Amamiya Hatoko occupe seule une vieille maison traditionnelle, au rez-de-chaussée se trouve la boutique où elle travaille. Depuis la mort de l'Aînée, sa grand-mère elle a repris
la papeterie Tsubaki.
« Et maintenant que son corps avait disparu, elle continuait à vivre dans les calligraphies qu'elle avait laissées. Son âme les habitait. C'était ça, l'essence de l'écriture. »
Les femmes de sa famille sont écrivains publics et calligraphes depuis des générations. Elle avait six ans quand elle a tenu un pinceau pour la première fois, il avait été fabriqué avec des mèches de sa chevelure de bébé. Toute son enfance, elle s'est entraînée à faire des ronds, la base essentielle d'une belle écriture, elle a appris à tracer les Kanjis signes assimilés à des caractères chinois, elle a passé ses années d'écolière à calligraphier sans arrêt. On la sollicite pour écrire tout ce qui est difficile à dire en face. Elle écrit tout ce qu'on lui demande pour venir en aide aux gens.
Tour à tour, Hatako va donc écrire :
Une lettre de condoléances pour la mort d'un singe, un billet doux qu'une jeune élève souhaite envoyer à son instituteur. Une lettre banale d'un homme à une amie d'enfance juste pour dire qu'il est en vie. Une lettre d'amour depuis le paradis pour une veuve qui attend chaque jour des nouvelles de son mari
Elle va aussi rédiger un faire-part de divorce pour prévenir tous ceux qui avaient béni cette union. Une lettre de refus de prêter de l'argent à un solliciteur. Bien entendu chaque fois elle n'oubliera pas d'offrir une tasse de thé ou une boisson à ses clients.
Ce roman est un ravissement, d'une douceur extrême, il nous plonge dans le japon des traditions où la beauté de l'écriture est au-dessus de tout, où l'on prend des cours pour apprendre à servir le thé, où l'on réduit en cendres, le 3 février, les lettres reçues au cours dans l'année, lors de cérémonie de l'adieu aux lettres. Au rythme des saisons, nous accompagnons Hatako dans son travail d'écrivain public. Nous suivons tout le rituel, les gestes ancestraux de l'art de la calligraphie. Tout d'abord, il faut utiliser le stylo-pinceau, stylo-plume, plume d'oie ou stylo à bille le plus adapté, ensuite il faut fabriquer l'encre, ensuite choisir le grammage du papier dont le toucher révélera la bienveillance et la douceur de l'expéditeur, surtout bien penser à incliner plus ou moins les lettres en fonction du degré de politesse choisi. Ensuite, il faut tracer d'une main bien claire l'enveloppe véritable visage de la lettre, le timbre sera lui sélectionné en fonction de la sensibilité de l'expéditeur.
Je remercie Aline et Nadine qui m'ont invité à pousser la porte de
la papeterie Tsubaki. Vous aussi entrez et découvrez cette boutique pleine de tendresse, d'amour, de partage, d'entraide. Une écriture délicate et précise, un vrai bonheur, une ode à l'écriture dans un monde où l'on communique de plus en plus par mail ou par SMS. Un roman qui donne envie de prendre un stylo-plume et d'écrire aux gens que l'on aime.
« On a du mal à jeter, à peine lue, une lettre qui nous est adressée. Même la plus humble carte postale, du moment qu'elle est manuscrite, garde la trace vivace de l'esprit et du temps de celui qui l'a rédigée. »