Insomniaque ++++
Maya va découvrir, un jour, une nuit,
en s'amusant à réveiller le monde endormi
en sonnant aux portes
Un autre elle-même, masculin
Benoît Boyloo
Benoît qui ressemble à Colombo,
maigre comme un hareng saur et grisonnant
il a 53 ans
Un quart de siècle les sépare,
Mais le mal être, les insomnies,
les rv chez les psychiatres et les psychothérapies
sans oublier la boisson
Vont les réunir.
Moins on dort, plus on est seul !
Comme des papillons de nuit,
ils sont des ombres vespérales
et se font régulièrement épingler les ailes,
des ailes dentelées qui se recroquevillent
sous les coups durs de la vie.
A deux, ils vont renaître
et peut être,
La ville les enlacera t'elle de nouveau
avec son jour et ses nuits
Eux deux ensemble !
Peut être !
C'est une balade tendrement violente, une errance à deux
doucement sensuelle, sans but et sans repères.
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- Ton chiffre préféré, c'est quoi ? lui ai je demandé au cours de la dernière nuit que nous avons passé ensemble.
- Zéro.
- Pourquoi ?
- C'est le chiffre le plus petit et le plus grand. Zéro vient avant un et après le plus grand chiffre qu'on puisse imaginer.
- Ce n'est pas vrai qu'il vient après le plus grand chiffre.
- Avant de naître, on est zéro, et quand on meurt, on est zéro aussi.
- D'une certaine façon, c'est peut être vrai.
- Ce n'est pas pour rien que c'est un chiffre rond, a t-elle dit sur un ton plein de mystère.
- En fait, moi, j'ai passé la plus grande partie de ma vie à être un zéro, lui ai je dit en rigolant.
Après m'avoir considéré d'un air sérieux, elle m'a dit :
- Non, pas vraiment, t'es un zéro de cinquante trois ans. Moi, une zéro de trente neuf. Mais, au début, le compteur est à zéro et, à la fin, il revient à zéro. On est des zéros de zéro.
- Et selon toi, on retombe dans une sorte d'état de grâce ?
- Non, on est un zéro tout rond, et c'est tout.
La lumière nous a éblouis tous les deux. Puis un frein a émis un cri prolongé. Ma mère m'a écarté d'un coup sec. Nous sommes tombés en même temps. J'ai échappé à l'estafette de la gendarmerie, mais pas elle. Deux gendarmes en sont descendus en tremblant ; ahuris, ils tripotaient leur uniforme. J'ai rampé vers ma mère, croyant que ce n'était rien de grave. J'ai écarté les cheveux de devant ses yeux lumineux. La pluie lavait son visage sanglant.
- ça va s'arranger, ai je dit.
- Oui, a t-elle répondu, et la lumière s'est éteinte.
ç a été le dernier jour qui a compté pour moi. Le reste : un semblant de vie.
-Tu penses que c'est quoi, mon métier ?
La lumière m'envoyait un message en morse. Il fallait que je la sauve.
- Cuisinière.
Elle a hoché lentement la tête. François écarquillait les yeux presque autant qu'elle. Il a étiré ses lèvres épaisses en un rictus découvrant toutes ses dents Puis, s'esclaffant, il s'est tapé sur les cuisses. Ma mère devenait lourde, mais il me fallait agir.
- Tu es une cuisinière hors du commun, me suis je écrié d'une voix aiguë. Tu cuisines uniquement pour les hommes. Tu cuisines tellement bien qu'ils doivent s'étendre sur notre lit car ils mangent trop. Et ils gémissent dans la chambre car ils ont des maux d'estomac !
Se défaire des choses, cela procure une illusion d'avenir fondée sur la volonté de disparaître dans le vide. Dès lors, dans des moments d'inattention, le passé redescend de ce même vide pour vous tomber sur la tête.
Rien n'est jamais totalement révolu.
Ce qui toutefois, n'adoucit pas la nécessité de procéder à une opération de débarras élaborée avec courage.
Jeter, cela crée de l'espace, quand bien même celui-ci serait imaginaire.
Les petits dormeurs refoulent plus de choses que les autres, en ce sens qu'ils ont tendance à cacher leurs problèmes psychiques ou à éviter d'en parler.