Triboulet fut le bouffon de Louis XII et
François Ier. Nain bossu au visage difforme, c'est par hasard qu'il obtient ce rôle, qui lui permet non seulement d'assurer sa survie que sa monstruosité rend bien précaire, mais également de côtoyer les grands de la cour de France.
L'histoire est agréable à lire. Elle est bien rythmée, émouvante quand il le faut, intéressante historiquement. Elle est également bien écrite, avec un style à peine maniéré mais pas trop, avec des mots juste assez bien choisis pour avoir une plume plaisante.
Le point marquant de ce roman, c'est la réflexion qu'il porte sur l'importance de l'humour, en particulier quand il est utilisé comme critique du pouvoir. Les hommes de pouvoir apprécient cet humour qui peut faire écho à leurs propres doutes et réflexions, et qui leur permet aussi, pour un court instant, de sortir de leur rôle de décideurs puissants et admirés pour redevenir de simples spectateurs ou sujets de taquineries (je pense ici aux rois du roman, mais également à certains hommes politiques qui aimaient beaucoup Les Guignols).
L'humour permet de mettre au grand jour certaines vérités, certaines hypocrisies, certaines contradictions. Ces critiques ne seraient pas tolérées si elles émanaient de véritables adversaires, mais de la part d'un « fou », on les accepte – le roi du moins, car les courtisans ont plus de mal…
Triboulet se demande également si le fait de faire de l'humour à propos d'actes graves, cela ne revient pas à les cautionner, comme s'il était une caution morale des actes du pouvoir.
Toutes ces réflexions et ces questions sont applicables aux humoristes politiques actuels et autres caricature. Comme souvent, c'est l'humour noir qui a le plus d'impact en la matière il me semble – un type d'humour souvent difficilement compris par beaucoup de personnes d'ailleurs (je pense par exemple aux couvertures de
Charlie Hebdo).
Vous l'aurez compris, c'est un roman que je vous conseille, à la fois car j'ai aimé l'histoire, mais aussi parce qu'il suscite des réflexions intéressantes ! Et puis c'était agréable autant de traits d'humour dans un roman historique :)