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3,8

sur 587 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Je fermai les yeux et écoutai le refrain de « Piece Of My Heart ». La voix de Janis Joplin me déprimait à mort. J'avais envie de tout plaquer, ma femme, mes gosses, ma vie. Mon seul désir qui me tenait quelque fois encore éveillé était de pouvoir partir à la pêche. Je ressentais cette eau froide et glaciale du Montana rentrer dans mes cuissardes. La brume vespérale commençait à se disperser, les truites arc-en-ciel semblaient puiser de ce réveil matinal une puissante force en luttant contre le courant. Je fus interloqué par la façon dont la pêche m'aidait à tout oublier, du moins tant que je restais dans la rivière. Pendant des heures, tous mes problèmes (argent, sexe, drogue) s'évanouissaient comme par enchantement tant ma concentration sur le cours d'eau, sur les courants happait mon esprit à la recherche des plus grosses truites.

Souvenirs du Montana et de la pêche à la truite tant pratiquée… Aujourd'hui, j'ai émigré à Key West et je passe mes journées à pêcher le tarpon. Enfin quand j'arrive à me lever pas trop tard et que je ne perçois pas cette désagréable sensation qui obscurcit mon esprit encore embrumé dans l'alcool de la veille… de toute façon, je ne vois pas ce que je peux faire d'autre. A quoi bon travailler ? La vie est trop courte… Un joint, un verre, deux joints, deux verres et une journée à taquiner le poisson : voilà le parfait résumé de ma vie.

Tim, le genre de gars costaud dont vaudrait mieux éviter son regard, vétéran du Vietnam en plus, une grande cicatrice le défigurant sur la moitié du visage. Je ne peux pas dire que c'est un pote à moi. On s'est juste rencontré la veille dans un bar autour de quelques whiskys. Comme d'habitude, je ne me souviens pas de grand-chose, si ce n'est que les bières et les whiskys défilaient sur le comptoir. Et au milieu d'une conversation anodine, voilà que je sors qu'ils vont construire un immense barrage sur le Grand Canyon. Et voilà que Tim, mon ami d'un jour, me balance qu'il faudrait le dynamiter. Ainsi, notre expédition va naître d'un discours de poivrot.

Un long road-movie à travers l'Amérique va m'entraîner des bords de la Floride jusqu'à mon Montana natal. J'espère qu'on trouvera le temps de prendre quelques belles truites sur les rivières du coin. Je n'oublie pas ma canne à pêche télescopique et monte dans sa voiture, direction le Grand Canyon. Une petite halte pour récupérer sa copine d'enfance, Sylvia et en route pour l'aventure. Mais dès le début, je me sens mal à l'aise. Je ne saurai dire pourquoi… Finalement, je crois que cela me fait chier de parcourir cette longue route juste pour faire sauter un barrage qui pour le moment n'est qu'un hypothétique projet vaguement utopique. Et Sylvia… Je ne peux m'empêcher de la mater dans la voiture. Jamais vu plus callipyge comme nana. Une paire de jambe sublime. Mon attention se porte fixement sur elle. Mon regard semble attiré magnétiquement par sa minijupe à pois, à la limite de l'indécence et j'imagine cette fine ligne dessinée par ses poils pubiens. Je n'ai qu'une envie : lui arracher sa jupe, la prendre en moi, lui fourrer mes doigts dedans et l'étreindre furieusement, bestialement, sauvagement… Dire qu'elle est amoureuse de Tim et que Tim n'en a strictement rien à foutre d'elle… C'est bien là mon malheur et mon triste sort. Heureusement que les bières sont là pour nous tenir compagnie, ainsi que Bob Dylan, à fond la caisse, entre deux bouteilles de whisky et de tequila. Heureusement qu'il y a aussi les cachetons de Tim et les joints. Merde, putain, dans quelle galère je suis… mais je l'aime moi, cette putain de Sylvia !

[...]
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Deux jeunes désenchantés, sans repères, imbibés d'alcool et intoxiqués par les stupéfiants, décident au cours d'une beuverie, de mener une opération de sabotage. Les voici partis pour une traversée endiablée des Etats-Unis, une longue diagonale qui les conduira de la Floride au Montana. le narrateur a quitté sa femme et sa fille pour se mettre en vacance du monde. Seule la pêche lui permet de calmer son désespoir. Il rencontre dans un bar Tim, un vétéran du Viêt-Nam au visage barré par une large cicatrice, symbole de sa fêlure interne. Riche de sa solde d'engagé volontaire, il est le moteur forcené du périple et semble animé d'une rage de vivre et de se consumer proche de celle de Dean Moriarty /Neal Cassady. Les deux hommes embarquent au passage Sylvia, l'ex que Tim n'a pu se résoudre à épouser à son retour du Viêt-Nam. Leur objectif initial est assez vague puisqu'il s'agit de détruire un barrage sur le Grand Canyon alors que l'ouvrage n'est encore qu'à l'état de projet. Ce n'est en fait qu'un prétexte, seuls le mouvement, la vitesse, la découverte de nouveaux horizons et la fuite en avant importent. le voyage est noyé par les vapeurs d'alcool, le brouillard de la drogue et la fatigue. le trio est aussi miné par une tension sexuelle permanente née de la frustration de chacun des personnages. On trouve dans cette oeuvre de jeunesse les thèmes de prédilection de Jim Harrison comme la Nature, les rivières, la pêche ou la culture amérindienne. Vous l'aurez compris, "Un bon jour pour mourir" marche dans le sillage de "Sur la route" ou d'"Easy rider", sans pour autant les égaler. A noter que le lecteur pourra être gêné par le récit fiévreux, décousu, qui se montre parfois difficile à suivre (cela s'explique par l'état de fatigue et l'ivresse du narrateur). J'ai été pour ma part emporté par le courant qui porte le roman. Un courant furieux, frénétique et irrésistible...
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Et bien Mr. Harrison nous embarque littéralement avec ses trois protagonistes : deux hommes, une femme. Pas de retour possible (il est rare, pour ma part, d'abandonner un bouquin de cet auteur!)
Un road trip où alternent une certaine lucidité avec son lot de questions existentielles sur la liberté et l'amour et des trips sous valium mêlé au whisky (par ex) jubilatoires parce qu'on est défoncés avec ce trio sans effet secondaire. On roule, dort de motels en motels, nous picolons dans les bars, nous arrêtons dans les dinners. Je vous dis : il nous embarque.

Et puis, les mots de Jim Harrison : du désespoir plein la caboche et en même temps du lyrisme toujours du lyrisme...qui nous envoûte. Parce que c'est simplement beau quand il évoque la nature, une averse et que sais-je encore?

Attardez-vous sur le titre! Magistral non?
Ironique. À double tranchant, oui c'est ça : il tranche. Harrison nous donne un gentil petit coup de couteau.
C'est possible ça? Un bon jour pour mourir?

Embarquez.
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C'est l'histoire d'un jeune homme, de retour du Vietnam et perdu dans sons Amérique natale. Il rencontre alors un compagnon de route et sa petite amie et décident de partir donner un vrai sens à leur vie. Drogue, sexe et mauvaises idées pour un voyage halluciné et désespéré.

Jim Harrison, avec sa plume si particulière signe ici un roman court et très agréable à lire, un roman dignes des meilleurs "beats". C'est un véritable plaisir que de suivre l'équipée dans sa recherche de sens et d'action, mais surtout d'évasion. J'avais lu ce livre très jeune et j'avais été soufflé par l'explosion ! A ne pas manquer !
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(A good day to die, 1973)
10/18 – 2019

Un trio, un ancien soldat, un pêcheur et une bombe décident de se rendre dans l'ouest des États-Unis pour faire exploser un barrage, il faut voir cela comme une sorte de contestation révolutionnaire d'activiste du dimanche. Road trip qui met sur le bitume les tripes de gens déglingués, à bout de souffle, sans but. de la pure folie.
Médocs, alcoolisme, substances hallucinogènes, stupéfiants, marijuana, sexe…

Plongé dans la littérature underground, la quête de sens, dans une période beat et post beat. On retrouve le même genre de personnage que dans « le dernier baiser » de James Crumley, « Hold up » de Patrick O'Neill, fort proche de « Putain d'Olivia » de Mark Safranko, de Dan Fante et de Bukowski, et surtout similaire à « Last exit to Brooklyn » d' Hubert Selby Jr — que celui-ci résume comme « Les horreurs d'une vie sans amour ».

« Quelqu'un a dit, je crois que c'est un poète russe, que nous n'étions sur cette terre que les ombres de notre imagination. J'aimais à contempler l'idée que nous étions tous les trois en train de folâtrer, comme les hirondelles autour de la source, là-haut dans les Pedregosas, alors que mon pauvre cerveau était ailleurs, essayant de créer une superstructure pour ce qui était en train de se passer. »

Jim est comme les autres, la vérité. C'est pour cela que ses écrits sont percutants. Il y a cette touche véritable qui vous titille au plus profond de votre être ; c'est comme l'insondable nature dans laquelle nous errons et que nous ne pouvons gérer, mais y être nous rassure quand on la voit telle qu'elle est ; c'est comme se laisser porter par l'eau quand vous êtes en apnée frôlant les coraux aux milles couleurs, ou s'extasier devant un framboisier complètement isolé au milieu des bois avec un chant d'oiseau et le souffle du vent dans les fougères en fond sonore : la théorie de « L'aperçu » ! Échafaudée par Jim lui-même :
« La réalité pouvait s'ouvrir et révéler son essence comme un morceau de linoléum qu'on plie jusqu'à ce qu'il casse, et qu'on découvre la fibre noire sous-jacente.»

Cet aperçu c'est la force constante dans l'oeuvre de Jim Harrison.
Vous trouverez ce bonheur dans tous ses livres.
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Il n'y a pas assez d'espace, d'espaces, pour augmenter le désir de vie qui colle à la peau des personnages. Il aurait pu ne rien se passer. Mais l'illusion transparait à chaque scène de ce "road bad trip". L'illusion de l'amour, l'illusion de l'amitié, l'illusion de la vie. Elle est portée par la débauche, la consommation de drogues, d'alcool, la mélancolie. Par cette idée folle de faire sauter un barrage pour sauver les truites de l'extinction... Elle est portée par la moiteur du voyage, irréel, embué. Par une forme de candeur inasummée des personnages. L'esprit torturé de désirs mal formulés, parce que hors du véritable désir qui n'est jamais prescrit, qui n'est pas atteignable, un désir qui sourd des actes et des mots comme la sueur sur les cuisses de Sylvia. Vouloir sans le vouloir vraiment mais se laisser emporter par celui qui veut le plus, par celui qui veut à la place de l'autre. Redouter de se joindre à l'autre mais dans une folle réflexivité des sentiments. Un trio improbable, une errance improbable qui ne connaitra même pas sa résolution. Et au delà, l'échec même du final qui ne ressemble en rien à l'idée majestueuse qu'ils s'en sont faite au départ.
Un beau livre sur la vacuité de la vie.
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Un chef d'oeuvre, sans doute le meilleur et le plus universel de Big Jim
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J'ai eu du mal à lire ce roman de Jim Harrison, j'ai dû m'y reprendre à deux fois. Il est un peu artificiel, par moments – disons qu'on ne croit pas vraiment aux personnages, ni à leur quête. Pourtant, c'est vraiment un roman émouvant, dont l'écriture est parfois follement poétique.
Il s'ouvre sur ses lignes, que je trouve formidables :

« le bateau est ancré au large de Cudjoe Key. L'aube se lève à peine mais j'ai été réveillé par les oiseaux. Il y en a tant. »

C'est un roman d'aventure, mené par un héros mélancolique, et légèrement réfractaire. C'est un roman désespéré, Jim Harrison était jeune encore, et il se demandait peut-être comment il allait faire pour tenir toute la vie comme ça.

En tout cas, il aimait déjà les oiseaux.

« Je sortis de la chambre dans l'obscurité totale, une heure environ avant l'aube. Il y avait un hibou dans les arbres, sur la colline derrière le bungalow. Je l'avais entendu et maintenant, dans le clair de lune, j'espérais l'entrevoir si par bonheur il se mettait en chasse. »

Quand on lit un road trip, bien sûr, on pense à Sur la route. Tous ceux qui suivent, et ils sont nombreux, ne sont que des variations sur un même thème. Celle-ci est sans doute une de mes variations préférées.
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J'ai découvert Jim Harrison avec ce recueil de nouvelles et depuis plus de 20 ans, je ne me lasse jamais de ses livres, de sa peinture de l'Amérique. Son Amérique a lui n'est pas celle de Hollywood non c'est celle de la campagne, celle des amérindiens spoliés, celle de l'aide sociale. Mais c'est si bien dit...
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Un magnifique ouvrage écrit à l'hiver de sa vie. Une leçon de sagesse.
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