Le Justicier

Une couverture racoleuse, polémique et caricaturale donne une fausse idée de l'ouvrage. Que veut dire le sang sur le glaive de la Justice, dont il n'est pas fait le procès dans le livre ? La caricature du président annonce un anti-sarkozisme primaire qui n'est pas du tout le propos d'une démonstration, au contraire, minutieuse et particulièrement documentée sur la politique judiciaire menée par le Ministre de l'intérieur, puis par le Président de la République, Nicolas Sarkozy. Un jour est annoncée la suppression du juge d'instruction. Mais il n'en sera rien. Pour oublier et faire oublier cette déconvenue, sont promis des jurés dans les tribunaux correctionnels et auprès des juges de l'application des peines. Les lois sur la récidive ne se comptent plus, suivant chaque fait divers, même si leur accumulation ne sert à rien. Puisque les jeunes d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'antan, il faut démanteler le droit des mineurs. Au diable les idéaux de la nouvelle défense sociale et l'humanisme qui ont animé les réformateurs de l'après-guerre. Il suffit de rapporter minutieusement annonces, idées et réformes pour dessiner le tableau saisissant d'un mélange de populisme, de cynisme, d'électoralisme et de précipitation. le constat accablant n'est pas le fait de l'humeur de Dorothée Moisan, mais de sa chronique raisonnée d'un véritable projet, persévérant malgré ses foucades et ses palinodies, dans la répression des plus pauvres et la bienveillance à l'égard des plus riches. L'auteur se hisse très au-dessus du niveau habituel du livre politique de circonstance ou de polémique, pour radiographier en profondeur la logique et les ressorts d'une politique publique qui entend nourrir à nouveau la prochaine campagne électorale. Au crédit du Président sortant, rappelons, puisque le livre ne le dit pas, l'introduction de la question prioritaire de constitutionnalité, à l'effet bénéfique sur l'ordonnancement juridique et judiciaire. Bref éclair dans un ciel de plomb... A chacun de juger. Un livre à lire, assurément !