Lors du deuxième mandat d'
Obama, le monde plonge dans l'obscurité et une mort vivante et dévorante. Des hordes de morts déferlent sur la planète. Nul ne semble savoir ni pourquoi, ni comment ; et ces prédateurs anthropophages ne laissent à l'humanité qu'une alternative : courir ou crever. Un pitch classique pour toute oeuvre qui traite du phénomène zombie. Cependant avec
Olivier Peru à la plume, on est certain que cette banalité va se muer en référence. le prologue de ce tome s'ouvre sur les grands vainqueurs de cette lutte sans pitié pour la préservation : leurs majestés les mouches. Très sartrien en l'espèce. le sous-titre n'est de plus pas choisi au hasard et notre fameux prologue va reprendre la mécanique de la Divina Commedia de
Dante en nous proposant un protagoniste en quête de rédemption. Ce dernier nous introduit au véritable personnage principal, Sam, qui va devenir un salaud de circonstances. Car dans ce monde décrépi « Plus de règles, plus de morale, juste le désir de vivre encore un peu ». Avec un humour froid et noir, Peru nous relate les aventures d'un héros qui doit tuer l'être humain qu'il était pour s'adapter à son nouvel environnement. L'espoir reste toutefois en toile de fond : le paradis se maintient en arrière-plan, en écho au chant italien, et ce grâce à une poignée d'autres survivants. Tous les ingrédients d'une bonne tragédie sont réunis. le dessin est magnifiquement pris en charge par Sofian Cholet grâce à une mise en cases classique, mais aussi efficace qu'un alexandrin, assurant une cohérence d'ensemble, et une excellente mise en tension dramatique. Les plans larges montrent de belles perspectives, des milieux urbains vides, froids et hostiles sous un trait mature et réaliste. Cholet sait user des différents types de plans pour mettre en valeur la force de l'action. de plus, ses morts-vivants sont suintants, dégoulinants et décatis à souhait, un vrai bonheur. Les vivants bénéficient du même soin : couturés, angéliques, expressifs, ou totalement fermés, tous ont une personnalité physique propre. de son côté, le coloriste
Simon Champelovier utilise une palette de couleurs sépia ou neutres qui accusent la violence de l'univers sanglant de ses acolytes, et exacerbe la profondeur du dessin. Edité par Soleil dans la collection Anticipation, l'objet en lui-même est désirable et bénéficie d'un vernis sélectif en couverture. On cultive le paradoxe pour tenir en pages de telles horreurs. Cette bande-dessinée, loin d'être une énième variation sur un thème surexploité s'avère être aussi délicieuse qu'un cervelet après son café du matin.
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