AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782360133185
291 pages
Riveneuve éditions (17/09/2015)
1.17/5   3 notes
Résumé :
Un roman sous forme de road-movie, convoquant des registres très diversifiés : quête amoureuse, roman d'initiation, roman historique, ... L'auteur donne des clés pour mieux comprendre notre monde moderne, et des événements aussi marquants que la chute de Saigon en 1975, le conflit entre Israël et Liban en 1982, etc. Une écriture rythmée et vivante, empruntant au carnet de voyage. Ce roman s'inscrit dans une collection aujourd'hui parfaitement identifiée : "Littératu... >Voir plus
Que lire après La praxis du Docteur YovVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
A l'Ouest, il y a du nouveau avec
La Praxis du Dr Yov


Nous voici relancés dans un nouveau voyage avec Đỗ Kh.. le Vietnam a toujours été présent dans ses romans écrits en Français. La Praxis du Dr Yov ne déroge pas à cette règle car ce fut à cause des évènements survenus durant les derniers jours de son séjour au Vietnam que Bruce, le personnage principal du roman, s'était engagé dans une odyssée à la Télémaque qui le conduisit à Beyrouth, à l'Ouest de Saigon.

Bruce recherche-t-il vraiment Lan et ensuite Zena? Où est-ce une raison pour meubler sa vie terne («rien d'intéressant était la marque déposée de son existence»), désoeuvrée et sans but. Il mène une vie de «bụi đời» (‘poussières de vie'), de vagabond, néanmoins international! Pas de vrai boulot: seulement soit prétendu soit temporaire.

Cadrons d'abord les principaux contexte historique et lieu géographique du livre.

1982 est une année charnière de ce qu'on appelle la Guerre Civile du Liban (1975–1990).

Beyrouth, ancien petit port phénicien devenu port de commerce, important centre culturel de l'Est de la Méditerranée et ville de villégiature pour les cheiks, a été séparé par une ligne dite ‘Verte': à l'Ouest, c'est le Beyrouth des musulmans avec les combattants Palestiniens et le commandement de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et l'Est demeure le domaine des chrétiens. L'intervention israélienne le 6 Juin 1982 (Opération Paix en Galilée) conduit le Tsahal jusqu'à Beyrouth huit jours plus tard. L'Ouest de Beyrouth se trouve donc encerclé par les Israéliens avec le soutien logistique des Forces libanaises/Phalangistes.

Les évènements relatés dans le roman s'écoulent entre le début de la présence israélienne à Beyrouth et avant le massacre de Sabra et Chatila, bouclés par les Israéliens et nettoyés par les Phalangistes.

Beyrouth, après sept ans de conflits, se trouve fortement endommagé, vidé d'une partie de sa population privilégiée qui s'était rendue dans des lieux plus paisibles en Europe, dans les pays du Golfe ou au Liban même. Toutefois la ville est envahie par des réfugiés musulmans qui pensent être plus en sécurité dans l'Ouest de Beyrouth. Bruce débarque donc dans une ville où tous les services publics urbains ne fonctionnent plus correctement et les habitants acceptent cet état des choses avec fatalisme et humour:

«L'on s'était plaint tout l'après-midi de la fumée causée par le petit incendie, car quand même, la CBU avait dû bousculer quelque bonbonne de gaz de cuisine mal branchée. Des pompiers étaient venus et avaient déroulé leur tuyau, avant de repartir car l'eau n'arrivait pas à la borne. La foule avait bien rigolé comme s'il s'agissait d'une farce réussie et les pompiers en question, vexés. de mauvais joueurs car on les avait pourtant prévenus qu'il n'y avait pas d'eau dans le quartier.»

Néanmoins dans cet environnement incommode et ardu, la coquetterie demeure plus vivante que jamais, une façon de lutter contre le présent:

«… Marwan insistait sur son apparence malgré les conditions. Il s'habillait toujours en chemisette et en pantalon à pinces autant que faire se peut et poussait la coquetterie jusqu'à sortir son pistolet quand cela était possible pour éviter de déformer ses poches.»

L'Ouest de Beyrouth est investi par des milices palestino-progressistes où les alliances se nouent et se dénouent de façon aussi imprévisible que les bombardements israéliens, phalangistes ou entre milices. Et les signes de vie ordinaire deviennent des annonciations de répits momentanés:

« Hoda sourit. C'était une meilleure nouvelle qu'une énième annonce de cesser le feu par Philip Habib. Une fille et puis deux, c'était mieux que de compter les obus. Un chien dans la rue, trois personnes qui buvaient du café sur leurs seuils, quatre enfants qui jouaient au foot et ce serait la paix revenue, presque.»

Bruce est le produit d'un grand métissage biologique et culturel: progéniture d'une bordelaise et d'un américain du Middle West d'origine lituano-polonaise. Né en Allemagne, il a beaucoup voyagé malgré ses moyens limités, possédant une grande culture, une connaissance toute théorique des armes de combat et une expertise toute pratique de la photographie qui est son prétendu métier. «Bruce était internationaliste comme il était photographe, les poings dans les poches et à mi-temps» et «Bruce se considérait comme un citoyen du monde».

Quelques jours avant la chute de Saigon, fauché, Bruce s'est vu proposé des fiançailles en blanc pour faire sortir une jeune fille, Lan, ses parents et son frère du Vietnam, projet qui n'a pas pu se concrétiser. de retour aux Etats-Unis, Bruce passe son temps à rechercher Lan dans les différents quartiers vietnamiens du pays tout en envoyant des avis de recherche aux différentes organisations jusqu'au jour où il rencontre Zena, une jeune libanaise, dans une manifestation de gauche à Los Angeles. Une relation s'en est suivie et puis Zena soudainement disparaît dans la nature. Alors Bruce décide de se rendre à Beyrouth à sa recherche (peut-être pour ne pas avoir à le faire dans les différents quartiers libanais aux Etats-Unis). Mais une fois arrivé à Beyrouth, il oublie rapidement celle qu'il présente comme sa fiancée pour porter son attention sur d'autres jeunes femmes, surtout sur Hoda qui l'a aidé et hébergé selon la tradition d'hospitalité du Moyen-Orient.

Il semble que pour Bruce l'interruption soudaine et totale de sa relation avec une femme devient une raison de meubler sa morne existence et de vivre. Son histoire avec Lan, Zena et Hoda pourrait se résumer dans ces deux vers du compositeur-poète vietnamien, Trịnh Công Sơn:

« Tu arrives sans crier gare
Sans raison tu disparais »
(Không hẹn mà đến
Không chờ mà đi)

Bruce a été exposé aux évènements historiques majeurs sans toutefois y retirer quoi que ce soit de notable. Il se dit photographe et se pavane avec des appareils de photo différents des autres photographes sans accoucher une photo qui puisse le rendre célèbre ou lui procurer quelques pactoles. C'est Fabrice del Dongo perdu à Waterloo.

Toutefois il sait en profiter pour tirer quelques avantages de temps à autre de ces moments:

« Vous n'étiez pas au Vietnam? demanda Bruce.
Non, personne de cette assistance n'avait ‘fait' le ‘Nam'. Cela rehaussa instantanément le statut de Bruce dans l'assemblée. Il méritait désormais pleinement le rosé qu'on lui avait accordé par pure gentillesse. ‘J'étais à la chute de Saigon' dit Bruce modestement.»

Comme si Fabrice del Dongo ressert à tout bout de champ qu'il a entendu le maréchal Ney ‘gourmander' durant la bataille de Waterloo pour se faire intéressant. La proximité de la célébrité peut parfois servir temporairement à ceux qui n'ont pas eu la chance d'être célèbre.

En plagiant Stendhal parlant justement de Fabrice, notre Bruce est «fort peu héros» dans le livre. Il apparaît, toutefois à mes yeux, non dépourvu d'intérêts avec son côté tragique car Bruce a, selon le mot de Georg Lukacs, une «âme plus large et plus vaste que tous les destins peuvent lui offrir: elle … se tient, dans sa confiance spontanée en elle-même, pour la seule réalité, pour l'essence même du monde»

Les vingt-deux chapitres du livre sont vingt-deux récits avec un enchaînement logique du conteur Đỗ Kh. qui manie l'humour, la nonchalance et parfois le cynisme avec une désinvolture toute naturelle et non dépourvue de poésie. Et les éclairages sur les personnages s'appuient essentiellement sur la technique du monologue intérieur.

On peut regretter que la relation entre Bruce et Hoda (son hôtesse à Beyrouth) ait été quelque peu «étouffée» (surement par le bruit des obus), et qu'elle n'ait pas été plus développée par l'auteur. le clair-obscur et le «sfumato» ne conviennent pas à tout le monde et sans dévoiler le dénouement, la fin semble fortuite et laisse au lecteur délicat le loisir de suppléer lui-même aux carences du romancier.

Ecrire pour Đỗ Kh. apparaît comme une amusante conversation avec cette «maîtresse de dix-huit ans», qu'est la littérature selon Guez de Balzac. Malgré ses vagabondages géographiques et culturels, je trouve que pour Đỗ Kh. «la vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie réellement vécue, c'est la Littérature», pour emprunter ce mot de Proust dans le Temps retrouvé. Car elle lui mène sur le chemin de la compréhension de l'homme et des univers dans lesquels il évolue. Et il les a décrits avec beaucoup de poésie, d'humour et de précision dans ce livre.

Comme avec Tintin, je ne doute point que nous ayons tantôt un «Bruce en Afghanistan», un «Bruce en Irak» ou un «Bruce en Syrie».

PHẠM Tùng Cương
Août 2015
Holmdel, NJ
USA
Commenter  J’apprécie          40
Ce roman nous propose les pérégrinations d'un journaliste de guerre, Bruce, un personnage un peu paumé autant professionnellement que sentimentalement. Après une histoire d'amour ratée pendant sa couverture de la guerre du Vietnam, il se retrouve en pleine guerre du Liban à la recherche d'une jeune femme pour ne pas laisser s'échapper un second amour potentiel. On est dans la pathologie mentale mais la volonté de Bruce à poursuivre ses chimères, jusque dans un pays en plein chaos, a quelque chose de plaisant. Il poursuit des rêves, c'est absurde mais il vit pleinement!
L'histoire foisonne de personnages, parfois truculents, l'état de guerre aidant, c'est le point fort du livre à mon avis car le personnage de Bruce est plutôt amorphe, chimères mises à part. le livre est bien écrit. le point faible réside pour moi dans les trop nombreuses références culturelles. On ne compte plus le nombre de modèles d'armes cités cité dans le récit. Plus généralement, l'auteur qui a du beaucoup voyagé, manie une culture large, mondiale, souvent dans le milieu du spectacle, plutôt anglo-saxonne. Personnellement, je n'ai pas compris un grand nombre de ces références ce qui a surement nuit à mon appréciation du livre. Je ne suis qu'un modeste gascon qui a rarement quitté son pays, les quartiers de New york ou de San francisco ne m'évoque pas grand chose...
Commenter  J’apprécie          10
Bruce, jeune journaliste, part dans Beyrouth en guerre pour retrouver sa petite amie, après avoir déjà perdu une fiancée au Vietnam. le résumé m'avait paru intéressant mais je n'ai pas du tout accroché à ce roman. J'ai eu du mal à suivre l'enchaînement des événements, et je pense que je n'avais pas toutes les connaissances culturelles pour comprendre le texte (par exemple la précision des armes ou du matériel de photographie, très présente). Je n'ai pas trop aimé le style de l'écriture, mais j'ai quand même réussi à finir ce livre.
Commenter  J’apprécie          10
Nous suivons donc Bruce, un pseudo-photographe qui prend prétexte de sa profession et de ses amours pour voyager – un peu – et glander – beaucoup – entre le Vietnam, la Californie et Beyrouth, de conflits en conflits.

Le roman baigne dans une ambiance d'indécision et de confusion propre à l'époque et au contexte. D'ailleurs l'histoire m'a semblé assez embrouillée, surtout au début. On passe d'une époque et d'un lieu à d'autres sans crier gare, on suit tour à tour un ou deux personnages auxquels je n'ai jamais réussi à m'attacher ou m'intéresser un minimum.

Le style est assez particulier, ce qui rend difficile l'immersion dans l'histoire. le texte est truffé de références et d'allusions dont 90% me sont totalement passées au-dessus de la tête et m'ont donné l'impression d'être complètement inculte. L'auteur s'invite assez souvent dans le récit pour faire des commentaires ou des blagues, ce qui ne facilite pas non plus la lecture.

Ajoutons à cela une ponctuation parfois aléatoire et des précisions détaillées sur les marques et modèles des appareils photo et armes diverses et vous comprendrez à quel point ma lecture a pu être pénible. Même en ne lisant que 2-3 chapitres à la suite, j'ai trouvé extrêmement fatigant et décourageant de lire ce roman, malgré son pitch original.

En bref, ce roman n'était clairement pas fait pour moi et je n'ai pas du tout apprécié ma lecture. J'ai cru ne jamais en venir à bout et je ne suis même pas sûre d'avoir tout compris. En grande partie à cause du style et des choix narratifs, qui m'ont laissée perplexe.
Lien : https://bienvenueducotedeche..
Commenter  J’apprécie          00

Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Elle va me chanter une chanson de Victor Heredia, se dit Bruce. Mais en Argentine, ils ne tiraient pas sur les gens du peuple. Ils les enlevaient pour les jeter vivant en dehors des avions. C’était une tradition des colonels. Et voilà la Rio de la Plata ! Elle était par ailleurs, trop claire de teint pour une Brésilienne, même si les forces armées là-bas savaient elles aussi manier du fusil devant la foule pacifique. Mais ce fessier, difficile à dire. Il n’était pas ferme et assez remonté, plutôt plat, et Bruce crut pouvoir deviner la naissance du coccyx. Non. Pas brésilien. Alors, elle serait…
Commenter  J’apprécie          40
"On évite pas les balles, ce sont elles qui vous évitent"
Commenter  J’apprécie          30

autres livres classés : road movieVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (5) Voir plus



Quiz Voir plus

Voyage en Italie

Stendhal a écrit "La Chartreuse de ..." ?

Pavie
Padoue
Parme
Piacenza

14 questions
601 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , voyages , voyage en italieCréer un quiz sur ce livre

{* *}