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Les chroniques des vampires tome 6 sur 13

Michelle Charrier (Traducteur)
EAN : 9782266123075
538 pages
Pocket (10/10/2002)
3.76/5   438 notes
Résumé :
Au chevet de leur ami Lestat, plongé dans un profond coma au retour de son voyage aux Enfers, David Talbot, l'archiviste du Talamasca, rencontre Armand, peut-être le plus mystérieux et sans conteste le plus séduisant des vampires.
Il entreprend de lui faire raconter l'histoire de sa vie. Une histoire cruelle et flamboyante qui nous mène des steppes de la Russie, où il est enlevé par des marchands d'esclaves, à Constantinople et enfin à Venise, où il est sauvé... >Voir plus
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Comment réussir à critiquer et définir un roman aussi envoûtant et mélodieux ? Inscrit comme le sixième volume de la saga « Chroniques des Vampires » – signée par la talentueuse Anne Rice – « Armand le Vampire » est sans conteste l'un des meilleurs de la série. D'une richesse inouïe, d'une beauté littéraire fantastique et d'une profondeur inattendue, ce livre est à coup sûr un roman que l'on devrait hisser comme classique, ou tout au moins ajouter à ses lectures incontournables. A l'aide d'une plume agile et fébrile, Anne Rice transporte son lecteur dans les sphères insoupçonnées de la magnificence, frôlant l'ésotérisme et effleurant l'érotisme. Un savant mélange, complexe en apparence, et qui pourtant parvient à nous charmer et à nous bouleverser.

Après avoir laissé la parole à Lestat et à ses pairs vampires, c'est au tour du mystérieux Armand de conter une histoire bouleversante de réalisme, le conte de toute une vie qui traversa les âges et les siècles. A l'instar des autres ouvrages de la série, celui-ci offre le récit d'une vie de l'un des personnages les plus charismatiques de l'univers des Chroniques. Mais contrairement aux autres, Lestat n'apparait pas réellement et l'histoire marque une halte dans son déroulement tandis que cet ouvrage offre un flash-back sur la vie ô combien passionnée et mouvementée du sieur Armand. Dans un genre éclatant, le style est travaillé et d'une poésie enchanteresse. On se laisse dériver sur les flots incessants et mélodieux narrés avec soin par Armand. Ainsi, et accompagnée d'une constante sensualité tout au long de l'ouvrage, l'on s'embarque dans un voyage à travers le temps, partant sur les traces délicates d'une vie somptueuse mais néanmoins cruelle. Et c'est avec un agréable plaisir que cette narration débute en un lieu qui a lui seul reflète toute la volupté de cet ouvrage : Venise, qui se pare alors des charmes magnifiques que lui offrit la Renaissance. Dans une Italie alors à l'apogée de sa production artistique et intellectuelle, fleuron De La Renaissance, Armand dérive de beautés en beautés, parant chaque détail sur lesquels ses yeux se posent de milles charmes. On se délecte ainsi de la savoureuse poésie qui égrène les phrases, à la tournure sophistiquée, et qui vient rendre grâce à la splendide Venise. On longe ses canaux et l'on flâne à travers ses rues enfiévrées avec une aisance incroyable. Chaque quartier n'a plus de secret pour Armand et son lecteur, et c'est avec un réel bonheur que l'on pénètre ces fabuleux hôtels particuliers où l'on profite de la beauté fantasque des ameublements. Anne Rice, par un fabuleux travail de recherches, a su rendre vie à la Venise du XVe siècle, lui instillant un souffle nouveau – plein de fougue et de folie – et lui rendant l'éclat splendide du temps de son apogée. Grâce à ce saut dans le passé, on prend rapidement goût à l'opulence omniprésente des toilettes diverses, des parures somptueuses et des mobiliers cossus. Des tissus satinés, des fines dentelles ornant les lourds velours brodés, des rubis et émeraudes égayant les doigts délicats de notre vampire bien-aimé, des perles admirables ornant les cous gracieux, tout est décrit avec une aisance magistrale. La fluidité des descriptions et les précisions tendent à renforcer l'impression de réalité. Les sens sont émoustillés par le jeu de métaphores et d'allégories variées et emporte le lecteur dans des envolées d'images toujours recherchées et raffinées. le bon goût est maître-mot à ce livre et l'on se plait à imaginer les scènes fabulistes décrites. A l'image d'un chef d'oeuvre pictural, ce roman est travaillé et dépeint avec faste, brossant des images magnifiques et rendant hommage à l'art dans son sens le plus large. Véritable hymne à la peinture, ce roman est aussi mélodieux que troublant. Car si les sociétés décrites sont celles de l'opulence, côtoyant toujours néanmoins les sphères les plus appauvries et exécrables pour certaines, un vent orientalisant souffle avec vigueur tout au long de l'ouvrage : toujours grâce à des descriptions soignées, les épices parfument l'ambiance d'exotisme tandis que les soieries les plus fines épousent et dévoilent les corps les plus parfaits. A l'image d'un harem, la volupté des scènes profite de l'ambiance entêtante pour perdre son lecteur dans un tourbillon de sensations. Car les sens sont définitivement mis en éveil : ouïe, odorat, toucher et goût sont sollicités tout au long de l'ouvrage, invitant ainsi le lecteur à se délecter de perceptions intangibles et pourtant bien présentes.

En réalité, la sensualité émanant de ce livre tient en grande partie à la présence vampirique omniprésente. Que ce soit le divin Marius ou l'envoûtant Armand, chacun est doté d'une nature majestueuse et d'une sensibilité savoureuse. Et lorsque les deux personnages interagissent, on assiste à une véritable explosion d'émotions. de fait, les vampires ne sont pas traités comme des monstres et Anne Rice profite de leur nature exacerbée pour les rendre encore plus poétiques et sensuels que de simples humains. L'auteur mêle habilement leur nature démoniaque et assoiffée de sang à celle, bien plus délicate, de leur émotivité. de fait, on pardonnera aisément à ces élégantes créatures leur avidité sanguinaire, d'autant plus qu'Anne Rice ne s'attarde pas tant sur celle-ci que sur les troubles intérieurs qui agitent constamment Armand. Né dans un siècle de passion, adepte d'instruction et à la recherche constante de savoirs, Armand est un homme mûr dans un corps encore adolescent, et pourtant parfait, doté d'une sensibilité parfois trop extrême, l'amenant à divaguer sur des sujets intangibles. A la recherche constante de la véracité et vénérant l'image du Christ, il est un de ces hommes remettant sans cesse le monde en question. Durant ces longs discours ésotériques, qui sont parfois trop éthérés pour le simple lecteur, ce sont de véritables doctrines qui prennent naissance : Dieu et le Christ prennent pratiquement consistance dans ce roman tant la recherche d'Armand sur leurs traces est poussée. On frise souvent l'indescriptible, l'évanescent et les atermoiements d'Armand prennent des tournures de philosophies complexes. La narration interne permet de réellement ressentir toutes les émotions d'Armand et de mieux comprendre la substance de ses sentiments… mais parfois on ne comprend pas la raison de son émoi et l'on s'égare dans un flot de paroles ininterrompues. Mais au final, tous les personnages possèdent une humanité impressionnante et sont dotés d'un caractère qui force le réalisme. Malgré des passages parfois longs, on retiendra surtout le sens esthétique des vampires qui agissent en tant que véritables mécènes, témoins d'ères révolues dont ils sont ressortis grandis.

Ce roman s'apprécie également pour sa véracité historique. En définitive, cette histoire romancée s'inscrit dans l'Histoire, brodant des fantaisies sur une trame belle et bien réelle. Que ce soit Venise, Constantinople ou encore les steppes russes, on s'enfonce avec bonheur dans une narration qui pousse notre esprit à s'échapper dans le glorieux XVe siècle et survoler de vastes paysages rutilants, rivalisant de magnificence. Chaque scène est parfaitement détaillée et le décor particulièrement bien posé de sorte que l'on ressent les effluves exotiques de chaque contrée, savourant l'effervescence de Constantinople, la tiédeur enivrante de Venise, la beauté cristallisée de la Russie et le charme classique parisien. le tout sur un fond de vampirisme qui, bien loin de dénaturer l'ensemble, s'harmonise magnifiquement avec les décors et l'histoire.

Mais si les deux premières parties sont particulièrement saisissantes de réalisme et constituent de pures odes à la poésie, la troisième partie en revanche, perd de sa vitalité et s'essouffle. On retrouve alors Armand au coeur du XXe siècle, s'amourachant de deux humains aux caractères bien trempés et qui pourtant, malgré tous les éloges dont les pare Armand, peinent à nous être sympathiques. Définitivement, Sybelle et Benji manquent d'élégance face aux charismatiques Marius, Armand et à la divine Bianca. Peut-être est-ce dû à la distance creusée et surtout à un manque de détails. Car contrairement aux deux premières parties consacrées à l'âge renaissant, cette dernière partie est bien plus courte, et de fait bien moins travaillée que ses précédentes. Quant à la fin de celle-ci, elle est très ambiguë : Armand parvient à accéder à un savoir, à l'aboutissement d'une quête qui avait guidée toute sa vie. Sa rencontre mystique, aux lueurs oniriques, avec le Christ est particulièrement difficile à saisir. A trop fait agir ses personnages dans l'intangible, Anne Rice en perd parfois son lecteur, lequel, désarçonné, se voit contraint de poursuivre sa lecture sans toujours tout comprendre des situations.

Au final, ce roman est une émulsion des sens, glorifiant toujours plus les vampires en les parant d'une âme poétique. Si cet opus constitue une pause dans la saga des Chroniques, ne s'attardant que très peu sur Lestat, il offre en revanche une très belle vision De La Renaissance et célèbre les merveilles de son temps. En tant que lecteur chevronné, on appréciera également de s'attarder enfin sur l'histoire du séducteur et insaisissable Armand, véritable mystère de l'univers. « Armand le Vampire » est l'un de ces joyaux littéraires dont la lecture se révèle être une expérience envoûtante de délices et de sensations. Ce roman est tel un verre de vin rouge sirupeux, où l'on apprécie chaque gorgée tout en savourant l'onctueux mélange épicé de sa robe, prolongeant le plaisir tout au long de la dégustation, laissant l'épais liquide s'écouler langoureusement en nous avant de se délecter de la saveur dont il parfume nos lèvres, appréciant encore plus le souvenir qu'il laisse sur son passage.
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Et enfin, voici le tour d'Armand, dont nous avons fait connaissance par bribes, d'apparition en disparition, lors des premiers tomes, et qui s'est révélé toujours plus important. Il répond aux question de David Talbot, enfant vampire de Lestat. Son enfance en Russie, ses années passées à Venise pendant la Renaissance, puis en France et enfin à New York.
Ce tome enrichit nettement le récit qui avait tendance à s'essouffler lors des deux volumes précédents. Autant de questions que de réponses sur Marius, son créateur, sa rencontre avec Lestat et ses rapports avec Louis, le jeune vampire par lequel démarre la saga.
On a hâte d'en savoir plus sur Marius et son entourage, notamment deux femmes qui se révèlent très importantes (je n'en ajouterai pas plus pour ne pas spoiler). Anne Rice navigue aisément entre les époques et je salue encore bien bas son travail de documentation sur l'ensemble de la Saga.
Un livre qui se lit comme une friandise, il faut dire que je commençais à être en léger manque. Des rebondissements à foison, du suspense comme s'il en pleuvait. Je ne regrette pas de m'être accrochée et j'ai hâte de lire la suite.
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De temps en temps, j'extraie une des chroniques vampiriques d'Anne Rice et me replonge avec plaisir dans son univers au style si recherché. Cette fois, la parole est à Armand, éphèbe qui découvre l'opulence et les plaisirs d'une Renaissance italienne où l'art côtoie le religieux. Venise, New York, Kiev, Paris, le récit d'Armand est un voyage à la fois temporel et spatial d'où ressort un perpétuel contraste profondément lié à l'évolution et à la transformation de ce jeune homme en vampire.

Mes souvenirs des opus précédents sont peut-être trop lointains, mais il me semble bien que le présent livre soit le plus érotique jusqu'ici. Sans jamais sombrer dans la vulgarité, Anne Rice évoque l'amour, la passion et les plaisirs charnels presque avec poésie. Et alors que l'époque actuelle multiplie les dénominations pour caractériser les préférences de chacun, elle s'affranchie des étiquettes pour ne s'intéresser qu'à l'essentiel.

En ce qui concerne l'intrigue générale, elle n'est pas des plus palpitantes dans le sens où l'action, le fantastique et le développement de la mythologie vampirique sont plutôt délaissés au profit d'un récit intimiste, présentant une occasion de combler quelques points obscurs des ouvrages précédents. Cela n'empêche aucunement l'intérêt et la qualité de rester au rendez-vous.

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Là où Anne Rice décide de mettre les personnages secondaires à l'honneur

Rappelons nous : Lestat est prostré, en sommeil. Et pendant que notre héros chouchou décide de faire sa petite sieste, Anne Rice a décidé de cibler sa chroniques sur d'autres personnages, de revenir en quelques sortes sur eux (tout en alimentant un peu l'intrigue, tout de même), histoire qu'on ne se sente pas lésés. Pour commencer, elle s'intéresse à Armand, Amadéo (l'aimé de Dieu) qui a joué un grand rôle secondaire dans les chroniques des vampires. Souvenez vous, dans Entretien avec un Vampire, c'est lui qui a ordonné l'exécution de Claudia. Et dans Lestat le Vampire, on découvre que Lestat lui a offert le théâtre des vampires.

Mais pourquoi a-t-il été aussi méchant vous allez me dire ? C'est ce que Anne Rice tente de nous montrer en relatant la biographie d'Armand, qui était un des enfants de Marius. le problème d'Armand est qu'il a toujours été assailli de doutes et de tourments religieux car, si vous vous souvenez bien, il a voulu être prêtre. Et puis il est devenu Vampire avec Marius, il s'est passé des tas de choses pour qu'il ouvre le théâtre des vampires dans une sorte de fanatisme religieux et enfin, quand il découvre le voile de Véronique, il entre en transe (dans Memnoch le Démon).

Indubitablement, c'est le plus religieux du groupe. Et il est normal du coup, qu'Anne Rice lui consacre tout un tome


Armand reste toutefois quelqu'un qui est voué à être malheureux.

Je ne sais pas pourquoi mais il y a des gens comme cela qui sont destinés à avoir une vie pourrie. Et c'est le cas d'Armand. Et même son père vampire, Marius, quelque part, le reconnaît puisqu'il le remet toujours dans le droit chemin. Même si parfois, pendant quelques siècles, il le laisse se débrouiller seul. Il tente toufefois d'éduquer cet enfant malheureux. Alors, je m'avance sûrement dans mes élucubrations sur l'auteure mais je pense que quelque part, Anne Rice a dû retrouver ce cas là dans son entourage familial car elle traite admirablement le sujet. Voire, elle le sublime parce qu'elle arrive à nous rendre le point de vue d'Armand.

Car oui, Armand est aimé de ses comparses vampires. Il a été aimé des prêtres orthodoxes. Il a été aimé de sa famille. Mais il ne s'aime pas lui même et du coup, il a du mal à aimer ou à exprimer son amour pour les autres. Ou s'il l'exprime, cela peut de toutes façons mal se terminer, en fin de compte. C'est un personnage que l'on apprend à aimer, même s'il agace franchement. Mais il a eu une vie incroyablement riche et il a énormément influencé la saga. Vous me direz si vous avez aimé Armand ou si vous l'avez détesté :)
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Andrei, Amadeo, et Armand! Trois noms pour un jeune garçon de l'âge de dix sept ans changé en vampire par Marius. Ce dernier dira plus tard qu'il n'aurait pas dû le transformer aussi jeune... Né à la fin du XV°s à Kiev en Ukraine, Armand ou plutôt Andrei, se destinait à mener une existence monastique austère au sein du monastère des Grottes. Mais ça c'était avant qu'il ne soit enlevé par des brigands, pour être ensuite vendu comme un esclave sur les rives de la Mer Noire puis trouvé par Marius et ramené à Venise pour y découvrir tous ses fastes. Tout au long de l'histoire, on suit le parcours initiatique et les réflexions mystico-religieuses d'Armand peu avant d'être transformé en vampire, de voir disparaître Marius sous les flammes et de le croire mort. Ayant dû quitter Venise dans la précipitation, accablé de chagrin et brisé, il se heurtera à un clan de vampires romains avant de venir enfin en France et de fonder le fameux Théâtre des Vampires. de tous les vampires d'Anne Rice, Armand est celui qu'à certains moments j'ai eu le plus envie de baffer, et d'aimer à la fois. Il est magnifique et cruel, bref l'ambigu par excellence.
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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Mais, bien avant l’aube, il changea. Les autres étaient depuis longtemps couchés. Je tournais les pages de mon livre, obéissant, lorsque son œil fixe, animal, me frappa. Il me regardait de son fauteuil comme si quelque rapace était entré en lui, chassant toutes ses facultés de civilisé pour l’abandonner ainsi, affamé, les yeux vitreux, la bouche rougissante, tandis que le sang luisant trouvait sa myriade de petits chemins sur la bordure soyeuse de ses lèvres.

La bête enivrée se leva et s’approcha avec des mouvements au rythme si étranger qu’une terreur glacée me frappa au cœur.

Ses doigts s’animèrent, se refermèrent, me firent signe.

Je courus à lui. Il me souleva à deux mains, toujours aussi doux, afin de loger le visage dans mon cou. De la plante des pieds au cuir chevelu en passant par les bras, le dos, la nuque, je sentis son étreinte.

Où me jeta-t-il, je ne sais. Sur notre lit, ou sur quelques coussins rassemblés à la hâte dans un salon plus proche ?

— Donnez-m’en, demandai-je d’un ton endormi – et lorsque le nectar se répandit dans ma bouche, je perdis connaissance.
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— Un jour, tu partiras, déclara-t-il. Tu quitteras le palazzo. Tu emporteras de l’or et tout le savoir que j’aurai réussi à te transmettre. Tu emporteras ta grâce et tous les arts que tu auras maîtrisés, ceux du peintre, du musicien capable de jouer à la demande n’importe quel air – tu y parviens déjà –, du danseur le plus exquis. Armé de tous ces talents, tu te lanceras à la recherche des trésors après lesquels tu soupires…

— Je ne soupire après rien d’autre que vous.

— … et lorsque tu repenseras à ce que nous vivons aujourd’hui, lorsque, dans un demi-sommeil, la nuit, tu te souviendras de moi, les yeux fermés, la tête sur l’oreiller, les moments que nous passons ensemble te paraîtront corrompus et de la plus grande étrangeté. Ils te sembleront émaner de la sorcellerie ou de la folie ; notre chambre douillette deviendra pour toi le théâtre oublié de sombres secrets, et peut-être en souffriras-tu.

— Je ne m’en irai pas.

— Rappelle-toi alors que nous nous aimions. Que tu t’es bel et bien trouvé dans une école d’amour, où tu as soigné tes blessures, réappris à parler, oui, et même à chanter, où tu es né d’un enfant brisé comme s’il n’avait été qu’une coquille d’œuf et toi un ange, t’élevant de lui sur des ailes de plus en plus grandes, de plus en plus fortes.

— Et si je ne pars pas de ma propre volonté ? Me jetterez-vous d’une fenêtre, que je sois obligé de voler pour ne pas tomber ? Fermerez-vous tous les volets derrière moi ? Vous feriez bien, parce que j’y frapperai encore et encore jusqu’à mourir sur place. Je n’aurai jamais d’ailes pour m’emporter loin de vous.
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En Marius, je voyais les cieux ensoleillés du Nord sauvage, des iris dont le rayonnement constant rejetait toute teinte extérieure – fenêtres parfaites ouvertes sur une âme elle aussi des plus constantes. — Viens avec moi, Armand, dit-il. — Où cela, maître ? Où voulez-vous que j’aille ? Je désirais me montrer civil, moi aussi : s’il arrivait à mon créateur de faire assaut d’intelligence avec moi, il avait toujours su mettre en lumière ce que j’avais de meilleur. — Chez moi, avec Sybelle et Benji. Oh, n’aie aucune crainte. Pandora est restée auprès d’eux. Ce sont des mortels étonnants – brillants, très différents et pourtant semblables. Ils t’aiment, ils en savent beaucoup, et ils ont parcouru un long chemin en ta compagnie. Le rouge me monta au visage – une chaleur douloureuse, déplaisante – puis le sang reflua. À l’instant où ma peau se rafraîchit, le simple fait d’avoir ressenti quoi que ce fût me donna un étrange sentiment d’infériorité.
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La caresse de ses doigts sur ma chair à vif était insupportablement délicieuse. N’osant lever la tête, je pressai la joue contre la broderie râpeuse du couvre-lit, contre l’imposante image du lion, je repris mon souffle puis laissai couler mes larmes. Un grand calme m’avait envahi ; le plaisir me dérobait le contrôle de mes membres, et je fermai les yeux.

Lorsque les lèvres du maître se posèrent sur une des meurtrissures, je crus mourir. J’allais gagner le Paradis – du moins un Paradis plus élevé encore, plus délicieux que ce paradis vénitien. Mon sexe s’emplit de vie, d’une force reconnaissante, désespérée et isolée.

Un sang brûlant se répandit sur la plaie. La langue légèrement râpeuse de Marius la toucha, la lécha, la pressa. L’inévitable fourmillement qui s’imposa alors alluma un brasier derrière mes paupières closes, un incendie rugissant sur l’horizon mythique de la nuit où baignait mon esprit aveugle.

Le maître passa à la meurtrissure suivante. Filet de sang, caresse de la langue – l’affreuse douleur disparut, remplacée par une langueur palpitante. Tandis que mon aimé se consacrait à une autre plaie encore, je songeai : c’est insupportable, je vais mourir.

Il progressa très vite, de meurtrissure en meurtrissure, offrant à chacune son baiser magique et la caresse de sa langue. Quant à moi, je tremblais de tout mon corps, gémissant.
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D'un romantique morbide ,je fis un véritable tueur; j'amenais à la réalité dans ses veines l'horreur qu'il se plaisait à croire comprendre dans les miennes. A l'instant ou je pressais son visage contre la chair du premier jeune innocent qu'il lui fallut massacrer pour étancher son inévitable soif, je tombais du piédestal sur lequel m'avait juché son esprit de mortel dément, trop imaginatif, fiévreusement poétique et exalté
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