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EAN : 9782369750062
144 pages
La Bouinotte (12/10/2014)
3.56/5   8 notes
Résumé :


Abel, 20 ans, passe son dernier Noël à attendre sa propre exécution. L’horreur de la Grande Guerre ne suffit pas au calvaire du soldat. Reconnu, à la hâte, coupable d’automutilation, le jeune Zouave est passé par les armes le 27 décembre 1914, en Belgique.

Ils seront près de 600 soldats à perdre ainsi la vie, pendant la durée du conflit. 600 « fusillés pour l’exemple », un drame dans le drame qui passe presque inaperçu au vu des lour... >Voir plus
Que lire après Fusillé pour l'exemple : Abel Garçault (1894-1914)Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Y a-t-il plus horrible sentence militaire que ce "fusillé pour l'exemple " ?
Mourir sous les balles de ses propres frères d'armes.
Exécuté à genoux,  attaché au poteau, les yeux bandés.
Mort pour avoir eu la trouille.
Mort parce que la peur vous aveugle et vous pousse à fuir ou à vous mutiler.
Mais aussi, mort parce que victime d'un procès qui n'en est pas un, avec des preuves qui n'en sont pas.
Condamné à l'avance.
Qui sont les lâches ?
Ceux qui se retrouvent au poteau ou ceux qui ordonnent l'exécution ?
Ils furent trop nombreux les innocents à payer de leur vie l'incompétence et l'aveuglement d'une hiérarchie intransigeante.
Pour l'exemple.
Bruno Mascle, retrace en quelques pages, le terrible destin d'Abel Garçault, ce jeune poilu d'à peine vingt ans, tombé aux côtés de deux autres compagnons d'infortune jugés comme des traîtres à la patrie.
Plus tard, comme lui, beaucoup seront réhabilités.
Et les mêmes qui les ont accusé, jugé et condamné,  de reconnaître leurs possibles erreurs et leurs décisions précipitées.
Ils ont bonne mine... mais je suis sûr qu'ils ont trouvé le sommeil malgré tout.
Après tout, c'était la guerre.
Les ordres venaient d'en-haut.
Il fallait... des exemples pour motiver les troupes.
Et pour se donner bonne conscience, sur la fiche militaire de Garçault, on appose la mention "mort à l'ennemi".
On lui accorde une mort honorable.
Il aura même son nom sur le monument de son village.
Privilège qui ne sera pas accordé à tous les fusillés ou alors bien plus tard, beaucoup trop tard...
Petit ouvrage de 120 pages, dont une partie seulement est consacrée à Abel, dans lequel l'auteur argumente et passe en revue ces épisodes dramatiques, au milieu d'un conflit qui n'avait déjà pas besoin de celà pour être meurtrier et que beaucoup auraient souhaité oublier.
Édifiant mais nécessaire.


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Qui est Abel Garçault, auquel cette enquête journalistique méticuleuse rend hommage ? Ceci : « Abel Garçault est tombé à Poperinge à la fin de l'année 1914, sous les balles des soldats défendant le même drapeau que lui. Il fait partie des quelque 600 à 700 fusillés pour l'exemple de l'armée française. » Fusillé en présence de camarades et par d'autres camarades, le coup de grâce étant donné dans la tête…

Autrement dit, ce jeune homme de vingt ans est un tabou qu'on lève à peine depuis quelques années. Il suffit, pour s'en rendre compte, de savoir que le film de Stanley Kubrick Les sentiers de la gloire, sorti en 1957 et qui traite de ce sujet, ne fut visible sur les écrans français qu'en 1975, suite à des pressions très fortes pour son interdiction.

Dans « la France d'avant la guerre [qui] vit dans l'idée fixe de la revanche », Abel, dans son Indre natale, reçoit un enseignement qui va dans ce sens. Autrement dit, la guerre l'attend de pied ferme, comme des millions d'autres Français ; même s'il n'aura qu'une préparation militaire de deux mois, n'ayant pas encore effectué son service militaire quand le conflit se déclare.

Avec la justice militaire d'alors on croit revivre les temps du tribunal révolutionnaire : « L'ultime conviction suffit » pour condamner un homme. Fouquier-Tinville aurait été fier de ces tribunaux d'exception ! Et parmi ces nouveaux héritiers du sinistre accusateur public – dont on peut voir les charniers qu'il a remplis, dans le cimetière de Picpus à Paris –, il y a André Mornet, « magistrat implacable dans la chasse aux “traitres à la Patrie” » ; hypocrite au point de servir sous Vichy et faire condamner plus tard Laval et Pétain. Notons que ce « cher » Mornet a participé à l'élaboration du Statut des juifs, texte assez immonde qui scella le destin de milliers d'hommes, femmes et enfants…

Revenons à Abel… En décembre 1914, il est suspecté d'automutilation et condamné à mort sans preuves solides. Mais il viendra hanter la conscience de ses accusateurs, sauf le médecin-major Lannou, pourtant à l'origine de tout puisque c'est lui qui demandera une enquête dont l'issue sera le peloton d'exécution.

Grâce au travail méticuleux de Bruno Mascle se dessine un portrait digne et attachant d'Abel. Les lettres adressées à sa famille et sa fiancée par le prête Jean-Baptiste Laffitte, qui l'a confessé avant son exécution, sont de ce point de vue admirables. C'est ce même prêtre qui mènera le combat de la réhabilitation d'Abel, dont les parents ne sauront que tardivement les causes de la mort.

Mais si Abel Garçault et Louis Chochoi – fusillé en même temps que lui – sont réhabilités en 1925, combien d'autres attendent de l'être ? Que dire lorsqu'on lit ce que nous rapporte plus loin l'auteur, à savoir un soldat qui refusait de se lever d'un champ criblé de balles dans la tête sur ordre d'un général commandant ? Ne mérite-t-il pas une réhabilitation, même tardive ? Idem pour les mutilés de 1917, ces hommes étaient courageux mais épuisés. Qu'importe, il fallait encore et toujours faire des « exemples » : « Sur les 600 700 fusillés aujourd'hui recensé, seule une cinquantaine ont effectivement été réhabilités. »

Quel cynisme, au passage, que cette expression abjecte « fusillé pour l'exemple » ; comme si on pouvait tirer un quelconque enseignement de l'exécution d'un gamin de vingt ans, « d'extraction extrêmement modeste », courageux qui plus est, qui cria « Vive la France ! » jusqu'au dernier souffle. Fusillé qui n'eut pas la chance de s'appeler Nivelle par exemple, ce général qui commit le carnage du Chemin des Dames et n'en reçut qu'une légère disgrâce. Il serait d'ailleurs temps que la France, au lieu d'aller s'inventer des crimes à sens unique de par le monde, reconnaisse au moins officiellement celui de certains généraux de 1914-1918.

C'est donc l'histoire d'un gâchis immense que nous raconte avec une nécessaire empathie rétrospective Bruno Mascle.

Enfin, rendons à Pagnol ce qui est à Pagnol, et lorsque l'auteur parle de ces soldats qui meurent « la tête couchée sur des herbes dont ils ne connaissent même pas les senteurs », souvenons-nous de ce pauvre Lili des Bellons dont « en 1917, dans une forêt du Nord, une balle en plein front avait tranché sa jeune vie, et il était tombé sous la pluie, sur des touffes de plantes froides dont il ne savait pas les noms » (Le Château de ma mère)…

(Remerciements aux éditions La Bouinotte pour le présent ouvrage et à Babelio)

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La Bouinotte: "Reconnu à la hâte coupable d'automutilation... Ils seront près de 600 soldats à perdre ainsi la vie, pendant la durée du conflit (FAUX: voir 1 et 3 infra). 600 « fusillés pour l'exemple » (FAUX, voir 1 et 2 infra), un drame dans le drame qui passe presque inaperçu au vu des lourdes pertes au front." "La paix revenue... réhabilité, tant les preuves de sa culpabilité étaient faibles" (voir 4 infra: 17 réhabilités en tout à la demande de la Ligue des Droits de l'Homme)

1/FAUX: "On estime à 620 environ le nombre de soldats exécutés pêle-mêle en quatre ans de guerre soit pour voies de faits graves sur leur supérieur en service actif, soit pour désobéissance en présence de l'ennemi, soit pour désertion en présence de l'ennemi, soit pour abandon de poste en présence de l'ennemi" (André Bach)

2/FAUX: "fusillés pour l'exemple n'a jamais été officiellement employé, et un historien ne peut pas honnêtement l'utiliser comme catégorie, car il n'existe aucune statistique" (André Bach)

3/FAUX: "Les soldats qui se mutilaient en se coupant les doigts pour abandonner leur poste étaient jugés suivant l'article 213, sur l'abandon de poste en présence de l'ennemi. On estime qu'il y en a eu environ 70-80 d'exécutés." (André Bach)

4/FAUX: "Très vite, la requête en réhabilitation a pris un tour politique. Autour de la Ligue des droits de l'homme, des mouvements à gauche de l'échiquier politique se sont emparés de certains cas, relativement restreints, revendiquant la révision de leur procès et réclamant la mise en accusation des juges qui y avaient participé. (…) Environ 90 demandes de révision furent étudiées et à l'issue de leur examen, D I X - S E P T exécutés eurent, à titre posthume, « leur mémoire déchargée » du « crime » militaire qui les avait conduit au poteau d'exécution (…) il y avait eu désobéissance collective aux ordres, donc « crime » avéré mais la cour estima que les conditions matérielles et morales extrêmes au sein desquelles s'étaient produites ces désobéissances ne pouvaient leur être imputées comme crime contre la discipline." (André Bach)
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Tout d'abord je tiens à vivement remercier Babelio et la masse critique ainsi que Bouinotte Editions pour l'envoi de ce livre.

La couverture de ce livre est très belle tout en étant absolument tragique. On ne peut qu'avoir une pensée pour toutes les personnes ayant périe durant ce premier conflit mondial du vingtième siècle.
La lecture ce ce livre m'a vraiment bouleversé. le personnage principal est, bien sûr, le jeune Abel Garçault, mais c'est la même histoire qui se cache derrière chaque "fusillé pour l'exemple". C'est une tragédie dans la tragédie qui s'est jouée en marge des batailles en elles-même. C'est une parodie de justice qui a fait exécuter de nombreux soldats.
On suit, dans ce récit, l'enquête de Bruno Mascle, qui retrace la vie, le parcours militaire de cet enfant de l'Indre qu'est Abel Garçault, et après ce parcours militaire, le parcours de sa réhabilitation. C'est un livre qui met en lumière une page tragique de l'histoire de l'armée française, qui nous est peu connue, hormis si l'on s'y intéresse véritablement. Et pourtant, cela est vraiment important de connaître cette part d'ombre de l'armée française, de ce qu'elle a fait subir à des hommes innocents de ce dont ils étaient accusés ou alors pour avoir refusé de servir de chair à canon...
C'est un livre qui se lit vite mais qui permet d'entretenir la mémoire d'Abel Garçault et des "autres".
Les quelques témoignages que l'on retrouve dans cet ouvrage sont édifiants et peuvent faire froid dans le dos.

C'est donc un livre que j'ai apprécié, vraiment intéressant mais qui ne laisse pas insensible.
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A GAGNER LE PRIX GUY VANHOR DE LA VILLE DE CHATEAUROUX 2015
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Difficile d'imaginer les souffrances subies par ces soldats dont certains sont tout juste sortis de l'adolescence, petits paysans ou ouvriers qui viennent perdre la vie, la tête couchée sur des herbes dont ils ne connaissent même pas les senteurs.
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Même l'adjudant qui a commandé le peloton d'exécution est sous le choc. Ce vieux sous-officier ayant servi en Afrique a déjà assisté à de nombreuses exécutions. Mais celles-là lui laissent une impression horrifiée. "Le cri d'un homme déjà frappé et ensanglanté qui se relève pour proclamer son innocence, cela ne pouvait être que la proclamation de la vérité."
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Le seul crime des morts de 14-18 est d'avoir eu entre vingt et quarante-cinq ans - les tranches d'âge couvertes par la mobilisation - au mauvais moment. Malheureux cumulards, les fusillés et leurs familles ont, en plus, eu droit à l'opprobre.
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Au fil de la lecture, Abel n'est plus seulement un nom sur un monument aux morts, ses traits s'affinent, on prend aussi conscience que ceux qui vont le conduire à la mort ne sont pas des monstres. Mais des pauvres bougres nourris de nationalisme et de discipline, eux aussi perdus dans l'immensité d'un conflit barbare et industriel.
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