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sur 674 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Lors d'une visite au camp de concentration de Buchenwald où il accompagne ses élèves, un professeur découvre sur une photographie un détenu qui ressemble à s'y méprendre à son propre père. Troublé, il entreprend des recherches qui vont le mener sur le double chemin de son histoire familiale et de la folie nazie.

Peut-on comprendre les mécanismes qui font que des hommes se livrent à la barbarie ? Peut-on percer l'essence du "Mal absolu" dont les camps de la mort furent le théâtre, quand, ainsi que le déplorait Jorge Semprun, le tourment moral qui habitait les détenus, au coeur de l'expérience de ces camps, est intransmissible ? Intransmissible parce que ce mal n'est pas un concept, mais quelque chose que l'on ressent à l'intérieur de soi, et qui est indicible parce que ne peuvent l'appréhender que ceux qui l'ont subi.

Fabrice Humbert a l'intelligence -ou l'humilité- de ne pas prétendre résoudre cette énigme. Au lieu de cela, il se sert de son récit et de son personnage principal (le professeur narrateur) pour s'interroger sur l'héritage que nous laisse ce terrible pan d'histoire, "ce laps de temps court mais effrayant ouvrant la boîte de Pandore de l'Humanité", et qui ne serait que le révélateur du potentiel de violence que recèle l'homme depuis toujours. Et de rappeler qu'en effet, le nazisme ne fut pas l'oeuvre de quelques fous furieux dont la monstruosité aurait été évidente -et rassurante-, mais une violence administrative, organisée, dénuée de passion...

C'est pour cela qu'en recherchant l'origine de cette violence en se basant sur l'exemple des camps, le narrateur en vient à s'interroger sur la genèse de sa propre violence, et par extension sur celle qui sommeille en chacun de nous. Et en partant du principe qu'en ce qui le concerne, ce sont ses peurs qui réveillent sa colère et sa brutalité, il imagine qu'en les analysant, il parviendra peut-être à comprendre le processus de cette violence. C'est pourquoi, lors de son enquête, il s'intéresse presque davantage au bourreau -un médecin SS- de son aïeul qu'à ce dernier. En effet, ce médecin non seulement est le parfait exemple de ces individus qui furent des rouages du mécanisme d'extermination mis en place par le IIIème Reich (un homme somme toute banal) mais il est aussi pour cette raison celui que choisit notre professeur comme représentant de ses peurs. S'il élucide les raisons qui ont poussé le médecin à devenir ce monstre ordinaire, il maîtrisera ces peurs -nées, finalement de l'incompréhension face à l'horreur- et donc sa violence...

J'en reviens à cette notion d'héritage que j'évoque plus haut... l'abomination que furent les camps d'extermination (et l'ensemble des comportements qui y ont contribué : les dénonciations, la résignation...) nous a surtout laissé des questions sans réponse. Elle est une preuve de ce dont l'homme peut se révéler capable, et nous laisse démunis face à ce constat.

C'est ce qu'évoque Fabrice Humbert sans jamais tomber dans le manichéisme.
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Le roman de Fabrice Humbert s'inscrit dans le courant du renouveau de la littérature concentrationnaire inauguré par "Les Bienveilllantes". Laurent Binet avec son roman-essai sur Reinhard Heydrich, "HHhH" l'illustre aussi. La nouvelle génération - l'auteur est trentenaire- revisite cette période dramatique, longtemps occultée et en interroge le sens. le mérite particulier de Fabrice Humbert est de tisser un écheveau serré avec la vraie/fausse reconstitution d'un épisode du camp de Buchenwald, une histoire personnelle et familiale et une quête identitaire. Cet objectif ambitieux est atteint d'une certaine manière, puisqu'il y a un vrai suspense dans l'enquête menée dans une savante progression. le récit, à la première personne, donne autant d'importance au sujet narrateur, qu'à l'objet de l'étude - les circonstances de la mort d'un grand père dans le camp de Buchenwald - . D'un côté le narrateur, qui, comme l'auteur, enseigne la littérature dans un lycée franco allemand, fait de la boxe pour se défouler, est très préoccupé, quoiqu'il en dise, de son rôle d'héritier dans une famille très bourgeoise dont il finira par percer le secret. de l'autre côté, la vie à Buchenwald, telle que reconstituée minutieusement, pour les besoins de l'intrigue. On peut accepter, au nom des droits imprescriptibles de la fiction, que L Histoire soit reconstruite et adaptée au récit de l'auteur, à la manière de Yannick Haenel, dans "Jan Karski", et ce, quoiqu'en dise Jacques Lanzmann. Mais on ne peut empêcher qu'un malaise gagne le lecteur à voir la Shoa utilisée comme le simple décor d'une intrigue. Décor soigné, certes, puisque de grands auteurs sont convoqués, de manière un peu universitaire - Styron, Levi, Semprun, et même le grand Sebastian Haffner ("Histoire d'un allemand"), évoqué comme "referendar" auprès de l'un des protagonistes du récit. Emporté par l'élan, le propos s'enhardit dans une audacieuse modernité, imaginant une intrigue amoureuse torride entre le narrateur et la petite fille d'un conjuré de l'attentat contre Hitler organisé par von Stauffenberg. le narrateur est envouté par cette jeune blonde rock-star bibliothécaire à la plastique avantageuse, libérée de toute interrogation métaphysique sur son passé. C'est donc un peu décontenancé que l'on pose ce livre, certes plein d'ambition et de talent, mais emporté par sa virtuosité loin de toute vraisemblance. Il n'est pas impossible que Fabrice Humbert trouve un large public, bluffé par ses audaces, son introspection psychologisante, sa reconstitution minutieuse de la vie d'un camp de concentration, l'ambiguïté sur la vérité de l'histoire racontée et ses complaisantes références maléfiques.
Lien : http://diacritiques.blogspot..
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Pas évident de donner mes impressions sur ce livre : des critiques quasi unanimes, un ressenti mitigé et une histoire pourtant pleine de sens.

Lors d'une visite de Buchenwald avec ses élèves, le narrateur, jeune professeur de littérature, est comme happé par une photographie représentant le médecin du camp : à l'arrière-plan, un prisonnier ressemble étonnamment à son propre père, Adrien Fabre.
La ressemblance est trop frappante, l'impression d'étrangeté est trop forte, et Adrien élude un peu trop le sujet quelques semaines plus tard…
De là, commence un travail de reconstitution et d'enquête grâce auquel le narrateur découvre un pan inattendu de son histoire familiale. Il trace peu à peu le portrait de David Wagner – un détenu juif parmi tant d'autres, tailleur parisien rêvant de réussite, jeune homme charmeur et opportuniste, victime des camps de la mort… Son véritable grand-père.
Inlassablement, notre héros poursuit sa quête, cherche des explications : en Allemagne où il s'installe et tente de reconstituer à la fois les événements autour de la mort de David et le destin des protagonistes, en Normandie où sa grande famille bourgeoise se réunit ponctuellement, à l'hôpital où son grand-père Marcel – l'autre, celui de toujours – accepte enfin de lever le voile.

Si on ne se débarrasse pas aisément d'une telle révélation, on ne tourne pas davantage le dos à une filiation, une appartenance : Adrien est bien plus le fils de Marcel Fabre que de David Wagner, et le narrateur son petit-fils. Fabrice Humbert explore avec finesse la filiation, le poids des origines « véritables », celui de l'éducation et bien entendu la force du secret de famille.

Une trame intéressante, une écriture fine et percutante : tout est là pour faire un grand roman. Et pourtant, L'Origine de la violence ne m'a pas réellement plu. Il m'a malheureusement fait enfin comprendre ce qui me déplaît souvent dans les textes teintés d'autofiction : l'autopsychanalyse. Certes, le héros veut comprendre « l'origine de sa violence » mais le décorticage méthodique des uns et des autres est l'occasion de développements parfois très longs, voire ennuyeux.
Une partie importante du récit est consacrée aux camps : et, c'est terrible à dire mais, pour qui a lu ne serait-ce que Primo Levi et Jorge Semprun, ce n'est pas toujours passionnant. Ici, l'auteur aurait dû selon moi se concentrer sur le factuel, et moins se précipiter dans les considérations plus générales sur une thématique explorée déjà si finement.

Une impression étrangement mitigée donc : L'Origine de la violence est une histoire intéressante, traitée avec subtilité, les réflexions sont pertinentes… mais des longueurs, des développements peut intéressants et un certain narcissisme m'ont déçue.


Lien : http://monbaratin.blogspot.c..
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C'est lors d'un voyage en Allemagne, à Bunchenwald, avec ses élèves, que le narrateur découvre une photographie d'un prisonnier du camp, David Wagner, qui ressemble étonnamment à son père.
Cette image ne cessera de le tourmenter jusqu'à ce qu'il découvre le véritable parcours de cet homme, tailleur juif français, amoureux de l'épouse d'un riche préfet normand.
Mais qui était David Wagner, et qu'a-t-il fait pour mériter une fin si violente et si inhumaine?

Car la violence est le véritable thème ici, et l'insupportable aléatoire des destinées. Comment comprendre, justifier, le sort de millions de gens dans les camps? de devenir de la sorte le martyr de tout un continent?
Toute sa vie, le narrateur s'est interrogé, pour reprendre un titre de Primo Levi, sur "les élus et les damnés", ceux qui s'en sortent et ceux sur lesquels le malheur et la souffrance s'acharnent. Et au milieu que reste t-il, à part celui qui, spectateur de l'histoire, peut décider ou non d'intervenir?
Car finalement, qu'est-ce qui distingue les bourreaux des martyrs? Qu'est-ce que ce mal qui s'empare sporadiquement de certains parmi les hommes? Est-ce une folie ou un véritable Mal? Un dérapage de l'histoire ou une véritable conséquence de l'échec de la politique et de la morale européennes?

Deux parcours sont enchâssés dans le récit, celui du grand-père inconnu, et celui du narrateur ; mais ce double récit est également enclavé dans une double histoire, celle de la seconde guerre mondiale et celle de deux familles, hasardeusement connectées et pourtant diamétralement opposées, les Fabre et les Wagner.

La suite sur http://www.madamedub.com/crbst_101.html

Lien : http://www.madamedub.com
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Roman très prenant, sur la quête de l'identité mêlée à l'horreur du nazisme. le côté romanesque est un peu déroutant : reconnaître les traits du visage de son père sur une photo de Buchenwald semble hautement improbable, mais c'est le privilège du romancier que d'inventer des histoires.

Bien sûr, l'auteur le dit lui-même, c'est toujours délicat de romancer les camps de concentration. Fabrice Humbert, en focalisant son enquête sur les bourreaux et leur motivation, arrive à donner un nouvel éclairage à la principale tragédie du 20° siècle à propos de laquelle les témoignages et les réflexions ne manquent pas aujourd'hui.

J'ai trouvé très intéressante son analyse de la violence, son passage en lycée dans les banlieues difficiles lui a permis d'ouvrir les yeux sur des souffrances contemporaines, j'ai trouvé qu'il le racontait bien.

Les personnalités de son père et de son grand père, donnent une profondeur au secret de famille qui trop vite n'en est plus un pour le lecteur. En revanche, j'ai dû attendre la fin du récit pour vraiment comprendre le père du personnage principal.

J'ai beaucoup aimé également la façon dont l'auteur mêle à son récit les auteurs qui l'inspirent, on retrouve Semprun, Primo Levi mais aussi Jack London et Sebastian Haffner, écrivain allemand dont la lecture éclaire de façon magistrale la montée du nazisme.

Comme toujours la lecture de livres sur l'extermination organisée par les nazis est éprouvante, mais c'est également réconfortant de savoir que les intellectuels d'aujourd'hui : la troisième génération, ne veut pas oublier.
Lien : http://luocine.over-blog.com/
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Côté pile, le roman est original : le narrateur ressent des pulsions violentes qu'il ne s'explique pas (alors qu'il est plutôt BCBG sur les bords) et qu'il comprendra peu à peu.
Côté pile encore, beaucoup de sensibilité et une grande capacité à faire ressentir l'émotion.
Côté face, maintenant, une écriture à mon sens trop travaillée (c'est le cas de beaucoup de romans français) et une intrigue qui part un peu dans tous les sens, avec comme final une amourette qui n'apporte strictement rien au roman.
Cela dit, malgré les défauts susmentionnés, j'ai passé un bon moment de lecture.
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Certes c'est très bien écrit, en particulier les premières pages parmi lesquelles on trouve les plus belles phrases du livre. Et la fascination pour le Mal, qui ne la partage pas parmi les petits-enfants de cette génération de la guerre. Mais tout est dit dans la 4e de couverture, il manque un ressort et un rebondissement...ce qui prouve que ce roman n'en est pas un.
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J'ai beaucoup aimé ce roman très bien construit, qui nous mène, à travers une quête des origines, vers le passé, le nazisme, la violence, et la philosophie de l'oubli.
Comment vivre en paix avec le passé ? Mais en même temps comment ne jamais oublier ?

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Tout d'abord c'est un roman extrêmement bien écrit, plein de poésie et qui nous fait bien ressentir les atrocités qui se sont déroulées pendant cette horrible guerre. Ce roman est divisé en deux parties : - la première partie nous raconte ce qui est arrivé à David Wagner : après la découverte de la photographie, le narrateur mène son enquête pour découvrir qui est David Wagner et à cette occasion on apprend ce qui lui est arrivé. J'ai trouvé cette partie très touchante et j'ai adoré. - la deuxième partie nous raconte l'impact qu'à eu la découverte de l'histoire de David Wagner sur la vie du narrateur : il est obsédé par cette histoire et ne peut s'en détacher même lorsqu'il rencontre Sophie, fille d'un "faux nazi" et dont il tombe amoureux. J'ai beaucoup moins aimé cette partie car je l'ai trouvée plus proche de l'essai que du roman, et certains passages étaient, à mon sens, un peu trop longs et sans rapport avec l'histoire du narrateur. Heureusement la fin du roman se recentre sur la vie du narrateur et on y obtient les réponses aux questions que ce dernier se posait. Bref, ce roman, s'il n'est pas un roman incontournable, reste tout de même un bon roman à lire pour les personnes qui comme moi aiment lire des romans sur la vie de juifs pendant la seconde guerre mondiale.
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Etre écrivain, ce n'est pas fouiller dans la vie des autres, c'est avoir de l'imagination, c'est inventer.
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