Nos fantassins, lancés en avant, furent alors pris de côté, à droite et à gauche, par deux mitrailleuses dont on ignorait l'existence. Résultat : des trois colonels, deux sont tués, l'autre blessé ; les officiers tombent l'un après l'autre. Les hommes qui échappent aux balles continuent leur course, poursuivant l'ennemi jusqu'en rase campagne. On leur a dit qu'ils devaient atteindre "les batteries de Servon". Arrivés ici il y a trois jours, ils savent à peine si Servon est du côté des bois d'Argonne ou vers la Champagne.
Pour certains d'entre eux,la guerre aura consisté, le jour, à fabriquer des gabions pliants, des échelles d'assaut et des ponts pour franchir les réseaux de fil de fer, le soir à caresser les gosses et sans doute les femmes de ceux qui leur doivent d'être munis de matériel aussi précieux. Il est joli, l'Arrière...
Tout étranger ayant un accent qui paraît germanique est soupçonné d'être un espion et souvent signalé à la police. De malheureux Alsaciens sont ainsi interpellés.
Il n'y a vraiment pas de plus sûres et profondes camaraderies que celles nouées sur le front.