisémitisme « en tant que protectionnisme », la « question nationale » dans le Pletzl…

Je termine en reproduisant la dernière phrase de la conclusion : « A l'époque, leurs tracts étaient rédigés en yiddish, mais les travailleurs asiatiques, turcs ou yougoslaves d'aujourd'hui s'y retrouveraient »
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Je me propose de réexaminer l’immigration juive des temps modernes, afin d’étudier les immigrants dans une autre perspective. Plutôt que de m’en tenir à des conflits entre autochtones et immigrés juifs, je préfère montrer que le mouvement ouvrier juif est la conséquence de la condition même d’immigré. Je m’intéresse donc aux immigrés juifs comme travailleurs et à leurs luttes socio-économiques avec leurs patrons eux-mêmes immigrés, bien plus qu’à leurs conflits politiques ou institutionnels avec la communauté juive française
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L’arrière-plan de xénophobie et d’antisémitisme, à la fin du XIXe siècle en France, ne pouvait que renforcer la sensibilité des juifs français à ce problème, qui finirent par faire leurs certains thèmes du discours antisémite : les juifs d’Europe centrale et orientale étaient, nous l’avons vu : sales, étrangers, pauvres et peut-être révolutionnaires
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Finalement, la solidarité des immigrés, même si elle renforce l’attachement aux valeurs et aux coutumes traditionnelles, est aussi un moyen d’adaptation dans le processus d’installation
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