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2,66

sur 243 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Un grand merci tout d'abord à Babelio et aux Editions Gallimard pour m'avoir proposée la lecture de « La chambre des époux » d'Eric Reinhardt.
Difficile de définir ce livre : roman autobiographique- Autobiographie et roman ?
En 2006, Eric Reinhardt, alors qu'il écrivait « Cendrillon » apprend que sa femme Margot est atteinte du cancer du sein. Mais, au lieu de laisser son écriture pour un temps afin de la soutenir, elle le supplie justement de terminer ce roman pour être ensemble comme dans une bataille conjointe. L'auteur, qui aura souvent envie de lâcher prise, va alors trouver la force pour écrire ce roman, puisant justement cette force dans le combat de sa femme contre la maladie, son amour pour elle, leur amour. Pour elle, parce que son combat à elle est bien plus grave et difficile, il a l'obligation de finir ce roman. Comme un mantra, une incantation qu'il se répète. Cette bataille qu'ils vont vivre ensemble, se soutenant mutuellement, va renforcer leur amour. La transcender plus encore.
Par la même, dans ce contexte, il nous raconte comment son écriture n'a plus le même ton, ses mots sont comme transportés par ce qu'ils vivent, ce qu'ils ressentent tous les deux.
Au cours d'un dîner, il croise une femme dont il se souvient qu'elle était, elle aussi, gravement malade et qui a été guéri « miraculeusement », alors que les médecins ne lui laissaient que quelques mois à vivre. La maladie de sa femme, quant à elle, est en cours de rémission. Et croiser cette femme le bouleverse. Elle lui rappelle bien-entendu toute cette difficile période vécue avec Margot, lui rappelle combien il l'aime. Et cette femme, en vie, dégageant de son être toute la représentation de la vie, lui donne une beauté, une luminosité incroyable au point de la désirer. Et alors qu'il ne s'était jamais allé aux larmes, à l'apitoiement durant la période de cancer de sa femme, là, il craque. Les émotions sont trop fortes. Il laisse tout déborder.
C'est notamment cette rencontre qui va lui donner l'idée d'un roman tiré de ces émotions diverses. Alors, peu à peu, on glisse vers le roman. On retrouve certaines phrases identiques à ce qu'il avait écrit pour lui-même et sa femme, mais avec d'autres personnages. (J'ai dû faire quelques aller-retours pour vérifier si tout était répété à la virgule près ou non).
Le héros est son double. Nicolas, compositeur de musique, apprend que sa femme Mathilde est atteinte d'un cancer et elle lui demande de terminer sa symphonie « La belle au bois dormant » (comme un double du roman « Cendrillon »). Et comme des doubles, toutes les femmes ont des prénoms commençant par M : Margot, Mathilde, Marie... La/les femme(s) qu'il aime(nt) (qu'il M, on l'aura compris).
Ce roman, Eric Reinhardt ne le terminera jamais, mais il écrira les romans qu'on connaît, notamment « Cendrillon » et « L'amour et les forêts ». Pourtant, dix ans plus tard, parce que le cancer est loin derrière, cet auteur nous raconte cette période, y mêlant les épisodes de sa vie avec ceux romancés de ce musicien et de sa femme, commentant son travail d'écriture ou n'étant que spectateur/narrateur du roman sur lequel il réfléchit, il imagine.
Les récits sont mêlés, approchant parfois la frontière de l'emmêlement et de la confusion (les situations, les prénoms si proches, si copier-coller). Même dans la deuxième partie « romancée », l'auteur est toujours omniprésent (ce qu'on peut trouver original ou qui peut déranger). de bout en bout, Il nous fait la chronique de cette période, de tout son travail d'écrivain, ses pensées, ses interrogations et analyses mais aussi ses désirs. Des désirs d'ailleurs un peu extrêmes qu'il a -en quelque sorte- pu assouvir par le biais du héros Nicolas, qu'il a fait aller plus loin dans l'expérience amoureuse.
Le double Nicolas est un peu « too much » à mes yeux, un peu trop super-héros. Parce qu'il va forcément composer une symphonie qui va tellement émouvoir les gens, qui forcément va aller se produire dans les plus grandes salles de concert internationales, qui forcément va chercher à sauver la deuxième femme, etc. Cela en devenait plus qu'agaçant.
Et j'ai regretté cette 2ème partie alors que l'idée de base était intéressante, voire originale. Sûrement aussi que mon côté un chouia féministe n'a pas apprécié le(s) rôle(s) qu'il a fait tenir à « ses » femmes (un peu égoïste quand même notre Superman. On ne peut pas avoir toutes les qualités ! Ni être le parfait prince chevalier servant qui va sauver sa « belle au bois dormant » parce qu'il en a même perdu de son autodérision de la 1ère partie). Sans parler des étreintes et coïts amoureux avec une femme atteinte d'un cancer que je n'ai pas trouvées crédibles. J'ai parfois ressenti du malaise à lire certaines « scènes » au point que son style d'écriture commençait à me lasser. Dommage qu'il ne soit pas arrêté à la partie autobiographique.
Par contre, j'avoue qu'il a été assez inspiré de ne pas avoir, finalement, écrit ce roman (dont il avait déjà le titre « une seule fleur »). Pour ma part, je ne suis pas sûre que je l'aurais aimé ! (possible même que je l'eus lâché en cours de route par exaspération, de mon bras « bionique » à la super Jaimie, bien sûr…).
Pourtant, parce que cela parle de moments douloureux, de la maladie, de la mort mais bien plus encore de la vie ; parce que cela parle de la beauté de la vie et de ce tout ce qu'elle nous offre de beau (l'art, la littérature, la musique, la nature, les lieux magiques comme l'Italie et tant de choses encore) ; parce que cela parle de corps, abimés, usés par la maladie, mais aussi d'amour entre un homme et une femme, de l'amour d'Eric Reinhardt pour sa femme, j'ai été assez touchée par ce livre (la 1ère moitié, s'entend). Car il reste un témoignage d'amour.

Pour la petite anecdote, les petites coïncidences de la vie (mais la rentrée y est un peu pour quelque chose): une amie avait pris deux places pour l'enregistrement de deux émissions « le masque et la plume » de France Inter. Pour la partie littéraire qui sera diffusée le 28 Août, parmi les livres commentés, il y avait celui de Reinhardt .
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Son roman « L'amour et la forêt » m'avait beaucoup plu. « Cendrillon » m'était tombé des mains, et celui-ci, eh bien...je ne m'attendais pas à ça du tout. La quatrième de couverture était bien alléchante, et puis patatra, je referme ce livre en me demandant si j'ai bien tout compris ;-)

J'ai aimé le thème de ce roman gigogne : accompagner un être chère dans sa lutte contre la maladie grâce notamment à la musique. L'auteur fait l'éloge de l'amour, de la beauté et de l'art. Complètement d'accord avec la quatrième de couverture pour cela "Éric Reinhardt livre ici une saisissante méditation sur la puissance de la beauté, de l'art et de l'amour".
« Il faudrait toujours se comporter, quelles que soient les circonstances, de manière à devenir nostalgiques. C'est à dire produire de la beauté. Quelles que soient les circonstances, coûte que coûte, objectif obsessionnel, produire de la beauté. Même avec un cancer. Surtout avec un cancer. La beauté du présent, d'être ensemble, de se battre, de s'aimer. L'intensité et la rareté. le cancer peut être vécu comme quelque chose de positif. Son traitement ouvre une période pendant laquelle on chemine vers une libération. »
C'est l'histoire dans l'histoire qui m'a gênée, m'a perdue à plusieurs reprises, et a interrompu le charme qui naissait, renaissait pourtant.
C'est dommage.
A relire donc pour moi, plus tard, après avoir pris le temps d'écouter l'auteur parler de son roman afin de mieux comprendre ses choix.
Faites-vous votre propre avis...les 176 pages de ce roman se lisent très vite.
« Décider d'être deux plutôt que seul, fusionner et être plus fort et plus intelligent, plus enjoué, plus déterminé, plus patient, plus réfléchi, plus résistant, plus ingénieux, plus perspicace sur le chemin de sa vie parce qu'on est deux, parce qu'on a choisi d'emprunter à deux le même chemin tout en gardant ses rêves à soi et des visées distinctes, c'est une façon comme une autre, je crois, de concevoir l'amour, peut-être aussi la plus belle, peut-être même la seule en réalité. »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Alors que sa femme est atteinte d'un cancer du sein, l'auteur va se battre en même temps qu'elle, pour terminer son livre en cours afin qu'il sorte quelques mois plus tard, lorsqu'elle sera guérie. Ils ont donc mené un combat conjoint : elle lui a donné la force d'écrire, il lui a donné la force de guérir. Peu de temps après, il rencontrera Marie, une jeune femme, qui vient de sortir d'un cancer du pancréas. Elle est pleine de vie et l'auteur va être attiré par cette femme, tout en ayant peur qu'une récidive vienne la frapper. L'idée que Marie puisse mourir lui est insupportable et le ramène à la peur qu'il a eu de perdre sa femme. Jusque-là, j'ai apprécié ma lecture. C'est après que cela se complique. L'auteur doit trouver l'inspiration pour ces prochains ouvrages et il va réfléchir à une histoire dans l'histoire puisqu'il va imaginer un couple Nicolas et Mathilde, lui compositeur et elle atteinte d'un cancer incurable. Nicolas va créer une symphonie pour sa femme et va lui permettre ainsi de guérir. Au printemps de l'année suivante, il rencontrera Marie, qui a réchappé d'un cancer du sang, particulièrement agressif, qui aurait dû la laisser sur le carreau. Un an plus tard, il apprend que Marie a rechuté et qu'elle est condamnée. Il décide de tout plaquer et de partir à Milan la rejoindre.
Je n'ai pas compris l'intérêt de cette histoire dans l'histoire, difficile de suivre entre les 2 situations similaires. Je n'ai pas compris Nicolas, partagé entre 2 femmes qu'il aime, abandonnant femme et enfants, pour partir vivre au côté d'une femme qu'il n'a connu en tout et pour tout que quelques heures et l'assister dans les derniers mois de sa vie. Et il revient ensuite, après le décès de Marie, auprès de Mathilde comme si rien ne s'était passé... Je suis peut-être passée à côté de ce livre…
Je remercie tout de même Babelio et Folio pour l'envoi de ce livre.
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Oh que j'avais adoré "L'amour et les forêts" et que j'avais hâte de le rencontrer à la libraire Chapitre.be de Louvain-La-Neuve.

J'avais adoré la lecture du premier chapitre et "La chambre des époux" a rejoint ma PAL dès la rentrée littéraire, l'envie de le lire était très grande. Malheureusement je suis en demi-teinte au terme de la lecture du récit. Ce n'est que mon avis, je vous explique.

Eric Reinhart nous raconte aujourd'hui un événement autobiographique. En 2006 il apprend que sa femme est atteinte d'un cancer du sein stade 4. Il est en pleine écriture de "Cendrillon", il "rame" depuis deux ans, a écrit 300 pages de son livre qui en comptera le double. Son épouse lui demandera de terminer son livre dans les trois mois le temps nécessaire pour elle de combattre son cancer.

Ainsi, c'est en communion qu'ils combattent chacun ; lui son livre, elle la maladie. Cette épreuve va les rapprocher, rendre cet amour encore plus beau, encore plus fort. Seulement voilà, les émotions que je pensais retrouver à l'écriture, je ne les ressens pas, j'ai l'impression de lire des dizaines de pages où l'auteur tourne autour de son nombril, c'est lui, lui et encore lui. Il se répète, c'est redondant, pénible à lire par moments (sans doute parce que je ne l'ai pas lu d'une traite mais dans les transports en commun?). J'ai voulu tenir bon car le quatrième de couverture me propose l'histoire transposée chez Nicolas et Mathilde.

Ce qu'il faut savoir c'est que quelque temps après la "rémission" de sa femme, il rencontre Marie qui elle aussi s'est battue contre le cancer. La maladie devait l'emporter mais elle a vaincu. Il est attiré vers elle de façon irrémédiable... et à partir de là, son armure craque, les digues lâchent et il devient fragile, triste, pleurant toutes les larmes de son corps, proche de la dépression.

Je comprends la démarche de l'auteur pour ce roman, il veut je pense montrer que le combat contre cette maladie peut aussi amener à des souvenirs heureux, ce que l'on peut aimer, désirer intensément un corps malade.

Il veut parler sans tabou, dire à ceux qui passent par là que l'amour est le plus beau.

J'ai adoré le premier chapitre écrit en 2007 pour les Inrocks et la fin du roman. Par contre, je n'ai pas trop accroché au reste, trop narcissique, nombriliste. J'ai trouvé certains passages très "malaisants" à la lecture, je n'ai pas vraiment trouvé l'apport de l'art pour sauver ces vies, suis passée à côté. Une grosse déception pour moi qui avait sans doute trop d'attentes sur cette lecture.

L'écriture est bien rythmée, magnifique mais cela n'a pas suffi.

Ce n'était peut-être pas le bon moment pour moi.

Ma note : 7/10
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Quand j'ai reçu la proposition de recevoir La chambre des époux en échange d'une critique, j'ai été tout d'abord très reconnaissance à Babelio et très heureuse à la perspective de découvrir le dernier texte d'Eric Reinhardt, un auteur dont j'ai beaucoup apprécié le système Victoria puis plus encore L'amour et les forêts. Un livre qui m'a emballée à la fois pour le thème abordé et la manière de le traiter.
Partager avec lui comment un couple traverse une aussi douloureuse épreuve que l'annonce et le traitement d'un cancer ne pouvait que me séduire. Et pourtant, une fois la dernière page refermée, je suis partagée entre l'enthousiasme et la déception.
Certains passages ont tellement fait échos en moi que je les ai recopiés sur Babelio et dans mon fichier "source d'inspiration" sur mon ordinateur. Pour moi qui côtoie des personnes dont la moyenne d'âge s'élève à près de 83 ans, plusieurs passages m'offrent des clés de compréhension de leur vécu, et de leurs émotions. « L'équilibre, il est dicté par la sensation que l'on a d'être accroché à la terre, avait dit Mathilde à Nicolas l'un ou l'autre de ces trois uniques soirs, et elle, Mathilde, elle n'était plus certaine du tout, depuis sa maladie, d'être bien arrimée à la terre, puisqu'elle pouvait en disparaître du jour au lendemain, comme le lui avait cruellement démontré l'irruption de son cancer du sein. » Je comprends mieux pourquoi nos vieux amis ont tellement peur de tomber. Je me dis qu'ils se sentent vraisemblablement moins accrochés à la terre.
Quant au poids des années, il est évidemment fonction du point de vue de chaque personne. « L'âge, le sens de l'âge, pour chacun, c'est l'intuition de la distance qui nous sépare du temps probable de sa propre mort. »
Malgré les nombreux moments où je me suis vraiment nourrie en lisant les mots rédigés par Eric Reinhardt, je reste sur ma fin. Il me semble que c'est dû au style qui m'a déroutée : un mélange de réflexions personnelles de l'auteur sur ce qu'il a lui-même vécu avec sa femme Margot, l'inspiration et le processus d'écriture de ses livres et la fiction. Il fait un parallèle entre ce qu'il a vécu tandis que sa femme luttait contre un cancer et qu'il écrivait Cendrillon et le roman. Il s'agit en effet d'une double histoire : celle du couple formé par Nicolas, un célèbre compositeur de musique, et Mathilde et l'histoire d'amour que ce dernier vivra avec Marie. Toutes deux souffrant d'un cancer dans le roman, tout comme Margot et Marie dans la vie d'Eric Reinhardt. Parfois trop compliqué pour moi de suivre le cheminement de sa pensée. D'où ma critique mitigée. Je vais maintenant lire les vôtres pour savoir comment vous avez vécu votre lecture.
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Ça fait bizarre de refermer un livre dont l'auteur (ou plus exactement, le narrateur du roman : Éric Reinhardt...) ne cesse de répéter, chapitre après chapitre, qu'il aurait voulu l'écrire mais qu'il ne l'a pas fait. Vertigineux.
Ce roman ne figurera donc jamais dans la bibliographie d'Eric Reinhardt ; il a pourtant un titre (Une seule fleur), une histoire, des personnages. Je l'ai lu.
La chambre des époux est le roman de l'histoire de ce roman, son enveloppe, sa coquille littéraire et matérielle.

* Chronologie de la chambre des époux :
À la rentrée littéraire 2007, l'écrivain Éric Reinhardt, quarante-deux ans, présente Cendrillon, qu'il a écrit dans l'urgence pendant le traitement, les mois précédents, de sa femme Margot atteinte d'un cancer du sein. Succès en librairie pour lui. Rémission pour elle.
En mai 2008, à Aix-en-Provence, il croise une jeune femme en sursis : elle est atteinte d'un cancer du pancréas ; elle le touche par sa rage de vivre. Bouleversé, il décide d'en faire un personnage, lui donne le prénom de Marie, et prend des notes pour un nouveau roman dans lequel il transposera/transfigurera son propre couple : Nicolas, époux de Mathilde guérie d'un cancer du sein, y sera un compositeur de musique contemporaine ; à Milan, il rencontrera Marie, soignée pour un lymphome.
En 2011, Reinhardt continue de travailler au projet Une seule fleur mais il termine d'abord et publie Le système Victoria.
En 2012, il imagine une nouvelle transposition gigogne du trio d'Une seule fleur : après la mort de la Marie de Milan, Nicolas compose un opéra moderne dans lequel Frédéric, peintre, époux de Marlène, rencontre une autre Marie à Berlin.
En même temps, Éric Reinhardt commence à écrire L'amour et les forêts qui sortira en 2014. Comme un prétexte pour repousser toujours l'écriture d'Une seule fleur.
Cette imbrication intime entre histoire personnelle et travail de l'écrivain constitue la charpente visible (écrite, lisible) de la chambre des époux.

* Ce que j'ai bien aimé :
La construction en abyme, virtuose.
La symétrie/dissymétrie des histoires des couples d'époux (Éric/Margot, Nicolas/Mathilde, Frédéric/Marlène), les transpositions, les redites (nombreuses) appuyées, voulues.
La spirale narrative, qui fait naître une ambiance irréelle et idéalise (parfois trop) les situations morbides.
Le thème de la création artistique (littérature, musique, peinture) comme antidote consolatrice.

* Ce que j'ai moins aimé :
Un certain entre-soi peu réaliste : les personnages de la chambre des époux évoluent élégamment dans des décors très bourgeois, des milieux intello-artistiques de haut niveau, ils ne connaissent pas la crise, ni les couloirs des hôpitaux.
L'exposition nombriliste des désarrois de l'écrivain, puis en miroir de ceux du musicien, leurs crises de larmes exagérées, leur romantisme exacerbé, extravagant.
Des scènes d'amour gênantes, jusqu'à être ridicules, comme peuvent l'être les mauvaises représentations qu'en donne parfois le théâtre lyrique ; le thème de l'amour vainqueur de la maladie et de la mort, même idéalisé, peut difficilement être suspecté de tripatouillage romanesque, seulement Éric Reinhardt va beaucoup plus loin en mettant en scène le fantasme d'un homme sexuellement attiré par une femme condamnée et diminuée (et ça, c'est too much pour moi).


Au final un avis de lecture mitigé, entre admiration (pour la forme) et agacement (pour le contenu).


Merci à Babelio et à Gallimard qui m'ont offert ce roman très attendu de la rentrée littéraire.



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Etrange livre que celui-là ! Pas un roman, pas un essai. Une variation sur les sentiments amoureux dans un couple, dans les couples. Une sonate qui trouve son éclat dans une écriture à quatre temps : le malade, le mari (ou l'amant), la maîtresse (supposée ou sublimée), les cancers.
Eric Reinhardt parle de son couple lorsque sa femme est atteinte d'un cancer du sein qui va les amener tous deux à imaginer une guérison qui sera soumise à l'aboutissement d'un projet d'écriture de l'auteur. L'épouse guérit au moment où le mari termine son roman qui sera plébiscité. Cette concomitance désirée par le couple fait que les choses finissent bien.
Pourtant, que d'atermoiements de la part du mari lors de cette chimiothérapie. Il lui faudra verser bien des larmes, lutter contre l'envie de commettre l'adultère avec une femme rencontrée lors d'un diner d'affaires, femme elle-même rescapée d'un cancer et belle au-delà de toute imagination (celle de l'auteur évidemment) !
Les pleurs et angoisses de ce mari semblent rejoindre sa propre peur de la mort plus que celle de sa femme qui reste juste en filigrane dans le roman, comme un prétexte à la propre douleur du mari.
A partir de cette histoire, Eric Reinhardt va calquer l'histoire imaginaire d'un couple dans la même situation. Ce couple formé d'une femme merveilleuse et intelligente, cela va de soi, et d'un musicien compositeur, le plus doué de sa génération. Ils vont tous deux faire le même pacte que les époux Reinhardt lorsque cette femme merveilleuse déclare un cancer au développement rapide.
Le mari va l'assister en composant une symphonie jusqu'à sa guérison… Puis la femme guérit, l'oeuvre musicale est saluée dans le monde entier, le mari part en tournée.
C'est alors que ce musicien tombe amoureux d'une belle italienne rencontrée à Milan, élégante femme condamnée à court terme par un…. cancer !
Notre généreux et brillant musicien va s'installer chez sa belle et l'accompagnera jusqu'à sa mort inéluctable. Cet amour est d'autant plus fort qu'il sera éphémère.
J'ai le sentiment que mon analyse est aussi brouillonne que l'ouvrage de Reinhardt. Notons toutefois que je n'ai pas le talent de l'écrivain qui donne du sens à ce qui est insensé et volontairement organisé comme un capharnaüm de sentiments et d'émotions.
On comprend que le cancer, surtout lorsqu'il touche une personne aimée, est un drame. On comprend que tous les exutoires sont recevables, même les plus pathétiques ou invraisemblables.
Reste que le propos de l'auteur est égocentré sur la douleur de l'homme alors que c'est bien la femme qui souffre dans sa chair et risque sa vie… La peur panique de perdre l'être cher auquel on tient le plus passe par des phases d'un égoïsme forcené où il semble que c'est avant tout le bien-être sentimental du mâle qui prévaut, jusqu'à imaginer une suite affective dans les bras d'une autre.
Il est possible que j'interprète mal les intentions de l'auteur. Pourtant c'est bien cela qui persiste dans mon esprit.
La douleur ressentie pour le malheur des autres n'est souvent que le douleur qu'on ressent pour soi-même. Eric Reinhardt a joué ce registre au risque de se perdre et il s'est brûlé les ailes. Tel un Icare sûr de lui-même, il a cru atteindre le soleil et sa lumière bienfaitrice, mais il n'a rencontré que le feu et sa puissance dévastatrice.
J'imagine que tel n'était pas sa volonté. Je considère donc que c'est la douleur et le chagrin qui ont été les instigateurs de ce désastre sentimental et cette confusion affective. Même quand il se trompe, un grand écrivain le fait avec la forme et avec une grande élégance d'écriture, ce qui est le cas dans cette variation romanesque indéniablement bien écrite.

Michelangelo 5/11/2019

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Lu en deux jours, ce livre est un extraterrestre littéraire !
Alors oui, lecture ardue et poussive parfois, quand l'auteur part dans des digressions à n'en plus finir.
Nous sommes dans un roman qui est dans un autre roman, sorte de livre à tiroirs que l'auteur affectionne tout particulièrement. Parfois même, ce roman est une sorte de fourre-tout littéraire.D'où la lecture quelque peu fastidieuse de temps à autre.
Que nous offre là le si controversé Éric Reinhardt ?
Une multitude de romans, d'histoires, de styles différents. Pas facile de le suivre dans ses digressions. D'autant qu'il mêle de temps à autre réalité et fiction (comme sa vie et celle de Nicolas), et qu'il ne finit pas ses phrases.
D'abord un roman très drôle ; et oui, étonnant quand on connaît le thème : le cancer. Mais justement, et c'est la que réside pour moi le talent de cet auteur qui m'était inconnu, faire dans le comique, le burlesque et je ne peux m'empêcher de penser à cette scène mémorable aux Assises internationales du roman, scène qui m'a fait rire aux larmes, surtout quand il parle de l'Écossais, qui détonne avec ses mocassins asortis d'un bas de jogging noir.
Ce passage hilarant de sa prestation lamentable à ces Assises m'a fait douter quelque peu du caractère sombre que l'on peut prêter à ce livre ; et si tout simplement il s'agissait d'un livre drôle, à prendre au 5e degré (au moins) pour ne pas sombrer dans le glauque ?
Ce qui m'a bien plu aussi, c'est cette sorte d'empathie monstrueuse que ressent l'auteur face à des individus que le cancer a touché, ou ceux qui sont en récidive, il en pleurera d'ailleurs des heures durant, sans possibilité de se ressaisir.
Je pense qu'il faut se laisser embarquer dans ce livre, avec son écriture si particulière, ses digressions, son univers, sinon, effectivement, on peut ressentir le besoin d'abandonner la lecture.
Ce livre est, comme son auteur, tourmenté.
Mais on parle aussi de guérison, d'espoir, de désir sexuel, mais aussi de tourments, de dépression, de fascination morbide pour les femmes malades mais aussi celles qui sont guéries. Attirance perverse, mais justifiée...
Après avoir lu les critiques mitigées de ce livre, je peux dire que, oui, il est difficile d'accès, qu'il faut s'accrocher à certains moments, que la lecture est difficile, fastidieuse, mais c'est indéniablement beau, fort, mais, encore une fois, le talent naît souvent de la difficulté...
Il n'empêche que cet auteur est brillantissime, que l'on aime ou pas, il a un vrai talent littéraire. Il y a des passages magnifiques notamment page 60 quand il décrit l'amour qu'il porte à sa femme.
Livre très intéressant mais ardu.
Mais que cet auteur est compliqué et complexe !
Je remercie les Éditions Gallimard, Babelio et Masse critique de m'avoir permis de lire ce livre en avant-première, et de découvrir un auteur que je ne connaissais pas.


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Eric Reinhardt m'avait envouté avec son précédent roman « L'amour et les forêts ». C'était la première fois que je le lisais et j'en suis ressorti enchanté. J'avais découvert sa belle écriture aussi exigeante que poétique. Il avait même réussi à me passionner pour une histoire d'amour et de maladie, deux thèmes qui ne font pas vraiment parties de mes sujets de prédilection. En fermant les dernières pages, je m'étais alors dit que je venais de lire le grand livre d'un grand écrivain.

Dans cette dernière réalisation, l'auteur s'attaque une nouvelle fois aux ravages de la maladie. Il nous emmène dans le passé et nous raconte tous les conséquences de ce drame sur sa famille. Au centre du roman, il utilise une mise en abîme qui lui permet de fantasmé son destin en accentuant les traits et embellissant les sensations. le roman étant court, cette seconde partie n'est finalement qu'une copie de la première et devient de fait quelque peu répétitif. L'histoire semble tourner en rond.

Là où « L'amour et les forêt » se présentait comme un hommage au combat d'une femme face à son destin, « La chambre des époux » est beaucoup plus personnel et par le fait plus autocentré. L'auteur ne s'attarde que sur ses propres sentiments, certes avec talent, mais oublie en route les vraies victimes. A l'instar de certaines critiques, je trouve ce texte peut être un peu trop égocentrique. En parlant uniquement de lui, le narrateur semble vouloir laisser un témoignage, pour se libérer de ses démons. Cette délivrance apparaît alors plus indispensable à son auteur qu'à ses lecteurs.

La plume d'Eric Reinhardt reste tout de même au top niveau. A part certains tics de langage légèrement lassants (répétition à outrance de détails dans plusieurs phrases consécutives), il nous livre de belles lignes et de belles pages dont il a le secret et que l'on relit juste pour la forme.

En conclusion, je sors déçu par le manque d'intérêt de l'histoire même si c'est toujours un plaisir, pour un amoureux des mots comme moi, d'explorer une langue si bien maîtrisée.
Lien : https://leslivresdek79.wordp..
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J'aborde cet ouvrage avec une joyeuse excitation : j'adooooore que masse critique m'adresse des oeuvres avant leur date de parution, et de surplus, celle-ci est éditée dans une de mes collections préférées!
Comme d'ordinaire, je prends le temps de m'imprégner de la 4ème de couverture, de découvrir l'auteur, son oeuvre... Je tique un peu en lisant qu'il s'est inspiré de ce qui leur est arrivé, à sa femme et à lui, il y a 10 ans : aura-t-il le talent de le transfigurer?
La lecture commence par un chapitre 1 autobiographique qui résonne comme un prologue, une sorte de mise en condition, de justification... et lorsque je découvre que le chapitre 2 en est la poursuite, je commence à ressentir la même exaspération que celle qui m'avait saisie à la lecture de "D'après une histoire vraie" : les circonstances sont les mêmes et il est difficile de ne pas faire le parallèle : l'écrivain grisé par son succès précédent se demande s'il pourra un jour écrire quelque chose d'aussi bon. Chez Delphine de Vigan, l'autobiographie glisse progressivement vers le roman, sans même que l'on s'en rende compte. Chez Reinhardt, pas de glissement, la rupture est brusque mais annoncée : il faut quand même attendre la p.75 pour que l'histoire, -celle annoncée par la 4ème de couverture-, commence. Nicolas et Mathilde, miroir parfait de l'auteur et de son épouse, c'est à nouveau son histoire qu'il raconte, le combat contre le cancer, le flottement des corps, de la vie, l'ancrage de leur amour, les errements de l'âme et du coeur, à ceci près que dans son histoire "réelle", il a laissé passer Marie, rencontre opportune qui ravive les mois/années passés. Dans l'histoire de Nicolas et Mathilde, il choisit de la saisir, cette chance-là de vivre cette parenthèse avec Marie, comme une façon de boucler la boucle, d'aller au bout, de ne pas laisser l'inachevé en suspens, d'aller voir la mort de près, pour l'être justement, prêt, lorsqu'elle viendra toquer.
Exorciste, ce roman, sans doute. Pour ma part, je ne sais pas trop quoi en penser. Dans le style, on devine l'urgence des phrases qui n'en finissent pas, ce refus de devoir s'arrêter, ce refus du définitif. de virgule en virgule, de prépositions en juxtapositions, c'est une sorte d'écriture automatique qui suit le fil de la pensée de l'auteur, comme s'il n'avait rien d'autre à quoi se raccrocher. Une sorte d'urgence désespérée, en somme. Ce style en rebutera certains, cela ne fait pas de doute ; mais l'exaspérant ne réside pas dans ces phrases à rallonge et qui essouflent... l'exaspérant se niche dans les interventions impromptues et incessantes de l'auteur dans le fil de son récit. Jamais il ne laisse vivre ses personnages, jamais on ne peut se laisser porter et s'identifier ; non, jamais. L'auteur vient commenter, justifier, expliquer le moindre de ses choix narratifs, rappelant constamment, au fond, que ce n'est rien moins que sa propre histoire qu'il écrit, encore et encore, de miroir en miroir, une mise en abyme à plusieurs étages (le roman se terminant par l'éventualité d'une 3ème histoire, à l'identique des deux précédentes). L'impression que cela me laisse, c'est d'être un chien tenu, justement, en laisse, et constamment freiné dans sa course par un maître qui me ramène à ses pieds :-(

Cette impossibilité de mettre un point final à son histoire, en se projetant continuellement dans de nouvelles façons de la raconter, donc de la vivre, montre que la page n'est pas tournée. La transfiguration, -l'essence de l'art!-, est ratée, l'essai n'est pas transformé. L'idéalisation de son amour pour sa femme malgré les épreuves, la souffrance de ce combat contre le cancer, l'envie quelque peu messianique de sauver le monde, le besoin d'aimer, de se sentir vivant... beaucoup de thèmes sont abordés, mais le seul qui manque, c'est justement celui qui sous-tend l'ensemble du "roman" : la peur de la mort. On sent l'auteur pas encore très "mûr" ; du coup ça manque de distance, le fait que la douleur soit encore bien présente rend ce roman assez impudique. L'excuse donnée, dès les premières pages, c'est d'aider les gens en proie aux mêmes coups du sort. Mais (à mon avis), pour cela ce n'était pas un roman qu'il fallait écrire. le roman, il vient après la digestion, pas pendant ;-)
Je ne peux m'empêcher d'établir (là encore) un parallèle avec l'incroyable et exceptionnel "Clair de femme" de Romain Gary. On retrouve la même problématique de base (femme malade, époux éploré) et la même complète idéalisation de l'amour. On retrouve aussi la "tierce" personne, celle que l'on va aimer (Nicolas avec Marie) pour mieux aimer la première. Mais si chez Reinhardt l'expérience s'arrête là, avec des émotions qui ne dépassent pas celles ressenties par l'auteur, chez Gary il y a transfiguration, transformation, sublimation ; la portée est toute autre.
Ne vous fiez donc pas à la 4ème de couverture, finalement mensongère : il ne s'agit pas de Nicolas et Mathilde, mais de différentes façons d'écrire une même histoire, avec des embranchements, des choix qui diffèrent : Eric et Margot, Nicolas et Mathilde, Fréderic et Marlène ; une façon pour l'auteur de vivre par procuration les choix qu'il n'a pas faits (et qu'il regrette?)
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