Citations sur Roberto Zucco (suivi de) Tabataba - Coco (46)
Zucco. -(...) C'est une rude tâche d'être transparent ; c'est un métier; c'est un ancien, très ancien rêve d'être invisible. Je ne suis pas un héros. Les héros sont des criminels. Il n'y a pas de héros dont les habits ne soient trempés de sang, et le sang est la seule chose au monde qui ne puisse pas passer inaperçue. C'est la chose la plus visible du monde.
La Mère. - (..) Pourquoi cet enfant, si sage pendant vingt-quatre ans, est-il devenu fou brusquement ? Comment as-tu quitté les rails, Roberto ? Qui a posé un tronc d'arbre sur ce chemin si droit pour te faire tomber dans l'abîme? Roberto, Roberto, une voiture qui s'est écrasée au fond d'un ravin, on ne la répare pas. Un train qui a déraillé, on n'essaie pas de le remettre sur ses rails. On l'abandonne, on l'oublie. Je t'oublie, Robeto, je t'ai oublié.
MAIMOUNA (elle s'accroupit et pleure). - Je ne veux pas d'un amoureux, je ne veux pas d'un mari. Un amoureux, c'est comme le soleil, plus il chauffe, plus il fait le désert autour de vous.
Mon sang à moi, je m'en fous, il ne m'appartient pas. Tandis que celui de mon fils, c'est moi qui le lui ai fichu dans ses fichues veines, c'est mon affaire, c'était à moi, on n'a pas à répandre mes affaires n'importe comment, dans un jardin public, au pied d'une bande d'imbéciles. Je n'ai plus rien à moi maintenant. N'importe qui marche dans la seule chose qui m'appartenait. Cela va être nettoyé demain matin par les jardiniers. Qu'est-ce qui me reste, maintenant, qu'est-ce qui me reste ?
Robert Zuccp
Je ne suis pas un héros. Les héros sont des criminels. Il n'y a pas de héros dont les habits ne soient trempés de sang, et le sang est la seule chose au monde qui ne puisse pas passer inaperçue. C'est la chose la plus visible du monde. Quand tout sera détruit, qu'un brouillard de fin du monde recouvrira la terre, il restera toujours les habits trempés de sang des héros.
Les héros sont des criminels. Il n'y a pas de héros dont les habits ne soient trempés de sang, et le sang est la seule chose au monde qui ne puisse pas passer inaperçue. C'est la chose la plus visible au monde.
L'INSPECTEUR. – Je suis triste, patronne. Je me sens le cœur lourd et je ne sais pas pourquoi. Je suis souvent triste, mais, cette fois, il y a quelque chose qui cloche. D'habitude, lorsque je me sens ainsi, avec le goût de pleurer ou de mourir, je cherche la raison de cet état. Je fais le tour de tout ce qui est arrivé dans la journée, dans la nuit et la veille. Et je finis toujours par trouver un événement sans importance qui, sur le coup, ne m'a pas fait d'effet, mais qui, comme une petite saloperie de microbe, s'est logé dans mon cœur et me le tord dans tous les sens. Alors, quand j'ai repéré l'événement sans importance qui me fait tant souffrir, j'en rigole, le microbe est écrasé comme un pou par un ongle, et tout va bien. Mais aujourd'hui j'ai cherché ; je suis remonté jusqu'à trois jours en arrière, une fois dans un sens et une fois dans l'autre, et me voilà revenu maintenant, sans savoir d'où vient le mal, toujours aussi triste et le cœur aussi lourd.
LA PATRONNE. – Vous tripatouillez trop dans les cadavres et les histoires de maquereaux, inspecteur.
L'INSPECTEUR. – Il n'y a pas tant de cadavres que cela. Mais des maquereaux, oui, il y en a beaucoup trop. Il vaudrait mieux davantage de cadavres et moins de maquereaux.
LA PATRONNE. – Moi, je préfère les maquereaux ; ils me font vivre et ils sont bien vivants
L'INSPECTEUR. – Il faut que je m'en aille, patronne. Adieu.
Zucco sort d'une chambre, ferme sa porte à clé.
LA PATRONNE. – Il ne faut jamais dire adieu, inspecteur.
L'inspecteur sort, suivi de Zucco. (p. 28)
UNE FEMME. — Moi, je ne pense qu'à l'enfant, je ne pense qu'à l'enfant.
UN HOMME. — Mais enfin, arrêtez avec votre enfant. C'est la femme qui a le pistolet sur la gorge.
UNE FEMME. — Oui, mais c'est l'enfant qui va souffrir.
LE BALÈZE. – À quoi tu réfléchis, petit ?
ZUCCO. – Je songe à l’immortalité du crabe, de la limace et du hanneton.
LE BALÈZE. – Tu sais, je n’aime pas me battre. Mais tu m’as tellement cherché, petit, que l’on ne peut pas encaisser sans rien dire. Pourquoi as-tu tellement cherché la bagarre ? On dirait que tu veux mourir.
ZUCCO. – Je ne veux pas mourir. Je vais mourir.
LE BALÈZE. – Comme tout le monde, petit.
ZUCCO. – Ce n’est pas une raison.
LE BALÈZE. – Peut-être.
ZUCCO. – Le problème, avec la bière, c’est qu’on ne l’achète pas : on ne fait que la louer. Il faut que j’aille pisser.
LE BALÈZE. – Vas-y, avant qu’il ne soit trop tard.
ZUCCO. – Est-il vrai que même les chiens me regarderont de travers ?
LE BALÈZE. – Les chiens ne regardent jamais personne de travers. Les chiens sont les seuls êtres en qui tu peux avoir confiance. Ils t’aiment ou ils ne t’aiment pas, mais ils ne te jugent jamais. Et quand tout le monde t’aura laissé tomber, petit, il y aura toujours un chien qui traîne par là pour te lécher la plante des pieds.
ZUCCO. – Morte villana, di pietà nemica, di dolor madre antica, giudicio incontastabile gravoso, di te blasmar la lingua s’affatica.
LE BALÈZE : – Il faut que tu ailles pisser.
ZUCCO : – C’est trop tard.
Le malheur ne demande pas de temps. Il vient quand il veut, il transforme tout en un instant.