AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,27

sur 3368 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Depuis que j'ai lu "Mémoires d'Hadrien", je suis devenu impitoyable envers les autres romans historiques, que je juge à l'aune de celui-ci. C'est injuste, je le reconnais, mais le roman de M. Yourcenar est un modèle de rigueur et de méthode. On raconte qu'un professeur de grec ancien en a donné un extrait à traduire à ses étudiants, à Toulouse : à part deux ou trois expressions qui ne passaient pas en grec classique, expressions trop modernes, le reste se laissait traduire sans barbarisme ni étrangeté en une langue littéraire contemporaine d'Hadrien lui-même. L'auteur ici rejoint, dans sa capacité d'assimilation à une autre culture et à une autre langue, un romancier-poète comme Victor Segalen, qui fut capable de devenir presque un Tahitien dans son roman "Les Immémoriaux", ou un Empereur de Chine dans "Le fils du Ciel". Cette capacité à sortir de soi et à devenir pendant un temps, un autre, est la marque du véritable romancier.
Commenter  J’apprécie          895
Ce monument de la littérature française, peut intimider voire effrayer le futur lecteur, par crainte de ne pas maîtriser les notions historiques, ou de se retrouver confrontéà un style complexe et abscons. Et pour avoir oser franchir le pas, dès les premières pages , je suis revenue sur ces préjugés. le test des 80 premières pages n'a pas été nécessaire, je me suis laissée séduire autant par la forme que par le fond.

Ce testament de vie d'un homme qui pressent l'arrivée de sa mort, et lègue à son neveu et futur successeur Marc Aurèle, alors âgé de 17 ans, un bilan assorti de suggestions et mise en garde pour assumer au mieux le pouvoir de régner sur un empire, est à la fois édifiant et émouvant.

Hadrien revient sur son histoire personnelle, sa jeunesse et les erreurs qui l'ont marquée , et son arrivée au pouvoir, après le décès de Trajan . Et sans en avoir l'air, dessine ainsi un état des lieux de la société romaine de la fin du deuxième siècle.

Cet empereur semble bien avoir été un gouvernant vertueux. Opposé à la guerre, si ce n'est pour défendre son territoire, mais en aucun cas par goût de l'affrontement et de la conquête, il se range plutôt du côté des pacifistes. Il vise une société plus équitable, se penchant sur le statut des esclaves dont il améliore le sort, ainsi que sur celui des femmes.


Il entreprend également une grande réforme de l'agriculture, une réorganisation de l'administration et du droit romain.

Cet amoureux des arts et des lettres est aussi à l'origine de grands travaux, s'inspirant des traditions grecques et égyptiennes.

Hadrien confie aussi les aléas de sa vie amoureuse. amateur des jolies femmes, même s'il n'était pas très attiré par la sienne, c'est surtout sa passion pour Antinoüs qu'il nous conte. Il ne se remettra jamais de la mort tragique du bel éphèbe, dont il fera dresser un nombre considérable de statues, et même élèvera une ville à son nom.

Il y aurait encore tant de choses à dire sur ces confidences pré mortem, empreintes de sagesse. le récit va bien au delà d'une page d'histoire, c'est une méditation sur la vie, l'amour et la mort, qui a quelque chose d'universel et d'éternel.




Lien : https://kittylamouette.blogs..
Commenter  J’apprécie          868
Il est des livres, nous dit Marguerite Yourcenar, qu'on ne doit pas oser écrire avant d'avoir dépassé quarante ans. Je dirais aussi qu'il est des livres qu'on devrait lire, ou relire, après avoir dépassé quarante ans. Ce sont les mêmes. En voici un. Rencontre au delà des siècles de deux esprits universels, de deux humanismes, de deux consciences morales, ces mémoires que Marguerite Yourcenar prête à l'empereur Hadrien sont riches de méditations sur la nature humaine, l'amitié, le courage, sur les peuples et les hommes, sur les ressorts parfois dérisoires qui les animent, sur la médiocrité des sentiments et des passions qu'ils ont dans le coeur.
Hadrien, espagnol de naissance, éduqué à Rome, et dans la langue grecque à Athènes, s'illustre d'abord en campagne militaire aux confins de la Germanie. Il a voulu voir et comprendre, s'approprier, toutes les régions et toutes les dimensions de l'empire: Egypte, Asie mineure, Judée, Bretagne (où son fameux mur est toujours debout), Dalmatie, Pannonie...
Je n'essaierai pas de résumer ces pages très fortes, mais j'y ai relevé quelques paroles et pensées qui m'ont paru frappantes:
- sur l'inconstance des hommes: "... les lâches qui pleurent leurs mots avant de les oublier."
- sur l'amitié qui l'unissait à Plotine (veuve du précédent empereur): "L'amitié était un choix où elle s'engageait toute entière. Elle m'a connu mieux que personne; je lui ai laissé voir ce que j'ai soigneusement dissimulé à tout autre: par exemple de secrètes lâchetés. J'aime à croire que de son côté elle ne m'a presque rien tu. L'intimité des corps, qui n'exista jamais entre nous, a été compensée par le contact de deux esprits étroitement mêlés l'un à l'autre."
- sur le christianisme naissant: "l'injonction qui consiste à aimer autrui comme soi-même est trop contraire à la nature humaine pour être sincèrement obéie par le vulgaire, qui n'aimera jamais que soi, et ne convient nullement au sage, qui ne s'aime pas particulièrement soi-même."

Ce grand livre mérite d'être un livre de chevet. Superbe remède contre l'idée bêlante de progrès et de perfectibilité qui est notre drogue depuis quelques siècles. Pour mieux connaître Hadrien, une visite approfondie de la villa Adriana à Tivoli s'impose. Dans ce lieu magique à l'écart du tumulte de Rome, Hadrien avait voulu reproduire la diversité des provinces de l'Empire.
Un chef-d'oeuvre d'une Grande Dame qu'était Marguerite Yourcenar !


Commenter  J’apprécie          831
Première découverte de cette grande dame de la littérature française, première femme reçue en 1981 à l'académie française, que j'avais boudée jusqu'ici, sans doute trop jeune pour apprécier son style classique et un peu froid, presque sévère. Il me fallait lire Les Mémoire d'Hadrien pour apprendre à mieux connaître cette personnalité complexe.

Derrière la biographie historique, savamment documentée, où l'empereur romain, au crépuscule de sa vie, nous livre -comme à son successeur- ses ambitions, sa conquête du pouvoir, ses forces et faiblesses d'homme et de dirigeant, la force de ses passions, de ses amours, et ses angoisses devant la maladie et la mort, c'est bien Marguerite Antoinette Jeanne Marie Ghislaine Cleenewerck de Crayencour, dans toute sa complexité et sa grande intelligence, qui nous éduque.

En effet, Les Mémoire d'Hadrien ne sont pas, pour moi, qu'un excellent roman historique nous plongeant dans l'antiquité romaine. Il s'agit aussi et surtout d'un essai philosophique, produit par une femme dont le père aura guidé avec amour l'éducation sans l'enfermer, qui se sera ensuite forgée elle-même, et entend transmettre à ses contemporains ses réflexions.

Ainsi, derrière les solides connaissances historiques et littéraires grecques et romaines, derrière la reconstitution crédible d'un empereur "éclairé" guidant son temps, s'impose une autre présence, forte et insistante : l'amatrice de théâtre, l'amoureuse de la poésie italienne, l'experte des mouvements philosophiques du XIXème, socialiste et anarchiste notamment, la femme curieuse aussi de culture orientale et engagée qui, dès le début des années 60, milite pour les droits civiques et pour l'environnement, parle à ses contemporains de l'après seconde guerre mondiale.En fait, peu importe qu'elle ait choisi Hadrien plutôt qu'Omar Khayyam ou Zénon pour s'incarner, ces personnages partagent clairement avec leur hôtesse un regard à la fois lucide, tolérant et désabusé sur la condition humaine et des illusions "dont l'humanité semble ne pouvoir se passer".

Pour toutes ces raisons, je recommande évidemment la lecture de ce livre, mais m'inscrit en faux contre les commentaires de l'oeuvre que j'ai pu lire, soutenant qu'elle est parvenue à faire revivre Hadrien en ne lui faisant dire que ce qu'il aurait pu dire : moi qui ne la connaissait pas, j'ai ressenti dans ce roman biographique sa présence incontournable et son regard de modernité. le couple Hadrien Marguerite-savoureux quand on en sait un peu plus sur leurs préférences sexuelles et amoureuses respectives-, est équilibré, complémentaire, et chacun répond à l'autre par des traits de caractère complexes travaillés par la vie... même si, contrairement à son personnage, Marguerite vivra encore 37 ans après avoir achevé son livre.

C'est pour moi tout ce qui fait la richesse de ce roman. Moi qui croyait ne pas aimer les biographies, voici que je me découvre grâce à Babelio (ah ben oui tiens c'est classé roman biographique ...) un goût pour ce genre qui permet à l'auteur habile de proposer un jeu à trois, intégrant son double littéraire et historique dans son dialogue avec lecteur.

Porté au fil des pages par cette découverte du triolisme de l'intelligence et de la réflexion -et avec quels partenaires ! - je retiens cependant une expérience inégale, depuis la jouissance extrême lors de l'apprentissage du pouvoir par Hadrien, jusqu'à l'ennui passager lorsqu'il se passionne pour Antinoous, en passant par une période réfractaire douce et respectueuse, quand il évoque sa maladie et sa mort prochaine.

De plus, au début, le mélange des réflexions contemporaines de Marguerite Yourcenar avec l'expérience antique d'Hadrien a pu me gêner, manquant sans doute de souplesse et d'ouverture d'esprit. Enfin, le style d'écriture de l'écrivaine reste assez classique et aride à mon goût. 4 étoiles donc, mais pas 5, pour ce néanmoins grand livre.



Commenter  J’apprécie          7111
Marguerite Yourcenar a depuis tout temps été avant tout pour moi la "première femme académicienne", une distinction, un progrès dans le chemin du féminisme plutôt qu'une auteure. C'est peut-être ce qui explique que j'ai finalement mis tant de temps à la lire, peut-être aussi parce que l'étiquette académicienne me faisait craindre un certain... académisme dans le style alors que le livre date d'une époque où les innovations se sont multipliées en littérature.

Et force est de constater que mes craintes se sont avérées fondées. le choix de "Mémoires d'Hadrien" n'était peut-être pas le plus judicieux pour fuir ces préjugés, me direz-vous. Comment ne pas chercher le classicisme quand on se donne pour projet de réécrire la vie d'un empereur romain du deuxième siècle en adoptant le point de vue du principal intéressé ? Difficile alors de faire dans l'original au risque de ne pas respecter son dessein initial.

J'avoue avoir traversé certains passages avec un certain ennui, notamment toute la partie consacrée au parcours de formation avant la fonction suprême. Heureusement j'étais toujours maintenu en éveil par certaines pensées philosophiques frappées au coin du bon sens et particulièrement bien formulées. Je commençais tout de même à m'interroger sur la différence entre le projet et une biographie classique, j'avais du mal à saisir le côté romanesque.

C'est alors que je rencontrais deux moments particulièrement forts de la vie d'Hadrien: la succession de Trajan qui l'amène aux plus hautes fonctions et les années de bonheur auprès de son amour Antinous, pendant seulement 4 ans (des 16 au 20 ans du jeune homme). le personnage, auparavant trop parfait, révèle à ces deux occasions plus de faiblesses, de contradictions... et Yourcenar déploie alors tout son talent pour réussir la gageure pour une femme du XXème siècle d'entrer dans la tête d'un empereur romain que le temps a mis à 18 siècles de distance. Je comprends aussi le retentissement qu'a du avoir à l'époque de la publication la relation entre l'empereur et l'éphèbe de Bithynie. Même si la plupart des gens avaient entendu parler de cette homosexualité assumée des temps antiques, la contradiction avec la façon dont elle était vécue dans les années 50 a dû rendre anachronique cette retranscription pleine de bienveillance. L'écart est aujourd'hui moins grand et l'effet est donc moins époustouflant, mais le talent de l'écrivaine reste intact.

Le carnet de notes de Yourcenar et les notes de fin d'ouvrage font encore mieux comprendre la difficulté de l'aventure et permettent de contrebalancer certaines lourdeurs quasiment inévitables (et Yourcenar nous indique qu'on a aussi éviter le pavé de 1000 pages qu'elle aurait pu publier si elle avait gardé les premiers écrits tels quels). Il me reste à lire un deuxième livre, indispensable pour moi si on veut se faire une idée plus précise de n'importe quel auteur, la première impression bonne ou mauvaise méritant le plus souvent confirmation... ou non ! Des conseils de lecture les spécialistes ?
Commenter  J’apprécie          638
Ce qui commence comme une lettre à un jeune ami devient rapidement le récit d'une vie. L'empereur romain Hadrien, fils de Trajan, livre sous la plume de Marguerite Yourcenar ses mémoires et une certaine philosophie. Se dévoile un vieil homme malade au crépuscule de son existence. « Il est difficile de rester empereur en présence d'un médecin, et difficile aussi de garder sa qualité d'homme. » (p. 11) S'il est empereur, Hadrien n'en est pas moins humble et c'est sans aménité qu'il considère son existence : « quand je considère ma vie, je suis épouvanté de la trouver informe. » (p. 41)
Il revient sur sa jeunesse, ses études et ses années de soldat et de magistrat. On découvre alors chez l'homme un goût pour les plaisirs simples et un certain dénuement. Loin du faste qui illustra ses prédécesseurs, Hadrien se veut l'empereur de la simplicité et de la paix. « Je m'efforce que mon attitude soit aussi éloignée de la froide supériorité du philosophe que de l'arrogance du César. » (p. 64) Attaché à la Grèce et particulièrement à Athènes, il n'a de cesse d'introduire une élégante modestie dans toute chose. « La paix était mon but, mais point du tout mon idole : le mot même idéal me déplairait comme trop éloigné du réel. » (p. 144) Plutôt que de conquérir et de dévaster, Hadrien se veut bâtisseur : sous ses ordres s'érigent temples et villes, pour la grande gloire de l'empire romain.
Hadrien était aussi homme et soumis aux passions. Son bel amour est un jeune homme, presqu'un enfant. Antinoüs est grec et incarne l'idéal amoureux de l'empereur. « Je n'ai été maître absolu qu'une seule fois et que d'un seul être. » (p. 226) L'empereur se révèle alors sensuel et sensible. Sous ses mots, la simplicité exulte et le raffinement amoureux n'est jamais si précieux que quand il s'accompagne d'un éternel attachement.
Ses derniers mots sont courageux : « Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts. » (p. 423) Ils sont aussi prophétiques : sous la plume de Marguerite Yourcenar, l'homme restera vivant pour longtemps. Qu'il est bon d'écouter cet empereur et de suivre sa pensée sage. Tiré d'un oubli de pierre et de poussière, exhumé des manuels et des fresques, Hadrien resplendit une nouvelle fois. Et avec lui, c'est l'empire romain qui se relève un instant de ses ruines, c'est une civilisation qui redresse la tête face au temps et qui clame qu'elle n'est pas perdue.

Commenter  J’apprécie          550
Pour moi, quand on évoque Marguerite Yourcenar c'est avant tout la première femme élue à l'Académie Française. J'étais encore toute jeune en 1980, mais je me rappelle que mon instit (bah oui, avant on appelait les professeurs des écoles comme cela) nous en avait parlé. Plus grande, je me suis juré de lire un jour une de ses oeuvres…Bon, là il est vrai que j'ai attendu quelques décennies avant de me lancer dans ces Mémoires d'Hadrien.
J'avais choisi ce titre car j'aime cette période de l'histoire et j'avais quelques petites connaissances sur cette époque et cet empereur.
Quelle belle plongée dans l'histoire et surtout dans la peau de l'empereur Hadrien ! Ce dernier, malade, sentant que ses jours sont comptés, envoie des lettres à Marc-Aurele, qui sera amené à devenir un jour empereur lui aussi.
Avec beaucoup de lucidité, Hadrien va revenir sur son passé et les actes importants de sa vie et de sa carrière d'empereur. Il sera aussi un visionnaire sur l'avenir de l'empire romain.
J'ai franchement adoré lire ce livre et j'ai vécu pendant un moment à la même époque que Hadrien. Je n'ai pu être qu'en admiration devant l'époustouflant travail de recherche de Marguerite Yourcenar. Car il faut en avoir fait des recherches pour arriver à restituer avec autant d'authenticité cette époque.
Retrouver l'histoire du fameux mur et aussi mes chers Sarmates m'a fait plaisir même si évidemment l'histoire ne se cantonne pas à ces épisodes du règne d'Hadrien.
J'ai découvert un empereur éclairé, plus préoccupé à faire la paix que la guerre contrairement à son prédécesseur Trajan. Je ne connaissais rien de son histoire familiale ni de sa passion pour Antinoüs.
C'est avec un style soutenu et élaboré, mais agréable à lire que Marguerite Yourcenar a raconté cette histoire à travers la bouche, ou plutôt les écrits d'Hadrien. C'est vrai que l'une ou l'autre fois j'ai dû relire une ou deux phrases car clairement ce livre se mérite.
Je ne sais pas si je lirais un jour L'oeuvre au noir, car au vu des critiques, c'est un livre qui me semble assez difficile à lire, mais je n'hésiterais pas à conseiller la lecture de celui-ci.

Challenge ABC 2017/2018

Commenter  J’apprécie          525
Ce livre, exigeant, est un véritable chef d'oeuvre.
Il allie avec pertinence faits historiques avérés et fiction, descriptions et réflexions philosophiques.
Hadrien, sur son lit de mort, évoque sa vie, ses joies et ses peines, ses réussites et ses déceptions, avec une intelligence certaine et des réflexions très modernes.
C'est une véritable plongée au coeur de l'antiquité, bourrée de références difficiles à comprendre pour le néophyte, mais le tout est relativement abordable et c'est une approche captivante de l'histoire antique.
Certains passages sont réellement splendides et le récit d'Hadrien est émaillé de nombreuses questions philosophiques amenées avec intelligence.
C'est une lecture qu'il faut déguster avec lenteur, et, c'est là le seul reproche que je pourrais faire à ce livre, avec une attention soutenue.
A découvrir absolument, ne serait-ce que pour la langue magnifique...
Commenter  J’apprécie          451
"Attention chef d'oeuvre / classique incontournable / monument de la littérature française", lit-on un peu partout au sujet des ces mémoires (fictives) de l'empereur Hadrien.
J'étais prévenu, et par avance impressionné. Aussi avant d'entrer dans l'arène, je l'avoue, j'ai tremblé un peu.
Ave Marguerite, celui qui va te lire te salue !

Comme prévu, le combat fut épique. Il a parfois tourné au corps à corps acharné et forcément déséquilibré entre moi, petit lecteur anonyme aux connaissances historiques lamentablement dérisoires, et ce texte splendide et plein d'érudition, ce vertigineux puits de savoir d'une densité et d'une profondeur qui forcent l'admiration. Au terme d'une lecture pour le moins exigente, je ne saurais dire qui l'a emporté...
Ce qui est sûr, c'est que je me souviendrai longtemps de cet ouvrage, à mi-chemin entre autobiographie et roman historique, fruit de recherches sans doute titanesques et source inépuisable de commentaires passionnés, qui m'aura ébloui (style admirable, évidemment, bien que d'un classicisme parfois un peu aride) autant qu'étourdi (innombrables références culturelles de très haute volée !). Je reconnais volontiers que l'expérience ne fut pas de bout en bout une partie de plaisir, mais l'effort en valait la chandelle !

Même si je ne retiendrai sans doute qu'une infime partie des évènements relatés ici par le grand Hadrien qui, au crépuscule de sa vie, adresse un courrier à son petit-fils adoptif Marc Aurèle, je garderai au moins l'image d'un empereur profondément humain, d'un grand voyageur pacifiste, d'un fin lettré féru d'art et de philosophie. Comment ne pas se laisser séduire, à l'instar de Marguerite Yourcenar, par cet esprit curieux et éclairé qui, à la différence de ces prédécesseurs, a toujours su tempérer ses aspirations expansionnistes, se préoccupant davantage de la stabilité de l'empire et de la paix aux frontières que de la grandeur de Rome ?
Au fil de cette longue lettre (350 pages quand même, je te dis pas le prix du timbre :-)), il revient avec un incroyable discernement sur les faits marquants de son existence, sa carrière de soldat et son accession au pouvoir, sans oublier bien sûr sa passion dévorante pour le bel Antinoüs, qui occupe à n'en pas douter les plus belles pages du livre. Il porte en outre un regard d'une remarquable lucidité sur l'homme qu'il fut, dans ses grandeurs et ses travers ("j'ai utilisé de mon mieux mes vertus, j'ai tiré parti de mes vices"), et dresse finalement un autoportrait d'une rare précision.

Déclarations d'amour enflammées, introspections approfondies, comptes rendus détaillés d'évènements historiques, considérations politiques, manoeuvres et intrigues de cour : dans cette belle "méditation écrite d'un malade qui donne audience à ses souvenirs", tous les lecteurs (fussent-ils des ignares dans mon genre) pourront trouver matière à s'intéresser de près au règne et à la vie bien remplie de ce grand réformateur.
Toutefois, les latinistes les plus accomplis restent je pense les mieux armés pour apprécier à sa juste valeur et pour digérer pleinement ce texte compact, monolithique et pur comme un bloc de marbre romain.
Commenter  J’apprécie          364
Dans la culture populaire on fait surtout référence à Hadrien pour son mur en Grande-Bretagne (ex-Bretagne de l'empire romain). Dans les "Mémoires d'Hadrien" Marguerite Yourcenar nous rappelle et nous raconte que cet empereur romain est bien plus que ça. Homme de lettre, passionné par la philosophie grecque, c'était aussi un homme de paix, qui a toujours cherché, durant son règne, à pacifier les relations aux frontières tout autant que les relations entre les peuples de l'empire romain (en étant plus "juste" notamment).
Les "Mémoires d'Hadrien", sous la forme d'un monologue adressé à son successeur, nous ra-conte la vie de cet homme, ses combats militaires, politiques, sociaux et nous livre, avec une véracité plus ou moins historique, les réflexions d'Hadrien sur la Vie, la religion et sa vision du monde.
Commenter  J’apprécie          321




Lecteurs (11177) Voir plus



Quiz Voir plus

Marguerite Yourcenar

Quelle est la nationalité de Marguerite Yourcenar ?

Elle est belge
Elle est américaine

10 questions
283 lecteurs ont répondu
Thème : Marguerite YourcenarCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..