AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,8

sur 2997 notes
Le titre du quatrième roman de Mohamed Mbougar Sarr est emprunté à Roberto Bolano, le génial écrivain chilien décédé en 2003 à l'âge de 50 ans qui considérait la littérature comme un engagement.
L'histoire que nous raconte le finaliste du Goncourt 2021 est relativement simple. C'est sa construction labyrinthique qui en fait une fresque remarquable par son ampleur et sa singularité.
Nous sommes en 2018 à Paris. Diégane Latyr Faye, jeune auteur sénégalais, découvre l'existence d'un livre mythique au titre énigmatique paru quatre-vingts ans plus tôt. Encensé par certains, blâmé par d'autres qui crient au plagiat, « Le Labyrinthe de l'inhumain » sort du circuit. A l'instar de son créateur T. C. Elimane.
Diégane va alors mener une quête qui tourne à l'obsession pour le retrouver. Cette recherche passe par des rencontres avec ceux qui ont connu Elimane de près ou de loin et elle emmène le limier improvisé, physiquement ou mentalement, de Paris à Amsterdam en passant par l'Argentine et le Sénégal.
Véritable ode aux livres et à ses pouvoirs supposés ou pas, « La plus secrète mémoire des hommes » place la littérature au coeur de son propos. La littérature est vue comme un combat permanent, un labeur exténuant, un sacerdoce de tous les jours. « C'est ça, vivre en écrivain. Faire de tout moment de la vie un moment d'écriture » affirme Diégane.
Le livre s'interroge aussi sur les relations complexes qui unissent les ex-peuples colonisés et les ex-occupants qui les regardent avec condescendance tout en les cantonnant dans une identité rêvée. Cette démarche réductrice vaut aussi pour les écrivains issus du continent africain et rangés dans les rayons francophonie. Dans une récente interview donnée au JDD, Mohamed Mbougar Sarr souligne cette tendance qui le réduit à la couleur de sa peau et à ses origines alors qu'il écrit dans la même langue que Victor Hugo qu'aucun libraire n'aurait l'idée saugrenue de ranger dans un espace francophonie ! « En littérature tout classement est une réduction » constate-t-il.
A contrario, les Africains qui ont quitté le continent pour obtenir la reconnaissance des Occidentaux sont souvent considérés comme des traîtres par ceux qui sont restés au pays.
Récit d'apprentissage, enquête policière, conte fantastique, « La plus secrète mémoire des hommes » est un peu tout cela. Servi par une écriture magnifique, il mérite amplement le Prix Goncourt qui lui sera peut-être décerné aujourd'hui.


Lien : http://papivore.net/litterat..
Commenter  J’apprécie          150
Ce roman sera couronné du Goncourt dans trois jours. Et si, finalement, il n'obtient pas le prix officiel, il sera le Goncourt du coeur de bien des lecteurs. Les critiques déjà publiées ici ont déjà bien décrit pourquoi. C'est une oeuvre à multiples facettes : un roman d'aventure, un thriller poétique, et, surtout, une déclaration d'amour à la littérature tout autant qu'une réflexion ambitieuse sur l'écriture, l'art, la liberté, la question noire. C'est un roman érudit, à la langue riche, dont l'histoire à tiroirs, parfois alambiquée, et le style peuvent rendre la lecture difficile d'accès ; en ce sens il est certainement moins grand public que, par exemple, L'Anomalie d'Hervé le Tellier (Goncourt 2020). Il ne plaira donc pas à tous. Pour ma part malgré toutes ses qualités j'en sors avec un sentiment mitigé. Je ne l'ai pas apprécié autant que d'autres lecteurs et autant que je ne le pensais au départ. Mais il est clair que c'est du haut niveau. Et plusieurs passages sont excellents. Disons qu'il ne faut pas être repoussé par la perspective d'une lecture un peu exigeante, qui s'interroge sur la littérature, l'écriture, la trace de l'art dans le temps, et la narration d'histoires les unes dans les autres, façon poupées russes.
Commenter  J’apprécie          110
Voici l'un des livres faisant parti de la sélection du Goncourt. Clairement je n'ai pas été transportée par cette lecture qui traite de notre rapport à la littérature. Il aborde la quête d'un livre et toute une réflexion sur le livre.
Suite à la découverte d'un roman, un jeune écrivain sénégalais est comme possèdé par ce dernier et décide de remonter la trace mystérieuse de son auteur.
L'auteur déstabilise son lectorat par de nombreux enchevêtrements de récits, des enchâssements à foison et de multiples mises en abyme. de la magie, du surnaturel et du fantastique viennent aussi ajouter une autre dimension.
Divers thèmes sont abordés comme l'exil, le plagiat, illusions et vérités, la guerre avec les tirailleurs sénégalais, la condition de l'écrivain, les liens entre Afrique et Occident.
Ce livre soulève aussi la condition des écrivains africains. L'écriture et le style sont à la fois beaux, poétiques et soutenus.
À mon avis ce livre a le parfait profil pour remporter le prix Goncourt toutefois de mon côté je n'ai pas réussi à entrer dans cette lecture que j'ai pourtant terminé.
Cette errance qui ne semble jamais s'arrêter ne m'a pas inspiré.
Commenter  J’apprécie          100
Rentrée littéraire 2021 #38

Chaque page de ce roman ruisselle de littérature, il l'expire et l'inspire sans jamais la présenter comme séparée de la vie, mais à l'intérieur de la vie. Dans La plus secrète mémoire des hommes, il n'est question que de livres, d'écrivains, de notre rapport intime à la littérature, de notre façon de lire les textes et de les recevoir. Ainsi présentée, on peut se dire que ce texte va être un peu poseur, sûrement pédant, assurément ennuyeux. Que nenni ! J'ai été complètement emportée par le souffle puissamment romanesque de cet éblouissant roman, envoutée même par une sorte de magie qu' infuse une prose inventive et flamboyante, en perpétuel mouvement.

C'est l'histoire d'une quête, celle d'un livre maudit. Dès qu'il le découvre, le jeune écrivain sénégalais Diégane, monté à Paris plein d'ambition, en est possédé. Il décide d'enquêter sur son mystérieux auteur devenu paria : T.C. Elimane, lui aussi Africain francophone, a connu la gloire en 1938 avant d'être balayé par une accusation de plagiat et de disparaître. Etait-il " un écrivain absolu ? un plagiaire honteux ? un mystificateur génial ? un assassin mystique ? un dévoreur d'âmes , un nomade éternel ? un libertin distingué ? un enfant qui cherchait son père ? un simple exilé malheureux qui a perdu ses repères et s'est perdu ? " Cette quête, au départ littéraire, se double très rapidement d'une quête existentielle : Diégane veut trouver l'Homme en lui, un sens à sa vie, une direction comme pour se ressusciter.

Le roman se déploie à travers un siècle d'histoire France / Sénégal, déambule à travers les fléaux du XXème siècle ( les tranchées de la Première guerre mondiale, la Shoah, la colonisation ), révélant à Diégane vérités et illusions. La construction très borgésienne de ce livre-monde est vertigineuse, multipliant les mises en abyme. Un jeu de pistes entre enquête policière, témoignages de ceux qui ont croisé Elimane et sont toujours hantés par lui, et roman initiatique, le tout saupoudré d'une touche de magie inquiétante et de fantastique étrange. Les légendes se fracassent les unes aux autres, les récits s'enchâssent, se mêlent pour tenter de cerner le fantôme de l'écrivain disparu, échafaudant très progressivement un portrait ambigu et parcellaire. La vérité est toujours plurielle dans cette structure polyphonique qui n'assène jamais mais laisse toute sa place au lecteur pour imaginer et douter sans pour autant jamais le perdre d'une époque à l'autre et d'un narrateur à l'autre, de France à Sénégal en passant par l'Argentine.

Cette narration labyrinthique rend parfaitement compte de l'histoire complexe des liens franco-africains, toujours avec subtilité, sans manichéisme mais fermeté lorsque est convoquée par exemple la mémoire des tirailleurs sénégalais. Surtout, le récit dépasse brillamment l'étouffante question de ce face à face Occident / Afrique pour ne parler que de littérature et de la condition de l'écrivain, à la fois magnifique et misérable. le roman rend hommage à cette littérature africaine d'expression française et redirige le regard vers Yambo Ouologem, écrivain malien qui a inspiré le personnage fictif d'Elimane. Il a été le premier romancier africain à recevoir le Prix Renaudot en 1968 pour le Devoir de violence qui suscite nombreuses polémiques car il remet en cause l'Afrique mythifiée célébrée par la poésie senghorienne et la Négritude. Accusé d'avoir plagié Graham Greene et André Schwartz-Bart, il choisit de vivre en reclus.

Un thriller littéraire palpitant, stimulant et malicieux d'une impressionnante maitrise. Sans déguisement ni futilité ( mais sans être dénué d'humour ), tout y est dense et fait sens pour construire un chant d'amour dédié au pouvoir intemporel de la littérature. Formidable !
Commenter  J’apprécie          39345
COUP DE COEUR

De nos jours, un jeune écrivain sénégalais, Diégane Latyr Faye, découvre à Paris l'existence d'un roman publié en 1938, "Le labyrinthe de l'inhumain", un livre étonnant par son sujet et son style. Son auteur, T. C. Elimane, un inconnu de vingt-trois ans originaire du Sénégal, a stupéfié le monde littéraire par son talent. Il n'est en effet pas courant qu'un auteur africain fasse autant parler de lui dans le monde littéraire français, Elimane sera surnommé par certains le "Rimbaud nègre".

Mais un professeur du Collège de France relève dans son roman des emprunts à de grands textes de la littérature. Accusé de plagiat, Elimane, auteur mystérieux qui ne s'est jamais montré, ne s'est jamais exprimé, s'enferme dans un silence qui restera une énigme. Il disparait, n'écrit aucun autre livre... mais tous les critiques qui ont conspué son texte avec souvent des arguments racistes meurent dans des circonstances dramatiques.

Diégane part à la recherche du livre et de T.C. Elimane. Il rencontre une écrivaine sénégalaise plus âgée que lui, Siga D., aussi fascinée et obsédée que lui par ce livre et son auteur.

Mohamed Mbougar Sarr dédie son roman à Yambo Ouologuem, un auteur africain lauréat du prix Renaudot en 1968 qui a connu un peu le même destin qu'Elimane, la gloire suivie du déshonneur. Il rend ainsi un hommage à cet auteur et à la littérature africaine.

La quête de Diégane, parti à la recherche d'Elimane, prend des allures d'enquête policière et nous fait traverser plusieurs époques historiques : la première et la deuxième guerre mondiale, la shoah, la colonisation, la dictature en Argentine, la révolte à Dakar de nos jours... C'est pour Diégane une quête existentielle car il doute après l'échec de son premier livre.
Ce roman possède de multiples atouts : une intrigue bien construite, un suspense bien entretenu (Qui est Elimane ? A-t-il vraiment existé ? Est-il vraiment africain ?...), un foisonnement d'histoires parallèles qui contribuent à dessiner le portrait d'Elimane, une incursion dans les mythes et légendes africains, des réflexions philosophiques sur le destin. La narration est surprenante, nous faisant passer d'un narrateur à un autre, d'une époque à une autre, nous contraignant à une attention constante, la langue est élaborée sans nuire à la fluidité du texte. Et surtout le texte regorge de réflexions sur la littérature trop nombreuses pour pouvoir toutes être notées.
D'une incontestable ampleur, ce roman est soigné aussi bien sur le fond que sur la forme. Un roman à part, une lecture assez exigeante, d'un accès parfois difficile.
Lien : https://leslivresdejoelle.bl..
Commenter  J’apprécie          171
En 2018, Diégane Latyr Faye, écrivain sénégalais, double de l'auteur Mohamed Mbougar Sarr, découvre un roman polémique, une oeuvre disparue, écrite en 1938 par T.C.Elimane. le labyrinthe de l'inhumain conte l'histoire d'un roi acceptant de brûler les vieillards de son royaume en échange du pouvoir absolu. Ce roman défraya la chronique. Pas assez africain, il alimentait la vision coloniale d'une Afrique violente et barbare. Mais surtout, l'auteur fut accusé de plagiats. Celui qu'on appela un temps « le Rimbaud nègre » dut fuir le monde sous les critiques violentes des critiques et lecteurs.
Et pourtant, ce manuscrit et cet auteur disparus attirent obstinément quelques passionnés de littérature. Mais on ne s'approche pas impunément d'un tel gouffre. Derrière la quête de ce roman, Diégane cherche aussi ce qu'il attend de la littérature. Cette intrigue particulièrement bien menée sur un livre et la quête de son auteur est aussi un roman d'émancipation autour de Diégane. Après l'échec de son premier roman, Anatomie du vide, Diégane doute de son choix. Que peut transmettre un écrivain africain, européanisé par la colonisation? Peut-il espérer un jour être adoubé par le milieu littéraire français?
En suivant la quête obstinée de Diégane, nous parcourons le monde de l'Afrique natale des auteurs, régie par les rites ancestraux, nimbée d'ésotérisme mais nous croisons aussi toutes les guerres du monde et tant d'âmes perdues prêtes à succomber sous la présence fantomatique de TC Elimane. Des guerres, des exils qui alimentent la fibre créatrice de Siga, fille de l'oncle d'Elimane, de la poétesse haïtienne ou de Musimbwa.
C'est peut-être ce qui rebutera certains lecteurs tant par la difficulté d'y trouver un axe majeur ( pouvoir de la littérature, influence de la colonisation sur la littérature africaine, quête existentielle…) que par le caractère foisonnant de tant d'histoires, toutes aussi passionnantes.
Ce roman mérite largement sa place de finaliste aux plus prestigieux prix de la littérature française. Avec un style de grande qualité, l'auteur nous emmène dans les tréfonds de l'âme tourmentée de ses personnages en quête de sens. Il faut vivre avec ses fantômes, « se tenir droit dans la plaie sacrée, la voir et la montrer en silence. »
C'est un hommage fabuleux à la littérature et notamment à la littérature africaine.
Lien : https://surlaroutedejostein...
Commenter  J’apprécie          150
Ce livre est un cri, un appel lancé à cette coterie parisienne qui fait et défait l'honneur des écrivains. Est-il possible de juger un roman en faisant abstraction de l'identité de son auteur, de sa couleur, de ses origines ou de ses déclarations ? (p235) Peut-on s'enivrer d'un texte en s'affranchissant de l'espace et du temps ? Mohamed Mbougar Sarr mérite le Goncourt. Non pas parce qu'il est noir, africain et qu'il porte le prénom d'un prophète – oh la belle étiquette en ces temps de woke et d'inclusion. Mohamed Mbougar Sarr mérite le Goncourt parce que son livre est admirable. C'est tout ! Il y eut Texaco, il y aura « La plus secrète mémoire des hommes ».
T. C. Elimane, le héros, est un génie apatride, précoce et mystérieux.
« Qui était-il ? Un écrivain absolu ? un plagiaire honteux ? un assassin mystique ? un dévorateur d'âmes ? un nomade éternel ? un libertin distingué ? un enfant qui cherchait son père ? ». Sa vie et l'écriture de son envoûtant « le labyrinthe de l'inhumain » constitue la trame d'un roman mené comme une enquête. L'occasion d'interroger l'Histoire et le traitement qu'elle a réservé aux poètes nègres, curiosités exotiques pour les membres d'un sérail colonialiste peu enclins à les créditer du talent (p72-73). L'occasion aussi de s'interroger sur le sens de la littérature : « nous ne pensions pas du tout qu'elle sauverait le monde ; nous pensions en revanche qu'elle était le seul moyen de ne pas s'en sauver ».
La question récurrente du texte de Mohamed Mbougar Sarr est la suivante : pour abattre un système, faut-il mener la révolution, chercher l'affrontement ou est-il plus efficace de l'infiltrer, usant de la ruse et du mimétisme ? Il semble que ce dilemme obsède l'auteur, aux aguets, prêt à se repaître de la reconnaissance de ses pairs occidentaux tout en se méfiant, le verbe amer, de leur enthousiasme trompeur.
Écrit dans une langue magnifique, intelligente et sans complexe, « La plus secrète mémoire des hommes » dépoussière avec brio cette rentrée littéraire.
Bilan : 🌹🌹🌹
Commenter  J’apprécie          680
S'il y a un livre dont on ne peut ignorer l'existence c'est celui-là. En effet il figure quasiment dans toutes les sélections des grands prix littéraires de l'automne.

Son auteur, fort sympathique au demeurant, est invité un peu partout, en particulier dans les émissions à forte audience, et dans les salons du livres renommés, et il est presque unanimement encensé sur la toile.

Je suis presque étonnée de m'être laissé faire aussi facilement…

Il faut reconnaître que ce garçon est brillant, son livre remarquablement bien écrit, et redoutablement construit. Et pourtant….

Et pourtant, je reste plus que partagée à l'issue de ma lecture, dont la facilité m'a -agréablement- surprise. Je m'étais d'ailleurs préparée à quelque chose de plus ardu à lire. Ce qui m'a laissée un peu sur le bord du chemin, c'est l'histoire en elle-même.

Le début est assez classique, le narrateur, est un jeune africain étudiant auteur à Paris. Il est totalement subjugué par un livre paru il y a quelques années maintenant dont on a perdu la trace de l'auteur. C'est donc à sa recherche que le jeune Diégane part, entouré de jeunes auteurs comme lui, de deux femmes à la fois mystérieuses et curieuses.

Il se dit ici ou là que ce roman se veut être une réflexion sur la littérature, la place de l'écrivain…. Je ne suis pas allée jusque- là, et quand bien même, ce n'est pas ce que j'attends d'un roman…

Je crois avant tout que l'auteur tente de régler quelques comptes avec la colonisation … soit….

C'est sans doute à la faveur d'une construction originale qui mélange les formes, et surtout prend beaucoup de liberté avec les choix narratifs, que je suis parvenue à ne pas trop trouver le temps long durant ces quelques 500 pages durant lesquelles j'ai pu oublier le fil d'une histoire un peu trop tarabiscotée pour moi. Esprit cartésien s'abstenir….

Car au fond qu'ai-je retenu de tout cela ? Peu de chose. Certes, l'ouvrage est brillamment littéraire, sans doute beaucoup trop à mon goût. Que faire d'une démonstration de style sur une histoire beaucoup trop perchée, dans laquelle on finit par se perdre, et à laquelle on ne fait plus attention ?

Voilà l'ouvrage parfait qui plaira sans doute aux intellos, qui permettra à certains de briller dans les diners en ville, sans doute un peu trop sur-vendu à mon goût. Certes il ne dépareillera pas dans ma bibliothèque, mais honnêtement, je regrette un peu mon achat, j'aurai préféré simplement l'emprunter….

Une lecture agréable donc, mais pas plus que cela ….
Lien : https://leblogdemimipinson.b..
Commenter  J’apprécie          260
Diégane, au cours de ses études littéraires, croise le chemin d'un auteur clé dans la littérature francophone sénégalaise, un auteur entouré de mystère.
T.C. Elimane n'a écrit qu'un seul roman, un grand roman. Mais à sa sortie en 1938 “Le labyrinthe de l'inhumain” fait scandale, tant pour son contenu que pour sa forme littéraire. Alors qu'Elimane voulait juste écrire, cette polémique va l'anéantir et on perd sa trace.

Diegane, 80 ans plus tard, enquête. Une enquête littéraire, philosophique, existentielle et Historique.

Si je vous dis que ce roman est exigeant, qu'il faut admettre les 140 premières pages, comprendre les différents emboîtements temporels, je vais vous faire peur. Alors je ne vous le dis pas.

Si je vous dis que ce roman parle de livre dans le livre, d'écrivain dans l'écrivain, de littérature dans la littérature, vous allez passer votre chemin pensant que le sujet est ennuyeux. Alors je ne vous le dis pas.

Si je vous dis que ce roman incite à la réflexion sur l'humain, son rapport à la littérature, au mystique, à son passé, au poids de ses ancêtres, je sens que je vous perds. Alors je ne vous le dis pas.

Si je vous dis que ce roman est un nouveau regard sur ce qu'être noir signifie quand on veut prendre la plume dans le monde des blancs, vous n'allez pas vous sentir concernés. Alors je ne vous le dis pas.

Je préfère vous dire que c'est un grand roman, épique et foisonnant, riche et littéraire.
Je préfère vous dire “lisez le”! (mais doucement)
Je préfère vous dire qu'il est encore dans la sélection Goncourt et que s'il gagne, il va vraiment relever le niveau littéraire de ce prix.
Commenter  J’apprécie          283
Périlleux de résumer ce livre, l'auteur dit souvent qu'il déteste la question « de quoi ça parle ? », j'ai peur de commettre un sacrilège. Disons pour faire simple que c'est la quête d'un jeune auteur, qui part sur les traces d'un livre introuvable, le labyrinthe de l'inhumain, de T.C Elimane, auteur qui n'a laissé presque aucun indice sur sa route. Ce faisant, il va croiser le chemin d'autres personnes qui vont lui raconter leur vie (et dans leur récit, d'autres personnes racontent aussi leur vie, il y a un enchâssement de récits). Et donc, c'est un peu la métaphore de la littérature, ou de l'art plus généralement, ce chemin qui se démultiplie. Et c'est en même temps une vision désabusée du sort qu'on réserve à l'art : « Mais chercher la littérature, c'est toujours poursuivre une illusion. Chercher la littérature, c'est chercher la merde ». On voit que le narrateur se sent comme une bête d'un ancien temps, avec ses compagnons de plume, qu'il sent l'absurdité de parler des heures de l'art quand dehors, ce n'est plus le temps, ni l'envie, il sent la futilité (et en même temps cette futilité irrigue toute sa vie). C'est aussi un livre sur la question noire, qu'est-ce qu'être un écrivain noir en France, selon les époques : être ramené à sa couleur autant dans les années 30 que de nos jours (le fait d'être décrit comme « une étoile montante » aussi réducteur que le « Rimbaud nègre » qu'on assigne à T.C Elimane en son temps. D'ailleurs, on montre à un moment la difficulté de briller, de « devenir des savants dans la culture qui a dominé et brutalisé la leur ».) Et cette impossibilité, (et ce désir qui se perpétue) c'est ça, la plus secrète mémoire des hommes.

Il y a quelque chose des mythique aussi dans ce roman. le mythe orphique avec l'histoire du père de Siga et de Mossane : son échec à la ramener vers lui rappelle celui d'Orphée à ramener Eurydice dans le monde des vivants. D'ailleurs, elle reste coincée dans cette entre-deux, cette terre qui gronde, qui palpite ( c'est peut-être là où le roman m'a moins plu, j'ai plus de mal avec les récits allégoriques, d'en saisir les enjeux, de marchander avec leur apparente simplicité. J'ai préféré les moments dans le présent. ) Et là où c'est assez fort, c'est que le narrateur semble anticiper cette impression plus loin dans le livre, en parlant d'une lettre qu'a laissé T.C. Elimane « c'est de la merde crypto-symboliste. C'est une mystagogie risible, une parodie de mauvais goût d'un prophète ou de Maître Eckhart ou d'un charlatan évangéliste congolais […] ». Et on lui répond « Tu dis ça, parce que tu ne comprends pas, ou pire, parce que tu crois comprendre sans savoir ce que tu crois comprendre. […] ça peut te sembler merdique, ou hermétique, mais chaque phrase ici dit quelque chose de précis. Même sous une forme ambigüe et chiffrée. ».

On ne sait pas ce qu'on lit ! Parfois, on se demande si on n'est pas en train de lire ce Labyrinthe de l'inhumain, cette « oeuvre avec des fragments de celles des autres. » et l'auteur « un génie du collage ». Il y a toute une réflexion sur l'innutrition, sur le plagiat.

L'auteur aspire à une littérature qui transcende l'intelligence et l'émotion. Est-ce le cas dans La plus secrète mémoire des hommes ? C'est un livre intelligent, on n'en doute pas, mais je ne me suis pas sentie impliquée. Je suis le cheminent de Diégane, cette quête impossible, on traverse le temps et l'espace, les voix, surtout, c'est un livre qui appelle à notre intelligence (je pressens des sens que je ne saisis pas à la première lecture). D'un autre côté, je ne ressentais pas grand-chose, pas d'engagement envers les personnages, trop fragmentés (peut-être trop dans l'exposition aussi, trop dans le récit). Autre raison possible : le fait que le livre se découpe en plusieurs « histoires » (avec les mêmes personnages, mais souvent un point de vue différent) : c'est la même sensation que passer d'un rêve à l'autre, ou de se réveiller soudainement (avec la part de frustration, et la difficulté de replonger aussi facilement dans le récit). C'est souvent bien à la moitié de chaque histoire qu'on comprend en quoi elles se recoupent (on ressent du plaisir à ce moment-là, et peu après, on est extirpé vers autre chose). le livre nait, meurt, se réincarne sans cesse, c'est sa force et sa faiblesse (poétesse du dimanche, z'avez vu), et pour cette raison, il faut le lire.
Commenter  J’apprécie          132




Lecteurs (6763) Voir plus



Quiz Voir plus

L'Afrique dans la littérature

Dans quel pays d'Afrique se passe une aventure de Tintin ?

Le Congo
Le Mozambique
Le Kenya
La Mauritanie

10 questions
292 lecteurs ont répondu
Thèmes : afriqueCréer un quiz sur ce livre

{* *}