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Rémi Mathieu (Traducteur)
EAN : 9782072827112
159 pages
Folio bilingue (17/10/2019)
4.5/5   1 notes
Résumé :
Le Shijing est le plus ancien recueil de poésie chinoise. Ces textes probablement compilés par Confucius forment un ensemble disparate de chants amoureux et de chants officiels, précieux témoignages de la vie et de la pensée d'une époque. Le Classique des Poèmes est une oeuvre fondatrice et incontournable de la littérature chinoise.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un petit livre pour aborder la poésie classique chinoise et ce qui est, au Pays du soleil couchant, le plus grand de ses recueils, le Shijing ou le Classique des poèmes.

Dans cette anthologie qui regroupe 305 poèmes qui remontent pour les plus anciens d'entre eux jusqu'au Xème siècle av. J.C. et pour les plus récents aux VIième et Vème siècles av. J.C, on retrouve un ensemble assez disparate de chants anonymes aux origines très différentes.

Le Shijing a été compilé par Confucius, à une époque où la Chine n'était constituée que de nombreuses principautés, où elle n'était pas encore unifiée (elle ne le sera qu'au IIIème siècle av. J.C.). Les territoires sont à cette époque formés d'une grande diversité ethnique, linguistique mais aussi culturelle et religieuse. Au travers de cette variété de sociétés s'impose pourtant des normes d'écriture des poèmes. Chants populaires issus de la paysannerie ou stances créées dans l'élite princière et royale, la plupart d'entre eux sont composés de vers quadrisyllabiques où seul varie le nombre de strophes :


« LA PUÉRAIRE CROÎT -

Sur l'épineux croît la puéraire ;
Au champ s'étend l'ampélopsis.
S'en est allé mon bel ami ;
Aujourd'hui, qui reste avec moi, solitaire ?

Sur la ronce croît la puéraire ;
Sur les tombes l'ampélopsis.
S'en est allé mon bel ami ;
Désormais, qui m'offre un repos, solitaire ?

Élégant oreiller de corne,
Brillant brocart de couverture !
S'en est allé mon bel ami ;
À l'aube, qui est près de moi, solitaire ?

Après les longs jours de l'été,
Après les longues nuits brumales,
De cent années de longue attente,
J'irai dormir dans sa demeure.

Après les longues nuits brumales,
Après les longs jours de l'été,
De cent années de longue attente,
J'irai dormir en son tombeau. »


La plupart des poèmes du Shijing sont des chants amoureux dans lesquels le sujet (homme ou femme, individu ou groupe) se désole de l'absence de l'être aimé, se réjouit de sa venue prochaine ou l'accable de reproches pour son indifférence... En contrepoint et de manière subtile, les poèmes intègrent la nature immuable et le temps qui passe.


« LA BARQUE DE CYPRÈS -

La barque de cyprès ballotte,
Ballotte au gré de ce courant.
L'esprit troublé, je ne dors point,
Comme assaillie de sombres peines.
Non que je manque de bon vin,
Pour flâner et pour divaguer...

Mais mon coeur n'est pas un miroir :
Je ne peux rien y deviner.
Mes frères aînés et cadets,
Je ne peux les solliciter.
Si je leur livre mes pensées,
Je vais leur colère susciter.

Mais mon coeur n'est pas un rocher :
Je ne peux pas le déplacer.
Mon coeur n'est pas natte roulée :
Je ne peux pas le déplier.
Mon maintien digne et gracieux
Je ne peux y renoncer.

Mon triste coeur est accablé,
Des gens médiocres me harcèlent.
J'en ai souffert bien des affronts
Et supporté nombre d'insultes.
En silence je pense à lui,
À mon réveil frappant mon sein.

Pourquoi le soleil et la lune
Alternent-ils donc leur clarté ?
La mélancolie de mon coeur
Colle comme chemise sale.
En silence je pense à lui,
Mais ne peux voler loin d'ici. »


À côté de la récurrence de leurs thèmes et de leur forme, la grande composante de ces poèmes anciens, est la part accordée aux rythmes et aux sons (aux rimes parfois aussi). Comme un travail sur le motif, les auteurs comme les chanteurs et les récitants observent de très près cette règle. Si la part rythmique des poèmes transparaît bien dans le livre, la sonorité peine à se frayer un chemin jusqu'à nous, malgré le travail considérable de traduction. Certains des termes anciens restent aujourd'hui encore intraduisibles.

« LES GRILLONS

Les grillons gîtent dans les salles,
L'année bientôt touche à sa fin.
Si nous ne jouissons de l'instant,
Jours et mois s'enfuiront bien vite !
Mais ne passons pas la mesure,
Pensons aux tâches d'intérieur.
Aimons les plaisirs sans excès :
Un sage est toujours vigilant !

Les grillons gîtent dans les salles,
L'année bientôt va trépasser.
Si nous ne jouissons de l'instant,
Jours et mois s'éloigneront vite !
Mais ne passons pas la mesure,
Pensons aux tâches d'extérieur.
Aimons les plaisirs sans excès :
Un sage est toujours avisé !

Les grillons gîtent dans les salles,
Nos charrettes sont au repos.
Si nous ne jouissons de l'instant,
Jours et mois s'écouleront vite !
Mais ne passons pas la mesure,
Pensons aux possibles tracas.
Aimons les plaisirs sans excès :
Un sage est toujours réfléchi ! »


Traduit, présenté et annoté par Rémi Mathieu, grand sinologue, chercheur au CNRS et enseignant à Paris VII, ce petit livre en édition bilingue est une très belle porte d'entrée dans la poésie classique chinoise et au Shijing.
Bien que ce volume ne rassemble que 49 des 305 poèmes que contient le Shijing, il est le témoignage vivant que la poésie, à une époque où la société était profondément hiérarchisée et traversée de tensions et de soubresauts, était un espace de liberté dans lequel chacun pouvait se retrouver et imaginer l'harmonie d'un autre monde.
Une lecture précieuse.

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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
L'ÉPHÉMÈRE

Ah ! Les ailes de l'éphémère
Sont une robe bigarrée !
Mon cœur n'est que tristesse amère...
Reviens vers moi pour demeurer !

Les élytres de l'éphémère
Sont des vêtements chamarrés !
Mon cœur n'est que tristesse amère...
Reviens vers moi te reposer !

Il sort du cocon l'éphémère,
Blanc comme neige est son coutil !
Mon cœur n'est que tristesse amère...
Reviens vers moi et prends logis !


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