J'ai lu sous ta plume : cette traversée du désert littéraire français qui équivaut à une génération et demie en négatif à laquelle a mis fin de la plus insigne des façons Michel Houellebecq depuis Sartre et Camus, mais tu as injustement oublié de faire référence à Malraux.
Oui fort juste, depuis Malraux, Sartre, Camus ..
Celui qui se tue court après une image qu'il s'est formée de lui-même : on se tue pour exister.
L'absence de finalité de la vie donnée à la vie était devenue une condition de l'action.
(Perken) Ce n'est pas pour mourir que je pense à ma mort, c'est pour vivre.
- Vous n'avez jamais songé réellement à vous tuer?
- Ce n'est pas pour mourir que je pense à ma mort, c'est pour vivre.
Claude frappait presque sans conscience, comme marche un homme perdu dans le désert. Sa pensée en miettes, effondrée comme le temple, ne tressaillait plus que de l'exaltation de compter les coups : un de plus, toujours un de plus... [p. 87]
La vedette démarra, s'enfonça entre les arbres immergés ; les vitres frôlaient les branches couvertes de boue coagulée par la chaleur, de filament de vase verticaux ; sur les troncs, des anneaux d'écume séchée marquaient la hauteur extrême de la crue. Claude regardait avec passion ce prologue de la forêt qui l'attendait, possédé par l'odeur de la vase qui s'étend lentement au soleil, de l'écume fade qui sèche, des bêtes qui se désagrègent, par le mol aspect des animaux amphibies. Au-delà des feuilles, dans chaque trouée, il tentait d'apercevoir les tours d'Angkor-Wat sur le profil des arbres tordus par les vents du lac : en vain ; les feuilles rouges de crépuscule, se refermaient sur la vie paludéenne. La fétidité lui rappela qu'à Phnom-Pehn, il avait découvert, au centre d'un cercle misérable, un aveugle qui psalmodiait le Ramayana en s'accompagnant d'une guitare sauvage. Le Cambodge en décomposition se liait à ce vieillard qui ne troublait plus de son poèmes héroïque qu'un cercle de mendiants et de servantes : terre possédée, terre domestiquée où les hymnes comme les temps étaient en ruine, terre morte entre les mortes ; et ces coquillages terreux qui gargouillaient dans leurs coques, ignobles grillons... Devant lui, la forêt terrestre, l'ennemi, comme un poing serré.
La forêt s'était refermée sur cet espoir abandonné. Depuis des jours, la caravane n'avait rencontré que des ruines sans importance; vivante et morte comme le lit d'un fleuve, la Voie royale ne menait plus qu'aux vestiges que laissent derrière elles, tels des ossements, les migrations et les armées.
Non, ce ne sont pas des corps, ces femmes : ce sont des possibilités.
" Venons à vos projets, Monsieur. Vous avez l'intention , si je ne m'abuse, de suivre la piste qui marque le parcours de l'ancienne route royale khmère....
____ Claude acquiesça de la tête .
" Je dois vous dire tout d'abord que cette piste, cette piste même, ___je ne parle pas de la route___est invisible sur des espaces considérables. À L'approche de la chaîne des Dan-Rek, elle se perd complètement.
___Je la retrouverai, répondit Claude en souriant.