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sur 691 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Coup de coeur pour la boue ! ( Mud en anglais )

Avril 1965. Imaginez...une petite fille d'à peine cinq ans, une toute petite fille accrochée à sa poupée en caoutchouc, précipitée par sa propre mère, marginale à moitié folle, dans la boue froide des marais de la Blake Snake River dans les Adirondacks pour se débarrasser d'elle. L'histoire tragique de Mudgirl commence ainsi, aspirée par cette boue qui pénètre dans sa bouche, ses yeux, ses oreilles, l'étouffe, promise à une mort certaine si un homme ne l'avait pas découverte in extremis et sortie de ce cloaque.
Mais...elle a été un rebut sans identité dont même sa mère ne voulait plus. Finalement recueillie par un couple de quakers qui reporte sur elle l'affection qu'ils n'ont pu donner à leur propre fille morte prématurément, elle poursuit des études brillantes et devient la première femme présidente d'une prestigieuse université de l'Ivy League, la désormais célèbre Meredith Neukirchen, dite M.R., professionnelle irréprochable aux idées progressistes, bourreau de travail, qui ne s'accorde que de rares parenthèses dans les bras de son amant astronome peu présent - l'amant ( secret ), facétie de l'auteur qui ne le mentionne que de cette manière, façon originale de le mettre réellement " entre parenthèses ".

Octobre 2002. Meredith a 41 ans et revient dans la région de son enfance pour prononcer un discours à un congrès. Mais on n'échappe pas aisément à son passé surtout s'il est aussi tragique que celui de Mudwoman. Ses souvenirs profondément refoulés l'assaillent, elle commence à perdre imperceptiblement ses repères, fait des cauchemars, tombe...À l'université, elle doit lutter contre la misogynie et l'immobilisme conservateur de ses collègues et souvent adversaires. Elle lutte courageusement comme elle a toujours su le faire depuis son enfance, mais lassitude insidieuse et/ou solitude dévorante, elle commence à perdre pied.

Comment survivre à un tel traumatisme, une telle absence d'amour finalement ?

C'est véritablement le propos de ce roman de Joyce Carol OATES centré sur M.R., Meredith Neukirchen. Un beau portrait de femme, complexe, dont l'analyse psychologique est très aboutie, subtile. J'ai trouvé particulièrement intéressante la descente aux enfers de M.R., l'engrenage des événements et de ses réflexions intimes, comment elle frôle la folie et flirte avec la perte de contrôle : du OATES au top de son art. Une aventure prenante finalement ce roman, un peu à la manière d'un thriller.
Pour mieux appréhender la psychologie de l'héroïne, et ne pas lasser le lecteur avec une trâme linéaire classique, les chapitres consacrés à Mudgirl et à Mudwoman alternent, scandés par des titres sybillins teintés d'humour grinçant " Mudgirl a un nouveau foyer ", " Mudwoman précipitée sur terre ", " Mudgirl accouplée ", " Mudwoman in extremis ". Presque un sommaire de livre pour enfants ! Un comble ! Bien sûr, il ne s'agit pas d'un roman léger, mais OATES, selon moi, dédramatise ainsi ce roman sombre par touches, s'amuse à sa façon. Jusqu'aux citations d'ouverture de roman : Nietzsche, Whitman et un certain André Litovik qui énonce : " le temps terrestre est une façon d'empêcher que tout n'arrive en même temps. " Tiens donc, qui est ce Litovik, me suis-je dis en ouvrant le bouquin, jusqu'à ce que je réalise bien plus tard qu'il s'agit de l'amant ( secret ). Astucieux clin d'oeil pour se citer soi-même Madame OATES !

N'ayant plus rien à prouver, elle brouille les pistes et se permet des facéties de présentation pour le plaisir de ses aficionados.
Je persiste : à quand le prix Nobel de littérature pour cette grande dame de la littérature américaine ?
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Dans les méandres boueux de la Black Snake River, perdue au milieu de l'immensité sauvage des Adirondacks, une petite fille, de la boue dans la bouche, de la boue dans les oreilles, jusqu'à de la boue dans les yeux, gît là, abandonnée avec sa poupée comme morte. Recueillie par une famille dite d'accueil, puis par des « parents » aimants, dans le genre couple de quakers, Mudgirl grandit, s'affranchit, et devient Mudwoman, une femme reconnue mais qui reste solitaire, pas vraiment par choix. Elle devient la première femme présidente d'une université de prestige, reniant pratiquement tout son environnement, sa famille, son passé, son histoire. Même son amant « secret » se fait extrêmement discret. Un corbeau noir dans le jardin l'observe à travers les persiennes de son manoir de fonction. Un cri perçant dans la nuit, un nuage dérive sur la lune, les ombres s'effacent dans le noir de jais d'un ciel sans étoiles.

Meredith Ruth doit lutter contre les préjugés, la misogynie de ses paires, la méfiance du conseil de gouvernance, l'hésitation des généreux donateurs. Fière de ses idées progressistes, voulant remettre en question le conservatisme de cet immense paquebot universitaire pour lequel on lui a octroyé la barre, M.R. ne ménage pas son travail, telle un bourreau, ne flanchant jamais devant la tâche et les obligations. Un congrès la ramène dans sa région d'enfance, ces routes isolées qui serpentent au milieu des Adirondacks, les souvenirs remontent à la surface, le goût de boue en bouche resurgit de sa mémoire. le cri des corbeaux devient menaçant.

Un nouveau portrait de femme, Mudgirl devenu Mudwoman, sous la plume de la prolifique Joyce Carol Oates. Grandeur de la femme, socialement parlant, avant la décadence, la chute irrémédiable tourmentée par les fantômes de son passé. Il a suffi d'une conférence sur les lieux de son enfance pour que l'histoire vire au « thriller » névrosé. Les pages ne se comptent plus. Certaines sont en trop mais elles apportent une ambiance, l'atmosphère des lieux, le cri perçant du corbeau, le roi des corbeaux. Les pages défilent, comme les feuilles mortes sur un campus universitaire livrées au vent. le temps passe, les années circulent, les yeux plongent dans ce roman, dans cet univers qui flirte avec – comme souvent – des instants gothiques.

Toujours aussi noire, cette plume de corbeau.
Toujours aussi sombre, cette histoire glaçante.
Toujours aussi froide, cette boue sombre et noire.
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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M.R. Neukirchen est directrice d'université , haute performance dans un milieu machiste au possible. En se rendant à un colloque dans l'est de l'état de New York, son enfance remonte et elle part à la recherche des secrets de sa jeunesse. Car M.R, alias Mudwoman, a été enfouie dans la boue par sa mère avant d'être miraculeusement sauvée.

Roman dérangeant, tant le talent de l'auteure est immense pour nous faire ressentir les moindres soubresauts de l'âme humaine . Ici encore , JCO étudie au scalpel son personnage , la faisant naviguer entre réalité et rêve ou plutôt cauchemars, où l'amènent ses pulsions . C'est indéniablement brillant
Comme le sont les descriptions des relations humaines , que ce soit dans la sphère familiale ou autre.
Le thème de la solitude , ou de la recherche d'amour et celui de la quête de soi, à travers ses origines sont la aussi terriblement bien décrites, avec ce style très personnel qui met un voile d'angoisse sur tout ce que peut écrire cette auteure.
Pour autant, j'ai eu du mal à entrer complètement dans l'histoire , non pas à cause de l'alternance des chapitres entre présent et passé mais plutôt en l'absence d'une histoire que j'aurais aimée peut être plus consistante en 560 pages. Ce n'était bien sur pas le but de l'auteure.
Une lecture qui parfois peut être dérangeante, qui suscite beaucoup d'empathie pour le personnage principal et qui démontre le talent de l'auteure pour coucher sur papier les comportements les plus obscurs de l'être humain.
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Mudwoman, ou le roman de la sortie de terrain, d'une boue insidieuse (à prendre à la fois au sens propre comme au figuré), dont on ne se débarrasse jamais tout à fait.

Meredith Ruth Neukirchen, ou « M.R. », comme elle préfère(rait) qu'on l'appelle, première femme présidente d'une université américaine, à la carrière brillante et irréprochable, est en route pour donner un discours au congrès d'une prestigieuse association d'intellectuels, non loin du lieu où elle a grandi. Ce discours aurait dû être un triomphe de plus pour elle si elle l'avait donné, car à peine arrivée à l'hôtel où elle devait séjourner, elle prit la route, attirée par un zone marécageuse située assez loin du congrès... Premier retour à la boue, premier pas vers le précipice qui attend M.R. et dont elle se rapproche inexorablement.

Meredith Ruth… ou bien Jedina ? Ou plutôt Jewell, cette enfant abandonnée de manière sordide par sa mère dans un marais des Adirondacks dont elle a été sauvée miraculeusement car quasiment ensevelie dans la boue, puis adoptée par un couple de quakers qui la rebaptise du nom de leur enfant morte (sans le lui dire) ? Elle-même ne le sait pas, ou ne le sait plus, tant les personnalités se sont accumulées successivement, sans transition, sur la boue originelle.

Beaucoup d'éléments difficiles à charrier, à porter en/avec soi, qui font que M.R., qui ne se sent au final à sa place nulle part, mal-aimée, voire en-dehors de l'amour qu'elle considère comme non fait pour elle, compense par une obsession de la perfection, de la hantise de commettre des erreurs, et construit sa vie comme étrangère à elle-même, comme… morte (« D'une certaine manière elle trouvait étrange ce fait curieux : elle n'était pas (encore) morte », p. 33).

Ainsi, cette obsession de la réussite, alors qu'elle obtient un poste difficile et exigeant, qui l'oblige à défendre à la fois et sa position de femme – la misogynie étant encore très forte dans le milieu universitaire –, et ses idées progressistes – plus discutées alors que le Gouvernement va attaquer l'Irak (le roman se déroule principalement en 2003) –, alliée aux traumatismes non réglés de son enfance qui prennent de plus en plus de place (la boue qui recouvre tout, jusqu'au maquillage qu'elle s'applique maladroitement pour cacher les traces d'une chute due à la fatigue), la plongent peu à peu dans un burning-out… matérialisé par des fantasmes et cauchemars dont on ne sait que difficilement, à la lecture, s'ils sont chimère ou réalité.

Voici donc (pour vous qui vous êtes accrochés dans la lecture de cette critique, bravo !) une introduction laborieuse, mais fidèle (j'espère) à l'ambiance, lente, lourde et embourbée, de l'ouvrage : si on met un peu de temps à entrer dans ce roman et dans la psychologie torturée (tortueuse) de M.R., il vaut ensuite largement le coup par sa passionnante analyse d'une âme en peine de son enfance et d'une identité qui se dérobe sans cesse à elle.
La structure du roman, faite de chapitres courts, portant tous des titres qui font penser à un ouvrage d'aventures pour enfants, et qui contrastent ainsi terriblement avec la noirceur du propos de l'auteur, en est également l'illustration bien pensée.

Bref, un roman magistral, marquant, à lire absolument.

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Meredith Ruth, dite MR, est au sommet de sa carrière universitaire en tant que présidente d'une prestigieuse université. Elle lutte quotidiennement contre le machisme et le conservatisme qui animent certains professeurs, jaloux de sa forte personnalité et de sa position. Nous découvrons peu à peu l'enfance douloureuse de MR, une petite fille maltraitée que sa mère, folle, jette dans les marais des Adirondacks. Tandis qu'elle s'enfonce dans la boue, promise à une mort terrible, elle est sauvée par un jeune homme faible d'esprit qui prétend avoir été guidé vers la fillette par le roi des corbeaux.
Le personnage de Mudwoman (MR) est passionnant, complexe et attachant. Sous cette femme en apparence forte, sous la froideur, se cache un être fragile, naïf, qui croit encore malgré tout à la bonté des hommes, mais aussi très solitaire. Elle doit faire d'immenses efforts pour parvenir à assumer ses fonctions, à avoir des relations avec les autres, à refouler le passé et l'angoisse qui montent en elle.

Une fois de plus j'ai été éblouie par le style si particulier de Joyce Carol Oates. Un très grand roman qui donne vie à une héroïne attachante qui rejoint la galerie des personnages façonnés par l'auteur au long de son immense carrière.
A quand le Nobel de littérature ?



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Roman déroutant par sa construction mais captivant par son thème.

Jetée dans la boue et laissée pour morte par une mère folle, la petite Jewell, âgée de trois ans environ, sera sauvée puis placée dans une famille d'accueil. Elle sera ensuite adoptée, vers l'âge de six ans, par un couple quaker. Elle sera alors rebaptisée Meredith Ruth, prénom de la petite fille défunte du couple.
Entourée d'amour mais confrontée au silence face à ses origines, MR fera d'excellentes études et deviendra présidente d'une prestigieuse université américaine. Mais cette vie emplie de travail, de solitude, de compassion pour autrui cache un mal être profond. La forteresse que présente Meredith n'est que façade et bientôt des fissures vont l'ébranler.

Des passages un peu longs sur les querelles universitaires mais un roman fort sur la résilience : une héroïne au passé tragique qui essaie de se (re)construire pour enfin se libérer de la boue qui l'empêche de parler, de respirer, de vivre pleinement.
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J'ai terminé la lecture de Mudwoman ce matin. Je suis restée quelques longues minutes, prostrée, perplexe, contemplative, sous le choc comme cela m'arrive parfois dans un siège de ciné lorsque la salle se rallume et que je n'arrive pas à m'extraire de l'ambiance du film pour retrouver une vie presque ordinaire.

C'est qu'elle n'est pas ordinaire la vie de Mudwoman. Elle est bien sombre son histoire, perdue dans les méandres d'une enfance maltraitée, d'une adolescence cloisonnée et d'un âge adulte répondant à tant de sollicitations et d'attentes.
Mudwoman peine à vivre en équilibre. Elle navigue sans cesse entre la réalité d'un passé brutal, la folie de rêves angoissants et l'espérance d'un avenir apaisé.

Et ce n'est pas facile de la suivre.
Ses réflexions sont complexes comme l'est l'écriture de Joyce Carol Oates dont c'est ma première découverte.
Je me suis parfois perdue, retrouvée dans la boue incapable d'avancer. J'aurais parfois eu besoin d'un médiateur capable de me rassurer et de m'expliquer les contours peu clairs entre rêves et vie réelle.
La folie est si proche de la réalité.

Joyce Carol Oates est brillante dans la description de la psychologie de son héroïne si bien qu'on s'y attache autant qu'on veut l'éloigner de nous, qu'on a envie de la secouer autant que de la consoler, et qu'on l'aime autant qu'on la déteste parce qu'elle nous renvoie à nos propres démons intérieurs.
Heureusement, le ciel s'éclaircit, le sol devient plus stable vers la fin du roman.
Mais rien n'est dit. Rien n'est scellé.Toutes les perspectives restent ouvertes. On ne peut qu'imaginer ce qu'il adviendra de Mudwoman à l'avenir. En espérant qu'elle choisisse le bon chemin.
Pour que Mudwoman puisse enfin devenir pleinement Meredith Ruth.
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Octobre 2002, Meredith Ruth Neukirchen, M.R pour ses proches, peut être fière d'elle, à 41ans elle devient la première femme présidente d'une université de renom. Adoptée à l'âge de 6 ans par un couple de Quaker bienveillant et humaniste, écolière et lycéenne brillante, elle ne doit sa réussite et son ascension au sein du monde universitaire qu'à elle-même. de retour dans les Adirondacks, à une centaine de kilomètres de Carthage, ville où elle a grandi, elle va prononcer un discours devant tout le gratin intellectuel et fortuné de la cote Est.

Pourquoi quelques heures avantce rendez-vous si important pour sa carrière, M.R décide-t-elle de louer une voiture et de prendre un chemin de traverse ? Elle doit retrouver Mudgirl la petite fille de trois ans qu'elle était, laissée pour morte dans les marais par une mère déficiente, cette petite fille qu'elle pensait avoir oubliée.Meredith devient Mudwoman la femme de boue.

Formidable roman philosophique, politique (nous sommes sous l'administration Bush junior juste avant l'intervention en Irak) et intimiste, nous pénétrons dans la psyché de M.R, nous revivons avec elle le chemin intérieur qu'une enfant maltraitée doit parcourir pour rester en vie. Véritable hymne à la résilience, savamment et brillement construit Joyce Carol Oates entraine son lecteur du passé au présent pour décrire la reconstruction d'une femme forte. Il faudra presque une année pour que Mudwoman, la femme de boue, redevienne une femme debout.
Bref, Un roman de la rentrée littéraire 2013 pour clôturer de la meilleure facon cette belle rentrée littéraire et espérer que la 2014 soit aussi belle!!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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La boueuse…Sera-t-il possible pour la petite Jewell (ou était-ce Jedina?) de se laver de cette boue qui a failli l ‘ensevelir à tout jamais, jetée dans le marais comme un vieux jouet, par une mère démunie? Car le chemin est long pour se hisser au sommet de la culture américaine en devenant présidente d'université. Cela, le lecteur le sait rapidement, et tout le savoir-faire de Joyce Carol Oates consiste à lever peu à peu des pans de ce parcours, pour lui restituer sa cohérence.

De l'enfance martyre, qui laisse des cicatrices indélébiles, une quête constante de légitimité au travers d'une stratégie relationnelle policée maintient les apparences, au risque de voir saigner à l'improviste des plaies qui ne referment jamais totalement.


L'intensité dramatique ne faiblit pas tout au long du récit, et la densité psychologique de cette héroïne hors du commun maintient l'intérêt sans relâche, et l'auteur use de stratégies diaboliques pour balader le lecteur et mieux le perdre… jusqu'à la fin.

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Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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C'est un livre que j'ai choisi pour une LC sur Babelio, une expérience nouvelle pour moi, d'autant qu'elle va sans doute être une LS (lecture seule, et non lecture stupide, je l'espère).
Joyce Carol Oates, une auteure que je connais assez peu au regard de sa production prolifique, mais dont les livres lus, Les chutes, il y a des années, et Délicieuses pourritures récemment, m'avaient impressionné.
Mais ici, cette lecture de Mudwoman, c'est plutôt une déception, je crois que j'en attendais trop..

Et pourtant, le thème m'attirait.
Mudwoman, l'histoire est celle d'une enfant jetée dans la boue à 3 ans par une mère prise de folie à composante mystique (comme c'est souvent le cas), et qui, sauvée, puis plus tard adoptée, devient une brillante universitaire, élue, à 42 ans, Présidente d'une prestigieuse Université américaine.
Ce thème du « transfuge de classe », de ces êtres humains qui se sortent d'une enfance dans un milieu défavorable, voire misérable, me parle beaucoup, et fait mon intérêt par exemple pour l'oeuvre d'Annie Ernaux. Et aussi, les moteurs du changement de condition, et les problèmes que ce dernier pose.

Dans Mudwoman, Oates traite le thème, un peu comme dans les autres romans que j'ai lu d'elles, sur le mode que je qualifierais de la tragédie grecque, dans lequel l'être humain n'échappe pas à son destin, destin qui guide implacablement les actes des humains (ce qui, dans sa version moderne, pourrait se nommer l'inconscient). Mais, chez Oates, les êtres humains arrivent finalement à surmonter la puissance de ces forces souterraines, et trouvent souvent le chemin de l'apaisement, c'est ici le cas.
La narration emprunte régulièrement les chemins de l'onirisme et du fantastique, du rêve étrange au cauchemar horrible.

L'auteur alterne les chapitres racontant l'histoire de la « Mudgirl » Jewell Kraeck, depuis l'enfant de 3 ans jeté dans la boue d'un marécage par sa mère biologique jusqu'à son adolescence chez les Neukirchen,ses parents adoptifs, et celle actuelle de la « Mudwoman » Meredith Ruth, (dite MR) Neukirchen, femme dans la quarantaine qui vient d'être élue présidente de l'Université de Cornell, femme progressiste et qui se veut accessible à toutes et tous, cependant très seule et très rigide, et dont le psychisme va se fissurer progressivement suite à son surmenage, à l'hostilité de certains collègues ou d'étudiants ultra-conservateurs, et l'amener à questionner son identité, à être rattrapée par un passé qui ne passe pas.
Mais finalement renouer les liens affectueux avec son père adoptif, Konrad Neukirchen, et peut-être retrouver la serenité.
Alors que les chapitres consacrés à l'enfant Mudgirl sont plutôt concis et forts, j'ai trouvé ceux qui racontent la vie universitaire de la Mudwoman encombrés de récits annexes trop longs, par exemple les pages de la relation de la Mudwoman avec un collègue enseignant, les retrouvailles avec son professeur de mathématiques du collège, les digressions sur la guerre en Irak etc... Au point qu'à certains moments je passais très vite des pages. Au point aussi qu'après la lecture d'un peu plus de cent pages, je n'étais pas loin de lâcher le livre. Au point que je me suis souvent demandé où l'auteure voulait m'emmener.

Au total, un récit certes fort et oppressant, mais que j'ai trouvé mal maîtrisé, nettement moins bon que les autres romans que j'ai lus. Donc de la déception par rapport à ce que j'en attendais.
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