AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,91

sur 22 notes
5
7 avis
4
3 avis
3
3 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le deuxième texte que je lis de Michèle Lesbre, après un souvenir attendri de "Ecoute la pluie"...

Ce deuxième récit parle de la destinée réelle et insensée ,injuste d'un Homme vrai, et fidèle à ses idéaux jusqu'au bout, Victor Dojlida. Nom que je ne connaissais pas le moins du monde jusqu'à une flânerie impromptue à la FNAC, place d'italie ( Paris), après quelques corvées...
J'ai été happée par le 4ème de couverture, pour une fois fort explicite.

Un biélo-russe, né en 1926, arrive en Lorraine en 1929, avec sa famille; il a trois ans.... Il résistera pour la France, sera dénoncé, déporté à Dachau... Quand il revient "miraculeusement" de là-bas.... il trouvera toujours en fonction, le juge et le policier... qui l'ont envoyé à la mort...

Ce n'est pas supportable pour lui ...

Ce livre , même si il est court et ne dépasse pas 100 pages... est très dense... Il exprime de façon lapidaire et justifiée toutes les horreurs et concessions inacceptables du XXe siècle, mais malheureusement de l'histoire humaine, dans son entier !.

Un coup de coeur et de douleur ... que ce livre -hommage de Michèle Lesbre qui a rencontré Victor Dojlida, à sa sortie de prison en 1989, et l'a accompagné jusqu'à son décès, en 1997. Elle exprime merveilleusement sa colère, sa révolte et son admiration envers cet homme qui n'a jamais failli... a résisté jusqu'au bout. Je partage la même admiration envers cet homme, qui en dépit de tous les coups du sort et des indignités qu'on lui a fait subir, est resté DEBOUT...

Volontairement... je vous en dis peu... pour exciter votre curiosité... et que vous ayez envie... d'en savoir plus sur cet homme, et son parcours...en ayant en mémoire que l'insoumission justifiée de cet homme lui a valu 40 ans de prison !!!?

Le style des plus éloquents de Michèle Lesbre rend le parcours de ce résistant encore plus poignant et révoltant

" Quarante ans, c'est le temps qu'il faut à un homme pour atteindre cet âge charnière entre la jeunesse et l'âge mûr. C'est celui que la machine judiciaire a mis pour tenter de te détruire, de casser cette rage irréductible, cette détermination à vouloir refuser la loi qui protège les infâmes, celle qui autorise les hommes à entasser d'autres hommes dans des trains de misère pour les envoyer ensuite au fond des mines, puis dans des trains de détresse qui les conduisent à l'horreur. Cette rage-là me semblera toujours infiniment respectable, bouleversante et tragique.
Une morale..." (p. 93 / Folio, avril 2014)

Je termine cette note de lecture... par une des citations que Michèle Lesbre a choisi de mettre en exergue : "Les morts dépendent entièrement de notre fidélité..." ( V. Jankélévitch, "pardonner" ?), et je suis infiniment reconnaissante à Michèle Lesbre de m'avoir fait connaître la destinée et les engagements de cet homme "immigré"...

Commenter  J’apprécie          440
Merci à Gwen21 d'avoir mis cette auteure dans la liste du challenge Solidiaire. J'ai aimé découvrir une plume touchante. J'avais prévu de lire "le canapé rouge". Et puis arrive une critique de Romileon sur ce livre. Une belle critique, tentante, stupéfiante. Bilan à peine lue, j'ai commandé et lu ce livre-ci.
.
Outre la belle plume de Michèle Lesbre, j'ai découvert un récit atypique et passionnant.
L'auteure s'adresse à Victor Dojlida, mort peu de temps auparavant, qu'elle a rencontré, apprécié. Mort après avoir passé 40 ans dans les prisons françaises. Passé par les camps allemands. Un Résistant du FTP-MOI enfermé dans les prisons françaises ?
Un homme que l'auteure va essayer de comprendre, va essayer de nous le faire comprendre. Un homme envahi d'une colère profonde. Un Résistant qui va être arrêté (par un policier français), jugé (par un juge français) et livré à la Gestapo. Torture. Prisons. Train. Et l'horreur absolue : les camps.
1946 retour en France. Victor Dojlida découvre que policier et juge exercent toujours. Et toujours cette colère qui l'habite, qui a commencé avec "les sales Polacks", avec le travail à la mine et à l'usine du père, qui a continué avec les bombes qui explosent sur sa ville, sur sa vie , colère qui va exploser face à ces deux hommes. Roués de coups, mais laissés en vie. 40 ans à l'ombre....
.
Le récit raconté par Michèle Lesbre m'a rappelé plein de souvenirs. Quand elle décrit la Lorraine des Polonais et des Italiens. J'ai revu mon Nord natal, le bassin minier, mes grands-parents qui ne parlaient que polonais. Enfin que polonais.... allemand et russe aussi.... mais pas français dans les ghettos construits pour les immigrés. Baragouinage de l'italien et de l'arabe. Mais le français ? Mes parents l'ont découvert sur les bancs de l'école en CP.
.
Un très beau récit. Une vie gâchée. Gâchée par la France. Pourtant un homme qui s'est battu pour elle.
Un récit court que je vous conseille vivement.
Clairement je vais emprunter "le canapé rouge", autre chose certainement mais j'aia imé la plume de l'auteure.
Commenter  J’apprécie          4223
L'auteure rend hommage à Victor Dojdila, fils d'immigrés polonais qui a passé quarante ans dans les prisons françaises pour un geste malheureux qui hurlait sa colère. Tout ce que voulait Victor, c'était obtenir réparation pour les années passées à Dachau. « Nous avons été bouleversés par cette hargne qui te poussait à vouloir régler tes comptes, jusqu'au bout, jusque dans tes derniers jours. » (p. 12) Victor n'était pas un saint et ce n'est certainement pas ainsi que Michèle Lesbre veut le présenter.

À la mort de Victor, l'auteure a voulu raconter son histoire. Pour ce faire, elle s'est rendue sur les terres d'enfance de Victor, dans une Lorraine plane et lugubre. le récit de son voyage à rebours du passé s'agrémente des souvenirs qu'elle a recueillis auprès de Victor, des textes qu'elle a lus et des souvenirs qu'elle imagine. le destin de cet homme est marqué par un poids qui semble trop lourd à secouer. « Une sentence semblait déjà peser sur toi, cette sorte de discrimination qui jette les gens dans le mauvais camp, et que tout un système y maintient. » (p. 60) Mais Victor Dojlida n'a pas laissé les camps, ni les prisons le briser : si ses actes sont condamnables, sa révolte est noble et digne.

Victor Dojlida est une victime à perpétuité des camps de la mort et d'un État français complaisant avec l'ennemi. « de tes voyages dans la nuit et le brouillard, tu reviendras meurtri et rempli d'une immense colère. » (p. 85) Certes, il n'est pas mort comme des millions d'autres moins chanceux que lui, mais où est la chance quand la justice porte une robe amidonnée pour cacher un uniforme de milicien ?

Admirez le choix de la préposition : Victor Dojlida n'a pas vécu une vie à l'ombre, mais dans l'ombre. La préposition obère la honte de la détention et présente l'homme dont on a retranché la vie derrière des grilles iniques. Je ne saurais trop vous conseiller la lecture de ce texte réédité, très court. La quatrième de couverture, comme souvent sur les livres éditions Wespieser, est trop bavarde : ne lisez que le premier paragraphe – et encore ! – et plongez dans le récit de Michèle Lesbre. D'une plume à la fois affectueuse et poétique, elle trace le portrait d'un homme dont on sent qu'il était un ami.
Commenter  J’apprécie          320
Est-il fou celui qui, envers et contre tout, reste fidèle à son passé et ses idéaux ?

Est-elle légitime la société qui permet à des hommes qui en ont trahi d'autres de garder leurs prérogatives et leurs privilèges ?

Ce récit est la réponse à ces questions et comme toujours, sous la plume de Michèle Lesbre, d'une façon poignante et forçant la curiosité d'explorer les références utilisées.



Victor Dojlida est fils d'immigrés polonais venus en France pour trouver un emploi dans les usines d'extraction minière de l'Est. En 1940, alors âgé de quatorze ans, il devient résistant comme si cela était une évidence et cela l'est pour lui. de simples patrouilles de ravitaillement aux actes terroristes contre l'ennemi, il grandit dans ses fonctions jusqu'à son arrestation en Févier 1944, en pleine période du procès du Groupe Manouchian.
Déporté à Dachau, puis Dora, Ohrdruf et Buchenwald, il revient après avoir vu périr ses amis et avoir noué des amitiés de misère dans les camps, pas forcément des amitiés d'idéologie, mais des amitiés indéfectibles par ce qu'elles portent d'existence partagée.
Il revient en France pour découvrir que ceux qui l'ont dénoncé et livré aux Allemands sont toujours en poste et même promus.
Il "réglera les comptes" et sera condamné à quarante années de prison et vingt ans d'interdiction de territoire auxquelles s'ajouteront ensuite les années pour tentative d'évasion.


Quelle est cette société - pour ne pas dire cette classe de magistrats - qui a oublié que cet homme avait un passé de Résistant et pour ne voir en lui qu'un "dangereux rouge" et pour n'en faire qu'un criminel, pendant qu'à Amiens, dans le même temps, sont jugées les Brigades spéciales de René Bousquet qui elles, bénéficieront de la clémence ?
Comment entendre que ceux qui avaient pactisé avec l'ennemi étaient encore en poste après la Libération ?

Toujours ces mêmes questions qui reviennent dans cet après-guerre où ceux qui revenaient de déportation découvraient une France où beaucoup continuaient à essayer de vivre sans vouloir se rappeler ?

L'oubli : horrible désinvolture de ceux qui sont restés libres grâce à la détermination de quelques uns qui ont donné leur vie pour cela.
Commenter  J’apprécie          232
A peine sorti du dernier livre de Michèle Lesbre, Chère Brigande, je pioche dans ma pile Victor Dojlida. Comment prendre un livre d'une telle force sans l'amoindrir, l'écorner, sans l'altérer.

On peut prier pour que de tels cauchemars ne se reproduisent pas, mais comment témoigner pour être entendu dans le fracas de notre temps..

Je ne vais pas commenter ce récit, mais laisser s'écrire les mots de Michèle Lesbre, de Victor, et de l'éditeur.

"Le 26 septembre 1989, à sept heures du matin, les portes de la prison de Poissy s'ouvraient pour toi, et la rue te rendait une liberté tardive… Quelques semaines après, le mur de Berlin tombait… Ah, les beaux jours de cet automne-là ! Car il faut bien que les portes s'ouvrent, que les murs s'écroulent, quand ils empêchent les hommes de vivre…"


"J'avais tout de suite pensé à une phrase de Roland Barthes: "il n'est Pays que de l'enfance". Ton enfance, c'était cet avant-guerre, ce monde d'avant ma naissance, ces moments d'histoire qui nous précèdent, dont on hérite sans le savoir et qui vous hantent toute la vie". P54

L' enfance polonaise de Victor, commence par un exode, vers la France. En 32 les grèves éclatent dans les mines de Lorraine où un ouvrier Kostia est tué sous un éboulement, les événements te reviennent en mémoire ? Tu as 6 ans.

Raconter l'horreur «  jusqu'à cette douleur de vivre », était-ce vain ? Tu t'abîmais dans un profond silence. p 27
« Bientôt ce sera ton tour de tomber dans les mailles du filet, tu es arrêté le 23 février 44. »

"L'homme qui t'a dénoncé était donc un fonctionnaire irréprochable ! Mais l'obéissance est une étrange vertu lorsqu'elle camoufle le pire." P 69

Tu as 19 ans quand tu reviens de Buchenwald où ton ami Stanis est resté. Ce seront que de mauvais tirages, de mauvaises retrouvailles, face à ceux qui ont sali leur fonction. « Ah ces bandits polonais ! » disait-on à l'époque.

"De tes voyages dans la nuit et le brouillard, tu reviendras meurtri et rempli d'une immense colère. " p. 85 « Nous avons été bouleversés par cette hargne qui te poussait à vouloir régler tes comptes, jusqu'au bout, jusque dans tes derniers jours. » p 12.

A 14 ans tu rentrais aux FTP, Victor Dojlida est à lui seul plusieurs destins, un personnage hors du commun, un être attachant qu'il faut décrypter, une figure assez symbolique de notre XX ème siècle, à nous maintenant de le faire revivre, il faut y mettre ses mots, comme nous le montre si justement Michèle Lesbre.

Inoubliable Victor Dojlida .



Commenter  J’apprécie          110
Un récit de Michèle Lesbre tout en émotion sur les traces de Victor Dojlida, immigré, résistant et condamné à 40 ans de prison.

Un drôle d'itinéraire pour ce garçon qui arrive de Biélorussie à l'âge de 3 ans, entré au FTP-MOI à 14 ans, arrêté ( sur dénonciation) et déporté à 18 ans. A son retour Victor réglera ses comptes lui-même. Et sera très sévèrement condamné.

L'auteur qui a rencontré plusieurs fois Victor Dojlida, remonte le fil de son histoire, retourne dans le pays de son enfance, dans cette région morne et plane, gorgée d'eau et aux usines abandonnées. C'est un long monologue adressé à cet homme décédé. Pas une réhabilitation, juste une remise en mémoire de ce que fut la vie de ces hommes qui ont cru à la France et qui ont été broyés par l'injustice. Victor n'était pas un tendre certes, mais il ne méritait sûrement pas de vivre une telle disgrâce.

"En 1948, l'Est républicain titrait :

Aux assises de Meurthe-et-Moselle Dojlida le bandit.

Et dans l'article on pouvait lire : "criminel-né"

Tu sortais des camps de concentration. Tu n'a jamais été condamné pour meurtre…Tu revenais à peine de ce cauchemar de la guerre qui t'avait arraché à l'adolescence. Mais, avant même que ce cauchemar commence, une sentence semblait déjà peser sur toi, cette sorte de discrimination qui jette les gens dans le mauvais camp, et que tout le système y maintient."

Un livre très fort, juste un peu court. On aimerait en savoir un peu plus sur cet homme au destin incroyable. Michèle Lesbre d'une écriture retenue nous raconte Victor, son enfance, ses parents, son combat et sa colère.

"Certains et certaines, une fois la paix revenue, ont tenté d'oublier, le plus souvent sans y parvenir. Toi, tu n'as jamais voulu."

Une vie dans l'ombre mise en lumière et c'est douloureusement triste et révoltant.
Lien : http://bibliothequedebracieu..
Commenter  J’apprécie          90
Ce petit livre est réédité par Sabine Wespieser en même temps que le nouveau roman de l'auteure Ecoute la pluie. C'est l'occasion de découvrir la vie d'un résistant, d'un éternel rebelle qui aura passé quarante ans de sa vie en prison. A la sortie du centre pénitentiaire, Michèle Lesbre attend cet homme qu'elle va longtemps interroger,, enregistrer, tour à tour dans un café, dans son petit studio d'Aubervilliers qu'il a aménagé comme devait l'être sa cellule ou bien encore dans le cadre cosy de la maison de l'auteure. Et on se prend à écouter la voix, basse mais toujours déterminée, de ce fils de Biélorusse émigré en Lorraine, qui tout jeune encore entre dans les FTP-MOI, les francs-tireurs de la main - d'oeuvre immigrée.
Et les faits s'enchaînent inéluctablement, la résistance , le réseau, les copains qui tombent, la dénonciation, la déportation, la soif de rétablir l'ordre et la dignité quand on découvre que les coupables sont encore à leur leur place. Puis l'enfermement, la vie de détenu et la sortie.

Ce qui frappe d'emblée dans ce livre, c'est l'écriture, rapide, précise, frémissante de l'auteure qui manifestement est en totale empathie avec son « sujet ».Elle restitue les cadres, les moments de vie, les acteurs de ce drame et réveille les souvenirs de ses lecteurs les plus âgés, ceux qui ont vécu l'époque de la guerre mais aussi ceux qui en ont tellement entendu parler par leurs parents qu'elle fait aussi partie de leur passé. C'est beau, c'est vibrant, c'est un moment précieux d'émotion et de réflexion.
Commenter  J’apprécie          30


Lecteurs (45) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1734 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}