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EAN : 9782810701469
200 pages
Presses universitaires du Midi (20/05/2011)
3.75/5   2 notes
Résumé :
Heinrich et Grete tombent amoureux mais, sitôt l'acte consommé, l'homme va rapidement délaisser la jeune femme. Leur histoire, inspirée du Faust de Goethe, est racontée par trois couples d'amis et se dessine en creux à travers des conversations décousues ou de grandes envolées. En reprenant le mythe de Faust, la pièce interroge le tragique contemporain et renvoie le reflet d'une société marquée par un utilitarisme des plus étroits. "L'homme n'est pas un loup pour l'... >Voir plus
Que lire après Faust a faim immangeable margueriteVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Faust n'a pas cette soif de connaissance qui le caractérise dans la pièce de Goethe.
C'est pire. C'est horrible. Il a faim. Et il veut de l'humain.
Malheureusement, Marguerite s'avère immangeable.
Le diminutif de Marguerite (Grete), signifie : arête.
Faust, il lui reste cette arête en travers de la gorge, Grete, et il s'étouffe.

Voilà pour le titre.

Dans cette pièce, la distribution surprend parce que personne n'incarne, ou tout le monde incarne, Faust et Marguerite. Il n'y a pas de corps pour les figures du mythe, alors les autres prêtent leurs corps (ou vendent leurs âmes) pour l'incarnation du mythe. L'auteur barre textuellement les personnages qui incarnent tour à tour les personnages de Goethe. Et c'est ainsi qu'on nie l'humain, en faisant un trait dessus, tout simplement.

La pièce commence au niveau -1 avec une speakerine qui fait son speech. Cette voix off qui sort de la télévision (ou de la scène), c'est le programme télévisuel de la pièce. À vous de comprendre quel genre d'émission c'est. C'est une affaire locale qui, personnellement, m'a fait penser à une histoire réelle. Les faits : une femme est au volant de sa voiture, elle prend des virages et le texte prend des virages aussi, s'interrompt là où on ne l'attend pas.

VOIX
"elle les connaît tous
tous les virages un par un
les virages ont toujours été
ont été dès le début
et même avant le début
ces virages elle les a"

En fait, on ne le sait pas encore, mais ce début, c'est la fin. C'est super déstabilisant comme pièce.

Ensuite, on a un prologue (niveau 0) [pas de ciel] et les personnages chutent. Ewald Palmetshofer a étudié la philosophie, la psychologie, la théologie, et là, c'est une réécriture de cette chute de Satan. C'est ainsi qu'il introduit le personnage de Méphistophélès (absent du titre mais essentiel, comme dans la pièce de Goethe). Les personnages sont ceux qui sont annoncés au début de la pièce mais ils semblent désincarnés parce qu'ils incarnent quelque chose qui les dépasse.

Et puis, on a le niveau 1. Où les acteurs incarnent véritablement leurs rôles. On a des couples, qui se réunissent pour un dîner de cons euh non, pour une soirée sympathique entre amis, et on ne partage pas véritalement un repas parce que le concept à la mode, c'est "bring what you eat". Deux couples accueillent pour la première fois le jeune couple (AnneFritz) qui vit à l'étage au-dessus, parce qu'ils ne sortent pas souvent, ayant un enfant en bas-âge, mais c'est bon, ils viendront avec leur babyphone.

" on allait les inviter
parce qu'une famille comme ça, il faut quand même un peu l'intégrer"

"je crois qu’ici tout le monde intègre tout le monde
ça aussi c'est absurde"

Et puis, Paul invite ( j'ai écrit -invente- mais je corrige) un pote à lui, LUI. Il n'amène rien à manger lui, juste un pack de bières ( mais ils préfèrent le vin) mais tant pis, il s'occupera de la musique.

Ils font ça souvent, parce que la prochaine fois, Anne invitera une autre femme, ELLE parce que voilà quoi, un homme seul, ça les embête ces couples alors ils jouent les entremetteurs, comme Méphisto.
Quand les femmes fument sur le balcon, elles jettent les cendres en bas. C'est pas grave si les tomates du voisin d'en-dessous crèvent ; elles sont déjà crevées.

Voilà pour l'histoire de fond, la base la plus solide de la pièce, sur laquelle s'appuie le lecteur à la lecture de ce texte déroutant.

Cependant, certaines scènes (des monologues) interrompent le déroulement de l'action et on sait d'emblée, en lisant, que c'est des scènes à part, parce que les noms des personnages sont barrés (et on sait que c'est Faust et Marguerite qui parlent et on découvre qu'ils sont méphistophéliques eux aussi). Personnellement, j'adore l'idée. L'ami de Paul est autant Faust que Méphisto, lui qui bosse dans l'humanitaire mais qui abandonne cette femme après l'avoir possédée ( ceci n'est pas un spoil). L'amie d'Anne, c'est autant Marguerite que Méphisto, elle qui travaille dans le social et qui s'occupe des enfants ... Le mythe de Faust, c'est violent, très violent et on le redécouvre à la lecture de cette pièce. Les couples, c'est des vrais couples et on est loin, très loin, de l'idéal amoureux. Les personnages s'entre-dévorent, comme dans le mythe, où l'innocence est sacrifiée. La Faim, cette force scénique, cette énergie qu'on attend férocement du théâtre, dont parle Antonin Artaud, elle est là. À la lecture de cette pièce, il y a pas mal de choses à digérer ; y compris les longues tirades, sans interruptions, un flux d'informations, un "flux de marchandises" que l'auteur nous vend comme dans la longue tirade de Fritz(barré) sur la société de consommation et sur la digestion, parce que "nous sommes des latrines" nous qui consommons pour tout rejeter, en masse bien dégueulasse, pollueurs que nous sommes.

S'il y a des intéressés, et que vous hésitez à découvrir cette réécriture postmoderne de Faust, qui est on ne peut plus particulière, un peu bizarre, que j'essaie néanmoins de décrire, parce qu'elle a de la valeur à mes yeux, je veux bien recopier certaines tirades sur la consommation, sur le corps de la femme, ou sur le capital (dés)humain (de cette pièce).
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
[...] peut-être qu'il faut parier sur l'existence d'une substance dans l'être humain et c'est comme un versement, un versement de dividendes à partir de l'être humain, le fait que tu mises sur lui, que tu mises un capital sur l'être humain et qu'il se mette à verser des dividendes d'intériorité, mais seulement si on tire de soi un investissement et un capital, et qu'un effet d'intériorité se déverse depuis la surface, peut-être, qui ne se serait pas produit sans une spéculation risquée, et c'est pour ça que tu prends un crédit sur cet être humain et que tu le crois capable d'une intériorité sous la surface de sa peau, tu lui en fais crédit, pour qu'une production puisse se développer en lui, et ça, des milliers de fois déjà, tu as déjà investi dans un être humain pour une production de plus-value, tu as spéculé sur une intériorité qui lui insuffle une substance et produise en contrepartie une création de valeur, peut-être, dont on n'aurait pas cru capable cette surface, cette surface d'être humain et qui laisserait transparaître une substance à contre-jour, qui devrait la laisser transparaître, à condition qu'on y injecte et qu'on y transfère un capital suffisant, et que, par un effet secondaire de ta spéculation, une plus-value d'intériorité soit fabriquée dans cette surface d'être humain et que le capital t'ait appris à créer ex nihilo, et tu te projettes vers une création, une création de valeur humaine et tu abordes cet être humain avec un endettement que tu peux à peine te permettre, et tu lui as déjà financé son intériorité des milliers de fois, la production d'une intériorité, tu lui auras acheté cher son âme, si une production démarre avec ton capital, parce que cette âme dans l'être humain, elle ne peut pas croître comme ça, on ne peut pas la booster, cette âme, elle se déverse du néant, ou peut-être pas, et puis à un moment donné, au terme d'une longue injection de capital, tu abordes cet être humain fortement subventionné, il faut bien s'assurer de la localisation de ce capital qu'on a transféré, il faut vérifier, et donc tu le tiens vraiment à contre-jour et tu lui retournes son intériorité et tu lui fais un contrôle de caisse, tu lui fonces dedans et tu le retournes, comme une chaussette [...] et il n'en sort qu'une chaussette et résultat, tu as gaspillé un bon capital et tu t'es bien gouré dans ta spéculation [...]
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PAUL [...] mais si on est tous ici trop ringards pour toi
rien ne t'oblige à
je veux dire, personne ici cherche à t'intégrer contre ton gré
je sais, va, que tout ça te paraît bien trop superficiel - nous,
qu'il manque un noyau dur, une substance - à nous
mais ça m'intéresserait de savoir ce qu'il reste
quand on voit de substance nulle part et qu'on supporte pas non plus
[la superficialité
ça m'intéresserait vachement de le savoir

ROBERT peut-être un peu trop de merde postmoderne dans la tête
je me dis
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Personnages :

Paul
Inès
Fritz
Anne
Robert
Tania

Faust et Marguerite manquent dans cette liste. Ils sont joués par les six autres personnages. Quand le nom d'un personnage est barré d'un trait, cela signifie que le personnage en question est en train de jouer Henri [ou Faust] ou Marguerite. On ne connaît pas leur véritable nom.
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[...] les gens se rassemblent en parlant et en bouffant et ouvrent pleins de grâce la voix du peuple nous la faisons entendre et invitons, invitons les autres dans la gueule du peuple par l'ouverture du corps collectif, corps gras, où il reste un peu de place pour quelques autres, qu'on intègre et incorpore volontiers
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