AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,61

sur 116 notes
5
12 avis
4
15 avis
3
7 avis
2
2 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Très jolie infidélité à l'Histoire, La rose de Saragosse est un roman délicat comme une fleur. Raphael Jerusalmy s'inspire de l'assassinat en 1485 de l'inquisiteur Pedro de Arbués dans la cathédrale de Saragosse pour tisser son intrigue. Qui assassina l'inquisiteur provincial chargé de la traque des marranes dans le royaume d'Aragon? On soupçonna les grandes familles de la cité qui voyaient d'un mauvais oeil le pouvoir grandissant du Saint-Office. Pour venger la mort de Pedro de Arbués, Torquemada mit en place à Saragosse un important autodafé au cours duquel on brûla des centaines d'hérétiques.
Raphaël Jerusalmy ne s'intéresse pas à l'identité des assassins de l'inquisiteur, mais à des placards collés le long des façades de la ville représentant le cadavre écorché de l'homme d'église. Le placard est signé d'une rose épineuse. Scandalisé par cette oeuvre subversive qui nargue l'Inquisition, Torquemada lance ses tueurs et ses mouchards sur la trace du mystérieux et talentueux graveur.
La rose est une allégorie de la résistance à l'obscurantisme religieux. Jerusalmy dépeint avec finesse la montée en puissance de l'Inquisition. D'abord réticente, une partie de la population de Saragosse finit par se plier à cette institution qui étend son pouvoir sur tout le territoire, gangrène le royaume d'Aragon, aidé en cela par l'assassinat de Pedro de Arbués, puis quelques années plus tard par le meurtre supposé du Santo Niño de la Guardia. Le décret de l'Alhambra de 1492, qui entraîne l'expulsion des juifs d'Espagne, achève la christianisation de la péninsule et l'unification des Espagne Médiévales.
Comment résister pendant sept ans aux tribunaux religieux, aux autodafés, aux bûchers, à la chape de plomb de l'obscurantisme, ? Deux figures se détachent, deux personnalités ô combien distinctes et pourtant si emblématiques de la société de l'époque, unies par l'amour de l'art.
Angel Maria de la Cruz y Alta Mesa, dont le patronyme n'est pas garant de privilèges, est le cadet d'une famille de la petite noblesse. Pauvre, méprisé, contraint de frayer avec la populace pour survivre, il ne sait pas encore qu'il est l'homme de la future Espagne. Car il est vieux chrétien et demain la pureté de son sang lui ouvrira toutes les portes. Léa de Montesa, quant à elle, est fille de conversos. Eduquée, cultivée, raffinée, elle est espèce négligeable, contrainte de taire ses capacités intellectuelles et ses dons naturels. « Elle n'est pas un homme. Sa sédition commence par là. En jouant du burin, elle ne défie pas uniquement la gent masculine. Elle menace les autres femmes qui se débrouillent très bien autrement, trichant, à la manière des artistes pour tromper la vigilance des pères et des maris. Léa s'insurge et se cabre d'une façon qui ne sied certainement pas à une demoiselle de la ville haute et que même ses servantes la voient d'un mauvais oeil car elles ne lui pardonnent pas son courage. Et puis, il ne faut pas oublier qu'elle n'est pas vraiment chrétienne. Ni Espagnole. Comme les roses de son patio, elle est greffée sur un plant qui n'est pas le sien. Et a beaucoup d'épines. »
Angel et Léa sont deux esprits libres, deux amoureux du beau, deux esthètes broyés par le fanatisme religieux. En faisant de l'art un outil de subversion, Raphaël Jerusalmy nous offre de très belles pages aussi délicates que la machine de répression est brutale. L'Homme aux yeux gris de Petru Dumitriu, s'ouvrait sur les mésaventures d'un converso fuyant Tolède, puis l'Espagne et se terminait dans l'atelier du Titien. La rose de Saragosse commence en Aragon et se termine avec Botticelli, comme si finalement la seule façon de survivre à la répression résidait dans l'exil, et dans le goût des belles choses.
Commenter  J’apprécie          7110
Voici un roman historique lumineux, porté par un récit mystérieux à l'écriture dense , à la fois épurée, subtile et elliptique, traversée par des portraits forts et simples, comme sait le faire l'auteur , dont j'avais lu avec bonheur "Sauver Mozart "en 2014.
Il tisse son récit de petites phrases à la fois puissantes et économes.
Nous sommes à l'automne 1485, à Saragosse , quand l'inquisition fait régner la terreur en Espagne...
Aprés le meurtre d'un prélat, membre de cette juridiction, le pére Arbués, dans la cathédrale de Saragosse, c'est le dominicain Torquemada qui est investi par le roi du titre de grand inquisiteur.

Qui est l'assassin ?
L'enquête se tourne vers les juifs convertis," naturellement" suspects , l'auteur se concentre entre deux personnages: Léa , la fille d'un riche converti , indépendante , espiègle et raffinée, élevée dans l'amour des livres et de l'art.Son pére , Menassé de Montesa, est un collectionneur précieux de gravures et de livres , possesseur d'une importante bibliothéque , avec un penchant pour les volumes mis à l'index et Angel de la Cruz, noble déchu, hidalgo en guenilles mouchard, indicateur de l'inquisition ,habitué aux moqueries ....mais artiste lui- même, toujours flanqué de son molosse impressionnant : Cerbero....
En même temps , une série de gravures satiriques --- infâme placard signé d'une rose épineuse placée en marge, telle une provocation, ------sont affichées dans toute la ville, en signe de résistance, au sein de ce royaume d'Aragon, autrefois béni, où vivaient ensemble chrétiens et Maures, juifs et païens , terre de liberté , peuple pugnace si jaloux, de son indépendance , tombé, hélas ! sous le joug d'une poignée de dominicains ....
"À quoi diable reconnaît- on un homme libre " ?
C'est un ouvrage mêlant religion et histoire , mais surtout l'art de la gravure, cousine de l'écriture, " Les graveurs , la plupart sont d'ailleurs anonymes . de simples faiseurs d'images....
Sous des apparences de naïveté dissimulent une acuité redoutable" ..." Cette alchimie des alliages , ce sortilège des pointeaux et des burins qui font surgir des images hors du néant ...." La gravure est l'art des rebelles...."
A l'aide d'une plume défiant les temps obscurs qu'elle évoque,retenue et sobre, l'auteur place l'art au coeur de ce roman , parmi les faux semblants , les non- dits, où chacun joue sa peau et porte un secret....
Une lecture à la fois vive et enrichissante, évocatrice où le mystère, l'art de la séduction et l'aventure exaltent la conquête de la liberté ....
La première de couverture est colorée et lumineuse .
Aux éditions Actes Sud .
Commenter  J’apprécie          514
Pour une première rencontre avec Raphaël Jerusalmy, j'ai lu « La rose de Saragosse » un roman passionnant mêlant histoire, art et religion dans une époque tourmentée, celle de l'Inquisition espagnole.
Nous sommes en 1485. L'inquisiteur de Saragosse, Pedro de Arbuès, vient d'être assassiné au coeur même de la grande cathédrale. Ce crime va renforcer le pouvoir du Grand Inquisiteur Torquemada. Son arrivée sur place marque le début de persécutions accrues contre les Juifs et les conversos, ces Juifs convertis au christianisme. Angel de la Cruz, hidalgo au visage balafré profite de ces évènements pour gagner de l'argent en tant que « familier », Indic à la solde du plus offrant, suivi de près par un chien errant, cet homme frustre est aussi un artiste. Sa rencontre avec Léa de Montesa, fille d'un noble converti, élevée dans l'amour des livres et de l'art, va bouleverser sa vie. Ces deux personnages vont se défier, se rechercher, jouer de leur art pour se protéger et conquérir leur liberté.

Au-delà des personnages, au-delà de l'histoire, c'est l'art qui est au coeur de ce roman et surtout la gravure. L'art est donc une arme et ce n'est pas pour rien que tous les gouvernements cherchant à dominer une société s'attaquent en premier lieu à la liberté d'expression, aux journalistes mais aussi aux artistes. Les artistes sont aussi bien pourchassés que courtisés pour les politiques ou les religions. La rose de Saragosse est donc un hymne à la liberté artistique mais aussi un rappel à l'ordre : veillons sur nos artistes

À l'instar d'un graveur, Raphaël Jérusalmy trace à coup de stylet les personnages aussi complexes qu'attachants: Léa de Montesa, Angel de la Cruz, Yehuda Cuheno ou encore Torquemada sont décrits autant par les mots que par les blancs qui les entourent. Il y a un certain mystère sur ces pages et c'est aussi ce qui m'a séduite. J'ai aimé les non-dits, comme un trait de dessin à peine appuyé pour faire ressortir l'élément principal.
J'ai aimé ce roman finement ciselé par la plume élégante de Raphaël Jerusalmy.
Commenter  J’apprécie          464
Aux premiers pas de la mondialisation quand s'illustraient sur les mers espagnoles et portugais, la communication balbutiante avait la rapidité des goélettes.
L'invention du livre sera l'affaire des lettrés, des religieux, pas de profanes.
Restera la gravure.
Aussi léger qu'un smart phone, aussi anonyme qu'un pseudo, aussi rapide qu'un tweet, la gravure, d'une seule esquisse, est en mesure de diffuser un message rageur tel un tweet. Propageant des rumeurs sous le manteau au nez et à la bure des dominicains, l'utilisation de la gravure ébranla les pouvoirs de l'inquisition.


Raphael Jerusalmy élabora sur cette invention une diabolique intrigue, qui pris de court le dominicain Torquémada investi par le roi du titre de grand inquisiteur.

Est-ce la perfide caricature du grand maître de l'inquisition qui déclencha ses fureurs ou la mémoire d'un fieffé prêtre inféodé pieusement au respect pointilleux des désirs du grand Torquémada ?
La réponse du Maitre fût immédiate et féroce, à l'image de ses saintes aigreurs, c'est tout simplement l'horreur qu'il convoqua, en mettant en place à Saragosse un autodafé au cours duquel on brûla des centaines d'hérétiques ( des hommes de toutes religions, convertis ou non, à traduire par de possibles opposants ).


Qui surveiller ? Sinon les artistes, et tous les autres, les plus nobles comme les plus vertueux, les grands et les manants, les juifs, les ottomans. tous sont soupçonnés.
Angel de la Cruz, noble déchu au visage balafré, indicateur de l'inquisition, mais artiste lui- même, toujours précédé de son molosse Cerbero, est sous haute surveillance.


Léa de Montesa, fille d'un noble converti, défie ses admirateurs, Angel de la Cruz ou Yehuda Cuheno . Maîtresse de son art, elle espère conserver son rang, et protéger sa famille.

Des gravures où apparaissaient la rose, pouvaient brûler les doigts des plus téméraires et des plus déterminés des opposants au régime de cette Espagne livrée au St Office.


Cette fièvre monastique ébranla le pape lui même qui condamna de la plus verte des bulles, l'incendiaire de la chrétienté. Ce dominicain n'avait rien compris, le pape espérait conquérir les âmes pas les brûler même par amour !
Raphael Jerusalmy donne un éclairage de la situation de l'Espagne très intéressant. Car la question sous jacente, est celle-ci, qui tirait les ficelles de cette fièvre dominicaine ? La gouvernance d'un pays par les flammes de l'enfer a ses limites.


Les jours furent rudes pour les juifs, et au premiers rangs desquels les convertis.
Surprenante lecture de cette douloureuse période.



Commenter  J’apprécie          340
Ravie de retrouver la plume de Raphaël Jerusalmy dont La confrérie des chasseurs de livres m'avait beaucoup plu. Et pas mécontente de le suivre à nouveau dans son exploration du 15ème siècle, une époque particulièrement clé tant en termes d'inventions que de combats pour la liberté. L'auteur choisit le prisme des arts, pour illustrer les luttes contre l'ignorance propice à toutes les dictatures. A commencer par celle de la toute puissante Église catholique.

Dans La confrérie des chasseurs de livres, François Villon devenait le héros bataillant, sous l'influence de Louis XI pour favoriser la propagation des livres et ainsi de la connaissance, face à la censure de l'église de Rome. Avec La rose de Saragosse, nous sommes une vingtaine d'années plus tard, en 1485, en Espagne où l'Inquisition fait régner la terreur sous l'égide de Torquemada. On envoie rapidement au bûcher à cette époque, des listes circulent, incroyants, infidèles ou autres "mal convertis"... la délation vit certaines de ses grandes heures, on connaît le principe et le type de politiques qui visent à la favoriser. Certains en vivent d'ailleurs, comme cet Angel de la Cruz, un noble déchu et désargenté qui vend ses services au plus offrant. Un indic qui possède néanmoins un réel talent de dessinateur même s'il l'utilise pour mieux traquer ses proies. A Saragosse, un petit malin s'amuse à narguer Torquemada, des caricatures gravées et signées d'une rose s'affichent sur les murs, déclenchant la fureur du grand Inquisiteur. "A quoi, diable, reconnaît-on un homme libre ?" enrage Torquemada. Bien décidé à dénicher le ou les coupables, Angel, flanqué de son horrible chien Cerbero s'intéresse de plus en plus près à deux familles, les de Montessa et les Cuheno, des juifs convertis dont les plus jeunes, Léa et Yéhuda sont amis depuis l'enfance. Commence alors un jeu du chat et de la souris sur fond d'affinités artistiques, tout en ombres et lumières.

Encore une fois, Raphaël Jerusalmy orchestre un roman vif, sur les traces de ceux, anonymes ou célèbres qui ont oeuvré sans relâche pour la liberté et le libre arbitre. Liberté de penser, liberté de créer et de diffuser sa vision des choses. Il trouve le ton juste pour exalter le pouvoir de l'art et des mots magnifiques pour parler de la gravure "l'art des rebelles" dit Léa, "Elle détourne encre et papier de l'usage que leur ont assigné les scribes. Elle élargit le stylet de l'emprise des lettres et des signes, lui donnant plus de leste. Elle émancipe nos regards des diktats auxquels les peintres l'astreignent. Elle oblige à voir autrement. Sans artifices ni demi-teintes".

Et le lecteur d'admirer une fois encore cet art subtil qui consiste à rapprocher les époques, à puiser dans les vastes archives de la connaissance pour mieux mettre en garde sur les dangers qui guettent notre siècle. Et à rappeler les valeurs qui fondent le monde libre.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
Commenter  J’apprécie          220
Alors que l'inquisition a étendu ses pouvoirs sur toute l'Espagne, un de ses membres vient d'être assassiné à Saragosse. Torquemada est y alors mandé par le roi pour faire toute la lumière. le Grand Inquisiteur de Castille et d'Aragon va devoir à la fois découvrir le coupable et juguler l'opposition pour faire rentrer dans les rangs ceux qui oseraient encore s'opposer à la religion d'état et à ses contraintes monstrueuses. Car il ne fait pas bon être juif en 1485, dans l'Espagne d'Isabelle la Catholique et de son mari Ferdinand.

Bien sûr, les marranes (juifs convertis) sont les premiers visés. La famille Menassa de Montesa est une des première à être suspectée. le père est un homme particulièrement cultivé, collectionneur averti, amoureux des livres et des écrits, il possède dans sa bibliothèques des ouvrages interdits par l'inquisition et surtout de splendides gravures devant lesquelles il aime à méditer. Sa fille Léa le seconde parfois à l'atelier de gravure. Dans leur entourage évolue un homme étrange, Angel de la Cruz, qui dessine à la volée les suspects qu'il signale à l'inquisition dont il s'avère être l'un des familiers (une sorte d'indic, d'espion). Il va partout accompagné de son chien, un effrayant Cerbero qui porte bien son nom. Alors que tout devrait les séparer, Angel et Léa portent le même amour au dessin et à l'art et ce goût et ce talent conjugués, loin de les rapprocher, pourraient bien entraîner une forme de rivalité.

Au même moment, dans la ville, des gravures satiriques de Torquemada portant dans un angle le dessin d'une rose s'échangent en sous-main. Que signifie cette rose, est-ce le signe d'une rébellion et par est-elle fomentée ?

Mené comme une intrigue, l'auteur nous propose à la fois un roman historique érudit et un roman politico social, dans lequel les méchants ne sont pas forcément ce qu'il ont l'air d'être. Et surtout dans La rose de Saragosse, l'art et la beauté des oeuvres restent les éléments prépondérants, malgré leur pérennité mise en danger par les autodafés de l'inquisition.

chronique complète sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2018/07/18/la-rose-de-saragosse-raphael-jerulasmy/
Lien : https://domiclire.wordpress...
Commenter  J’apprécie          152
On est en pleine inquisition et Torquemada est de plus en plus puissant et féroce. Les mécréants, les apostats, les « sorcières » constituent son gibier ordinaire.
L'inquiétude est déjà bien installée dans les maisons juives quand survient – le livre commence ainsi – le meurtre d' un Père, membre de l'Inquisition, en pleine église. Les tensions vont alors arriver à un sommet dans la ville! un livre bien construit de Raphaël Jérusalmy, à découvrir!
Commenter  J’apprécie          140
La famille Cuheno ne se décide pas encore à quitter l'Espagne, nullement alarmée par la liste noire sur laquelle elle figure. Les conversos considèrent qu'ils n'ont rien à craindre. Comme eux, la plupart des convertis, et même certains juifs, occupent de hauts postes, sont reçus à la cour, habitent les plus belles demeures de la cité. il ne se sentent pas menacés par la bataille que livre le clergé dominicain aux juifs qui seront bientôt contraints de partir à la recherche d'une nouvelle terre d'asile.

L'auteur s'inspire de l'assassinat de Pedro de Arbués, poignardé dans la cathédrale de Saragosse et point de départ d'un gigantesque autodafé orchestré par Toquemada pendant lequel furent brulés des centaines d'hérétiques, pour tisser l'intrigue de son roman.

Toquemada ne s'intéresse pas à l'auteur du meurtre mais plutôt à l'auteur des placards collés le long des murs de la ville, signés d'une subtile rose épineuse. La Rose de Saragosse, hymne à la liberté et qui semble narguer l'Inquisition.

Un roman qui mêle histoire, religion et art de la gravure. On apprend beaucoup de choses sur cette partie de l'histoire espagnole mais également sur les techniques de dessin et de gravure que l'auteur prend plaisir à détailler et qui ajoute une pointe de finesse et de beauté à son récit. L'auteur dépeint ses personnages par des portraits forts, évocateurs, aussi complexes qu'attachants, et donne même le point de vue très bien amené du chien de l'hidalgo. Un roman mystérieux, élégant, qui m'a séduit.
Lien : https://eemmabooks.wordpress..
Commenter  J’apprécie          60
1485.
Suite à l'assassinat du Père Arbuès, membre de l'inquisition, Thomas de Torquemada est dépêché à Saragosse pour traquer et punir les meurtriers. Étonnamment, la récompense promise pour toute information susceptible d'arrêter les coupables est moindre que celle offerte pour permettre de mettre la main sur ceux qui, suite au meurtre, ont placardé sur les murs de la ville des affiches représentant le cadavre écorché de la victime, signées d'une délicate rose épineuse...

La présence à Saragosse de ce grand inquisiteur réputé pour s'allier les services de la racaille exhausse les tensions et ranime chez la population juive la peur d'être de nouveau contrainte à l'exil, sous peine de persécutions. Torquemada va doter d'une nouvelle puissance la Guerre Sainte que l'Espagne a décidé de mener non plus en Palestine, mais en son propre sein.

Les de Montesa font partie de ces riches juifs convertis au catholicisme, conversion qu'ils ont payée cher, mais c'était là le prix de leur tranquillité. Ménassé, le chef de famille, est passionné de gravure. Il a initié sa fille Léa à cet art réservé aux hommes, pour lequel elle se montre particulièrement douée.

Angel de la Cruz pratique lui aussi avec amour et talent ce savoir-faire qui, sans mot ni couleur, trouve le chemin sans détour vers l'oeil -et donc vers l'âme-, qui ne rend pas esclave du plan que l'on travaille, et laisse s'exprimer les blancs et les non-dits, ouvrant des aires de liberté. Personnage ambivalent que cet Angel de la Cruz, hidalgo déchu, "familier" -indicateur- de l'Inquisition, mais aussi électron libre, dont la silhouette aussi menaçante que misérable, systématiquement accompagnée d'un chien à l'allure non moins effrayante, suscite l'effroi. le pouvoir dont il est investi en tant que sbire du Grand Inquisiteur est pour lui un moyen de prendre sa revanche sur ceux -les riches-, qui l'ont raillé, brimé, avili. Fort de ses connaissances techniques en dessin, il compte bien attraper l'auteur des insultantes affiches.

Sa rencontre avec Léa, lors d'un dîner chez les de Montesa désireux de s'attirer les grâces des enquêteurs de Torquemada pour détourner les soupçons que pourraient faire naître leur statut de "conversos", le hante. Intrigué par l'intelligence et le raffinement émanant de la jeune femme, il l'épie, lui fait parvenir d'inquiétantes esquisses.

Raphaël Jérusalmy, que je découvre avec ce très court roman, m'a charmée avec sa plume à la fois précise et légère, que l'on dirait portée par une élégance naturelle. Malgré la brièveté de son texte, il parvient à y installer une ambiance prégnante, qu'il emmène son lecteur dans les salons des riches convertis, dans les sombres ruelles de Saragosse où officient de subversifs artistes de l'ombre, ou encore sur les grouillantes places publiques, aux côtés de la foule assistant aux autodafés, symboles de la nouvelle politique répressive de l'Inquisition.

Pimentée par le suspense qu'instille au récit la traque visant l'artiste rebelle, l'intrigue est également prétexte à un bel hommage à la puissance de l'art comme vecteur de révolte et moyen d'expression contre l'iniquité et la persécution.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          20
Inquisition, Espagne, Art, Peinture
Commenter  J’apprécie          21




Lecteurs (212) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3188 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}