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Les trois nouvelles du recueil sont exigeantes et dérangeantes. Elles ont été écrites de 1957 à 1961 par un jeune homme profondément marqué par la violence de la guerre et celle de l'après-guerre au Japon. Elles sont assez différentes mais traitent toutes du mal de vivre d'adolescents déboussolés et désespérés, incapables de trouver leur place dans une société japonaise hiérarchisée et déresponsabilisée. Ils sont en proie à des pulsions morbides.

1) le Faste des morts (1957) ****
Le narrateur est un étudiant en lettres qui a trouvé un travail méprisé à la morgue de la fac de médecine. Il déplace des cadavres d'une cuve à l'autre en compagnie d'une fille enceinte. Ce travail se révèlera absurde suite à une erreur que personne ne voudra endosser. L'odeur pestilentielle et l'atmosphère suffocante créent le malaise au propre et au figuré. Les corps des cadavres côtoient ceux des vivants et bientôt le narrateur dialogue intérieurement avec un soldat mort. Quand la guerre s'est terminée, les adultes ont digéré sa dépouille, pas les enfants.

2) le ramier (1958) ***
Le narrateur a quatorze ans. Il fait partie d'un groupe d'adolescents incarcéré dans une maison de redressement. Il décrit sans complaisance la violence des gardiens mais aussi celles des rapports de fascination et de domination sexuelle au sein du groupe. Pour monter dans la hiérarchie et être protégés par "le marin", les adolescents se lancent dans un concours morbide. Il faut prendre la vie d'un animal et l'exhiber pour être reconnu et protégé. le narrateur raillé par "la femme" du marin entre dans le jeu.Le fils du directeur, un métis aux yeux bleus, se lance aussi dans la compétition. La vie du narrateur va alors basculer. La nouvelle est vraiment très dure, jusqu'au bout.

3) Seventeen (1961) *****(je reprends le billet dédié à cette nouvelle)
Une nouvelle forte et dérangeante qui s'intéresse à la formation d'un militant d'extrême-droite dans les années soixante. Elle est inspirée d'une histoire vraie.
Le narrateur, anonyme, a dix-sept ans ce jour-là. Sa famille oublie son anniversaire à l'exception de sa soeur, infirmière dans les Forces d'auto-défense. il n'a pas d'ami Il passe son temps à se masturber, en rêvant de beauté, de puissance et de gloire. La réalité est toute autre, il se trouve très petit, très laid, trop sensible. Il angoisse au point d'uriner de honte au cours d'un huit cent mètres où il est largué devant les filles...
La narration à la première personne fait que l'on s'attache à ce teenager empoté, omnibulé par ses pulsions sexuelles , rongé par la culpabilité et capable de soudains excès de violence. Il est en quête de reconnaissance qui ne viendra malheureusement qu'associée à un groupuscule nationaliste d'extrême droite. A travers ce personnage, Kenzaburô Oe nous parle aussi du Japon déboussolé des années soixante.
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Sans que ça n'ait été un choix prémédité, je me rends compte que je découvre l'oeuvre de Kenzaburo Oé, depuis des années, à rebours: me voilà arrivée au but, à la naissance de l'auteur en tant qu'auteur, c'est-à-dire à ces trois nouvelles, écrites alors qu'il avait 21 ans seulement, et parfaitement maitrisées.

Comme tous ses romans de jeunesse, son écrit est violent, glauque et sans concession; et pourtant magnifique, bouleversant et sensible.
Les protagonistes de ces trois récits semblent jetés dans un monde comme on le serait dans le tambour d'une machine à laver en marche: tributaire du cours de la vie, dans l'incapacité de décider de leurs actes et destins, soumis à une violence absurde. La première nouvelle qui donne aussi son titre au recueil sa passe dans la morgue d'un hôpital: deux jeunes étudiants y sont engagés pour transférer sur une journée des dizaines de cadavres flottant dans une cuve de conservation dans une autre. le jeune narrateur se voit confronté à ce monde inversé des morts et semble un instant perdre pied face au monde des vivants. le deuxième récit, mon préféré, se passe dans l'un de ces centres de redressement pour jeunes ados délinquants (ça m'a fait penser aux Quatre cents Coups mais aussi à Genet) coupés du monde et de ses règles.
Le troisième, je l'avais lu il y a quelques années et s'avère incroyablement contemporain par rapport à ces fusillades qui ont lieu un peu partout dans nos sociétés avancées.
C'est un peu comme boire cul sec un shot d'alcool fort qui reste là à brûler la gorge encore longtemps après, violent et puissant.

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Ce que j'aime dans ce recueil de nouvelles c'est la subtilité de l'écriture d'Oe.
Il réussit a créer dans la première nouvelle un dialogue entre les pensées des morts que l'on balade d'une cuve de formol à l'autre et les paroles des personnages, ceux qui sont chargés de bouger les corps.
Et ainsi sans que les uns n'entendent les autres, les pensées semblent se répondre ou se recouper faisant apparaître en filigrane les vies et les préoccupations des vivants autant que celles des morts.
Ce procédé permet de mettre en lumière la vanité et l'éphémère de nos problèmes face à la mort qui attend chacun de nous.
J'y trouve également un humour très noir et qui me correspond bien que ce soit dans cette nouvelle ou dans la dernière Seventeen qui nous relate le destin fasciste et terroriste d'un ado onaniste et frustré.
Bref c'est subtil, drôle, inventif, original, bien écrit.
Que demander d'autre?
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Sans en faire une obsession, j'essaye de découvrir les auteurs consacrés par le prix Nobel ; c'est ainsi que je suis tombé sur ce livre. Il est longtemps resté au chaud dans une pile, je ne savais même pas qu'il s'agissait de nouvelles.
Pour vous éviter de devoir chercher ailleurs (ce que pourtant vous devriez faire si cet auteur peut vous intéresser), je vous copie la présentation de l'éditeur :
"Les trois nouvelles rassemblées dans ce recueil appartiennent à la première période littéraire de Kenzaburô Oé. Elles ont pour protagonistes de jeunes ou très jeunes gens confrontés à une situation extrême, exprimée en termes métaphoriques ou réalistes, sexuels, psychologiques ou politiques. C'est dans une morgue, une maison de redressement, une famille en décomposition, un lycée et un groupuscule d'extrême droite que se développe cette violence, sous des formes diverses : la mort, la nausée, la mauvaise foi, la manipulation, la culpabilité règnent et brouillent l'univers mental des jeunes anti-héros".

Ce qui m'a frappé c'est la violence du propos opposée au raffinement de la langue : utiliseriez vous des termes rares et précieux pour décrire une morgue et des cadavres anciens? Comment choisiriez-vous votre vocabulaire et vos tournures de phrase pour évoquer une maison de correction pour adolescents tourmentés par leur culpabilité et leurs hormones? Associeriez-vous le style le plus littéraire à la naissance d'un fasciste monstrueux? C'est, vous l'avez deviné, ce que fait le tout jeune auteur, et je parierais volontiers que c'est ce qui l'a rendu célèbre. (Vérification faite, le pavillon d'or de Mishima a été publié juste un an avant la première de ces nouvelles : Mishima lui aussi célèbre dans une langue fastueuse les troubles des jeunes de cette génération profondément désorientés après le désastre de la guerre).

Je ne suis pas sûr d'avoir aimé ces textes, parce que c'est une lecture perturbante, mais je les ai admirés. Belle maîtrise à 22 ans, pour oser parler de la vie et de la mort, d'amour et d'avortement, de masturbation solitaire ou mutuelle, de la culpabilité ressentie, voire espérée, du trouble éprouvé à la vue d'une blessure ou d'un cadavre d'animal, de la fascination qu'exerce un discours fascisant sur un esprit torturé par le doute... et pour captiver son lecteur! Peut-être ce recueil est-il un catalogue de tout ce que l'adolescence peut avoir de douloureux, voire de morbide, catalogue animé par un tout jeune auteur qui ressemble à un chirurgien de l'âme tourmentée.
En tous cas, une découverte intéressante.
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Dans ce recueil de trois nouvelles, Kenzaburô Ôé explore avec une grande acuité les états d'âme, le désoeuvrement et les interrogations existentielles d'une jeunesse en perdition, ou plutôt en sustentation dans le doute et la confusion. Face à la mort, à la violence, aux espérances avortées, à la culpabilité ou aux idéologies extrémistes, les jeunes gens portraiturés dans ces nouvelles tentent de dégager un sens à leur vie. Tantôt malmenés, tantôt manipulés, que ce soit par leurs pulsions sexuelles, les idées morbides ou des élans politiques nauséabonds, leur esprit échafaude des principes ou des raisons, en quête d'une manière de tenir leur place dans le lieu où ils marchent.

Dans « le faste des morts », un étudiant en lettres accepte un travail dans la morgue de l'hôpital universitaire. Accompagné par le gardien des lieux et une jeune femme perturbée, il doit y faire de la manutention de cadavres. Déplacer et étiqueter des gens morts parfois depuis de nombreuses années, et qui flottent désormais comme des choses dans un liquide brunâtre chargé de puanteur. Au cours de cette journée au pays des oubliés, l'étudiant s'interroge sur ce qui sépare le vivant du trépas.

Dans « le ramier », un adolescent décrit son quotidien dans la maison de redressement où il est incarcéré avec d'autres délinquants. Il raconte les rapports de force et l'oppression sexuelle des plus grands sur les garçons choisis pour « femmes », les jeux morbides visant à accrocher des cadavres de petits animaux au mur d'enceinte, la manière dont l'admiration ou l'humiliation peuvent jaillir de rien. Il y est aussi question de culpabilité et de pardon à soi-même.

Dans « Seventeen », un garçon de dix-sept obnubilé par sa propre médiocrité et tout entier possédé par l'onanisme, lutte contre ses complexes dans une famille dysfonctionnelle et une société dans lesquelles il ne trouve pas sa place. Jusqu'au jour où son engagement auprès de militants d'extrême droite lui fait découvrir la voie qui fera de lui un « garçon élu ». Cette nouvelle s'inspire d'un fait réel, l'assassinat d'Inejirō Asanuma, président du Parti socialiste japonais par un garçon de dix-sept ans.
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Le faste des morts rassemble trois des premiers écrits de Kenzabûro Ôé, prix Nobel de littérature 1994 (1957, 1958,1963). Ces trois nouvelles révèlent avec éclat le talent de l'écrivain et méritent vraiment d'être lues, pour la finesse d'écriture et la capacité de Ôé à toucher le lecteur, à l'intriguer, à le bouleverser.

La première nouvelle, le faste des morts, première publication de l'auteur est très dérangeante car elle étudie les limites entre la vie et la mort. En effet un étudiant accepte un petit boulot, il doit déplacer les cadavres utilisés par la faculté de médecine d'une cuve de formol à une autre. Alors qu'il effectue ce travail dans la pièce exiguë du sous sol, la présence des morts s'impose à au personnage et par son entremise à nous, et, peu à peu, rend l'atmosphère suffocante : baignants dans le formol, les morts semblent évoluer dans un univers ou ils deviennent des êtres vivants qui se meuvent dans le liquide glauque disparaissants et apparaissants alternativement des profondeurs de la cuve, et donnent par leur odeur l'impression dérangeante qu'ils mènent une nouvelle vie, dans un univers sombre, parodie de leur vie terrestre et dont le formol rappelle étrangement le liquide amniotique dans le ventre des mères, ce qui peut laisser songeur. L'auteur veut-il nous signifier à travers cette nouvelle que les limites entre la vie et la mort, que l'on souhaiterai intangibles, sont inadéquates et qu'ils existe une vie après la mort ? Ou veut-il nous signifier que l'on ne dout pas oublier les morts ? Je laisse à chacun son interprétation personnelle... C'est d'ailleurs tout le talent d'Ôé, de réussir à entrer en resonnance avec ce qu'il y a de plus profond en nous, tout en traitant avec une grande habileté de sujet délinquants.

La deuxième nouvelle, le ramier, traite de la vie d'un jeune enfant dans une maison de correction. L'auteur parvient à nous attacher à ces jeunes enfants, qui sont des délinquants, en nous exposant, sans pathos assommant mais dans son style sobre et émouvant, la vie dure que les enfants mènent, entre vie matérielle rude, brimade des éducateurs. On est attristés de voir ces enfants qui confrontés aux dures lois de la société ne se comportent plus comme des enfants mais comme une bande aux attitudes dures et cruelle qui exerce sa violence sur les animaux et ou les conflits sont violents, en ce sens l'écrivain réussi à reproduire fidèlement l'univers d'une maison de correction. de plus les sentiment du personnage principal rendent le récit très intéressants, car il semble supporter le poids d'une culpabilités terrible et diffuse que rien de rationnel ne peut expliquer. Cette culpabilité insidieuse et gênante nous touche et semble l'arme utilisée par Ôé pour nous rappeler que bien que criminel, un enfant ne doit jamais être accusé par la société, de peur de retirer à tout jamais ce qui fait d'un enfant cet être si merveilleux : son innocence.

Pour la troisième nouvelle, voir ma critique de Seventeen.

Au final, un recueil talentueux, intriguant et qui mérite le détour, une excellente manière d'aborder Ôé !
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Shisha no Ogori, Hato, Seventeen
Traduction : Ryôji Nakamura & René de Ceccatty.

C'est un auteur qu'on m'avait beaucoup vanté - il a d'ailleurs reçu le Prix Nobel de Littérature en 1994 - et je n'ai pas été déçue. Les trois nouvelles qui composent "Le Faste des Morts" appartiennent à sa première période. On peut même dire que celle qui donne son titre au recueil a lancé la carrière de l'auteur.
"Le Faste des Morts" est l'une de ces nouvelles qui méritent une relecture. L'argument en est à la fois très simple et très macabre : dans une morgue, l'heure est venue de changer de cuve des cadavres conservés pour les dissections. le narrateur est un étudiant en lettres qui, afin de mettre un peu de beurre dans ses épinards, se charge de ce "petit boulot." Il l'accomplira en compagnie du gardien de la morgue et d'une autre étudiante qui est enceinte et désire se faire avorter.
Pas de sang, pas d'effets horrifiques mais une réflexion sur le rapport des vivants avec la Mort à la fois subtile et un peu déstabilisante : le narrateur finit par penser que les morts sont moins dérangeants que les vivants, beaucoup trop violents, torturés et prêts aussi à torturer leur prochain.
La seconde nouvelle, "Le Ramier", se déroule dans un centre de redressement pour adolescents. Plus longue, elle parle surtout de violence mais sans complaisance, de sexe, de châtiment, de douleur et de rachat tout en posant l'éternelle question : n'avons-nous pas tous en nous le désir de faire souffrir, voire de tuer ?
Quant à la troisième, la plus féroce peut-être mais certainement la plus ironique, elle fit scandale à sa parution, en 1961. Elle nous dépeint les premiers émois sexuels d'un adolescent de 17 ans - le titre est d'ailleurs "Seventeen" - qui, en révolte contre sa famille et son pays qui, à ses yeux, accepte sans broncher l'occupation américaine, cherche dans la vie sociale un exutoire à ses nombreux sentiments de frustration. Un jour, par curiosité plus que par conviction et poussé par l'admiration qu'il éprouve envers un condisciple, ce jeune homme qui s'affirme "de gauche" dans les premières pages, se rend à une manifestation orchestrée par l'extrême-droite japonaise. Et c'est la révélation : il trouve enfin un sens à sa vie.
Ôé avait imaginé une suite, intitulée : "Un jeune militant meurt". Fanatisé à outrance, le héros de "Seventeen" se risquait dans un attentat contre un leader socialiste, était arrêté et se pendait dans sa prison. Mais cette seconde partie, parce qu'elle se basait sur l'assassinat, en octobre 1960, d'Inejirô Asanuma par un militant nationaliste, déplut si fort à l'extrême-droite que le rédacteur de la publication dut présenter ses excuses publiques et qu'il fut décidé que plus jamais - en tous cas au Japon - elle ne serait republiée. Il paraît cependant qu'on peut la trouver dans une édition italienne.
Kenzaburô Ôé a également écrit des romans ("Le Jeu du Siècle") et des textes autobiographiques comme "Moi, d'un Japon ambigu" ou "Une famille en voie de guérison" et s'ils sont de la même tenue que ces trois nouvelles, le lecteur ne s'en plaindra certainement pas. ;o)
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Trois nouvelles sont regroupés dans cette ouvrage "Le faste des morts" 1957, "Le ramier" 1958, "Seventeen" 1963.

Le faste des morts : le narrateur, un étudiant en lettre trouve un travail temporaire à la faculté de médecine consistant à transporter des corps. Accompagné d'une étudiante enceinte et névrosée et d'un gardien, ils ont en charge le déplacement des cadavres d'une cuve à une autre "Baignant dans un liquide brunâtre, les corps se tenaient enlacés et leurs têtes se heurtaient.". le narrateur semble être en dehors de son corps. Il subit des remontrances du gardien pour ses maladresses, puis du professeur de médecine qui pensait qu'il faisait ce travail pour un intérêt académique . le rapport étrange de chacun des protagonistes avec les morts, ou des corps :"des choses sans conscience". Les pensées ou les échanges qu'il reçoit des cadavres : "Tu as violemment bandé, non ?", lui dit l'esprit ou le corps d'une fille flottant dans la solution de formol. Une erreur du secrétariat, les vieux cadavres devaient être embarqués pour être incinéré dans le crématorium. Travail inutile, heures supplémentaires… Un univers kafkaïen pour cette nouvelle, ou les protagonistes sont victimes de l'administration dans un travail inutile et qui semble sans fin, une atmosphère étrange et collante comme leur gants de caoutchouc.

Le ramier : Une prison d'adolescent, proche d'une décharge publique et d'un cloaque. La vie, les rapports des force entre les détenus. L'homosexualité entre les prisonniers encadrés par des surveillants sans humanité. Leur distraction qui est de collectionner des cadavres d'animaux et de les accrocher comme des trophées à un des murs. La recherche d'une punition du narrateur pour un crime pardonné: il saute du mur, se blesse, escalade de nouveau le mur pour sauter de nouveau et enfin se briser les os. Il est libéré.

Seventeen : Un jeune, sa fête d'anniversaire a été oublié. il semble transparent ou sans valeur aux yeux de sa famille : un père armé de principes libéraux qui a déserté de ses obligations de père. Il ne reste que sa soeur avec qui il essaye de discourir, mais rapidement à bout d'arguments, acculé et en larmes il la frappe violemment. Il s'adonne à la masturbation jour et nuit, il a la phobie de s'endormir, du néant qui accompagne le sommeil, il a peu de confiance en lui-même, une peur des autres qui se transforme en haine.

La honte qu'il éprouve de lui-même suinte de ses pores, il semble que tout le monde ne voit que ses dépravations. La compétition pour les universités qu'il n'assume pas. Un de ses copains, l'invite à venir faire la claque pour la "droite extrême :Action impériale". Il va écouter le discours démagogue parmi une foule de journalier. Ce langage simpliste plein de haine va trouver un écho dans son âme :"La voix de la révélation m'a touché". il va trouver sa place et être adopté dans ce groupe "Tu es un garçon élu" qui va le valoriser et lui permettre d' assouvir ses fantasmes de violence, de pouvoir et de vengeance. Il bascule et trouve dans ce parti la joie ultime d'appartenir à un groupe, d'être apprécié, respecté, et craint des autres : "Elle regarda mon uniforme à la lumière d'une ampoule nue embuée.Puis son visage se ferma, presque odieux, et elle baissa les yeux". Un sentiment exaltant qui ne le lâchera plus "j'aurais un orgasme qui durerait la vie entière", une sensation de pouvoir et de force qui ne tient aucunement à un engagement politique quelconque.

Trois nouvelles, que je trouve de niveau inégales mais qui finissent dans le paroxysme de seventeen. Elles mettent à nu les sentiments et les actions primaires de l'individu : comportement , sexualité, rapport humains chez des adolescents : "Tu as dix-sept ans. Tu ne veux pas saisir ta propre chair ?" .
Lien : http://nounours36.wordpress...
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Baignant dans un liquide brunâtre, les morts se tenaient enlacés et leurs têtes se heurtaient, certains flottant l'un tout contre l'autre, d'autres immergés à demi.

Ainsi débute la première nouvelle qui donne le nom à ce recueil, le faste des morts (Shisha no ogori en japonais). le ton est donné, il sera froid, cinglant et lugubre. Deux étudiants, pour arrondir leur fin de mois, vont devoir, sous la tutelle d'un gardien zélé, transférer des cadavres d'un bassin à un autre afin que les étudiants en médecine puissent avoir les meilleurs spécimens, du moins les plus récents. A noter que les corps putréfiés se sont accumulés au fil du temps, certains ayant coulés tout au fond de l'eau suintant la putréfaction.

Ce postulat extrêmement morbide sera traité radicalement par son jeune auteur qui en fera un manifeste puissant sur l'absurdité administrative et l'industrialisation de la conscience humaine, le tout baignant dans un détachement stylistique faussement clinique et aussi éprouvant que fascinant. Absolument tout est détaillé, les gestes, les techniques, la procédure, les odeurs, la texture… C'est une immersion complète dans ce microcosme putride. Il n'est pas interdit d'y trouver une forme d'humour noir, ne serait-ce qu'en songeant que ce lieu mortifère et besogneux sert avant tout à une élite sociale chargée de sauver des vies.

Le faste des morts est un texte dérangeant, à la fois repoussant et désespéré. Kenzaburô Ôé fait preuve d'une complexité littéraire confinant à une brutalité inédite, créant des contrastes irréconciliables et pourtant poreux entre la vie et la mort, la chair et l'esprit, le chaos et l'organisation.

La suite sur mon site : https://lirealombredelolivier.wordpress.com/2023/09/17/le-faste-des-morts-kenzaburo-oe/
Lien : https://lirealombredelolivie..
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Il s'agit d'un recueil de trois nouvelles :

Le faste des morts
Le ramier
Seventeen

Les trois sont des récits fait à la première personne, par des adolescents ou jeunes adultes, en proie à un vide intérieur, un manque de perspectives, un difficile passage à l'âge adulte dans un monde désespérément sans repères.

Le faste des morts :

Un texte d'une écriture splendide, où un jeune étudiant en lettres, pour gagner un peu d'argent accepte un travail à la fac de médecine, il est chargé de transférer les cadavres destinés à la dissection d'une cuve à une autre. Il travaille avec une jeune étudiante, qui lui confie d'être enceinte et de travailler pour pouvoir se payer un avortement. Une étrange communion s'établit entre l'étudiant et les cadavres, qui exercent sur lui une étrange fascination.

Le ramier

Le héros est un préadolescent placé en maison de redressement ; il décrit le quotidien du groupe des jeunes dont il fait partie, et évoque l'étrange relation qu'il va établir avec le fils adoptif du directeur de prison.

Seventeen

Le héros de cette nouvelle fête ses 17 ans au moment où débute la nouvelle. Extrêmement perdu, son occupation principale consiste à se masturber. Il a un mal fou à se trouver une place, ou un but dans la vie, et se laisse entraîner dans un parti d'extrême droite.
Cette nouvelle a pour point de départ un fait divers, l'assassinat par un jeune homme militant d'extrême droite du chef du parti socialiste. le texte proposé ici avait une suite où l'assassinat et le suicide jeune homme étaient décrit. Cette partie a suscité des vives attaques de l'extrême droite, allant jusqu'aux menaces de mort à l'encontre de l'écrivain. A la suite de ces attaques, Ôé a décidé de ne plus jamais publier cette partie controversée, considérant d'ailleurs qu'elle n'apportait rien au texte, et que la première partie se suffisait largement à elle-même. le style qu'il adopte dans ce récit est très spécifique, il y parodie la phraséologie d'extrême droite, et le discours même du jeune homme par rapport à ses difficultés d'adolescent est par moments très drôle, ce qui n'arrive pas dans les deux textes précédents.

Trois textes éblouissants, complètement maîtrisés, Ôé semble nous décrire des personnages très réelles, très denses, très désespérés, d'une façon très réalistes, en nous donnant à ressentir leur quotidien dans les choses les plus banales mais aussi en nous faisant entrapercevoir le plus intime et le plus impalpable de leur vécu intérieur, leur monde fantasmagorique. Des textes très forts, qui ne peuvent laisser insensible.
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