Bien plus que d'autres, ce livre va toucher ses lecteurs un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout en fonction de leur propre histoire familiale. Pour moi, le bilan est assez mitigé.
Tout le début, l'enfance de Lucile au sein de cette famille nombreuse, en apparence très joyeuse mais pourtant marquée par les deuils et la souffrance, m'a semblé manquer de substance, de vie, de sang, de tripes, d'émotions... On pourrait parler de pudeur, mais, pour moi, c'est plutôt de la froideur. du coup, je suis restée en dehors de l'histoire, comme derrière une vitre. J'ai en outre été assez agacée par les constantes interruptions que fait
Delphine de Vigan pour observer son nombril, du type 'l'homme que j'aime s'inquiète que je dorme mal' ou 'je tergiverse sans fin à l'idée de choquer les membres encore vivants de ma famille'. Oui, et alors ? On dirait qu'elle essaie de faire du Carrère, alors qu'elle écrit plutôt comme
Pancol (ce qui n'est pas une critique dans ma bouche, j'ai beaucoup aimé les tout premiers
Pancol, et je pense profondément qu'on n'a pas besoin d'avoir une écriture opaque pour dire des choses intelligentes et/ou intéressantes). Bref, à ce moment-là, je me demandais sérieusement pourquoi tout le monde trouvait ce livre si formidable.
Puis vint la maladie de Lucile, notamment ''l'événement'' du 31 janvier, et j'ai un peu changé d'avis. Je trouve qu'elle rend très bien la crise, sa peur, son souhait de fuir, celui de Manon de rester, leur impuissance d'enfants face à ''ça''... et leur amour. du coup, j'ai été plus indulgente par rapport à ses nouvelles digressions sur ses difficultés à écrire ou sur "l'homme qu'elle aime" (rien que cette expression, beurk). Mais je suis restée aussi hermétique face à la suite du récit, les week-ends, les révélations, la famille...
La fin, en revanche, a résonné très fort en moi. J'ai eu l'impression de comprendre, enfin, Lucile. Et, encore plus, de sentir les émotions mêlées de Delphine de Vigan et sa soeur. Probablement parce que cette situation s'apparente plus à la mienne (et je n'en dirai pas plus, à la fois pour ne pas spoiler et pour ne pas raconter ma vie... sachant que ma mère n'est pas bipolaire, qu'elle est vivante et le restera encore longtemps, j'espère).
Une critique au final assez éloignée de certains commentaires enthousiastes publiés ici, ou entendus de mes amies... mais une lecture qui ne m'a pas laissée indifférente et que je ne regrette pas. Peut-être même relirai-je ce livre dans quelques années pour voir si mon ressenti change en fonction de mon expérience...