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Citations sur Le Solitaire (127)

Personne n’est coupable de rien. Ou tout le monde est coupable de tout : ce qui revient au même. Mais combien sont faibles ceux qui se sentent coupables tout en pensant qu’ils ne le sont pas. Quelle rupture entre la raison et la déraison. Ceux qui se sentent et en même temps se croient coupables n’ont qu’à se rendre, se démettre. Plus rien ne les retient dans leur suicide. Tandis que moi, l’embrouillé…
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Je suis demeuré tout seul au pied de ce mur. Tout seul, comme un sot. Eux, ils ont fait du chemin, ils organisent même des sociétés, plus ou moins bien, c’est vrai, et il y a des engins extravagants. Moi je ne fais que regarder le mur et je tourne le dos au monde.
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Mon appartement était un désert, aussi vaste que le monde.
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Je ne veux pas en savoir plus que les autres, je désire que tous nous sachions.
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La vie est surprenante, un tas de choses inattendues peuvent vous arriver. Des petites, pas des grandes.
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Il y a toujours eu ce manque. Il y a toujours eu ce sentiment que quelque chose me manquait, donc qu'il n'y avait que manque. Qu'est-ce qui manquait? Qu'est-ce qui m'a manqué? J'aurais voulu tout savoir. C'est cela qui me manquait. De ne pas avoir su. De ne pas savoir tout. J'étais ignorant mais pas assez pour ne pas me rendre compte que j'étais ignorant. Les savants savent-ils quelque chose ? Est-ce que ça leur suffit? Qu'est-ce qu'il y a de plus? Les arbres savent peut-être davantage de choses. Les animaux savent beaucoup de choses. Je n'avais fait aucun effort parce que je sentais qu'on ne pouvait pas savoir. J'en étais inconsolable. Peut-être qu'on saura tout un jour. D'autres sauront tout. Cette fatigue qui a pesé tout le temps sur moi. Ç'avait été la fatigue de l'impuissance. Oui, il y a eu des milliards et des milliards de gens. Il y a eu des milliards de vivants, et pour chacun, l'angoisse universelle. Chacun, comme Atlas, avait supporté tout le poids du monde comme si chacun était tout seul, accablé par le fardeau de l'inconnaissable. Cela me consolait-il de me dire que le plus grand savant était aussi ignorant que moi, et qu'il en avait conscience? Mais est-ce vrai?
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La découverte me plongeait autrefois dans la joie. La joie ne m'envahissait plus. Ne me touchait plus. La joie, c'est de s'apercevoir tout d'un coup, d'une façon qu'on pourrait appeler surnaturelle, que le monde est là et que l'on est dans le monde, que l'on existe, que j'existe. A présent, tout semblait prouver l'inexistence des choses et ma propre inexistence. J'avais peur de disparaître. En écoutant et en regardant attentivement dans la chambre ou par la fenêtre, il me semblait que les petits séismes imperceptibles mais assez nombreux avaient donné au monde une grande fragilité. Tout s'effritait, tout menaçait de sombrer dans un néant quelconque. L'univers où la réalité résistait de moins en moins. Y aurait-il quelque chose derrière ce décor ? Y aurait-il quelque chose, un autre décor ou rien du tout? Et qu'est-ce que c'était que le rien du tout? Je me sentais ébranlé dans un monde ébranlé. C'est curieux comme tout est à la fois si présent et si absent, si dur, si épais et si fragile. Cela existait-il vraiment? Cela avait-il jamais existé? Une défaillance un peu plus grande et tout pouvait se briser, en des milliers de morceaux. Je me sentais être un des points lumineux d'une gerbe d'artifice. La nausée du vide. Et puis la nausée du trop-plein. Comment cela pouvait-il tenir encore et pour combien de temps, si le temps était. Il n'y avait peut-être que de l'instantané.
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S'ils me regardaient, il y avait chez eux, vis-à-vis de ma personne, une sorte d'hostilité. Oui, c'était cela, ils ont tous pour moi de l'hostilité ou de l'indifférence. Mais moi aussi j'ai pour eux la même hostilité et la même indifférence. Qu'est-ce qu'ils avaient à me reprocher? De ne pas vivre comme eux, de ne pas me résigner à mon destin. Et moi, qu'avais-je à leur reprocher? Rien. Surtout quand je pensais que, dans le fond, ils étaient comme moi. Ils étaient moi. Voilà pourquoi je leur en voulais. D'être des autres, sans être tout à fait autres. S'ils avaient été vraiment différents de moi-même, j'aurais pu les prendre pour modèle. Cela m'aurait aidé. J'avais le sentiment de porter en moi la peur entière et l'angoisse de milliards d'êtres humains, le malaise de tous. Mis dans d'autres conditions, chacun d'entre eux vivrait la même angoisse, la même peur de la vie, le même malaise. Mais ils ne s'approfondissent pas. Ils se laissent être adolescents, puis adultes, puis vieillards, dans une sorte d'inconscience ou de résignation, de résignation inconsciente. Ils se défendent contre eux-mêmes, comme ils peuvent, tant qu'ils peuvent. Mais si chacun s'approfondissait, chacun vivrait l'angoisse et la peur des milliards d'êtres humains. Elle est en chacun de nous, cette angoisse. C'est cela qui me paraît être une cruauté certaine de la divinité : chacun est à la fois unique et tout le monde, chacun est l'universel. Cela aurait été tellement plus facile que l'angoisse et le désespoir et la panique soient répartis de façon égale sur tous les milliards d'êtres humains. Notre angoisse ne serait alors que la trois milliardième partie de la souffrance universelle. Mais non, chacun entraîne dans sa mort l'univers entier qui s'écroule.
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Il raccrocha. Je pensai qu'il était bizarre de considérer qu'il est anormal de vivre ainsi continuellement à se demander ce que c'est que l'uni-vers, ce qu'est ma condition, ce que je viens faire ici, s'il y a vraiment quelque chose à faire. Il me semblait qu'il est anormal au contraire que les gens n'y pensent pas, qu'ils se laissent vivre dans une sorte d'inconscience. Ils ont peut-être, tous les autres, une confiance non formulée, irrationnelle, que tout se dévoilera un jour. Il y aura peut-être un matin de grâce pour l'humanité. Il y aura peut-être un matin de grâce pour moi.
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Décevant, tout cela. Toujours la même chose, c'est bien ennuyeux. En effet, puisque, de toute façon, les gens vont tous mourir, quelle importance cela peut-il avoir de les tuer un peu plus tôt? Mais enfin, tout de même, bien que ce soit tous les jours pareil, tout ce qui se passe tient l'esprit éveillé.
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