Ce livre est le catalogue d'une très belle et dense exposition qui a eu lieu en avril - mai 2022 à la
Maison de la Culture du Japon à Paris. Il reflète fidèlement, tant en quantité d'oeuvres présentées qu'en qualité d'impression ce qu'il était possible de voir à l'occasion de cet événement.
L'ère Meiji, du nom de l'empereur qui régna de 1868 à 1912, fut pour le Japon une période d'ouverture trépidante sur l'occident, dont il avait jusqu'alors rejeté fermement les tentatives d'intrusion dans sa culture, et même cruellement en ce qui concerne les velléités d'évangélisation.
La famille impériale elle-même va encourager cette excitation de la société pour tout ce qui est européen et occidental : la mode vestimentaire, les coiffures féminines plus courtes, les salons où l'on danse, salons photos où geishas et samouraïs posent pour les touristes étrangers qui affluent comme "des nuées de sauterelles", tout cela accompagne un développement industriel mené à un rythme effréné. Et donc, être un enfant japonais à cette époque, c'est découvrir l'éducation à l'occidentale, avec des manuels scolaires très didactiques, très complets, exposant les différentes espèces de plantes, d'animaux, sans pour autant renier la culture japonaise. Ces estampes sont comme toujours d'une grande précision de trait, il faut passer du temps pour apprécier les détails de dizaines de scènes domestiques, de ces enfants qui jouent. Certains de ces jeux sont universels, comme courir à cloche-pied, marcher sur l'ombre de son camarade, essayer d'attraper des libellules, ou faire du coloriage. D'autres sont plus insolites, comme ces jeux autour du sumo : une planche de papier permet de découper des figurines recto-verso de lutteurs de sumo, le cercle d'affontement, les arbitres. Après création du lutteur, les deux enfants joueurs tapaient sur la table pour renverser le sumo de papier adverse et l'emporter. Une estampe très instructive montre également des enfants participant à la cueillette du thé vert à Uji, près de Kyôtô, on voit qu'il s'agit de Kabusecha, ces plantations recouvertes en fin de culture par un voile pour leur procurer une mi-ombre permettant de développer la saveur umami. La même série instruit les enfants sur la pêche à la sardine, la culture du ver à soie ou l'exportation par conteneurs maritimes. Et deci-delà, un chat pointe son nez, comme souvent dans la vie japonaise.
Un très bel ouvrage, en souvenir d'une passionnante exposition retraçant des scènes parfois émouvantes d'un monde aujourd'hui largement disparu...