Bérénice est une tragédie écrite par Racine en 1670. Eternel grand rival de
Corneille, ce dernier publiera son propre ouvrage,
Tite et Bérénice, à seulement une semaine d'intervalle du
Bérénice de Racine.
C'est une histoire tragique facilement à comprendre. En effet,
Bérénice aime l'empereur de Rome, Titus, mais Titus ne peut pas continuer à aimer
Bérénice, à cause des lois romaines qui lui sont imposées. Les personnages sont en prise avec leurs passions, ils s'aiment, mais ne peuvent pas s'aimer pleinement. Car
Bérénice est une reine étrangère. Après la mort du père de Titus, celui-ci se retrouve à la tête de l'état et renvoie
Bérénice avec la formule latine "invitus invitam" qui signifie "malgré lui, malgré elle. le dilemme amour et honneur qui gouverne le récit m'a très clairement rappelé une pièce de son rival,
Corneille. En effet, dans
le Cid Chimène est tiraillée entre son honneur, bafoué par Rodrigue, mais son intense amour pour ce dernier. Une décision dure à prendre, tout comme l'est celle de Titus.
Dans ce recueil, les passions sont questionnées. On assiste à un triangle des passions, avec comme personnages principaux : Titus,
Bérénice et Antiochus, serviteur de Titus et amoureux de
Bérénice. Chacun d'eux est tiraillé par une contradiction interne qui les empêche de se réaliser pleinement : Titus est à la fois amant et empereur,
Bérénice femme et reine, Antiochus ami et amant.
Ne vous attendez pas à une énorme quantité d'action. Dans
Bérénice, il ne se passe rien, tout naît de la parole. Une parole lyrique où transparaitra l'expression des sentiments intérieurs des personnages, qui se livrent sans retenue aux lecteurs. Une parole amoureuse, qui sera rapidement critiquée et rapprochée de la poésie pastorale. Ce manque d'action sera une spécificité qui lui sera longuement reproché ; il ne se passe tellement rien que la pièce sera très peu jouée.
La vision tragique est mise en avant : nous avons deux personnages qui se retrouvent anéantis par la fatalité de leur destin. Ils sont tous les deux amoureux l'un de l'autre, mais ils ne peuvent pas s'aimer. Les trois personnages souffrent en se laissant aller à l'élégie. Dans leur grand désespoir, ils vont tous aller jusqu'à évoquer la mort par suicide, tant ils sont minés par ce destin tragique qui s'abat sur eux. La pièce se clôturera d'ailleurs par un bref mot prononcé par Antiochus, "hélas", touche forte en faveur de la déploration.
J'ai pris beaucoup de plaisir à étudier cette oeuvre. L'étude psychologique des sentiments est très intéressante, tout comme l'acceptation (ou non) du dilemme - ils s'aiment mais doivent se quitter.
Bérénice est vraiment une femme que j'aime beaucoup et que j'admire énormément : elle aime un homme qui ne peut pas l'aimer parce qu'elle est étrangère. Elle va donc renoncer et accepter les aléas du destin. Malgré l'expansion de ses sentiments intimes et l'humiliation du renoncement de Titus, on ressent une force de caractère phénoménale qui fait d'elle une vraie reine, digne des plus grands honneurs. Ravie de cette lecture !
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