Quoi de plus apaisant qu'une promenade en forêt ?
On y vient chercher un remède contre les grandes et petites batailles de la vie. Mais on a rarement conscience que ce lieu est lui aussi celui d'une rude concurrence. Bien sûr on sait que tous les fruits, glands, faines, marrons... ne deviendront pas tous de grands arbres (heureusement) mais l'on pense rarement qu'ils peuvent en avoir envie. Sans doute pas au sens ou nous humains avons envie de réaliser tel ou tel projet, mais après la lecture de ce livre il est impossible de voir les arbres comme des êtres passifs. Lents oui, mais pas passifs. La vie au sein d'une forêt non plus n'est pas un long fleuve tranquille.
Voici en gros la vie vue par un futur arbre. le fruit tombe au hasard sur un sol plus ou moins favorable. Mais bon, maman-arbre et les voisins aident en sous-sol via le réseau du mycélium et protègent des rayons du soleil trop fort pour les feuilles fragiles. En contrepartie les “grands” empêchent de se développer, il faut patienter. Lorsque un adulte meurt et laisse une trouée vers la lumière, s'il ne vous a pas écrasé en tombant, on peut enfin grandir en espérant échapper aux animaux qui se ruent sur les jeunes arbres qui fabriquent enfin du sucre. Lesquels animaux se servent aussi de vous comme grattoir jusqu'à parfois vous meurtrir à mort. Selon l'auteur sur tous les fruits que produit un arbre dans toute sa vie seul un arrivera à l'âge adulte. Et il faudra encore se défendre des attaques d'insectes et d'oiseaux et de bien d'autres dangers. C'est dire si la vie est difficile.
Anthropomorphisme ? Les arbres ne souffrent pas comme nous ! Peut-être mais
Peter Wohlleben nous parle d'expériences qui démontrent que les arbres savent compter. Il nous dit aussi que par exemple certains individus trompés par les températures développent des bourgeons en automne. Si tous ne le font pas c'est sans doute que certains sont plus malins. Ils ont donc bien une individualité.
Il est beaucoup question de champignons. Ceux qui servent à communiquer ne sont sans doute pas les mêmes que ceux qui attaquent les arbres. Je n'ai pas trouvé de nette explication sur ce point. Je connaissais déjà le rôle de mise en relation des arbres par le mycélium, sans doute grâce à un ouvrage de
Jean-Marie Pelt.
J'ai tout de même trouvé un défaut. Ce livre est un peu trop “littéraire”, j'aurais préféré une approche un peu plus scientifique avec des schémas que j'ai dû aller chercher sur internet. La version illustrée offre de très belles photos d'arbres mais n'aide pas à en voir la structure intérieure par exemple.
J'ai lu en un temps pré-babelio Éloge de la plante de
Francis Hallé que j'avais beaucoup aimé. Et j'ai regardé au cours de cette lecture un numéro de la Grande Librairie dans laquelle j'ai entendu Hallé dire “Les hommes sont les principaux ennemis des arbres la cohabitation est trop récente.” phrase qui m'a arrêtée. Elle sous-entend qu'un jour lointain il y aura une cohabitation équilibrée, les deux espèces survivront-elles jusqu'à cette époque idyllique ?
Ce livre a créé pour moi des connexions avec d'autres livres mais aussi avec le cinéma. “Les arbres ne sont pas les seuls à communiquer ainsi entre eux, les buissons, les graminées échangent aussi et probablement toutes les espèces végétales présentes dans la communauté forestière” page 24. En lisant cette phrase m'est revenue une image d'un film catastrophe (Phénomènes je crois) où tout à coup la nature se rebelle contre les hommes.
Une lecture très enrichissante. Je ne m'étonne pas du succès en revanche je comprends mal que
Francis Hallé en ait moins.