Ouf, sur le fil, je viens enfin de terminer cette lecture disons un peu particulière, reçue dans le cadre de la MC de septembre. Enfin « tu l'as voulue, tu l'as eue » comme disait ma grand-mère quand je chouinais parce que quelque chose ne correspondait pas exactement à mon attente. Et pour ça, aye, j'en ai eu plus que je ne l'imaginais. Mais bien barry, aye !
Je préfère prévenir tout de suite : je sais que certain(e)s parmi vous détestent la grossièreté et la violence. Ce livre en est rempli, et ma critique se doit d'en refléter l'esprit, elle ne sera donc pas forcément très policée. Imaginez un cocktail comprenant une bonne dose de
Bukowski, un zeste de
San-Antonio, surmonté d'une tranche d'Aydan Truhen (« Allez tous vous faire foutre », titre d'un de ses romans), et vous aurez une petite idée de ce qui vous attend si vous décidez de tomber dans ce traquenard. Autre précision qui parlera à certains d'entre vous :
Irvine Welsh est l'auteur de «
Trainspotting »( d'ailleurs l'un des personnages principaux de celui-ci y apparaissait déjà). Je craignais d'ailleurs beaucoup de retrouver une scène aussi traumatisante que celle du bébé de
Trainspotting...heureusement on m'aura épargné ça !
Bref, comme je le confiais sous une récente critique de @musemania, j'ai eu le plus grand mal à entrer dans ce roman, notamment parce que chacun de ses héros tordus s'exprime à son tour, avec son vocabulaire et ses tournures de phrases bien à lui. C'est d'ailleurs grâce à ce vocabulaire qu'on finit par comprendre qui parle, parce que ce n'est pas vraiment précisé ! Et certains des personnages ont un langage pour le moins fleuri et imagé, mais aussi très elliptique. Nombre de mots font l'économie des voyelles, qu'il faut deviner. Exemple quand Terry « Juice » fait la causette à son client, un promoteur immobilier et star de télé-réalité aux States (ça vous rappelle quelqu'un?) : « Alors ça, pour les dégotter et leur mettre une bonne cartouche comme i faut, jamais eu dproblème, fredonne-t-il triomphalement. — Ma fidèle Excalibur, là, fait-il en se tapotant l'entrejambe, l'a pas souvent pris djours dcongé, c'est moi qui te ldis ! En même temps quand faut assurer, faut assurer, aye ? le sourire de Terry s'étire, tandis que Checker presse son dos contre le dossier rigide, un vrai délice comparé à tous ces fauteuils de jets privés et de limousines qui font son quotidien. — Par contre, pour les garder... tsais c'que c'est, hein ! Lpire qui peut arriver, c'est dtomber amoureux. On sment à soi-même quand on sdit qu'on va plus staper qu'cette nana-là et pas une aut pour lrestant dses jours. On est juste pas câblé pour. Au bout d'une poignée dmois, même pas, vlà qu'le serpent borgne a dnouveau envie dsortir jouer ! Garanti ! »
Excalibur, vous l'aurez compris, c'est le petit surnom affectueux dont Terry gratifie son appendice viril, plus essentiel pour lui que n'importe lequel de ses autres membres. Car Terry, chauffeur de taxi, acteur occasionnel de porno (parce qu'il faut bien rentabiliser les cadeaux de la nature) et dealer de coke (mais seulement pour rendre service!), est sans conteste
le Coup du Siècle, si l'on en juge par ses innombrab
les conquêtes, bien souvent besognées à même le siège arrière de son taxi.
Parmi celles qui ont succombé à ses jolies bouclettes (gardons quand même un soupçon de romantisme...), il y a Jinty, une gentille fille obligée de bosser dans un « salon de massage » sous la coupe de Victor, affectueusement surnommé « le pédé » et de son neveu Kelvin, un pervers sadique.
Un boulot qu'elle cache soigneusement à son petit ami Jonty, qui croit qu'elle fait des ménages. Mais ça lui frait trop d' peine à Jonty, ce gars un peu simple de Penicuik (un bled de la cambrousse, pas très loin d'Edimbour
g), lui qui attend sagement sa Jinty en lui préparant des pizzas surgelées quand il ne s'instruit pas sur internet. Jinty et Jonty ont régulièrement voix au chapitre, ce dernier s'exprimant avec un vocabulaire à base de « Aye » et de « sûr » ou « barry », répétés à l'envie.
On va croiser Suicide Sal un peu plus loin, ainsi surnommée par Terry parce qu'elle s'apprêtait à sauter d'un pont lorsque, tel un Chevalier Blanc, il a surgi dans la nuit et l'a sauvée, aidé bien sûr par la fidèle Excalibur. Sara-Ann Lamont de son vrai nom est auteure de théâtre et ne résistera pas longtemps aux « arguments » solides de Terry. Elle fera également la connaissance de Ronald Checker, dit « Ronnie », le client croisé plus haut qui entre-temps a embauché Terry pour lui servir de chauffeur particulier le temps de son séjour en Ecosse.
Le temps est à l'ouragan à Edimbourg, un ouragan nommé Bawbag qui va conduire toute la population à se terrer qui chez soi, qui dans les pubs pour les soiffards. Mais certains vont continuer à circuler malgré la menace, entre autre Jonty qui cherche sa belle Jinty et va passer au Pub sans Nom pour l'y retrouver...C'est le rendez-vous attitré de tout le petit monde qui gravite dans cette histoire, des rencontres s'y font, des drames s'y nouent, en particulier ce soir-là.
Si vous m'avez suivi jusqu'ici, vous avez certainement compris que j'ai fini par me laisser prendre dans les rêts non pas de Terry (qui de toute façon a eu quelques petits problème avec sa virilité hors norme) mais de ce roman qu'au départ je pensais abandonner comme une vieille chaussette. Ben oui, de temps en temps j'aime me vautrer dans une histoire bien glauque, truffée de politiquement incorrect, de grossièreté outrancière et d'irrespect total de la bienséance. Croyez-moi, ça fait du bien, et je me suis fendue la poire plus d'une fois. Et pourtant il y a du sentiment et de la tragédie aussi dans le bouquin, et bien d'autres ingrédients, pêle-mêle : des arnaques, du whisky scandaleusement cher, de la consanguinité, des morts plus ou moins naturelles, du golf, et du cul, du cul et encore du cul.
Je le déconseille formellement à toute personne sensible à la crudité (des mots, pas des carottes), féministe intransigeante ou allergique au second degré. Certaines scènes sont très explicitement décrites, cela peut choquer ; pareil si vous êtes attaché à une écriture littéraire et léchée, ce titre n'est pas pour vous.
Mais si vous avez envie de passer un bon moment d'éclate sans vous soucier de coller aux standards de la bienséance, foncez !
Merci à Babelio et aux éditions "Au diable vauvert" pour ce monument de tru"cul"ence !