Je sors enfin de ma PAL ce très beau roman que je souhaitais lire depuis sa sortie, tout en craignant qu'il soit trop larmoyant pour moi.
C’est donc au petit matin, le jour à peine levé, que j'ai rencontré Simon Limbres, la vingtaine fougueuse, ayant tout juste découvert l’amour et, surtout, passionné de surf. Au retour d’une séance matinale éreintante dans les vagues glaciales, Simon et deux amis ont un accident de voiture. Simon n’avait pas de ceinture dans ce vieux modèle de van qui les transportait, il se trouve en coma dépassé avant d’arriver à l’hôpital.
Démarre dès lors un drôle de ballet : Celui des gestes médicaux, de l’annonce aux parents, de l’effondrement. Et des décisions. Quelles décisions, puisque Simon est mort ? Et s’il est mort, pourquoi une machine le maintient-elle encore en vie, pourquoi son cœur bat-il encore ?
C’est bien sûr toute la question du don d’organe, car il n’est pas question de brader l’intégrité du corps humain encore chaud au nom d’autres vies humaines. Si, en théorie, le fait que la victime n’ait pas laissé de consigne vaudrait acceptation, il s’agit pour les médecins de recueillir l’assentiment des proches qui connaissaient le mieux la victime afin, non seulement, de respecter sa volonté, mais également de ménager la famille qui doit faire face au difficile moment du deuil.
Il n’est pas évident, pour les parents de Simon, de concevoir que leur fils est réellement mort alors que son cœur bat toujours, et ce, uniquement en vue de lui prélever ses organes pour les donner à des inconnus qui en ont besoin… Ses parents doivent affronter de nombreux sentiments contraires en très peu de temps, et il s’agit pour les Médecins de ne pas les brusquer, tout en essayant de les amener à agir au mieux pour les autres patients sur le point de mourir, que ces organes pourraient sauver.
« Que faire Nicolas?
Enterrer les morts et réparer les vivants. »
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Verdict : Je suis soulagée de ne pas avoir trouvé dans cette lecture un livre qui fait pleurer sur le sort des parents ou des patients en attente d'une greffe, mais plutôt un roman doux et humain dont le mérite est de nous sensibiliser à cette question du don d'organes.
En seulement 300 pages, Maylis de KERANGAL nous offre les points de vue des divers intervenants, parvient à nous livrer des bribes de leurs vies respectives, un aperçu de leurs choix, de la psychologie des receveurs également ; Claire, par exemple, atteinte d’une myocardie, doit accepter de « jeter » son propre cœur pour sentir battre celui d’un inconnu – dont elle ne saura jamais rien à part qu’il est mort pour qu’elle vive, et qu’elle ne pourra jamais remercier – dans son propre corps. L’auteure nous montre l’imbrication de toutes ces vies (victimes, familles, patients, personnel hospitalier) dont les chemins se croisent au gré du destin.
Comme les parents de Simon tentent de respirer entre deux pensées qui se bousculent, le lecteur cherche à trouver son souffle au fil des phrases longues de l’auteure, à la fois filantes et saccadées. A bout de souffle, on cherche un sens à tout cela avec les parents de Simon, on croise les doigts pour Claire, dont le cœur est sur le point de lâcher et qui n’est pas à l’abri d’un rejet... ; on observe avec recul la salle d’opération qui, une fois vidée de ses intervenants, ressemble à un champ de bataille.
Grâce à ce récit aussi empathique envers tous les protagonistes que sont les victimes, patients, familles, médecins, que documenté sur la procédure médicale du don d’organes, on englobe en en clin d’œil les tenants et aboutissants de ce moment crucial, à la croisée des chemins de ces multiples vies. Et l’on espère que chacun, à sa manière, s’en sortira comme il pourra. Un très beau roman qui ne cherche pas à s’appesantir mais a le mérite d’attirer l’attention sur ce sujet important.
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