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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Après avoir fermé le livre, pas tout-à-fait sur la dernière page, on se demande s'il ne vaut mieux pas se contenter de tout lire au premier degré sans jamais essayer de soulever le voile sur lequel Lovecraft a projeté ses images fantastiques. Doucement avec un style d'une grande limpidité, le texte du critique finit par être plus effrayant que les histoires du maître de Providence. Plus question de jouer à se faire peur. Quoi que... suivant l'âge auquel on lit les aventures de Herbert West réanimateur dont il n'est jamais question nulle part dans cet ouvrage et la sensibilité que l'on pouvait avoir avant d'entrer dans cet univers en décomposition qui ne finit pas de mourir, on peut encore faire des cauchemars longtemps après avoir lu ces nouvelles tant le pouvoir d'évocation de l'écrivain est aussi subtil que puissant quand il trouve dans son lecteur un terreau imaginatif à la hauteur. Houellebecq se reconnait dans cette oeuvre et il n'est peut-être pas le seul...
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Il a fallu le Challenge Solidaire pour que je relise Houellebecq. Mais pitié, pas un de ses romans : il a écrit une biographie de Lovecraft ? Ça ne fait que 130 pages ? Parfait !
Pour commencer, une intéressante et drôle introduction de Stephen King, élégamment traduite par Philippe Mikriammos. King y raconte la genèse d'une idée de nouvelle, en imaginant trouver dans la vitrine d'une brocante... l'oreiller de Lovecraft : un oreiller encore tout imprégné des rêves de l'écrivain. (Puis comment il a oublié son idée, en allant picoler avec des copains.)
Vient ensuite Houellebecq. Ne vous attendez pas une biographie très détaillée, c'est plutôt une explication de texte s'appuyant sur des éléments biographiques ; et sur la fascination qu'exercent les "grands textes" de HPL sur Houellebecq.
"Nous sommes là à un moment où l'extrême acuité de la perception sensorielle est tout près de provoquer un basculement dans la perception philosophique du monde ; autrement dit, nous sommes là dans la poésie."
Ça se discute.
Il précise tout d'abord que HPL est un matérialiste qui ne croit à rien, et en aucune façon à des forces obscures. Par contre, il a vécu toute sa vie dans le regret de l'enfance et de son imaginaire. Toute sa vie il a entretenu également une hostilité face au monde (d'où le titre "Contre le monde, contre la vie"), face à ce que MH appelle "les lois universelles de l'égoïsme et de la méchanceté", d'où la fascination de HPL pour des existences étrangères à l'Humanité.
(C'est sûr que, si vous partez persuadé que tout le monde est égoïste et méchant, vous ne rencontrerez guère de bienveillance en face ; mais ce n'est que mon avis.)
Dans une deuxième partie, la plus pertinente, MH analyse les techniques d'écriture de HPL, comme ses fins ouvertes, ses descriptions architecturales et son utilisation des découvertes scientifiques : il a par exemple cité la physique quantique, sitôt l'idée publiée.
Pour terminer, MH explique l'odieux racisme de Lovecraft, sa déshumanisation des Noirs ("des chimpanzés graisseux") ou des Asiatiques, par son séjour dans le melting-pot qu'était New-York par rapport à sa province d'origine. Ça m'a paru un peu faible comme argumentation : HPL était déjà un vieux réac à 30 ans, et loin de s'émerveiller de la diversité qu'il rencontre, il se sent agressé par les personnes qui ne lui ressemblent pas, au point d'en faire d'ignobles caricatures dans ses oeuvres.
On a le sentiment que, s'il vivait de nos jours, il serait un de ces ados attardés de la fachosphère, trollant les réseaux sociaux.
Bref, MH réussit, comble pour un biographe, l'exploit de dégoûter n'importe qui de relire Lovecraft.
Challenge Solidaire 2023
Challenge Départements (La Réunion)
LC thématique mars 2023 : "Une biographie romancée ou non"
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Houellebecq ne me fascine guère. Je ne cherche pas dans la littérature ce pessimisme fondamental qui le caractérise.

Et pourtant j'aime l'oeuvre de Lovecraft (un autre grand pessimiste, je ne suis pas à une contradiction près) et j'ai donc entrepris de lire ce que Houellebecq dit de Lovecraft.

Tout d'abord, je dois reconnaitre qu'il connaît bien le maître de l'horreur qu'est Lovecraft. Il ne rend pas seulement compte de son oeuvre, il cite aussi sa correspondance, très à propos.

Mais je n'adhère guère au début de l'ouvrage, là où Houellebecq tente de dire que le pessimisme cosmique de Lovecraft a quelque chose de réel. Ce que j'apprécie chez Lovecraft, c'est la fiction, et certainement pour une large part de sublimer ce qui l'horrifie dans le réel en de l'imaginaire que je peux tenir à distance.

La fin de l'ouvrage n'est guère à mon goût non plus, là où Houellebecq défend la thèse que l'horreur cosmique et les créatures dégénérées de Lovecraft sont inspirées par son profond racisme. Ça me peine car j'aime cet auteur mais je dois reconnaître que Houellebecq a de sacré arguments notamment des extraits de lettres, peut-être sorties de leur contexte, j'espère.

Mais je dois reconnaître que sa plume a de la verve et qu'il sait aussi rendre hommage aux qualités du maître, à son intégrité d'écrivain et à son style unique au monde, bien que tant pastiché.

Ça ne m'a pas convaincu de lire plus de Houellebecq mais je suis content d'avoir lu celui ci, et d'y avoir trouvé un aussi bel hommage.
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L'essai biographique de Michel Houellebecq sur H.P. Lovecraft a plus d'un intérêt : bien sûr, il conte la vie difficile et marginale d'un écrivain bien précis, et représentatif d'une époque et d'une classe sociale dont ses lecteurs d'aujourd'hui n'ont pas idée. Mais il raconte aussi comment la création littéraire sert à la fois à dire la vie, à la transposer, et à s'en retirer en interposant entre le réel brutal et l'individu l'écran du mythe et des légendes. Lovecraft est en effet un écrivain profondément anti-moderne, qui ne cesse de répéter dans ses récits que le passé ne meurt pas, ne meurt jamais, et revient toujours sous des formes d'autant plus atroces qu'on l'a mieux refoulé. Enfin, on remarquera cette intuition remarquable de l'essayiste, qui est de faire observer que l'oeuvre de Lovecraft aujourd'hui, dans ses continuations, réécritures, transpositions de toutes sortes dans la culture populaire, a le même sort que les plus anciennes légendes médiévales, devenues propriété culturelle de tous. C'est un changement majeur dans la condition de l'oeuvre littéraire.
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Le côté obscur ce n'est pas le Mal, ce serait trop simple ou trop ambigu : le Mal porte trop facilement les vêtements du Bien. Le côté obscur c'est l'inconscient, le non advenu, le non compris, le non-monde, la non-vie : Solitude et terreur, paroxysme de la sensation. Bref, le coté obscur, c'est du Lovecraft! Et là, une autre ambigüité surgit, la terreur a la même intensité fascinante que l'émerveillement.
Peu de gens finalement semblent se poser cette question qui fait peur : Pourquoi le monde ne nous apparait pas comme rigoureusement incompréhensible? Ce serait naturel étant donné sa complexité. le bébé qui ouvre pour la première fois les yeux, doit en tâter un peu et ça doit déchirer…
Même si l'on ne s'en fait pas, il y a toujours cette menace d'un jour qui viendrait où comme pour ces aveugles de naissance à qui l'on rend la vue…. Miracle? Pas sûr! Toute la structure de compréhension s'écroule, pour ouvrir sur un ça innommable. Ainsi, pour cet aveugle qui avait sa représentation, soudain : Non-sens des informations visuelles, agression des couleurs, non-sens des limites, il ne sait pas qu'il y a le vide derrière la fenêtre : Terreur, terreur!
Ce qui est remarquable chez LPH, c'est quand il fait sentir qu'on ne peut pas comprendre, que c'est hors de portée de se rassurer avec une explication qui, de toutes les façons nous détruirait par sa toute puissance.
C'est ce que Lovecraft nous propose, une expérience limite terrifiante et donc fascinante : C'est Edgar Poe au carré. Mais attention ce n'est pas du «gore» : Zombis, morts- vivants, vampires ou fantômes ne fonctionnent pas longtemps, il n'y a vite plus de piles… On les reconnait vite pour ce qu'ils sont : Farces et attrapes. Non, Lovecraft atteint à autre chose : A l'énigme du rêve, qui crée et manie les symboles, ces choses absolument unes, qui ne sont pas coupées en deux sens complémentaires, qui sont symboles purs : La langue des entités pré ou post humaines, comme il dit.
Je tente une illustration par le récit d'un de mes rêves «lovecraftien» :
Pourquoi suis-je dans cet immeuble sinistre, ce n'est pas ma maison! Il fait nuit, dans ces couloirs inquiétants, on a peur de rencontrer on ne sait qui, mais ce serait surement des vrais méchants avec qui on aurait aucune chance. Dans ces couloirs où l'on ne peut se cacher, seulement faire demi-tour, la peur ne cesse jamais. Et pourquoi suis-je là alors que je n'ai jamais eu d'appartement ici… Personne, personne, j'erre… Ah! Quelqu'un à cet étage, une fille, avec un pull rouge, elle veut me vendre quelque chose que j'achète même si je n'en veux pas, mais c'est pour pouvoir lui demander : Comment sort-on d'ici? - Mais on ne peut plus, vous ne savez pas?! Et elle s'éclipse, toute pressée, de quoi? Et je n'ai pas eu le temps de lui demander de la revoir. Mais où suis-je… pourquoi condamné ici, tellement seul? Ou suis-je?
Dans un rêve… Dans un rêve… Je reprends conscience. Un rêve, mais si inquiétant, si vrai! Qui veut dire quoi? Quoi? J'en suis torturé.
Alors je cherche. Ah! Peut-être une piste, de ma machine à chercher du sens; je tente de casser ce symbole énigmatique, je l'ouvre et… C'est plutôt terrible : Cet immeuble maléfique ce serait mon corps! Et mon esprit cherche à le parcourir et aussi à lui échapper; il faudrait le sauver, sauf que je ne sais comment… Et puis il n'y a presque plus personne qui peut écouter, aider. Alors comprendre est presque pire que d'oublier simplement. C'est «lovecraftien» : de la terreur, mais aussi la fascination du récit… Un signe «unnatural»… Une voix désespérément improbable et perdue a pu parler…
HPL parle couramment la langue symbolique, celle de l'inconscient et cette maitrise fait qu'on l'entend et qu'on l'entendra longtemps encore, comme l'a bien vu MH.
“Unnatural deeds do breed unnatural troubles.” (Shakespeare, Macbeth).
… Ces visions malsaines infecteront le réel…
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Courte biographie critique de Lovecraft effectuée par Houellebecq. On y apprend des éléments intéressants sur la vie de Lovecraft (sa vie à New-York, son racisme presque maladif, son bref mariage...). A mon sens, le plus intéressant dans ce livre, ce sont les citations de Lovecraft, même si l'analyse de Houellebecq reste assez pertinente sur certains points.
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Le Houellebecq de 2022 apparait comme un joyeux drille à l'aune de cet essai sur H.P. Lovecraft dans lequel l'auteur de Anéantir se livre au travers de la vie, l'oeuvre et la pensée du célèbre auteur de science fiction. H.P.L y est décrit comme un misanthrope immodéré, nihiliste convaincu et pratiquant.
Le style de Houellebecq, bien qu'il s'agisse d'une biographie était déjà là, comme incréé, sortie d'un seul jet et non construit roman après roman, en témoigne son utilisation de mots ou phrases en italique qui firent flores chez les imitateurs du virtuose de la déprime.
Un essai qui n'est pas indispensable mais bien documenté par un vrai inconditionnel du maître esse frisson
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Une très bonne introduction à Lovecraft.
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Première bibliographie que j'ai lu de Lovecraft. Je trouve très intéressant l'exercice qui consiste à raconter la vie de quelqu'un qui n'a pratiquement rien fait de son existence en dehors de l'écriture. Car disons-le, Lovecraft était pathologiquement incapable du moindre autre travail.

Houellbecq, utilise Lovecraft pour nous livrer son avis pessimiste sur le monde, et c'est souvent assez pertinent. Malheureusement le livre passe un peu trop sous silence le racisme de Lovecraft, le réduit souvent, l'excuse parfois.

Cette bibliographie souffre donc à mes yeux de deux défauts : elle excuse trop facile le racisme du maître de Providence, et elle est incomplète.

Néanmoins l'exercice mérite d'être lu.
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