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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Un récit âpre et révoltant pour une lecture à plusieurs niveaux pour les lecteurs que nous sommes aujourd'hui, elle sera culturelle et sociale et nous obligera à un certain recul dû à l'évolution des consciences.
Les événements décrits ici datent d'il y a un siècle et appartiennent à un passé désormais révolu dans la majorité des pays, cela-dit il est possible et probable que perdurent ce genre de pratiques à l'abri des regards dans certains coins reculés du monde.
Il s'agit d'un réquisitoire sur la plus obscène des recherches de profits, celle qui se fait au détriment de la vie des hommes au nom et sous couvert d'un idéal patriotique dévoyé, l'exploitation de l'homme par l'homme dans des proportions impensables aujourd'hui.
Le contexte d'un bateau-usine de par son isolement permet de plus une véritable prise en otage d'autant plus efficace puisque perpétrée sur des hommes n'ayant même pas l'idée qu'ils puissent s'y opposer.
On suit la lecture de ce quasi documentaire avec une fascination teintée d'incrédulité et pourtant on ne doute pas un seul instant qu'il s'agit de la vérité.
S'il y a une chose qui ne cesse de me désappointer c'est ce paradoxe japonais, comment une telle culture peut-elle être capable de tels extrêmes ?
Il y aura tout de même une morale à ce triste épisode qui sera la naissance d'une idée révolutionnaire dans l'Empire du soleil levant, celle des débuts de la lutte ouvrière.
Il s'agit aussi d'une rencontre avec un homme de conviction, Takiji Kobayashi sera condamné pour un extrait de ce livre, il sera aussi assassiné pour ce qu'il représentait, il avait 29 ans.
Plébiscité par plusieurs babéliamies, ce titre avait rejoint ma PAL et je les remercie au passage pour cette lecture instructive.
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« C'est parti ! En route pour l'enfer ! »
Ainsi commence ce court roman de 160 pages, qui suffisent effectivement à vous y emmener.


Japon, 1929. Les « fiers navires glorieusement estropiés lors de la guerre russo-japonaise où ils avaient été bateau-hôpitaux ou convoyeurs de troupes, avaient après la guerre été mis au rebut comme des entrailles de poissons, et n'étaient plus aujourd'hui que l'ombre d'eux-mêmes ».


Aujourd'hui recyclés en bateaux-usine, ils servent les profits de patrons sans scrupules exploitant, comme des bêtes, le prolétariat extrêmement pauvre et soumis. Entassés dans « le merdier », ces dortoirs où les conditions de vies sont à vomir, les employés sont chargés de pêcher le crabe et de le mettre en boîte, dans des conditions météorologiques effroyables de la mer du Kamtchatka.


Sur ces cercueils flottants même pas rénovés, pour économiser chaque centime de l'entreprise, n'existe aucune humanité puisque les patrons ne les « considère[nt] pas comme des êtres humains », mais comme de la main d'oeuvre devant se sacrifier pour l'autosuffisance de la patrie et son honneur : des corps à martyriser quand les cadences sont jugées insuffisantes.


A peine nourris, malades, pourrissant vivants et parfois mourant dans leur foutre et leurs excréments, parmi les poux, les puces et les punaises, ils assistent avec écoeurement à la vie de château de l'équipage dirigeant.


Mais dans ce Germinal maritime, aussi cru que poétique, la colère gronde, même si le vent emporte sa rumeur. Si seulement, cette fois, on pouvait récolter ce l'on sème…


Comme l'a écrit, sur la première page de ce roman, le babelami que je remercie pour l'envoi, ce récit aussi noir que la couverture le laisse présager est « Dur mais nécessaire ». Si vous avez aimé A La Ligne, de Joseph Ponthus, ou Germinal, d'Emile Zola, vous ne pourrez que vous intéresser à ces bateaux-usines qui prouvent malheureusement, si cela était encore nécessaire, que l'homme peut-être une ordure avide de pouvoir et d'argent d'où qu'il vienne, et quelle que soit l'époque.
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« C'est parti ! En route pour l'enfer ! »

Il existe des livres qui ont des résonances particulières et celui-ci en fait parti. Tout au long de ma lecture, j'ai pensé à son auteur, Kobayashi Takuji, mort en 1933 à l'âge de 29 ans, torturé par la police pour ses convictions politiques.
En lisant ce livre qui ressemble davantage à un récit documentaire qu'à une fiction romanesque, un sentiment de malaise et de dégoût m'a submergée. Cette histoire est horrible et affreusement sinistre.
*
Les bateaux-usine étaient des épaves laissées à l'abandon de nombreuses années avant d'être revendues « telles des prostituées syphilitiques dissimulant habilement leurs disgrâces sous d'épais fards ».
Dans les années 1920, des hommes embarquaient sur ces immenses bateaux-usines pour de longs mois de pêche dans les eaux glaciales de la Mer du Kamtchaka.
Ce roman décrit et dénonce les conditions de vie misérables, inhumaines, intolérables de ces hommes employés à mettre en conserve du crabe, produit de luxe destiné à l'exportation pour un salaire de misère.
« Dans la pénombre, des hommes grouillaient comme des porcs. A l'odeur aussi, une odeur à faire vomir, on se serait cru dans une soue. »
*
Ils sont pauvres, souvent d'anciens paysans, travailleurs miniers, terrassiers sur les chantiers de construction de routes ou de voies de chemin de fer, ou étudiants désargentés.
Une vie rude les attend comme pêcheur, marin, machiniste ou matelot.
Ils n'ont pas de nom. Ils ne sont rien.
Leur vie ne compte pas.
Seul compte le profit.

Sur des bateaux-épaves, ils affrontent le froid, les tempêtes, des cadences de travail infernales qui épuisent les corps, la maladie, la faim, la promiscuité, les châtiments corporels, les agressions sexuelles, les humiliations, le manque d'hygiène, la pestilence de leur dortoir.
« Notre corps, c'est rien de plus que des feuilles de mûrier pour nourrir les vers à soie, il faut qu'il soit sacrifié ! »

La mort les accompagne.
« - Est-ce qu'on ne pourrait pas le ramener à Hakodate, quand même… Regardez la tête qu'il a ! On dirait qu'il veut nous dire « J'veux pas y aller, me faites pas plonger dans l'eau glacée de la mer… » Même morts, on est pas bien lotis, nous autres… »
*
Kobayashi Takuji décrit avec justesse et précision la vie de ces hommes, leurs conditions de travail dégradantes, le danger permanent, l'ambiance délétère, mais il se dégage également un esprit de solidarité et d'unité.

Le style est très descriptif, direct, froid. Mais aussi, contrairement à ce que l'on pourrait penser, j'y ai trouvé une écriture poétique. Chaque page s'imprègne de colère, de ressentiment face à l'exploitation humaine. Il s'en dégage beaucoup de force et d'authenticité.
*
Ce roman est un récit engagé issu du courant de la littérature prolétarienne et censuré à sa parution en 1929. Tombé dans l'oubli pendant des décennies, ce roman a trouvé une seconde jeunesse grâce à la sortie d'une adaptation en roman graphique.
Après les superbes critiques de HordeduContrevent et LaBiblidOnee qui m'ont convaincue de lire ce petit livre d'environ 150 pages, c'est à mon tour de vous encourager à le lire.
« le bateau-usine » est une lecture dure, révoltante, mais importante.
Un livre rare et précieux.
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1929, les eaux du Kamtchatka que se disputent Russes et Japonais dont le Hakkô-maru parti pêcher le crabe.

Inhumaine vie à bord du bateau, pêcheurs et ouvriers logeant dans 'le merdier' (qui porte bien son nom), soumis à d'immondes conditions de travail, aux cruelles punitions corporelles de l'intendant Asakawa. Si certains acceptent ce sacrifice pour la gloire du Japon (et pour les bénéfices des actionnaires), la propagande communiste soviétique commence à germer.

Roman interpellant d'autant plus que ce genre de littérature prolétarienne redevient d'actualité dans un Japon où se dégradent les conditions de travail.
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Un livre puissant qui nous fait découvrir les conditions de travail et de vie terrifiantes d'un équipage de crabier japonais dans les années 1920.

La pêche au crabe dans les eaux riches mais glacées du Kamtchatka est alors une des principales ressources de l'Empire du soleil levant. Cette activité constitue un tel enjeu, dans un contexte de fortes tensions avec la Russie voisine, qu'elle fait l'objet d'une stratégie d'industrialisation à outrance. Des bateaux-usines pourris naviguent sans relâche, exposant à tous les dangers marins, machinistes et ouvriers, sur une mer souvent démontée...
Les ouvriers travaillent jusqu'à épuisement dans des conditions d'hygiène effroyables, sous la coupe d'un intendant tyrannique, dont on sent en permanence la présence pesante et inquiétante (Asakawa, qui est, curieusement en tant que "méchant", le personnage central de cette histoire)...

Un beau texte, dont le style semble étonnamment très actuel, qui frappe par la crudité des mots, la brutalité des situations, et qui a le mérite de nous faire découvrir un bout d'histoire japonaise, tout en dévoilant quelques traits de la mentalité nippone.

Ce récit sonne comme un prétexte à dénoncer les abus du capitalisme industriel exploiteur, du productivisme...et comme un véritable manifeste pour la libération de l'homme. Kobayashi luttera pour des idées révolutionnaires, communistes, soutenant des révoltes d'ouvriers et paysans, ce qui lui vaudra de mourir en 1933, à 30 ans, sous la torture des autorités gouvernementales japonaises, alors même que les idées réactionnaires et ultra-nationalistes s'imposent et mèneront le Japon à la catastrophe que l'on sait.

L'auteur deviendra culte sur son île d'origine d'Hokkaido, et cet ouvrage est redécouvert par la jeune génération japonaise désenchantée, en perte de repères face à la crise économique et politique qui frappe le pays.




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Roman poignant sur la condition ouvrière au Japon dans les années vingt, alors que le bolchévisme vient à peine d'être victorieux chez les 'Russkofs'.

Véritable Malraux de la littérature nippone, cet auteur, vu son succès, a vite été rattrapé par la police secrète japonaise et est mort sous la torture.

Ce bateau-usine est son second livre et il nous fait aimer ces pêcheurs frustres, dont l'humanité est oubliée au profit des bénéfices à amasser pour les capitaines de l'industrie.

Un très beau livre, sans être un chef-d'oeuvre de la littérature.
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Roman social âpre, je découvre des facettes de la littérature japonaise qui cette fois ne fait pas dans la demi-mesure et dans la retenue.

Les bateaux de peche de tailles respectables partent pour de longues campagne et les conditions de vies y sont souvent difficiles, le travail y est éreintant la faute aux quarts qui peuvent s'éterniser, surtout quand les conditions météorologiques ne sont pas au beau fixe..

Ça c'est encore valable aujourd'hui, et je me suis demandé ce que c'était alors, et décrit par un japonais, nation de pêcheur, qui a ça dans le sang, et qui malheureusement chasse toujours la balaine de nos jours.

Bon, la c'est le crabe qui se fait pêcher, et en quantité astronomique, car c'est un peu la course entre bateaux concurrents qu'ils battent pavillon japonais, ou que ce soit les ruskofs, ennemis invétérés de l'empire du soleil levant.. Les Kouriles qu'ils se disputent toujours aujourd'hui y étaient déjà pour quelquechose.

Après avoir manipulé un livre à la couvertueuse obscure et sublime, nous allons embarquer dans l'enfer quotidien, l'exploitation de la misère humaine, fin des années 20 au Japon, et sur un bateau, les 35h et le CHSCT sont un fantasme plus qu'extravaguant auquel ne se seraient jamais abandonné les hommes à bord.

Ici la productivité est cadencée à coups de savate, la pause déjeuner c'est du riz mal cuit et du poisson avarié, les gars sont menés à la baguette à coups de violence extrême et sont terrorisés et affaiblis à un point inouï.

Mais la résilience nait parfois des cas les plus désespérés..

J'ai été transporté après un petit temps d'acclimatation, comme quand on remet les pattes sur un bateau depuis longtemps, cette navigation sur ce navire épave mené par le capitalisme au moyen de l'exploitation de la misère humaine m'a secoué, et lire le destin tragique de l'auteur qu'on a fait taire pour toujours de la pire des façons à même pas 30 printemps m'a écœuré.

La plume est sobre mais terriblement pragmatique.

C'est un ouvrage important qui a fait se soulever bien des lecteurs et ce roman social mérite d'être lu car il fait la part belle à la force de l'unité.

Sombre mais percutant, malaisant mais nécessaire !
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Ce roman fait partie des oeuvres publiées lors de l'âge d'or de la littérature prolétarienne au Japon. On y dénonce les abus perpétrés aux ouvriers par les patrons de grosses compagnies et même des gouvernements.
Ici les victimes du système capitaliste sont de pauvres pêcheurs engagés sur un bateau usine. Et ce “bateau” était une usine délabrée avant d'être un navire, donc la loi sur la navigation ne s'y appliquait pas. Pour un patron, la mort de quelques travailleurs n'était rien, car tous les moyens sont bons pour obtenir le plus de yens possible …

Après le succès de ses premiers livres, Kobayashi se voit mis sous surveillance par l'État. À l'époque (années 30), les mouvements de gauche étaient sévèrement réprimés et “Le bateau-usine” fut un des romans censurés dès sa publication.

Un roman que j'ai trouvé très dur, où l'on sent les odeurs nauséabondes, la saleté, la faim et l'épuisement, … C'est triste et noir … on ne peut qu'avoir de l'empathie pour les ouvriers et une aversion pour les supérieurs qui s'acharnent sur eux.
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Le bateau-usine. Je peux dire que la lecture de ce roman m'a été soufflée par les babéliotes dont les billets invitaient, pour ne pas dire imposaient de le lire. Je les remercie.

C'est fait.
J'ai souffert physiquement de cette lecture d'une grande qualité narrative mais épouvantable de descriptions du martyr subi par ces hommes. Je resterai modeste tant les chroniques de tous les lecteurs sont exhaustives et dithyrambiques.
Néanmoins ces bateaux usines, saisies de guerre aux Russes, sont le théâtre (ou le huis clos) de maltraitances, brimades, châtiments corporels, tortures orchestrées par un intendant sans foi ni loi.

Pour les conditions de vie à bord Kobayashi nous livre avec un réalisme percutant p 133 ".......une succession de scènes fortes visuelles plus cinématographiques que narratives." Crasse, croûtes, punaises, poux, béribéri, pestilences des corps faméliques et des crabes en décomposition .
Tous les sens sont convoqués : p 134 "Le lecteur perçoit la puanteur omniprésente, le goût et la texture des aliments, les sifflements et craquements du navire, les voix des hommes résonnant dans la coque, le froid et les démangeaisons". Ce roman se mérite !

L'auteur est très documenté par une étude approfondie de nombreux articles, relatant les événements tragiques à bord de ces bateaux. Il est à l'origine de la littérature prolétarienne japonaise et dont nous apprenons p 126 que Henri Barbusse a exercé une certaine influence sur cette littérature.
Toutes ces horreurs conduisent à une inévitable révolte.

Roman longtemps oublié car interdit à sa sortie, mais diffusé clandestinement, Kobayashi est arrêté, torturé puis assassiné en 1933, à 29 ans. Sa mort n'est pas passée inaperçue internationalement et dénoncée entre autres par un écrivain chinois Lu Xun et Romain Rolland en France (voir postface).

Heureusement il connaît un nouveau succès depuis 2008 grâce à un éditeur et des écrivains, libraires.... très inspirés, de nous permettre de découvrir ce récit.

Pour finir je cite la traductrice Evelyne Lesigne-Audoly : "Il se serait certainement réjoui de savoir que, quatre-vingt ans plus tard, sa prose violente et visuelle saurait conquérir un si large public."
Hommage posthume à ce très jeune et talentueux auteur.
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Je ne pensais pas apprécier cette lecture en entamant ce petit livre. La succession de personnages de phrase en phrase me rappelait Certaines n'avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka, roman auquel j'avais peu accroché en raison du style narratif impersonnel, du choix de raconter un collectif sans passer par l'individu. Dans le bateau-usine également, les personnages passent au second plan, c'est le collectif qui prime. Mais rapidement, on est embarqué sur le navire, en observateur de la misère humaine. Travail au-delà de la limite de l'épuisement, violences physiques, conditions d'hygiène déplorables… Il faut avoir le coeur bien accroché pour lire la maltraitance que subissent les ouvriers au nom du profit. Une lecture dure mais importante.
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