Composé entre 1476 et 1494, resté inachevé, éclipsé dans la postérité par l'ouvrage de l'
Arioste,
Roland furieux, qui est une continuation du récit de Boiardo, le Roland amoureux est une vaste oeuvre en vers, un roman de chevalerie, d'amour et de guerre. le livre connut un très grand succès de son temps, ce qui entraîna « la suite » de l'
Arioste.
Boiardo s'appuie pour rédiger son texte sur Historia de vita Caroli Magni et Rolandi attribuée à l'évêque Turpin, rangé parmi les douze pairs du royaume de Charlemagne, présent (entre autres ) dans la
Chanson de Roland. La geste de Charlemagne a joui d'une grande popularité en Italie, Boiardo a eu l'ambition d'écrire un roman de type nouveau, qui joindrait aux thèmes et personnages de chansons de gestes ceux des romans arthuriens, avec la large place accordé à l'amour, à la magie, à l'aventure. Boiardo, avant le Roland, s'était déjà fait connaître par des poésies d'amour d'inspiration pétrarquiste. Mais nous sommes pendant la renaissance, et les thèmes, mythes et récits antiques, sont également de la partie ; les lecteurs croiserons ainsi dans le Roland, des nymphes, le Cyclope, une sirène, les armes d'Hector...Des sources multiples d'inspiration donc, que Boiardo fond dans un seul récit.
Tout débute par une femme, la plus belle des belles, Angélique. Fille du roi de Cathay, elle vient à la cour de Charlemagne, où tous les chevaliers tombent sous son charme. Mais elle a des mauvaises intentions : accompagnée de son frère, qui dispose d'armes enchantées, elle se propose comme prix du combat entre le frère et les chevaliers qui le souhaitent, le but étant d'amener les chevaliers chrétiens, qui ne pourront gagner le combat, comme prisonniers chez son père. Evidemment le complot est déjoué, mais de nombreux chevaliers, et surtout le plus fameux d'entre eux, Roland, sont complètement subjugués par la trop belle Angélique, qu'ils sont prêts à poursuivre jusqu'au bout du monde. Sur la route, de nombreuses aventures, des châteaux enchantés, des dragons, des géants, des princesses captives et tant d'autres. Et quelques guerres aussi, celles que des prétendants amoureux font au père d'Angélique, pour pouvoir l'épouser, celle que les musulmans livrent aux chrétiens etc. Il n'est pas possible de résumer les nombreuses péripéties et rebondissements, ni évoquer tous les héros et héroïnes qui habitent les pages de Boiardo.
L'auteur est un admirable conteur, qui enchaîne les aventures, qui laisse un personnage en fâcheuse posture pour évoquer un autre héros, qui lorsqu'on pense enfin arriver à un moment d'accalmie, trouve moyen de relancer le récit par des faits encore plus grandioses et palpitants. Il est dommage que ce livre ne soit pas vraiment accessible en français, la seule version que j'ai trouvée est une vieille traduction du XVIIIe siècle de Lesage, qui d'après la préface, a pas mal modifié l'oeuvre d'origine, pour l'adapter au goût de son époque. Une traduction moderne, avec les exigences actuelles en ce qui concerne la fidélité, ne serait pas un luxe.