Le parti communiste français (PCF) est de retour. Tel est en substance le message adressé par
Fabien Roussel dans ce livre réussi, qui se veut intimiste, analytique et programmatique.
Intimiste d'abord, quand le nouveau secrétaire national du parti communiste français nous livre les coulisses de son ascension à la tête de sa formation politique, en 2018, mettant ainsi fin au mandat de Pierre Laurent à la direction du parti.
Fabien Roussel n'élude rien des raisons qui l'ont poussé dans la course au secrétariat national : le député du Nord dénonce la stratégie d'effacement du PCF au profit d'autres formations de gauche, stratégie qui a conduit le parti de
Maurice Thorez dans les abysses du champ politique français. Pierre Laurent est justement traité, selon ses fautes et ses mérites, et l'on comprend que la transition, inhabituelle chez les communistes, a pu s'opérer sans trop de heurts.
Analytique ensuite lorsque l'auteur du livre revient avec beaucoup de finesse sur la mauvaise compréhension faîte par le PCF du rejet du traité constitutionnel européen en 2005. Alors que beaucoup à gauche se sont plu à considérer ce vote comme la catharsis de l'antilibéralisme du peuple français,
Fabien Roussel estime de son côté que ce vote était également l'expression de l'attachement des citoyens pour la nation et la souveraineté. Hélas, ces mots ont été volés ou trop facilement cédés au Rassemblement National (RN), alors qu'ils demeurent historiquement une création des révolutionnaires de 1789. le secrétaire national veut lancer la reconquête de ces concepts qui appartiennent à la gauche, faute de quoi, il sera impossible d'instaurer la République sociale, laïque et universaliste que le natif de Béthune appelle de ses voeux.
Programmatique enfin, au moment de dérouler les grands axes de son projet pour le pays.
Fabien Roussel défend la souveraineté de la France au niveau international et promet de quitter l'OTAN si jamais les Françaises et les Français décidaient de lui confier les plus hautes responsabilités politiques. Il désire réarmer la France sur le plan industriel, en s'appuyant essentiellement sur l'énergie nucléaire et hydraulique, les seules capables de nous mettre en conformité avec nos engagements en matière de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Il s'insurge contre l'inaction du gouvernement actuel contre l'évasion fiscale, et préconise, entre autres, de taxer à la source les bénéfices des grandes entreprises et d'établir une véritable liste française des paradis fiscaux.
En matière écologique, le nouveau secrétaire national détaille les contours d'un véritable plan Marshall du ferroviaire, articulé autour de la SNCF, entreprise publique, fierté historique qui appartient au patrimoine commun des Françaises et des Français. D'une même manière, il défend avec ferveur la paysannerie française et propose, une fois au pouvoir, de la soutenir massivement pour faciliter sa conversion générale à l'agriculture biologique, distribuée en circuit court, selon une juste rémunération des producteurs.
Fabien Roussel conclut (ou presque) l'exercice par la jeunesse, dont il fait sa priorité, considérant, non sans raison, que celle-ci souffre de grandir dans un monde aux perspectives chaotiques. le candidat à l'élection présidentielle veut rétablir l'école républicaine dans toutes ses prérogatives, notamment en augmentant le temps scolaire effectué par les élèves. C'est de cette manière que les inégalités sociales et territoriales seront gommées : plus les enfants passeront du temps à l'école pour apprendre, mieux ils auront des chances de briser les chaines du déterminisme. Ses espoirs sont les mêmes pour l'enseignement professionnel qu'il juge fondamental, tout comme il croit ardemment en son idée d'un revenu étudiant de 850 euros, calquée sur le modèle danois.
Toutes ces propositions — qui seront développées ultérieurement nous prévient l'auteur — sont autant d'horizons dessinés par un candidat qui se veut l'épigone de
Georges Marchais. Cette filiation saute d'ailleurs aux yeux au moment où
Fabien Roussel évoque le sort réservé aux ouvriers des usines Renault, éprouvés par des conditions de travail sans cesse dégradées. Il est impossible de rester insensible devant ces accents de sincérité. Car si depuis 40 ans, la gauche a lâchement abandonné la classe ouvrière,
Fabien Roussel lui la comprend, la défend et parle la langue du peuple comme peu en sont capables parmi les femmes et les hommes politiques français.
Pas de doute, le parti communiste français est bel et bien de retour.