Qu'appelle-t-on langue classique en littérature japonaise ? Est-ce l'équivalent de la langue de Racine, ou de la langue romantique du 19 ème siècle pour les Français ?
Je ne connais pas la langue japonaise, malheureusement. Mais on a dit que Mishima était attiré par le style européen et, surtout, par le classicisme français, notamment, par Racine.
En tout cas, il faut rendre hommage à
Marc Mécréant qui a traduit
le Pavillon d'Or en une langue magnifique, pleine de poésie, de métaphores et qui invite le lecteur à une subtile déambulation dans l'âme des personnages, de Mizoguchi, en particulier, à une promenade poétique lente, d'où resplendit la beauté ; promenade emplie d'images de paysages, de descriptions minutieuses de temples, et du Pavillon d'Or, et du Silence, comme on se représenterait le Japon traditionnel dans les clichés occidentaux.
Je ne reviendrai pas sur la relation de l'histoire que nombre de Babéliens ont effectuée. La beauté du Pavillon d'Or ne s'impose pas d'emblée au bonze novice Mizoguchi, quoiqu'ait pu lui dire son père, lorsqu'il se trouve en présence du monument pour la première fois.
Puis, progressivement, de façon mystérieuse, sans doute en appliquant son regard au moindre détail de l'architecture, et en en contemplant l'image dans le Miroir d'eau, cette beauté se révèle à lui, telle qu'il se l'était imaginée depuis sa plus tendre enfance, grâce à son père, jusqu'à l'obséder.
Beauté hypnotique à laquelle la magie de l'écriture nous fait accéder, et qui constitue un obstacle entre la Vie et Mizoguchi affligé d'un bégaiement et d'une certaine laideur physique. Ces tares en font un garçon solitaire et sombre.
Le Pavillon d'Or le paralyse et l'empêche de vivre, en effet ; quand il prend la décision de s'en délivrer, c'est encore la beauté du Pavillon d'Or qui le rend impuissant à passer à l'acte, comme c'était déjà le cas avec les filles.
Cette fois-ci, il surmonte son impuissance et incendie de Pavillon d'Or, choisissant de vivre et non plus de mourir comme il l'avait prémédité, une fois son forfait accompli.
Le 2 juillet 1950, le Japon se réveilla hébété, en apprenant l'incendie, par un jeune bonze, du Rokuon-ji lequel, durant des siècles, avait échappé à toutes les guerres et calamités qui ont pu, à travers l'histoire, environner Kyoto, l'ancienne capitale impériale où le temple d'or avait été édifié à partir de 1397.
Il est des faits divers qui sont l'occasion de grands romans...
Pat