Chaque pays a dans son histoire quelques événements qu'il préfère laisser sous le tapis parce qu'il s'en dégage un léger parfum de ridicule. L'intervention de la France au Mexique de 1862 à 1867 en fait partie. Qui a bien pu avoir l'idée fumeuse d'envoyer dans un pays en guerre civile à l'autre bout du monde quarante-mille soldats, pour mettre sur le trône un brave archiduc autrichien, devenu Maximilien Ier du Mexique ?
A l'origine de ce qui fut la « grande idée » de son règne, se trouve l'étrange personnalité de Napoléon III. Visionnaire, il a compris que les Etats-Unis sont en passe de devenir la première puissance du monde. Croissant à un rythme effréné, convaincu que sa « destinée manifeste » est de dominer tout le continent américain, le chaos régnant dans les anciennes colonies espagnoles leur permettra de faire facilement main basse sur leurs ressources. Mais si on intervenait dans les affaires du Mexique pour en faire un état fort, capable de faire barrage…
Malheureusement, le brave homme est également… Un stratège désastreux. On y va et puis bof, on verra, on s'adaptera. du reste, c'est comme ça qu'il est arrivé sur le trône. Mais là, il s'agit de lancer une expédition dans un pays dont il ignore tout. Or le Mexique est dans un état catastrophique.
En quarante ans d'indépendance, il a connu… Quarante régimes successifs, de six natures différentes, et deux-cent quarante ‘Pronunciamentos' (tentatives de putsch). Les guerres civiles s'enchainent sans répit. Dans ces conditions, la différence entre officier, gouverneur et chef de truands est devenue plus que ténue, et mêmes les principales routes ne peuvent être empruntée sans escorte solide. Surtout le pays est totalement ruiné, endetté jusqu'au cou. Un prétexte parfait.
Bien écrit et plaisant à lire, ce livre a cependant le défaut de défendre sa thèse avec une certaine lourdeur : casser le mythe du « brave Maximilien » en montrant le caractère retors du personnage, et réhabiliter le maréchal Bazaine, chef des troupes française, en passant sous silence la suite désastreuse de sa carrière . Mais il n'en est pas moins intéressant et instructif, et fait bien ressortir le plus incroyable de cette affaire : au final… Ca a failli marcher.
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En moins d'une quarantaine d'années, le pays connaîtrait une quarantaine de régimes, six formes de gouvernement, et pas moins de... deux cent quarante pronunciamientos. Conservateurs ou libéraux, les pouvoirs en place ne seraient jamais, jusqu'à la révolution de 1910, que des dictatures aux horizons limités.
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