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Quelle belle idée de raconter cette horrible histoire du génocide Arménien par le biais d'un conte.
Tout est factuel mais les faits sont adoucis par le coté narratif;un peu rébarbatif et qui se répète vers le milieu du roman mais n'est-ce pas un parti pris par l'auteur pour bien souligner la longueur et la dureté de ces évènements?
Edgar Hilsenrath réussit également à nous faire rire malgré l'horreur de la situation.Il dépeint merveilleusement bien l'état d'esprit,la mauvaise fois et les coutumes de tous les protagonistes de ce conte
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"Le premier droit de l'homme est le droit à la vie" pourtant "l'homme est un animal qui tue". J'aime ces
deux citations de Robert Badinter s'appliquant à tous les temps mais particulièrement au XX -ème siècle qui a connu quatre grands génocides dont celui des Arméniens.

Printemps 1915 débute l'holocauste en Anatolie. Auparavant,
Abdul Hamid avait massacré 300 000 arméniens mais l'arrivée au pouvoir du Comité Union et Progrès accélère le processus d'éradication.
Cette population qui était une force vive en Turquie que représentaient artisans, commerçants ou paysans est devenue la bête immonde à tuer.
C'est à travers la vie du pauvre Wartan Khatisian que le lecteur suit la tragédie d'un innocent manipulé par les mensonges d'Etat.
Accusé de complotiste, Wartan subit tortures morales et physiques afin d'avouer sa complicité avec une conspiration mondiale arménienne.
"Les ficelles de cette guerre, ce sont les Arméniens qui les tirent. Leur but est l'anéantissement de l'humanité. Mais d'abord, ils veulent nous nuire à nous les Turcs."
La vie de Wartan défile grâce à Meddah, le conteur qui s'adresse au moribond Thovmas, fils de Wartan.
Cette forme de narration voulu par Hilsenrath permet de calquer la tradition arménienne des contes et de garder ainsi une distance face aux atrocités commises par les Kurdes, Tchettes, et zaptiehs.

L'auteur allemand de confession juive emploie ici ironie et sarcasme et décrit crûment la boucherie notamment dans la gorge de Kemach au nord de l'Euphrate.
J'ai dû maintes fois arrêter ma lecture heurtée par les actes barbares infligés aux Arméniens et aux Arméniennes.
Toutefois Meddah n'oublie pas de décrire des temps plus doux où ce peuple vivait en harmonie près de la chaleur du tonir.

Ce génocide programmée non reconnu par la Turquie engendre un profond sentiment d'injustice auprès des descendants. D'ailleurs ce livre est venu entre mes mains grâce à un ami d'origine arménienne qui voulait m'éclairer sur le sort de ses aïeuls.
Je n'ai pu m'empêcher de faire une corrélation avec "La zone d'intérêt " livre irrévérencieux de Martin Amis caricaturant la shoah des juifs.
"Rire de la mort, je veux qu'elle reste dans la gorge", voilà la mission de l'auteur qui a connu lui aussi l'exil.
Un livre mémoriel et bouleversant qui atteint sa cible en plein coeur. Mission accomplie Monsieur Hilsenrath.
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J'aime Edgar Hilsenrath. J'aime son cynisme, j'aime son humour, son don si particulier de mêler la dérision au tragique, ses personnages loufoques et malins, perdus et cruels...
J'ai adoré Fuck America, puis la trame absurde dans le Nazi et le Barbier. J'ai été déboussolée avec le Conte de la dernière pensée. le style tranche d'avec les précédents ouvrages, il s'agit d'un conte, assurément, raconté comme un grand-père pourrait le raconter à son petit-fils, son petit agneau. Mais un grand-père un peu fou alors, car il faut être fou pour décrire comme un conte les atrocités subies par le peuple arménien.
Le conte est indéniable, la magie et la malice se mêlent aux horreurs pourtant bien réelles, conférant parfois une certaine distance, comme si tout cela n'était qu'imaginaire. Hilsenrath ne perd pourtant pas son écriture terre à terre et acerbe et la réalité reste présente, étouffante, parfois difficilement soutenable, jusqu'à se retrouver de nouveau, pour plusieurs pages, emporté dans une nouvelle envolée aux tonalités fantastiques. On croit rêver, entre la douceur des paroles d'un grand-père et les horreurs illimitées que les hommes parviennent à s'infliger.
Il faut être fou pour décrire comme un conte les atrocités d'un génocide, mais cette histoire-là est superbement racontée.
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Effectivement : truculent, lyrique, grand-guignolesque, subversif, cinglant… et aussi cynique, corrosif sur fond de tragédies historiques.
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L'auteur étant récemment décédé (le 30 décembre 2018), je voulais me plonger dans cet ouvrage, vide de retrouver la plume d'Edgar Hilsenrath.

Ce livre-ci n'est, contrairement aux précédents de l'Hilsenrath, pas autobiographique. Il fait référence au génocide arménien, à ce peuple persécuté par les Turcs et les Kurdes. L'auteur choisit le mode du conte: la dernière pensée de Thovma se trouve confrontée à une voix - le conteur et/ ou Meddah - qui va lui permettre de retracer le parcours de vie de son entourage - son père et sa famille - et le raccrocher à ses origines.

Comme les contes classiques, celui-ci contient énormément d'histoires dans l'histoire, toutes s'entremêlent, pas toujours chronologiquement d'ailleurs.

Ce livre est dense, ardu et touffu. La plume d'Edgar Hilsenrath toujours aussi affutée, cynique, burlesque et dramatique mais, personnellement, ce n'est pas l'ouvrage que je préfère dans son oeuvre.

A mes yeux, le meilleur restant Nuit suivi de Fuck America et le nazi et le barbier.

Un merveilleux auteur, une oeuvre remarquable, je vous invite à découvrir ou re-découvrir Edgar Hilsenrath.


Lien : https://letempslibredenath.w..
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Thovma Khatissian va mourir, il vit ses dernières heures.C'est le moment où toute sa vie défile, où ses dernières pensées conscientes lui viennent à l'esprit. Cette conscience qui s'échappe de son corps est le conteur, personnage irréel qui va nous parler pendant tout ce roman. Une forme de double qui le confronte à son passé et surtout à celui de sa famille, à ses origines. Un double qui au fil des pages sera tantôt "le conteur", tantôt "Meddah", ce double, cette conscience l'interrogera.
La construction est originale et plaisante
Thovma est né en 1915, pendant ce génocide arménien, si peu évoqué en littérature...il est l'un des derniers contemporains de cette horreur...Une horreur que sa famille a vécu.
Ne sortez pas les mouchoirs...préparez-vous à vivre une aventure dans laquelle le burlesque, la farce, côtoient L Histoire, la vraie, la farce, l'horreur.
Cette haine que portent les Turcs et Kurdes aux Arméniens est une haine ancestrale, viscérale.
La mère de Thovma était enceinte de lui quand Wartan Khatissian, son père, personnage principal, fut arrêté et torturé... A son retour des Etats-Unis où il avait émigré, il passa par Sarajevo, le 28 juin 1914, jour de l'assassinat de l'archiduc François-Ferdinand, héritier de l'Empire austro-hongrois, et de son épouse...Alors pourquoi pas, contre toutes les évidences, lui faire avouer ce meurtre au nom d'une internationale arménienne voulant déstabiliser la Turquie ! On trouverait ainsi un bon prétexte pour entrer en guerre cnntre eux. Tous les moyens sont bons pour le faire avouer...Hilsenrath alterne horreur et sourire quand il évoque le scénario invraisemblable imaginé pour les Turcs, conseillés par leurs alliés - des officiers allemands - pour démontrer au monde la malveillance des Arméniens. L'imbécillité instaurée comme mode de gouvernance d'un peuple ! le rôle de l'Allemagne !
Une manipulation, une machination qui en préfigurent d'autres aussi dramatiques. La grande Histoire nous le confirmera.
Depuis des années les Arméniens vivent sur un territoire à cheval sur l'est de la Turquie et la Russie. Depuis toujours les Turcs et le Kurdes les rejettent, les emprisonnent, les tuent. Depuis des années ils sont pendus et restent accrochés aux arbres aux yeux de tous. La religion oppose ces communautés, les Arméniens sont chrétiens au sein d'un monde musulman. Ils sont là depuis 4000 ans, mais sont toujours considérés comme des intrus. Hilsenrath nous permet de découvrir leurs conditions vie en ce début de siècle et leur histoire. Oh non ! ils ne vivent pas dans l'opulence, ils ont des doigts d'or et sont souvent artisans, bottiers, orfèvres. de ce fait ils sont indispensables. Indispensables mais haïs. C'est certain, ils sont très riches ! On les soupçonne de cacher leur or dans la chevelure des femmes, dans les talons de leurs bottes...ça ne vous rappelle rien ces a priori, cette haine contre une communauté, contre une religion ? contre d'autres qui ont leur propre langue qu'on ne comprend pas ?
En nous faisant sourire et pleurer, en mêlant les époques, L Histoire et le roman, le burlesque et le tragique Hilsenrath démonte le mécanisme de ce génocide, le premier de ce XXème siècle, le mécanisme en fait de tous les génocides, de toutes ces haines entre communautés, Rwanda, Tibet, Darfour, Turcs et Kurdes, Moyen-Orient également...Et bien sûr, la Shoah dont il souffrit dans son âme et qui vit disparaître des proches en fumée, les moteurs restent identiques : différences, haine, mensonge, manipulation des masses, communautarisme , et surtout le silence... le silence de la communauté internationale.
Edgar Hilsenrath est au sommet de son art ! Sans doute le meilleur de ses ouvrages, celui en tout cas qui m'a donné le plus de plaisir, celui qui m'a le plus dérangé. J'aime cet homme qui dans chacun de ses livres m'a bousculé. Il mêle habilement à plusieurs reprises le tragique, le burlesque, la farce, sans jamais choquer le lecteur pour évoquer des faits graves afin que notre conscience reste en éveil, là où d'autres auteurs restent graves et éplorés.
Son message n'en est que plus fort.
Il est bon de rappeler, que suite à la reconnaissance comme génocide, par le Parlement allemand, du massacre des Arméniens sous l'Empire ottoman en 1915, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a déclaré, que cette reconnaissance « n'a aucune valeur » . Lors d'un discours à la télévision, le 4 juin 2016, il a mentionné que les accusations de génocide arménien constituaient un « chantage » et que son pays ne les « accepterait jamais ». (Source le Monde)
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Le génocide arménien fait partie de ces épisodes de l'histoire qu'on évoque peu. Il s'agit pourtant d'un fait marquant de la Première Guerre mondiale. L'extermination de ce peuple, l'auteur la retranscrit dans toutes ses vérités. Les sévices corporels, les mensonges politiques, les machinations. C'est extrêmement dur à lire, les propos sont parfois très crus, mais c'est une réalité historique qu'il faut connaître.
Afin de raconter l'histoire, le narrateur appelé Meddah parle à la dernière pensée de Thovma. L'effet est très particulier, il faut un vrai temps d'adaptation. Il y a pas mal de répétitions voulues, ce qui a tendance à ralentir le texte.
Le roman est divisé en trois livres. le premier s'attache à raconter la captivité de Wartan, le père de Thovma. Il est arrêté par les Turcs et torturé. Ce sont probablement les pages les plus difficiles. le deuxième livre raconte l'histoire de la famille de Thovma, l'enfance de son père, les mariages. Les coutumes arméniennes décrites nous immergent avec force et simplicité dans la culture de ce peuple. Beaucoup de détails peuvent surprendre les lecteurs occidentaux du XXIe siècle, comme une croyance disant qu'il ne faut pas que la mère quitte son bébé les 40 premiers jours de sa vie car il pourrait être enlevé par des esprits maléfiques. Ce sont des choses très ancrées dans le quotidien de la famille Khatisian qui vit dans un petit village. le troisième livre revient aux faits historiques de la guerre, au parcours de Wartan et à ce qu'il se passe une fois la guerre finie.
Lien : http://voulezvoustourner.blo..
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« Pendant soixante années, j'ai rencontré des survivants du massacre qui m'ont raconté des histoires, des histoires du Hayastan, qui s'appelle aussi Arménie turque ou Anatolie - comme vous voudrez -, et à partir de ces nombreuses histoires, j'ai reconstitué ma propre histoire. Et c'est ainsi qu'un beau jour je me suis retrouvé à la tête d'une véritable histoire familiale. Je connaissais mes racines. J'avais de nouveau un père et une mère, et j'avais de nombreux parents. J'avais aussi un nom et une tradition, un nom que je pouvais donner à mes enfants et à mes petits enfants. »

Alors qu'il est sur le point de mourir, Thovma Khatisian voit sa dernière pensée dialoguer avec le Conteur pour reconstituer l'histoire de sa famille, de ses origines, l'Histoire du génocide arménien.

Hilsenrath mêle avec un incroyable et unique talent l'absurde, l'humour et le tragique pour tisser un conte époustouflant qui dénonce avec une puissance singulière l'atrocité du génocide arménien, et la possible barbarie humaine.
Parallèlement au récit du désespoir et des pires atrocités, il rend aussi un hommage incroyablement vivant et vibrant à la culture arménienne.
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un chef d'oeuvre ! un livre presque musical pour écouter la musique intérieure du héros et de tout son peuple
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Sur le mode des Contes des mille et une nuits le dialogue entre la pensée dernière de Thomas Khatisian et le Conteur nous entraîne dans une épopée époustouflante sur fond d'histoire tragique du peuple Arménien.
Et que dire de la maestria littéraire et narrative d'EDGAR HILSENRATH
Un ouvrage magnifique
Un pure moment de bonheur
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