Avis chrono'
Le livre qu'il me fallait pour retrouver du plaisir à lire
Amélie Nothomb. Un thème - la correspondance - qui m'attire, des passages brillants... Un mélange habile et intrigant entre éléments biographiques et fiction. Un humour bien dosé et des propos carrément acides sur ses lecteurs... Pour la peine, je lui pardonne la fin ratée.
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"Un lien ne me paraît complet que s'il comporte une part de correspondance."
Me revoici en pleine Love Story, bon sang que ça fait du bien! C'est que nous étions brouillées, moi et Amélie N. Vous savez comment c'est, on se tourne autour, on se dit qu'on est bien l'une avec l'autre et puis c'est le drame, un mot de travers et nous voilà fâchées.
Avec
le sabotage amoureux, nous avions échangé nos premiers sourires, avec
Mercure j'avais entériné notre rapprochement et avec
Stupeur et tremblements... Il y a eu consommation...
Puis après quelques années de hauts et de bas, il a bien fallu nous rendre à l'évidence, la passion du début s'était émoussée et puis... est arrivé
le voyage d'hiver... le coup de froid fatal. La rupture.
Mais voilà, c'est le printemps, saison des amours, je succombe à nouveau au charme de cette auteure belge et pourtant, je l'ai vue à la télévision il y a moins de deux mois. Mon dieu qu'elle est affreuse, elle me fait peur et sa voix me terrifie... Vraiment, on a pas idée, quand on est un auteur, d'exister en vrai! Tsssss...
Le premier plaisir, dans
Une forme de vie, c'est l'intrigue à proprement parler.
L'auteure reçoit dans son courrier des lecteurs une lettre d'un soldat américain basé en Irak. de réponse en réponse, se crée un attachement. Celui-ci lui dépeint sa tragique réaction au stress de la guerre: il mange, mange, mange et devient plus qu'obèse.
"Je me dis: Là, je dois être en train de grossir. Ma panse commence le boulot. C'est fascinant d'imaginer la transmutation de la nourriture en ce tissus adipeux. le corps est une sacrée machine."
Là dessus,
Amélie Nothomb nous sert ce qu'elle fait le mieux, du bizarroïde, le gars s'imagine que son tas de graisse est une femme fondue en lui...
On s'y fait. C'est Nothomb, quoi. C'est même pour ça que je l'aime. Même si ça m'exaspère. Mais cette excentricité est brève, le sujet est bien traité, original, les lettres sont délicieuses.
La seconde couche est encore meilleure: l'utilisation d'une expérience personnelle (qui fait classer ce livre dans les autobio) autour du thème de l'écriture, de la correspondance.
Amélie Nothomb répond aux lettres de ses lecteurs et dans ce roman, à diverses reprises, elle en parle et j'ai trouvé ses propos pleins de bon sens.
"De même qu'il ne suffit pas d'écrire un livre pour être écrivain, il ne suffit pas d'écrire du courrier pour être épistolier."
"Il y a des gens qui gagnent à être cotoyés et d'autres qui gagnent à être lus."
Elle évoque les types de lettres reçues, de la demande d'argent sans délicatesse à la déclaration d'admiration absolue et sa façon de les ouvrir, de les trier. Elle parle de l'évolution possible de ces échanges, qui pour certains deviennent de véritables amitiés durables.
La réflexion sur ce qu'on perd en perdant un correspondant m'a plu. "Pourquoi un ami d'encre et de papier vaudrait-il moins qu'un ami de chair?" La réaction face au silence brutal de l'autre... Evidemment, ça ne pouvait que me séduire...
Enfin, elle n'est pas tendre avec certains de ses lecteurs!! Ne leur fait cadeau d'aucune langue de bois! J'ai adoré ces passages, assez nombreux!
"Je reçois très souvent des missives dans lesquelles le destinataire a oublié ou n'a jamais su qu'il s'adressait à moi ou à quelqu'un. [...] et cette personne m'envoie une réponse qui n'est pas une réponse [...] parce que rien dans son propos ne signale qu'il a lu le mien."
Ne dirait-on pas qu'Amélie a lu mon Petit guide de politesse à l'usage des blogueurs venus se faire un peu de pub??
Lien :
http://talememore.hautetfort..