Si vous appréciez
Maupassant, la richesse de son oeuvre et en particulier ses incomparables nouvelles, passez au large de cet essai.
C'est triste à dire, mais Tolstoï n'a rien compris à
Maupassant, ou presque. Aussi sont-ils par trop différents. le Tolstoï déjà âgé qui écrit ce texte est de plus en plus enfermé dans une vision moraliste étroitement normative.
Tant de choses
lui répugnent chez
Maupassant, à commencer par le choix de sujets "immoraux" - pensez,
La Maison Tellier que
lui a vantée
Tourgueniev, la journée épanouie à la campagne des pensionnaires d'une maison close qui n'ont même pas honte ou souffrance de leur condition! Il en conclut forcément, et très superficiellement, que
Maupassant est un apologiste de la débauche - or c'est bien moins simple. de même les histoires souvent cruelles sur le monde paysan le convainquent que l'auteur le méprise "d'en haut", ce qui est également un contresens. Enfin sur
Maupassant et les femmes, s'il consent à voir dans
Une vie un récit sans fards de douleur et d'aliénation féminines, il épouse pour le reste la vision d'un
Maupassant qui ne verrait en elles que des objets de tentation et de conquête, ce qu'autant de nouvelles contredisent ou nuancent que celles qui le confirment.
Mais la vraie raison de critiquer cet essai critique et de ne pas le recommander, c'est que les grands critiques comme Zweig et tant d'autres essayent de comprendre les auteurs, d'être en empathie avec eux - Tolstoï juge juste
Maupassant selon ses critères moraux normatifs de ce que la littérature doit être et ne pas être, et cela a bien peu d'intérêt.
Pour lire un très grand auteur,
lui aussi obsédé de morale, qui a lu et admiré
Maupassant, il vaut bien mieux lire la préface que
Joseph Conrad a écrit sur
lui.