AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9791022607278
272 pages
Editions Métailié (18/01/2018)
3.78/5   34 notes
Résumé :
Dantala vit dans la rue avec les voyous de Bayan Layi, fume la wee-wee sous le baobab, fait le coup de poing pour le Petit Parti. Souvent, les bagarres tournent mal mais, comme on dit, tout ce qui arrive est la volonté d’Allah. Un soir d’émeutes, pris en chasse par la police, il doit s’enfuir.
Sans famille, il trouve refuge à Sokoto auprès d’un imam salafiste. Il apprend l’anglais avec son ami Jibril, tombe amoureux, psalmodie l’appel à la prière, lit tout c... >Voir plus
Que lire après Né un mardiVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
3,78

sur 34 notes
5
4 avis
4
11 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis
Dantala a un dizaine d'années quand, à sa sortie de l'école coranique, il se retrouve seul à Bayan Layi, dans le Nord-Ouest du Nigeria, sans argent pour rejoindre son village. Il intègre alors la bande de jeunes qui, sous le grand baobab, fument la wee-wee, vivent de la débrouille et, à l'occasion, se battent pour le Petit Parti. Les élections approchant, la situation se tend et tourne mal. Traqué par la police, Dantala fuit vers la ville de Sokoto où sa ferveur musulmane le fait repérer par l'imam d'une petite mosquée. Avec son ami Jibril, il apprend l'anglais, s'initie à l'informatique et devient un membre éminent de la petite congrégation dirigée par Sheikh Jamal. Mais si tous, à Sokoto, pratiquent l'Islam, des divergences existent dans la façon d'interpréter le Coran et de voir le monde. Entre Sunnites, chiites, intégristes, salafistes et modérés, la tension monte et bientôt, Dantala assiste, ébahi, à la violence qui se déchaîne entre sa petite communauté et les autres factions musulmanes de la ville.

Salafisme, Boko Haram, intégrisme...des mots qui font partie de notre quotidien devant le journal télévisé mais des mots que l'on entend sans les comprendre, sans parfois se sentir concernés, sans vraiment connaître ce qui se terre derrière ces mouvements religieux extrémistes. Pour Dantala, ces mots vont prendre forme avec toute la violence qu'ils recèlent. Bon musulman, pieux et croyant, Dantala n'est qu'un enfant mais il connaît déjà toute la misère du monde. Séparé de sa famille, sans argent, sans repères, il subit d'abord la violence de son enseignant de l'école coranique qui aime faire entrer les préceptes d'Allah dans la tête de ses élèves à coups de bâton, puis celle de la rue où les jeunes voyous mènent la danse, se vantant de leurs exploits, de leurs crimes, la machette à la main, le joint au coin de la bouche. Dantala n'est pas un rebelle, il supporte tout, persuadé que tout ce qui arrive est la volonté d'Allah. Quand il est repéré par l'imam d'une mosquée salafiste, c'est heureux, qu'il devient membre de la petite communauté bienveillante qui lui a fait une place en son sein. C'est en ce lieu qu'il grandit, mûrit, réfléchit, apprend, construit sa pensée. Il protège l'imam, appelle à la prière, tout en s'interrogeant sur le monde qui l'entoure. Autour de lui, les idées fusent : haine des juifs et de l'Amérique, création d'un Etat islamique, combat contre les idées de l'Occident. Son imam est un modéré mais il s'est fait des ennemis. Quand la violence atteint son paroxysme, Dantala est désemparé. Allah a-t-il voulu tout cela ?
Roman initiatique, Né un mardi est le récit sans concessions du quotidien de ce petit coin du monde oublié de tous. La misère, les catastrophes climatiques, conduisent certains à se tourner vers les extrêmes, à trouver dans une foi vindicative le moyen de se venger contre les coups du sort, les humiliations, le mépris, la pauvreté. Loin des clichés, c'est avec un réalisme brut qu'Elnathan John décrit cet Islam qui se fissure pour donner naissance à des sectes déterminées et violentes. Financement saoudien, apprentissage de la lutte armée dans les pays limitrophes, harcèlement des modérés, c'est tout un mécanisme qui se met en place pour plonger un pays dans le chaos. Au milieu de tout cela, Dantala est un personnage touchant, à la fois naïf et terre-à-terre. Curieux, ouvert, intelligent, animé d'un vif désir de paix et de justice, il est une perle au milieu de la douleur et du sang. Un livre prenant, pédagogique, instructif.
Commenter  J’apprécie          480
Ami.e lecteur/trice, je voudrais que tu te souviennes de ton enfance. J'espère pour toi qu'elle fut un temps d'innocence, pleine de Bisounours, de chevaliers et de princesses, sans autre traumatisme que les escarmouches entre cowboys et Indiens, policiers et voleurs. Ca y est, tu visualises ? Maintenant, laisse-moi te prévenir, tu vas te prendre une baffe. Je t'emmène en Afrique, dans le nord-ouest du Nigéria, région pauvre majoritairement musulmane. Focus sur le bled (fictif?) de Bayan Layi, zoom sur, ou plutôt sous, le baobab de la place. C'est bon, tes yeux se sont habitués à la lumière et à l'ombre ? Tu distingues un groupe de gamins. Observe bien, et tu verras qu'ils ne jouent pas au foot ou aux billes. Ils y vivent sous des cartons, y fument de l'herbe, se racontent leurs exploits machette au poing. Parmi eux, Dantala (« né un mardi » en langue haoussa). Envoyé très jeune à l'école coranique par ses parents (pour échapper à la pauvreté?), il s'est révélé être un élève studieux et doué, mais cela ne l'a pas empêché de se retrouver à la rue une fois ses études terminées. Violence quotidienne banale, survie et fatalisme (« tout ce qui arrive est la volonté d'Allah »), petits « boulots » pour le compte du Petit Parti à l'approche des élections (incendies, passages à tabac d'adversaires politiques et plus si affinités), forcément, un jour tout ça tourne mal. Emeutes, policiers et voleurs, Dantala s'enfuit pour sauver sa peau. Il échoue à Sokoto, capitale d'un des états fédérés du pays. Plus de baobab ni de fraternité urbaine, mais toujours la violence et l'indifférence. Cette fois il faut se battre pour grappiller la nourriture et l'argent distribués par on-ne-sait-trop quelle chapelle, non loin d'une mosquée salafiste. Très vite, Dantala est repéré par l'imam de cette mosquée, qui le prend sous son aile. le gamin est naïf mais curieux et intelligent. Il lit tout ce qui lui tombe sous les yeux. Au fil du temps, il s'acharne à apprendre l'anglais, à se servir d'un ordinateur. Il se voit même confier l'appel à la prière, où il trouve une paix inespérée : « chanter ces mots peut me procurer la meilleure sensation du monde, une sensation qui chasse toute douleur, toute peur, toute inquiétude, tout désir ». Et Allah sait qu'en ce début de 21ème siècle, le pays est troublé : tensions religieuses entre salafistes modérés et radicaux (même si Boko Haram n'est jamais explicitement évoqué), entre chrétiens et musulmans, corruption du pouvoir, alliances politiques opportunistes, épidémies et pauvreté. Alors que Dantala, qui semble promis à la succession de l'imam, est lui-même aux prises avec les troubles de l'amour et de l'amitié, forcément, un jour tout ça tourne mal. Parce que dans ces moments de ténèbres, les uns ne tolèrent pas l'ouverture d'esprit, et les autres, qui confondent fondamentalisme et islam, n'y croient pas.

Pour un premier roman, voilà une belle réussite. Difficile de ne pas être touché par le personnage de Dantala (les retrouvailles avec sa mère, emmurée dans sa douleur, sont bouleversantes – je me comprends), petit gars pas méchant, foncièrement honnête et croyant, catapulté à la case « adulte » sans passer par l'enfance. Son histoire et celle de son pays sont tragiques et pourtant l'humour affleure, sans doute grâce au ton ingénu qu'il utilise. Une histoire terrible, qui suinte la vie malgré la mort omniprésente, un roman secouant sur le monde comme il va (ou pas) au Nigéria, où, entre le radicalisme et la corruption s'infiltrent quelques gouttes de tolérance et d'espoir.

En partenariat avec les éditions Métailié.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          516
Ce que j'ai ressenti:

Comme le vent soulève le rideau de la couverture, il souffle dans ses pages, un air chaud venu du Nigéria, empreint de ses expressions fulgurantes, de ses tourments sanglants, de ses relents nauséabonds, d'un goût sucré inoubliable…Un vent de passion et de violence qui fait voler en éclat la poussière rougie de sang, et l'innocence de cette jeunesse désoeuvrée. Dans ce premier roman, la fiction prend des airs de réalités troublantes et on vit les petites et grandes histoires de ses terres arides. Elnathan John nous emporte au coeur de l'Afrique, nous la raconte sans fard et artifices, déchirante et survoltée, au plus près de la foi et ses travers tourbillonnants.

"Mais Umma disait que parfois les gens qu'on trouve méchants sont simplement idiots et que, s'il est facile de se repentir d'être méchant, il est difficile d'arrêter d'être idiot."

Dantala, c'est un gamin qui traîne dans les rues, et qui pourrait se faire entraîner sur des parkings de haine, mais qui choisit le chemin lumineux de la culture et de l'humilité devant Allah. A force de lire et d'apprendre les langues, à force de prosternations et de confiance, il se forge une opinion, ne se laissant plus guider par une fatalité lâche, mais avance sûrement sur la voie de la bonté et la liberté de penser. C'est un personnage qui m'a émue dans cette quête noble du savoir, on le voit doucement se transformer au fil des pages et de ses expériences, jusqu'à l'audace de s'écrire : un roman d'apprentissage intense!

"-S'il vous plaît, je veux quelque chose pour écrire."

Elnathan John met dans ce livre une telle richesse, entre les troubles adolescents qu'il caresse avec sa plume, et la force d'une culture qu'il prend à bras le corps, il nous révèle, à travers le regard naïf d'un jeune homme, les dessous de la corruption et les chemins enténébrés de l'extrémisme religieux dans une région, où même la météo devient chaos…Une lecture au rythme des prières, où l'amitié inonde de clarté ces lignes noires, où les émotions nous submergent vers toujours plus de tolérance grâce au talent d'un conteur inspiré…




Ma note Plaisir de Lecture 9/10


Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          432
Je viens de terminer le livre lorsque j'ai entendu la terrible nouvelle. La secte intégriste avait fait un grand nombre de victimes au Nigéria. Triste actualité et triste rappel du bouquin.

Dantala vit au nord du Nigeria. Il est revenu à Bayan Kayi après que son père l'eût envoyé dans une école coranique pendant six ans. Dantala signifie « né un mardi », ce n'est pas son vrai nom, mais un surnom donné par son père. L'ennui ou quelque chose d'autre, le pousse à suivre de jeunes désoeuvrés, dans un pays où il n'y a plus rien, à fumer la wee-wee, sorte de cannabis. le gouvernement profite de ces jeunes, les paient grassement, ou pas, pour faire les sales besognes, les coups de poings. “On n'est pas méchants. Quand on se bat, c'est parce qu'on n'a pas le choix. Quand on cambriole des petits magasins à Sabon Gari, c'est parce qu'on a faim, et quand quelqu'un meurt, eh bien, c'est la volonté d'Allah.”

.Dantala les accompagne, participe, jusqu'à l'assassinat sordide d'un vieil homme au moment des élections entre le Grand Parti et le Petit Parti, y perd son meilleur ami. Il fuit Bayan Layi et trouve refuge dans une mosquée de Sokoto. Repéré par l'iman salafiste modéré Malam Abdul-Nur, celui-ci lui propose de travailler avec lui. Ainsi débute la nouvelle vie d'Ahmed, vrai prénom de Dantala, qui se voit proposé une sorte de rédemption.
Petit-à-petit, Ahmed, curieux, vif et intelligent, s'instruit se développe, apprend, murit. Son plus grand plaisir est de chanter l'appel à la prière : « chanter ces mots peut me procurer la meilleure sensation du monde, une sensation qui chasse toute douleur, toute peur, toute inquiétude, tout désir ». Il est bien dans son nouvel état. Il murît, grandit
Dantala se découvre un nouvel ami en la personne de Jibril avec qui il apprend l'anglais. Ce même Jibril, doit obéissance à son frère ainé, Malam Abdul-Nur, un imam passé du côté des intégristes, enfin, surtout du côté où l'on donne plus d'argent et rejoint l'autre camp sans que leur amitié se coupe.
Dantala, lui, restera toujours fidèle à Malam Abdul-Nur dont il devient le second. Cet imam croit en l'homme, il accorde sa confiance, quelque fois, de plus en plus, mal placée. Ses propos modérés ne font plus recette, les subsides diminuent car les offrandes vont du côté de la secte, vous savez ceux qui prennent leurs ordres en Arabie Saoudite ou en Iran. Pourtant, les imams des différentes obédiences se réunissent, sont capable d'échanger… Malam Abdul-Nur prône l'accord, la non-violence, le partage, l'amour des autres… des concepts de moins en moins audibles alors qu'arrivent les attentats, massacres. Politiques, religion, police, corrompus, la main dans la main pour les coups fourrés, ne laissent plus de place à Malam Abdul-Nur qui aura la tête tranchée.
« Nos émirs et nos grands hommes sont cupides et ne s'intéressent ni à nous ni à notre religion. Ils prétendent seulement être musulmans et originaires du Nord, mais ils s'allient avec ceux qui nous oppriment. Pour eux, un parti infidèle qui accepte toute sorte de kouf est plus important que de défendre les musulmans et Allah ».
Ce livre, sorte de journal de bord de Dantala, montre la montée de l'intégrisme dans un pays, le Nigeria, où la violence me parait extrême. La montée du fanatisme est plus du fait des politiques, politicards corrompus, que de celle de la population extrêmement pauvre qui suit qui lui donne un peu à manger, un peu d'argent. C'est si facile d'acheter des gens miséreux.
Porte entrebâillée vers la découverte d'un pays, de la montée du religieux, plutôt de la religiosité, la quasi naissance de la secte Boko Haram avec son cortège d'exactions sanglantes. L'écriture rythmée d'Elnathan John les mots crus, directs, l'ambiance réaliste, dure, avec de très belles descriptions, font que je n'ai pu lâcher le livre avant la dernière phrase, le dernier mot. Un livre précieux, très bien écrit, qui ne se laisse pas facilement oublier. Histoire d'une vie au Nigeria, vivier où la secte recrute ses futurs membres sanguinaires ; qui a les armes et l'argent a le pouvoir.

Les Editions Métailié ont publié un superbe premier roman.

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
Commenter  J’apprécie          140

Elnathan John
Né un mardi
traduit de l'anglais (Nigéria) par Céline Schwaller
Métaillé, 2018, 258 p
premier roman


C'est à la fois un récit de conflit interreligieux (autour de l'islam) et de pouvoir, un roman de formation, et un document sur la vie de nos jours au Nord du Nigéria , le roman retraçant les années courant de 2003 à 2010. Beaucoup de choses me sont étrangères, ne serait-ce que le mot astaghfirullah (je demande pardon à Allah) et j'ai du mal à suivre l'itinéraire d'un enfant privé de l'affection de sa mère, à cause de la distance puis de la maladie, la folie, de celle-ci qui a d'abord perdu son mari malade, puis ses deux filles jumelles dans la grande inondation. le récit est raconté par le garçon, qui n'a pas non plus une idée claire de la situation, bien qu'il soit très observateur, et qu'il retienne tout de ce qu'il voit et de ce qu'on lui dit.
le garçon, un haoussa, Dantela, qui signifie « né un mardi » alias Ahmad, alias Black Spirit, a été admis comme almajiri (enfant envoyé dans une école coranique, qui travaille et mendie pour le directeur de l'école) dans une autre école coranique, faute de place, que ses trois frères, chez un malam, Junaidu, où il apprend très vite et très facilement l'arabe. Il vit depuis -les almajirai devenant des enfants des rues - sous un kuka, protégé par un grand parce qu'il est le plus petit, qui fournit à la bande le wee-wee, plante hallucinogène qui provoque plus de déplaisir que de plaisir, et la fait travailler pour le Petit Parti. Dantula frappe un homme. le chef de bande, atteint de tuberculose, meurt au moment où les émeutes exigent qu'ils fuient.
Dantela monte dans un camion qui dérape, et arrive à Sokoto, devant une mosquée où il est repéré par un imam, Sheikh, qui voit en lui un enfant intelligent. A la différence des autres garçons, il n'est pas intéressé par les formes différentes des pénis. Autour de la mosquée, un homme politique fait distribuer de la nourriture et de l'argent. C'est la ruée, accompagnée de luttes, vers ces mannes. Son oncle vient le chercher parce que sa mère va très mal. Il apprend que ses frères sont chiites, pratiquent un autre islam qui n'est pas le bon. Sa mère, la vendeuse de gruau, n'appartient plus déjà à ce monde. Elle est soignée par sa soeur qui, à cause de ces soins, a délaissé son mari qui a pris une autre femme comme le dicte la sunna, et lui refuse le divorce, mais voudra bien qu'elle vienne habiter leur maison quand sa soeur sera morte. L'habitation a deux ailes, l'aile des femmes et celle des hommes. Devant la maison, se trouve un zaure, espace extérieur où se rejoignent les deux sexes. L'hospitalité commande qu'on reçoive avec des égards un hôte fatigué qui a fait un long voyage. L'hôte ne vient pas les mains vides. le manque sévit, et quand on peut l'amoindrir, il ne faut pas hésiter. On voit la boue des pistes dans laquelle tombent les denrées fraîchement achetées - il n'y a pas de routes- après l'inondation qui a balayé les habitations, combien il est difficile de se rendre à l'hôpital parce qu'il n'y en a pas sur place, le degré de pauvreté des populations, la rareté de la nourriture.
Revenu à Sokoto, il apprend l'anglais avec un autre garçon, Jibril, alias Gabriel, un yoruba dont le frère, Malam Abdul-Nur, l'adjoint de l'imam, un ancien chrétien qui s'est converti à l'Islam, frappe tous ceux qui ne lui obéissent pas. Ahmad met en situation les mots nouveaux qu'il acquiert, et on peut lire ses lettres maladroites dans lesquelles il utilise ce vocabulaire tout neuf. Jibril lui fait aussi connaître la femme. Jibril couche avec la femme de son frère, qu'il aime et protège des cruautés de celui-ci : il la bat et lui enfonce des choses dans l'anus. Cependant elle ne veut pas quitter son époux. Ahmad aime Aisha, l'une des filles de Sheikh. Il apprend aussi à se connaître, il adore assurer l'appel à la prière, qui vaut mieux que le sommeil, il est presque en transe quand il s'adresse à un large public. Lui qui aime tant parler sait que trop parler expose. Ahmad constate aussi que le généreux distributeur gonfle la somme d'argent destiné à fonder une école voulue par Sheikh, où les filles, séparées des garçons, apprendront à lire et à écrire, comme les filles des chrétiens. Il est bon que, devenues femmes, elles aillent voter, accompagnées de leurs maris.
Malam Abdul-Nur, dont les idées radicales s'éloignent par trop de celles de Sheikh, un modéré, est envoyé en Arabie Saoudite, et quand il en revient, ayant pris pour lui les subsides saoudiens, il fonde un nouveau mouvement opposé à Sheikh. Il est favorable à un état islamique installé par la force et dans le sang. Il fait appliquer la charia à tort et à travers. L'Islam, ce n'est pas traiter des gens en esclaves, et régner par la peur, lui rétorque Sheikh. L'Islam veut qu'on décide ce qui est bénéfique aux musulmans. Oui, Sheikh est pour un gouvernement islamique, mais en attendant il faut savoir comment fonctionnent les membres de l'actuel gouvernement. Pour contrecarrer les ennemis, il faut connaître leurs méthodes. Sheikh veut aussi montrer qu'Islam et paix vont ensemble. Malam Abdul-Nur est un ignorant qui ne connaît pas l'Islam ni ses préceptes. du reste il mourra en lâche, niant sa qualité de moudjahidin. Ahmad, qui le remplace, prend des fonctions de plus en plus grandes auprès de Sheikh qui le considère comme son fils, lui faisant comprendre sans le brusquer ce qui est bon, et l'incite à apprendre à se servir des ordinateurs et à se marier. Les dissensions s'intensifient, Sheikh est égorgé, Ahmad jeté en prison et torturé. Ce qui le maintient en vie, c'est qu'il veut écrire son histoire. Libéré, il apprend qu'Aisha est mariée au généreux distributeur de vivres qui, après l'égorgement de Sheikh, ne s'est plus occupé que des élections. Il apprend aussi que Jibril va bien et viendra le chercher. Ces deux garçons montrent qu'on peut être de confession différente et nourrir des liens forts. Sheikh et un iman chiite jouaient ensemble au football quand ils étaient enfants. Pourquoi un choix différent de religion les empêcherait-il de s'entendre ?

Son histoire, Elnathan John l'a écrite, en insérant des mots haoussa et arabes qui appartiennent au personnage principal, dont l'expression est simple. Sa voix se substitue parfois à celle du narrateur quand il dénonce les gens qui se tournent vers tel mouvement, uniquement happés par la nouveauté ; quand il dit que les gens aiment bien ceux qui frappent, confondant violence et autorité; quand il montre que les policiers ne sont pas futés ; quand il s'indigne que des très pauvres s'engouent pour des clubs de football très riches, alors que les footballeurs ne savent même pas qu'ils existent.

C'est un livre dans lequel il a été difficile pour moi d'entrer. Tout semble en effet étranger. Certes, Boko Haram a défrayé les chroniques en s'emparant de ces lycéennes et en mettant à sac les villages et en massacrant les villageois. Les Français se sont indignés, et après ? Boko Haram a-t-il cessé ses agissements ?
Au moins, on approche de plus près une réalité nigériane, qui ne doit pas être très différente de celle des pays musulmans voisins.
C'est aussi un appel à un Islam modéré, qui passe par l'enseignement, l'ouverture à l'autre, la remise en question de ses idées.
A la fin du livre, Ahmad, qui aura compris beaucoup de choses, prendra le bus. Pour aller prêcher la modération ?
Avec Ahmad, moi aussi je continue d'apprendre beaucoup sur l'humanité occupée à survivre.




Commenter  J’apprécie          10


critiques presse (4)
LePoint
28 mai 2018
Un premier roman-choc (Métailié) qui est aussi une radiographie du Nigeria.
Lire la critique sur le site : LePoint
LeJournaldeQuebec
26 mars 2018
En racontant l’histoire d’un enfant des rues, l’écrivain nigérian Elnathan John nous entraîne au cœur de la violence.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Actualitte
02 mars 2018
Initiatique et agité, expressif et plein de vie, le premier roman du Nigérian Elnathan John (traduit par Céline Schwaller) est une évasion, un choc émotionnel.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LeFigaro
23 février 2018
Dans le roman Né un mardi, Elnathan John plonge dans la ­société nigériane à travers les yeux d'un jeune musulman de bonne foi.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Mais Umma disait que parfois les gens qu'on trouve méchants sont simplement idiots et que, s'il est facile de se repentir d'être méchant, il est difficile d’arrêter d'être idiot.
Commenter  J’apprécie          280
..Umma disait que parfois les gens qu'on trouve méchants sont simplement idiots et que,s'il est facile de se repentir d'être méchant,il est difficile d'arrêter d'être idiot.
Commenter  J’apprécie          40
-S'il vous plaît, je veux quelque chose pour écrire. 
Commenter  J’apprécie          110
Je me vois moi aussi, en train de souffler de la fumée de wee-wee, me sentant invincible et l'envie de voler. Je vois les cendres se former après chaque bouffée, transformant les feuilles en fumée et en poussière, comme la vie. Ma vie. Chaque jour ressemble à une bouffée qui me rapproche du moment où je serai entièrement consumé, transformé en cendre.
Commenter  J’apprécie          00
Le president et le vice -président ne voyagent jamais dans le meme avion...
...quelqu'un doit prendre la reléve au cas où quelque chose arrive à l'autre
Commenter  J’apprécie          10

autres livres classés : nigeriaVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus

Lecteurs (93) Voir plus



Quiz Voir plus

Jésus qui est-il ?

Jésus était-il vraiment Juif ?

Oui
Non
Plutôt Zen
Catholique

10 questions
1836 lecteurs ont répondu
Thèmes : christianisme , religion , bibleCréer un quiz sur ce livre

{* *}