Voilà un petit roman qui m'aura agréablement changé de mes habitudes de lecture !
Petite précision avant de continuer ; je ne connais pas du tout
Shakespeare, et à peu près autant l'univers du théâtre. Ca ne m'a pas empêchée d'être emportée par ce récit.
La première chose qui m'a marquée en commençant ma lecture est le rythme et la plume de l'auteur. C'est rythmé et poétique, avec une alternance de phrases longues (plusieurs lignes) et d'autres courtes, en fonction de l'action en cours. Nous plongeons d'ailleurs directement dans l'action du roman, et dans la représentation de
la Tempête que David donne à sa fille.
L'immersion (sans mauvais jeu de mot, puisque nous arrivons au milieu d'une tempête qui va faire naufrager un navire) est très facile, et l'on comprend rapidement ce qui se passe. Sans aucun dialogue, à part quelques répliques de la pièce, l'auteur réussit le tour de force de nous montrer la journée d'un père et sa fille, et de nous la faire ressentir. Petit à petit, la pièce de théâtre se met en place, adaptée par le narrateur pour accrocher sa fille de deux ans, et, à travers elle, le lecteur.
Il réussit à condenser l'action de cette oeuvre de
Shakespeare en quelques lignes, et en même temps à en faire ressortir toutes les implications de l'époque.
C'est une jolie manière d'impliquer un néophyte tout en faisant découvrir un nouvel aspect de la pièce au connaisseur de
Shakespeare.
Dans la suite du texte, et notamment dans l'interlude, on en apprend un peu plus sur le contexte de la journée, ainsi que le background de David. Beaucoup de choses s'emmêlent, comme dans la tête du narrateur, entre considérations politiques, analyse du théâtre sur deux époques différentes ou encore réflexions autour de l'art et de sa place.
Ca ne m'a pas perdu, et je n'ai pas non plus trouvé cela excessif ; David nous donne ici sa vision des choses, à travers le prime d'un intermittent du spectacle et des difficultés qu'il peut rencontrer. En tant que lecteur, nous sommes impliqués dans cette réflexion : l'écriture, après tout, est aussi une forme d'art et de création. Les livres ont une place dans la Culture, mais elle va en s'amenuisant avec la préséance des écrans. L'implication dès le plus jeune âge dans la lecture ou le conte, comme le fait David avec sa fille, a son importance dans la continuité de la littérature (même si je reste dubitative, par expérience, sur la capacité de compréhension de ce que David expose à deux ans et demi ^^').
J'ai également beaucoup apprécié le parallèle entre le temps à l'extérieur de l'appartement, la pièce qui est jouée par David et
la tempête intérieure du personnage, sur son avenir et ses choix de vie entre autres. Les uns répondent aux autres, dans une mise en abyme qui entraine le lecteur.
J'ai eu cette impression que le narrateur a avancé sur ses blocages intérieurs, sur ce qui l'empêchait d'entreprendre quelque chose de nouveau.
C'est d'ailleurs mon seul regret sur cette lecture. En tant que récit tranche de vie, on suit les personnages pendant quelques heures, mais on les quitte tout aussi brusquement. Ca donne un intérêt particulier au roman, mais le lecteur reste complètement dans le flou sur le reste : quelle suite pour David et sa famille?
Ma Tempête est un roman court mais aussi très riche ; en réflexion et en images fortes, tout en permettant la (re)découverte d'un classique du théâtre. Un tour de force en si peu de pages, que je conseille à tout ceux qui veulent sortir de leurs habitudes de lecture, le temps d'un orage de quelques heures.
Lu dans le cadre de la Masse Critique de septembre :)