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EAN : 9782810702619
324 pages
Presses universitaires du Midi (07/05/2013)
3.5/5   2 notes
Résumé :
Capitale catalane, cœur économique de l’Espagne, métropole méditerranéenne, siège de l’exposition universelle de 1929 et des Jeux olympiques de 1992,
Barcelone a traversé l’histoire. Depuis les années 1980, ses quartiers anciens, la « Ciutat Vella » des Barcelonais, ont fait l’objet d’une politique ambitieuse associant réhabilitation du patrimoine, développement du tourisme et construction de nouveaux équipements culturels et de logements sociaux : un Modelo ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Opération Masse Critique, Juin 2013.

« Changer Barcelone – Politiques publiques et gentrification dans le centre ancien (Ciutat Vella) » est un ouvrage d'Hovig Ter Minassian. Publié en 2013 aux Presses Universitaires du Mirail, plus précisément dans la collection « Villes et Territoires », cet ouvrage de 315 pages est le fruit d'un travail de thèse de doctorat réalisé, entre 2005 et 2009, avec le concours du laboratoire Cités, TERritoires, Environnement et Sociétés (CITERES – UMR 7324) du CNRS et de l'Université François-Rabelais de Tours.

Réélaborée pour être converti en livre, cette thèse est un pur produit de l'Ecole française de géographie : toute idée est énoncée méthodiquement (introduction, développement, conclusion) et avec la prudence qui sied, présentée avec ses hypothèses, son contenu, les arguments favorables et défavorables, des explications, des références (historiques, sociales, démographiques …) et des justifications ; le texte est structuré en chapitres, sections, paragraphes et sous-paragraphes, parsemé de citations (architectes, hommes politiques, sociologues …) en VO, illustré de 12 pages de cartes et de croquis bien faits et en couleurs ainsi que de quelques photos réalisées en noir et blanc par l'auteur : 26 pages de références bibliographiques sont à la fin du livre à la disposition des lecteurs qui voudraient approfondir la question des politiques publiques et de la gentrification dans le centre ancien de Barcelone.

Vous avez dit gentrification : de quoi s'agit-il au juste ? Il n'y a gentrification (page 151) que si les 5 critères suivants sont réunis : présence d'un quartier initialement dégradé et populaire (c'est la situation de départ), amélioration du parce de logements, amélioration généralisée du statut social, changements dans la population par substitution, et non par amélioration in situ du statut, et émergence d'un quartier relativement aisé : c'est le point final du processus de gentrification.

L'auteur observe, sur les 25 dernières années, la transformation et la mutation dont le centre ancien de Barcelone (4,2 km2) a fait l'objet. L'auteur constate l'arrivée progressive des classes moyennes, laquelle s'est traduite par l'éviction des classes populaires qui résidaient dans ce périmètre, la démolition de certains immeubles vétustes, la réhabilitation de quartiers insalubres, la reconversion d'ateliers ou d'usines désaffectées, la transformation de bâtiments anciens en musées, l'ouverture de nouveaux commerces en liaison avec l'explosion d'un tourisme « low cost », une immigration massive en liaison avec une industrialisation croissante, l'offre d'emplois de service, des mesures de protection du patrimoine historique, des tentatives d'éradication de la pauvreté et de la prostitution, la construction de crèches, d'écoles, d'hôpitaux et de logements sociaux, le développement d'espaces culturels et de voies de communication, l'aménagement d'espaces verts, la création d'un centre d'affaires et d'un port touristique à la périphérie du centre ancien …

Dans ce contexte d'évolution de la configuration spatiale et socio-démographique du centre ancien de Barcelone, l'auteur réalise que ces transformations présentent les caractéristiques suivantes : insuffisance des réflexions préalables, manque de place laissée à la concertation avec les parties prenantes, peu de cohérence dans la multitude de projets concurrents lancés pendant toute la période couverte par ces mutations, remise en cause de la spécificité du centre ancien, incapacité à déterminer le bon niveau d'incorporation de nouveautés technologiques, difficulté à définir le type d'ancrage (local ou international) de la transformation urbaine, aveuglement collectif de la classe politique obnubilé par la nécessité de se comparer en permanence avec Madrid et Paris, remise en cause de certains choix du fait de l'existence de coupes budgétaires …

L'auteur pose alors les questions suivantes : comment construire le futur d'une ville, sans ruptures, en prenant en compte les demandes de mémoire et les revendications identitaires ? peut-on construire ce futur en évitant la gentrification ? quel rôle doivent jouer les pouvoirs publics dans cet aménagement urbain ? y-a-t-il un modèle de mutation urbaine, modèle qui vaudrait et qui pourrait être répliqué à l'identique quelle que soit la ville ? que faire pour s'assurer que ce modèle reste cohérent et articule harmonieusement chacun de ces composants dans un contexte de tertiarisation croissante, de densité touristique et de privatisation des projets urbains ? comment légitimer et « vendre » ce modèle ? peut-il s'agir d'un modèle exportable malgré les spécificités de Barcelone ? s'il y a gentrification, doit-elle avancer partout au même rythme ? comment conjuguer modernité et marquage identitaire du centre ancien, lequel conserve une grande force symbolique du fait de l'existence d'un patrimoine culturel indéniable ? comment favoriser la concertation dans le recueil des exigences des nouveaux résidents tout en évitant la concentration des revendications catégorielles, revendications qui pourraient mettre à mal la classe politique, à commencer par le pouvoir municipal ? comment composer habilement et avec quelle marge de manoeuvre considérant la diversité des apporteurs de fonds (municipalité, région, État, communauté Européenne) et les droits spécifiques des communautés autonomes, lesquelles peuvent modifier certaines choses à leur guise ? jusqu'où peut-on aller en termes d'aménagement de l'espace urbain compte tenu du vieillissement de la population, de la montée du chômage, de la crise du logement et de la superposition de logiques contradictoires (économique, sociale, touristique, patrimoniale, symbolique, idéologique, mémorielle …) ? peut-on légitimer le changement de l'espace urbain en se référant à la nécessité d'une rupture politique, rupture qui pourrait aller à l'encontre de la réalisation d'une identité collective ?

L'auteur illustre le tout en rappelant ce qui s'est passé dans le centre ancien depuis les années 1980. Il met en évidence les éléments ayant permis cette gentrification du centre ancien, les effets et les conséquences de ce processus, puis il montre l'empreinte laissée par ce phénomène dans les médias et dans toutes les couches de la population locale, régionale, nationale et internationale. Il illustre son propos de faits concrets et vivants, en évitant toute polémique. Il tire un bilan provisoire de cette expérience en vraie grandeur, en indiquant toutefois que des études complémentaires seraient nécessaires pour en arriver à des éléments conclusifs. Bref, vous avez entre les mains un vrai travail d'universitaire qui ravira les lecteurs usuels de thèses de doctorat, les amoureux de Barcelone, les fans de géographie ainsi que tous ceux qui se passionnent pour l'évolution du paysage urbain. Je souhaite bien du courage aux autres …
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( Je ne vais pas refaire la présentation de l'oeuvre complète ni des thèses de l'auteur, la critique de Zébra les reprenant de manière absolument limpide)

Ayant vécu moi-même á Barcelone, et étant anthropologue, c'est avec un regard particulier et un vécu que j'ai abordé cette lecture.

Hovig Ter Minassian nous présente la politique urbaine des 30 dernières année de la capitale catalane. Cette politique a pour but la mise en valeur des quartiers anciens de Barcelone, et notemment le quartier del Raval. Les populations de ce quartier populaire se voient obligées de laisser la place aux installations tournées vers les touristes et les populations plus aisées : spas, hôtels, musées, etc:. 8 et donc une augmentation des loyers. Cet assainissement urbain se fait donc au détriments des habitants de ces quartiers. Cet exemple nous montre á quel point Barcelone dédie sa politiaue urbaine á la patrimonialisation et au tourisme. Ainsi, on peut imaginer un Barcelone ancien de type " disneyland" sans aucune vie de quartier: Il me semble pourtant que le mouvement des Okupas barcelonais tente de redonner vie au tissu urbain en créant des espaces de création urbaine, mais aussi d'activités sociales pour les habitants du quartier. Ainsi, les habitants reprennent en main leur propre quartier et lutte contre cette gentrification massive.

L ' auteur nous montre ainsi que le modèle de développement de Barcelone est unique en Europe et donc bien particulier á la capitale catalane.

Il nous présente donc certes avec des outils de gépgraphie urbaine les transformations de la ville, mais sans en oublier les enjeux humains et sociaux.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
page 110
[...] Barcelone comme modèle international d' "urbanité" ? Le thème du modèle Barcelonais est très souvent associé à ceux de la conception de la ville, de l'échelle européenne et mondiale, et dans une moindre mesure à la définition de la "collectivité" (l'usage du "nous"), aux Jeux Olympiques de 1992 et au Forum universel des cultures de 2004. [...]. La question du modèle apparait très tôt dans les textes de BMM. Dès le n° 15 (1990), l'éditorial rappelle l'objectif poursuivi, celui d'élaborer "un model de ciutat imaginativa, prospera, més competitiva i progressivament més justa i confortable" (un modèle de veille imaginative, prospère, plus compétitive et petit à petit plus juste et plus confortable). Ce modèle est en cours de maturation. Qu'en est-il exactement ? Les termes "imaginative" et "compétitive" renvoient à la capacité d'innovation, donc à l'éducation et aux nouvelles technologies; "prospère" relève du champ de l'économie : Barcelone est une ville qui produit de la richesse. Enfin, "confortable" renvoie à la qualité de vie et, sans doute, à la qualité de ses infrastructures et de ses équipements. Dans cette perspective, la ville-modèle est définie par sa matérialité. [...]
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