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EAN : 9782363083470
Arléa (31/08/2023)
2/5   1 notes
Résumé :

Quand on perd sa mère, qu’est-ce qu’il reste ?
89 cartes postales, quelques recettes, un agenda, des instants fugitifs, des souliers dorés...
Pour tenter de prolonger la présence de sa mère disparue, Ludivine Ribeiro fait l’inventaire des objets donnés ou retrouvés, des images, tous source de souvenirs enfouis, de secrets, de questions sans réponse.
Ce qui aurait pu n’être qu’une liste, devient alors une enquête, presque le roman d’une ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
L'autrice helvétique avait en 2016 fait paraître un premier texte, « le même ciel », qu'elle avait explicitement inscrit dans le genre romanesque. Son deuxième livre, superbe travail de composition, restitue la figure de sa propre mère, disparue en 2005. Très exactement depuis 3037 jours, un peu plus de huit ans, lorsque commence l'écriture en 2013. Non pas sous la forme classique d'un portrait, mais par un savant jeu d'éclairage sur des objets, des personnes ou encore des lieux renvoyant aux moments disparates d'une vie.
Erika, surnommée Heidi, avait promis à sa fille, l'aînée de ses quatre enfants, de lui écrire l'histoire de sa famille. Elle ne le fit jamais, imaginant n'être pas encore entrée dans ce temps d'urgence où les souvenirs, tenant désormais les premiers rôles sur notre scène mentale, exigent d'être fixés. Tout comme sa fille, elle pensait « qu'il y aurait encore des milliers de lendemains » avant que ne sonne l'heure. La blonde enfant allemande née à la fin des années 1920 à Brombach en Forêt Noire, non loin de la Suisse, aurait certainement eu matière à beaucoup écrire. Telle par exemple la Nelly de Christa Wolf, dans « Trame d'enfance », sur le plein bonheur des toutes premières années, alors que la tragédie déjà se préparait : à cette époque il y avait d'abord eu pour elle les sorties en forêt, « entourée de fougères et d'oiseaux » et la découverte de la lecture. C'était avant « la honte d'être allemande. » Elle eût pu également écrire sur « la faim terrible » des années de guerre et son séjour chez une tante en Suisse, à Saint-Gall au bord du lac de Constance, pour « se remplumer. » Bien plus tard, ç'aurait été sur son mariage avec un diplomate indien du Bureau International du Travail, originaire de Goa, de près de vingt ans son aîné. Tout cela que sa fille égrène au fil de brefs chapitres, comme autant de repères temporels dans le désordre des souvenirs. Un parcours de vie se donne ainsi à voir, en quelque sorte redoublé par le bouleversant inventaire auquel procède Ludivine Ribeiro.
Il s'agit en effet pour elle de ne pas laisser trop vite s'effacer la présence de sa mère. Il en advient donc ce livre d'une rare justesse, dans lequel vient confluer le flux désordonné qui assaille la survivante. Sans autre priorité que l'urgence de l'instant. Déclenché par la vue d'un objet, d'une paire de souliers, l'exhumation d'une photo ou d'une carte postale (il y en avait 89), la lecture d'un agenda comme d'une simple recette, ou encore une association d'idées. Et puis il y a, comme agraphées au milieu du reste, ces six listes « de ce qu'elle aimait », depuis « Mozart » et « les pâtes de fruits » au début de la première, jusqu'à « rouler dans la Forêt Noire » et « apprendre » à la fin de la dernière. En même temps sobre et délicate manière de restituer la mosaïque de cette vie. Pour Ludivine Ribeiro, dont l'objectif est de « compenser son absence par l'écriture », il s'agit en effet de ne s'interdire le recours à aucune forme. Les listes participent de cette visée. Ainsi encore de ces chapitres intitulés « La vie des objets », dans lesquels elle évoque l'inclination constante de sa mère à s'approprier ceux-ci en les transformant au gré de sa fantaisie, souvent en les repeignant et des décorant : coiffeuse comme piano, tabouret comme armoire à pharmacie. Dans ces chapitres, à la façon du Nouveau Roman, se dessine un portrait en creux : un caractère apparaît grâce à la simple description de son environnement. Et même, au-delà, une histoire familiale.
Ce saisissant travail de composition se présente comme une réponse, par la littérature, à la question qui avait surgi dès la disparition de la mère : que resterait-il de celle-ci pour faire pièce à l'inévitable érosion qu'on appelle l'oubli ? Dont l'une des conséquences à long terme est, pour celle qui reste et qui aujourd'hui écrit, cette « mémoire de soi-même enfant » appelée aussi à disparaître avec l'effacement de la mère. Une assiette cassée, un pull marin, un chandelier, des pierres peintes, des violettes…lui tiennent maintenant lieu d'objets votifs. Tandis que le livre avance, dans son apparence de désordre se laisse percevoir de plus en plus fort, par delà le chagrin provoqué par la séparation, la certitude consolante d'une beauté inhérente à cette vie. Une condition pour la possibilité d'un deuil ? La très grande beauté de « Ma mère en toutes choses » y participe assurément.

Lien : https://jclebrun.eu/blog/
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Lorsque le deuil s'installe ou lorsqu'il ne se fait jamais,on ne sait pas, restent les objets et leurs souvenirs. Des cartes postales ou un sari. Un compotier ou des gâteaux d'anniversaire. Ludivine Ribeiro évoque sa mère et se raconte. L'impossible sidération et le règne de l'absence. Sans jamais glisser dans la mièvrerie ce roman se lit comme un tableau. Chaque objet a sa toile de fond, son histoire et celles des autres. J'ai aimé l'humilité de ce roman, la force fragile de cette femme qui à travers cet inventaire se réapproprie un sain chagrin. Beau.
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