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Voici l'étonnante histoire de Lizbeth, servante dans une grande maisonnée britannique et aristocratique au beau milieu du XIXe siècle, imaginée et écrite par Hubert (scénariste des Ogres-Dieux, de Peau d'homme, …) et astucieusement mise en images par Virginie Augustin.
Derrière ce titre et une couverture singulière semblant annoncer un scénario à tendance frivole et libertine se cache une page essentielle de l'histoire sociale et de l'émancipation féminine.
La ville de Londres en pleine période victorienne est grosse de 2,5 millions d'habitants – quand Paris n'en comptait à peine un million – et représentait parfaitement cette époque de pleine effervescence et en mutation.
Des populations issues de classes sociales que tout opposait furent attirées par l'essor économique sans précédent que connaissait l'Angleterre, conséquence directe de la défaite de la France napoléonienne et des choix politiques et économiques fait par la Couronne, ce qui allait assurer à la Grande-Bretagne un siècle de suprématie et fonder les bases de la modernité technologique.
Des archaïsmes sociaux très stricts ainsi que les nombreux abus dont l'aristocratie et le clergé s'étaient montré capables avaient nettement défini les enjeux sociaux et formé une caisse de résonance qui allaient attiser ce que l'on nommerait bientôt la lutte des classes.

Lizbeth est une servante intelligente, moderne et profondément féministe. Elle a la tête bien faite et les pieds sur terre.
Monsieur Édouard représente le pouvoir à travers le monde aristocratique libertin et décadent. Paradoxalement, il sera l'instrument de la révolution sapant lui-même les bases de la caste dirigeante par ses frasques et parce qu'il choisira Lizbeth comme confidente ; transgression des genres.

Le dessin de Virginie Augustin est très évocateur et véhicule parfaitement les émotions ressenties par les personnages, qu'ils soient aristocrates, gouvernantes, majordomes, servantes, gens du peuple ou prostituées.
L'ordre social reposait alors sur des conventions connues et tacitement acceptées ; chacun connaissait sa place et ses limites ainsi que les prérogatives héritées des siècles précédents. Il n'aura suffit qu'une seule pièce, qu'une unique brique de cet édifice se descelle pour que des anfractuosités se révèlent et fassent que le mur se lézarde menaçant de ruine toute la maisonnée…

A la fin de l'album - qui se termine un peu abruptement à mon goût - se trouve un cahier de 28 pages fait d'encarts historiques abordant différents thèmes comme celui de la prééminence de la Grande-Bretagne au XIXe et de Londres en particulier ; les problèmes de santé publique rencontrés dans la capitale liés à l'explosion démographique ; l'histoire et le fonctionnement de la monarchie Britannique ; celle de la famille royale ; l'organisation du monde aristocratique et celui de la domesticité et… la condition féminine.

Il est choquant de constater à quel point la place de la femme était insignifiante dans l'Europe du XIXe siècle et cela même – paradoxalement – dans une Angleterre gouvernée par une reine.
A cette époque, il était inconcevable qu'une femme puisse vivre seule. Les filles étaient préparées à un rôle d'épouse et on leur inculquait les notions de servitude de leur mari, de douceur et d'humilité. L'éducation religieuse, les arts ménagers et les arts d'agrément leurs étaient enseignées alors qu'elles étaient dispensées des études universitaires (les sciences et le droit en particulier) !
Bien entendu, leurs lectures étaient strictement encadrées. C'est dire que Jane Austen (Orgueil et préjugés, Persuasion, …) a eu bien du mérite !
Juridiquement la femme était une perpétuelle mineure qui n'avait pas le droit de vote, ni celui de porter plainte, ni celui de posséder des biens en propre, ni celui d'occuper un emploi en dehors de l'enseignement ou de la servitude des classes dirigeantes, à moins celle fut prostituée.
Lors du mariage, ses biens appartenaient au mari et celui-ci gardait les enfants en cas de divorce. En cas de veuvage, c'est le fils ainé qui prenait possession des biens de sa mère… Il faudra attendre la fin du XIXe s. pour la loi commence enfin à envisager un rétablissement de l'équilibre.
Mais un siècle et demi plus tard, il reste encore du chemin à parcourir…

Cet album est un très beau plaidoyer pour le GIRL POWER.

Et pour les lecteurs curieux ou perspicaces, les jolis motifs floraux de la première et de la quatrième de couverture (des lys ou des ipomées rouges sang ?), préfigurent les allégories de l'Art Nouveau et dissimulent de petits corps féminins extatiques à moins qu'ils ne représentent quelques vulves épanouies : un joli travail de la dessinatrice !
Quant aux gardes colorées en papier marbré, elles sont très… spéciales.

N'hésitez pas à aller jusqu'à la toute dernière page de l'album (p. 128) où Lisbeth apparait siégeant fièrement devant son épicerie et portant une Winchester.
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Une bd complétement atypique que j'ai eu envie de découvrir après la lecture de Peau d'homme (même auteur du scénario).
Cela commence dans une ambiance qui peut rappeler les romans de Jane Austen ou Forster : l'Angleterre sous le règne de Victoria, un milieu aristocratique, des domestiques soumis à une hiérarchie impitoyable et qui n'ont pas droit à vivre leur propre vie.

Lisbeth vient d'être embauchée dans une grande maison londonienne. C'est une jeune femme discrète et sage, pas très jolie. le maître des lieux, Edouard, s'avère être un jeune débauché, séducteur, noceur et toujours à la recherches d'expériences de plus en plus extrêmes. Il n'est pas sans rappeler un certain Valmont.

L'équilibre de la maison va être bouleversé quand Edouard décide de faire de Lisbeth sa confidente et celle qui doit s'occuper de lui au retour de ses nuits agitées. Scandale….car si Edouard peut profiter sexuellement de ses servantes ou les mettre enceintes, il ne peut entretenir une telle relation de proximité avec une personne si « inférieure ». D'autant qu'il s'attache de plus en plus à la jeune femme.

C'est le récit de cette relation étrange entre un jeune noble en perdition et la magnifique Lisbeth qui nous est raconté. J'ai apprécié une fois de plus le grand talent de narrateur de Hubert qui imagine des histoires loin de sentiers battus dans le monde de la Bd. C'est fin, bien écrit, tout sauf simpliste.
Un bel ouvrage.
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Etonnant ! Surprenant !
Un noble de l'époque victorienne, obsédé sexuel qui prend du plaisir à raconter à sa jeune servante ses exploits et orgies. Lisbeth reste stoïque, jusqu'au jour où il la demande en mariage….
Gros travail documentaire sur les derniers pages qui narrent cette époque victorienne et les conditions du peuple. Des chiffres qui font froid dans le dos.
Graphisme de qualité.
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Je suis arrivée à cette lecture au travers de la sélection pour le prix Cezam. Et je ne suis pas déçue. Je me demande même si ce n'est pas le meilleur de la sélection de cette année, bien qu'il n'ait pas été primé. Mais, compte tenu de l'avis exprimé par un de mes collègues je pense que certains ont pu être gênés par le récit du libertinage du personnage principal.
J'ai beaucoup aimé cette plongée dans le début de l'époque victorienne, c'est très intéressant et très bien documentée par un long dossier en fin de livre.
Le dessin simple m'a bien plu. Et la façon de rendre les employés invisibles de leur employeur est très efficace : pas besoin de discourt, on comprend tout de suite.
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Difficile de faire un retour sur ce roman graphique adulte alors que le personnage principal est un salaud fini.
Lorsque Ms Oliver revient à Londres, « les mères frémissent et cachent leurs charmantes filles encore innocentes des dangers de l'amour, les maris frottent leurs cornes et les putains sortent leurs plus belles parures. »

Cet album regroupe les aléas de l'organisation de la société victorienne. Les clubs masculins, l'insignifiante place des femmes, les valeurs aristocratiques et les employés de maison. Je ne parle pas de la prostitution car elle perdure au passage du temps malgré qu'au XIXe siècle, elle ne soit pas illégale.
Lisbeth, nouvellement engagée comme domestique chez Édouard Oliver, dans des conditions exécrables bien sûr, devient la confidente de son maître courailleur. Mais il est pas à peu près bambochard le noble arrogant. Il est difficile à cerner alors que Lisbeth est un vrai ange pour lui.
« C'est un enfant perdu, égaré dans des jeux d'adultes, mais qui n'a jamais grandi. »
Elle devient sa complice malgré elle alors que cet état lui crée des conflits avec les autres serviteurs. Notre Lisbeth saura se sortir de ce pétrin tout en continuant son rôle protecteur pour son maître.

La morale de cette histoire donne le méchant rôle à la maman, les hommes sont très méchants et l'époque pas trop recommandable. Est-ce que cette BD aux scènes de sexe très explicite est intéressante? Oui mais… pas essentielle. Pour le plaisir de voir une femme de basse classe s'en sortir!
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Londres, au XIXe siècle, Lisbeth, une nouvelle servante rentre au service de Monsieur Edouard. Comparée aux autres, elle n'a pas un beau physique, (même si cela la protégera des ardeurs de son maître), mais elle a un regard de Madone et sait être à l'écoute sans jugement qui la fera être la confidente de Monsieur.

À force d'être à l'écoute de Monsieur, et de l'aider à le mettre au lit le soir lorsqu'il revient complètement ivre... la gouvernante et le majordome par jalousie de voir que Monsieur consacre du temps plus à une servante qu'à eux, vont mettre leurs frustrations et colère sur elle, qui n'a rien évidemment demandé.

L'ordre social des différents personnages est très bien représenté, et bien expliqué ; que ça soit le maître qui a tout pouvoirs sur ses serviteurs qui doivent s'effacer, que les serviteurs entre eux, par rapport à leurs tâches qui leur sont assignées.


Monsieur Edouard est une personne très riche de la famille royale. En plus de cela il a un très grand charisme, le sachant fort bien que toutes les femmes le désir il en abuse. Malheureusement, bercé trop jeune dans la luxure, il n'en a rien à faire de briser des âmes, surtout de ces pauvres servantes qui se retrouvent enceintes, dehors, sans recommandation et la seule offre accessible pour survivre est la prostitution.


À travers les confidences d'Edouard à sa servante Lisbeth, où l'on suit ses nombreuses et diverses conquêtes sexuelles qu'il  se vante et qu'il espère être adulé pour flatter son ego. Mais au fond de lui il y a un immense vide de tristesse car ce n'est qu'un enfant qui a grandit trop vite... heureusement que Lisbeth sera là pour recoller les morceaux.

Une belle histoire par Hubert, malgré les nombreux et tristes contrastes, injustices de l'époque, qui sont toujours d'actualités.
Superbement mise en pages par Virginie Augustin, tant dans les expressions des visages, que les différentes positions et  postures des personnages.
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Dans cette bd où les dessins s'accordent très bien à l'époque évoquée, un jeune aristocrate de l'époque victorienne mène ce que les bien pensant ne manqueraient pas d'appeler une vie de débauché : alcool, sexe, bagarre... rien ni personne ne lui résiste excepté une jeune servante à qui il raconte toutes ses frasques en espérant la choquer et la faire quitter la neutralité que lui impose sa condition de domestique.
C'est intéressant de voir les rapports de force entre eux s'inverser alors que chacun à un rôle tout désigné dès la naissance et se doit de le tenir... au moins en apparence. Mais finalement les vraies personnalités de ce lord et de sa confidente se révèlent au fur et à mesure... et en fin de compte tout n'est pas écrit à l'avance...
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Une bande dessinée vraiment étonnante, qui m'a surprise et séduite du début à la fin. J'avoue que le thème m'inquiétait un peu, je ne l'aurais pas lu si une lectrice au goût impeccable ne me l'avait mis entre les mains. Les rapports d'une servante et de son jeune maître, riche à l'excès et près à tout pour lutter contre l'ennui, y compris le pire, dans la société victorienne, et bien, j'avoue, je craignais que ce fut complètement glauque!
Et bien, si c'est dur, oui, ce n'est pas ce que je craignais, au contraire, c'est beaucoup plus fin, et très bien servi par le trait, très expressif. Et un gros coup de coeur pour la fin, excellente! Signalons au passage que l'édition que j'ai lu, je ne sais pas si il y en a d'autres, est pourvue aussi d'un petit dossier sur l'époque victorienne et ses rapports sociaux.
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Quand un dandy libertin et pervers rencontre la bonté-même au coeur de l'Angleterre victorienne.
Monsieur a 25 ans, une belle fortune et un grand train de vie, avec la luxure pour compagne et l'ironie pour compagnie. Un jour, avec le reflet de sa vie dépravée dans un regard plein de bonté et dénué de jugement, il croit voir son ange gardien : Lizbeth, la nouvelle recrue des domestiques de la maisonnée, commandés par une Mrs Oliver au regard et à la main de fer. le bon va-t-il frayer avec le mal ? Brouiller les cartes du contrat social ?
Le regard porté sur une société qui dresse autant de carcans que de désirs est affaire de franchise avec soi-même. Et avec les autres. Telle pourrait être la leçon de ce magnifique album, réussi sur tous les plans : l'intention, le dessin, l'histoire, les dialogues et le découpage. Et pour peu qu'on soit sensible au Londres des années 1840, la façon dont ce cadre et son contexte vivent ici, est un pur régal. Bravo Augustin et Hubert !
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Voici une chouette Bd qui nous plonge dans les deux mondes d'une grande demeure anglaise : celui d'en haut, des aristocrates, des bourgeois, et celui d'en bas, des domestique et des gens de maison. Si tel est le décor, l'histoire est plus perverse : un aristocrate débauché, cynique et jouisseur, sorte De Valmont anglais du XIXe siècle, décide de raconter toutes ses frasques à une domestique au physique disgracieux mais aux yeux de Madone et à la force et à la vertu inégalable.
L'histoire est intéressante, bien menée quoiqu'un peu répétitive.
Le dessin est assez bon, un peu maniéré mais tout à fait dans le ton de la BD.
L'ouvrage se termine par un petit dossier intéressant sur la reine Victoria, le contexte historique et géographique et les codes de la société d'alors.
Juste après ce dossier se trouve un petit dessin qui clôture l'histoire...une bonne idée.
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