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EAN : 9782348064838
400 pages
La Découverte (13/10/2022)
3.86/5   7 notes
Résumé :
Qu’ont en commun une chaudière, une voiture, un panneau de signalétique, un smartphone, une cathédrale, une œuvre d’art, un satellite, un lave-linge, un pont, une horloge, un serveur informatique, le corps d’un illustre homme d’État, un tracteur ? Presque rien, si ce n’est qu’aucune de ces choses, petite ou grande, précieuse ou banale, ne perdure sans une forme d’entretien.
Tout objet s’use, se dégrade, finit par se casser, voire par disparaître. Pour autant... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Voici un livre passionnant qui sensibilise à l'art de faire durer les choses.
Il est écrit par deux sociologues, qui, dès les premières pages, à travers le récit d'une journée banale, nous offrent un aperçu de la diversité des actions de maintenance.

Sept chapitres vont nous éclairer sur les différents aspects de cette maintenance.
Le premier fait une distinction importante entre réparation, ponctuelle, et maintenance, routinière.
Le deuxième nous plonge dans le métro parisien avec ses panneaux indicateurs qui semblent immuables. Et pourtant, on nous montre qu'ils sont obligatoirement l'objet d'une maintenance continue pour rester fonctionnels.
Le troisième souligne la nécessaire attention à l'usure : il faut voir, toucher, sentir, être familier de la matière.
Le quatrième parle de la rencontre de l'homme et de l'objet, qui parfois résiste, ou peut être détruit ou endommagé par l'action de maintenance en elle-même.
Le cinquième parle du rapport au temps : faire durer, c'est parfois faire exister des choses oubliées (l'horloge du Panthéon). C'est parfois sélectionner parmi tous les caractères de l'objet celui que l'on va faire durer (le corps de Lénine), c'est parfois seulement ralentir sa dégradation (Oradour ou la Joconde).
Le sixième mène une réflexion sur l'authenticité des objets maintenus.
Et enfin, le septième y questionne le droit à la réparation (le logiciel d'un tracteur n'appartient pas à l'agriculteur), et la culture du tout jetable.

C'est un livre étonnant, au style d'écriture très abordable, agréable et rigoureux.
De multiples récits illustrent les notions développées, on voyage dans toutes sortes de mondes captivants qu'on ne soupçonne pas.

Et on peut réfléchir à l'invisibilité des actions de maintenance et au mépris que certains ont envers ces activités et qui préfèrent mettre en lumière l'innovation médiatisable.
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Oeuvre de deux sociologues, "Le soin des choses" est un ouvrage original qui annonce : " Nous voulons nous, et vous, rendre attentifs et attentives à l'attention de celles et ceux qui pratiquent la maintenance." "Activité ancrée dans les plis du présent, toujours à refaire, elle est un geste banal qui ne reconnaît pas de héros. Et c'est pourquoi elle mérite toute notre attention."
Objectif atteint avec un style clair et vivant lorsqu'il illustre d'exemples convaincants le soin apporté, avec des objectifs fort différents, à des choses fort différentes : panneaux de signalisation, voitures anciennes, oeuvres d'art, etc… et même un corps embaumé.
Jérôme Denis et David Pontille méritent d'être suivis patiemment jusqu'au bout de leurs analyses subtiles et nuancées. La typologie de la maintenance qu'ils dressent en variant les points de vue force l'admiration.
Malheureusement dans les passages théoriques le style est souvent emphatique et jargonneux. Et la fin de l'ouvrage dans sa conclusion, et dans la chapitre qui précède qui aborde "le droit à la réparation", m'a paru trop engagée pour être totalement convaincante.
Enfin, le monde dans lequel nous vivons reposant sur des activités multiples et spécialisées, le citoyen lambda certes ne se soucie guère de ceux qui "font durer les choses" mais se soucie-t-il plus de ceux qui conçoivent, fabriquent et transportent les produits de leur vie quotidienne ?
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Jérôme Denis et David Pontille signent avec "Le soin des choses"un beau livre sur notre inattention au monde. En l'éclairant sous de multiples angles, en en montrant sa grande diversité, ils soulignent la complexité de notre rapport aux choses, des réalités comme des représentations qu'elles produisent. Ils explorent notamment la perte de la maintenance, en pointant notamment combien l'innovation et la consommation nous ont éloigné du soin des choses. Pourtant, c'est à l'inverse qu'ils nous invitent : "Admettre que le monde est toujours cassé, c'est accepter de prendre au sérieux les tâtonnements, les bricolages, les tentatives avortées et plus généralement les troubles qui affleurent sans cesse a la surface des relations que les êtres humains entretiennent avec les objets techniques". C'est comme si notre désir de modernité, d'action sur le monde lui-même, par l'innovation comme la consommation avait invisibilisé le soin que nous devons y porter. Pas seulement au vivant, comme nous le racontent le mur écologique qui s'annonce, mais également au monde matériel finit qui est le nôtre. "La possibilité de faire durer les choses est une affaire de redistribution des pouvoirs", nous rappellent-ils. Nous ne prendrons pas soin du monde sans changements politiques et économiques.
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critiques presse (1)
NonFiction
02 décembre 2022
Le lecteur est d’emblée séduit par la remarquable maîtrise de leur propos, la pertinence des exemples choisis, la densité et la diversité des analyses, sans oublier l’attention constamment portée à l’écriture tout au long de leurs explorations.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
Nous l'avons affirmé à plusieurs reprises, notre objectif dans ce livre était aussi de faire compter la maintenance et celles et ceux qui la pratiquent. Faire compter la maintenance, c'est donner à voir sous un angle nouveau les manières dont les humains mobilisent des artefacts de toute sorte pour habiter le monde. C'est montrer que si ces objets perdurent, s'ils peuvent agir et participer à la texture des sociétés humaines, ce n'est pas uniquement parce qu'ils ont été conçus et fabriqués dans des conditions particulières, c'est aussi parce que des femmes et des hommes en prennent soin et ne cessent de les appréhender comme des choses en devenir. Or ces femmes et ces hommes sont laissés à l'arrière-plan des récits triomphants de l'innovation et du progrès technique, en particulier lorsque la maintenance est leur métier. C'est donc un geste de repeuplement que nous avons cherché à effectuer et que nous appelons à poursuivre (…). En complément de la mise en lumière du rôle crucial que tiennent des objets dans la constitution des sociétés humaines, cette « masse manquante » que les sciences sociales ont longtemps négligée, l'étude de la maintenance appelle à prendre en compte la multitude des personnes, petites mains ou expertes reconnues, qui leur assurent une existence et une certaine pérennité. Un « peuple des choses » très hétérogène qui travaille au quotidien à assurer la continuité de la trame sociomatérielle du monde.
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C'est le pari de ce livre : nous posons l'hypothèse que la maintenance elle-même a une portée politique. Dans de nombreuses situations, l'art de faire durer les choses participe en effet d'une forme de relation aux objets qui ne s'aligne pas avec ce qui est habituellement mis en avant, non seulement lorsque sont vantés les supposés bienfaits du « progrès technique », mais aussi lorsque sont critiquées les dérives matérialistes de la société de consommation. Maintenir, c'est souvent résister à l'obsolescence et rompre un temps le cycle du remplacement incessant. Mais c'est aussi troubler les principes d'une version de l'économie circulaire qui n'a d'yeux que pour la production, la consommation et le recyclage. Sur un autre plan, maintenir c'est également perturber les projections d'un futur souhaitable ou inquiétant, qui obnubile l'attention collective, parfois jusqu'à la paralysie. C'est agir dans la trame ordinaire du quotidien, ici et maintenant, sans arrimer les préoccupations à l'horizon aveuglant d'une crise insurmontable, toujours à venir.
C'est à la découverte de ces politiques de la maintenance, à peine esquissées ici, que nous voulons nous atteler, en nous rendant sensibles aux choses et à celles et ceux qui en prennent soin.
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L'enjeu n'est plus ici de comprendre ce qui sature l'attention d'une grande part des citoyennes et citoyens des pays riches, mais de réaliser ce qui lui est soustrait. Ce que l'on appelle communément la « société de consommation » repose sur une oblitération systématique de la fragilité matérielle des choses. Une négation de l'usure qui configure la négligence des consommatrices et des consommateurs en déléguant le souci de la fragilité à une petite frange de la population mise au service de la fiction de la solidité et de la pérennité des artefacts modernes.
(…) nous pouvons apprendre à observer cette frange de la population au travail et trouver dans l'attention qu'elle cultive des leviers permettant de s'extirper du régime moderne de la consommation des objets, inattentive aux choses.
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Prendre soin d'une chose, s'assurer qu'elle dure, revient toujours à sélectionner, parmi la multitude de traits qui la définissent, ceux auxquels on tient et dont on souhaite prolonger l'existence; ceux qui, précisément, vont faire que c'est bien la « même » chose qui dure. Dans ce mouvement, de nombreux aspects de la chose seront à l'inverse délaissés, ou tout simplement ignorés. Cette opération ontologique est généralement enfouie dans l'ordinaire de la maintenance. Elle relève de l'évidence qui caractérise le mode d'existence de nombreuses choses. Ce n'est qu'en mettant en regard des situations concrètes que l'on peut en mesurer l'importance et que l'on peut saisir l'épaisseur de ce que signifie l'expression « faire durer ».
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Plutôt que la nier ou la négliger, la maintenance prend l'usure des choses comme point de départ. Elle l'appréhende comme une condition commune, qui oblige les humains à imaginer différentes formes de diplomatie avec la matière. C'est en ce sens que la maintenance peut être vu comme un soin des choses.
(…)
La maintenance passe par un contact avec la matière au gré duquel, en mobilisant le regard, mais aussi le toucher, l'ouïe ou l'odorat, les personnes qui prennent soin des choses s'attachent à les laisser s'exprimer. Cette enquête incertaine, ouverte à l'imprévu, montre que la maintenance est aussi un art de faire connaissance avec les choses à même leur surface.
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