Neuf nouvelles qui parlent de l'invisible. Pas vraiment des nouvelles fantastiques au sens de
Poe ou encore moins
Lovecraft.
Alexei Remizov a toujours été marqué par le rapport entre la vision réelle du monde réel et celle intérieure d'un monde invisible. Il a expliqué dans
Les yeux tondus à quel point le jour où on a corrigé sa forte myopie avec des lunettes, il a ressenti la perte d'un monde imaginaire, ce
lui que cette vision floue
lui laissait loisir de construire, ce monde invisible. Il a fini sa vie quasiment aveugle, ayant, au contraire de ce que les myopes connaissent bien, « laissé » sa vision continuer à se dégrader, se refermer pour retrouver son monde invisible (mon interprétation psychanalytique de comptoir !)
Dans ce recueil, on trouve un lien très fort entre le « voir » et la tradition de sorcières, de monstres et de mystères qui trainent dans les histoires populaires des campagnes russes. L'invisible n'est pas ce qui n'existe pas, c'est ce qui existe à l'intérieur et rejoint des phénomènes inexpliqués par la science du visible mais connus de tous (de tous ceux qui y croient en tous cas), y compris bien sur la religion qui s'insère dans ce maelstrom comme une autre des croyances populaires.
Un livre de nouvelles à l'écriture et à la construction très simple, qui ressemblent parfois à de simples souvenirs d'enfance – ou plutôt des souvenirs du monde de l'enfance. PETOUCHOK, la nouvelle centrale la plus longue - 50 pages - narrant le monde de Petka, un enfant qui vit avec sa grand-mère – beaucoup de grand-mère semi-sorcières dans ces histoires – et qui rêve d'un monde d'oiseaux et de brigands et d'icônes religieuses, le tout très lointainement lié à la révolution de 1905.
5/5, ma note de myope rêveur athée ayant été élevé dans la religion.