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Critiques de Christian Bobin (1264)
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Une petite robe de fête

Recueil de nouvelles formant une excellente et brève initiation au monde de Christian Bobin, à sa poésie pénétrante.



Introduction, première page, première émotion : comment cet homme peut-il autant pénétrer mon âme ?

C'est fou, j'ai ce sentiment troublant qu'une fée m'aurait touché de sa baguette, me donnant le talent d'écrire, car les mots que je lis sont le reflet de ce que je pense intimement et profondément.

C'est même très troublant de voir ses idées, que l'on croit un peu étranges ou même marginales, avancées si naturellement, si profondément.



Je vais vous confier un secret : Christian Bobin est mon nègre, mais il signe de son nom.

C'est normal, c'est lui qui a le talent…

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Pierre,

Mais comment peut-on écrire si.... magnifiquement ?

L’immense talent assurément. Mais, comme il le sous-entendrait sans doute lui-même, il y a autre chose en plus – une grâce, un souffle, une lumière…



Chaque mot de chaque phrase de chaque chapitre résonne et raisonne en moi.



Heureusement cet ouvrage est bref - Plus long il serait un tel ébranlement – alors pour bien en profiter et ménager mes émotions, j'ai pris le temps de lire en laissant les pauses faire leur œuvre de macération, de rumination pour qu'il opère dans mon cœur.



Christian Bobin a simplement écrit ce livre pour son ami Pierre Soulages. Et moi je plonge et me noie dans ses mots. Le flot du verbe m'entraîne vers l'Outrenoir, vers l'outre amitié. Il se faufile entre certaines évidences triviales les éclaboussant de gouttes dans lesquelles se reflète Dieu.



Que ce mot ne vous effraie pas.



Ce n'est pas une catéchèse et Christian Bobin n'est pas un prosélyte.

S'il cherche à nous révéler quelque chose, ce ne sont que ses doutes et son intuition.

Il y a dans les Outrenoirs de Pierre Soulages de la lumière et Christian Bobin guète et aime la lumière. Il y voit plus que la simple lumière, il y voit quelque chose qu’il ne nomme pas mais qui l’ébloui et le comble.



Moi je n'ai pas peur de l’évoquer ce mot, Il est une telle évidence dans l'œuvre de Christian Bobin que j'aime tant, qu'il m'est devenu intime.



Que dire de plus de ce livre que j'aurai du mal à refermer définitivement ?



Rien…

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La nuit du cœur

Que s’est-il passé dans l’âme de Christian Bobin ce 26 juillet 2017 ?



Ce jour l’abbatiale de Conques est devenue son tourment, un tourment exquis, un tourment divin.



Christian Bobin écrit à G. la femme qu'il aime et qui n'est plus.



Est-ce le texte d’une illumination, d’un éveil à Dieu, de la naissance d’une certitude divine ?



Est-ce le texte de la nature de Dieu ?

Le « très bas » de Bobin hante sa prose comme il hante les pierres les plus basses, les dalles de l’abbatiale de Conques.



Ce vide toujours, ce vide de Conques, ce vide de l’abbatiale, ce vide du cœur, ces vides en forme de Dieu et qui l’appellent.





Des chapitres très courts, des poèmes voguant entre aphorismes et haïku. Chacun apporte sa touche en formant notre esprit à cette idée évanescente du divin.

C'est bien ça : la lumière, les vitraux, les pierres, les oiseaux, les mousses, les fleurs sautent d'un poème à l'autre précisant insensiblement leur message.



Ce splendide ouvrage est éminemment chrétien et moi, je ne le suis que….sommairement ; mais Christian Bobin est un de mes écrivains introspectifs fétiches. Son écriture magnifique est un long travail de déblaiement puis de ciselage. Ce qui reste est absolument magnifique ; rien à ajouter, rien à enlever. La phrase fait mouche. Si elle ne le fait pas instantanément, elle le fait dans la rumination.

Un livre qui contribuera au pavage de mon chemin.
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L'homme-joie

L'homme-joie, c'est un instantané de douceur. Chaque mot fond dans la bouche comme un bonbon sucré, lentement, délicieusement. On s'arrête, on savoure, on succombe. Ça nous prend au coeur comme par surprise. C'est d'autant plus savoureux que je ne m'attendais pas à un tel chavirement, à une telle envolée de l'âme.

Chacun des textes de « L'homme-joie » de Christian Bobin sont des portraits, tels des moments de plaisir ou de trouble différents, preuve de tout le champ des possibles pour se laisser embarquer par l'émotion. Chaque texte nous rappelle combien il faut savourer l'instant, profiter du moment, apprendre à ouvrir les yeux sur ce qui nous entoure et aimer, contempler, admirer, ressentir...

Parce que, malgré les temps difficiles et les douleurs, malgré les peines et les frustrations, la beauté est plus forte, la beauté est toujours là, arrogante et fière. La beauté s'immisce même parfois dans ce qui nous amène des larmes. C'est un tableau de Soulages, le bleu du ciel, les notes de musique, le bouquet de pois-de-senteur dans un vase, les mots qu'on écrit à l'être aimé, à ceux qui nous ont quittés, les mots qu'on se dit, qu'on s'invente, les moments seuls avec nous-même. C'est parfois le silence aussi.

Entre chaque portrait, on découvre sur une page blanche quelques lignes écrites à la main. Juste une ou deux phrases qui sont comme des transitions. Elles ont le rythme poétique des haïkus. On s'y arrête, transportés plus encore par l'intensité des mots. Mots choisis, doux, lyriques, parfois d'une simplicité et d'une pureté comme l'eau claire, quasi transparente d'un ruisseau. Mots purs et évidents dans lesquels on s'emmitoufle comme dans un nuage de coton. Aériens comme la danse virevoltante d'un papillon blanc. Une simplicité des mots évoquant ces moments simples, sans fioriture, ces moments qui nous amènent de la joie, un bien être. Des mots et des sensations qu'on voudrait avaler et garder en soi.

Puis, au coeur du livre, ces pages bleues rappelant le ciel, et une lettre écrite à la main, écrite à son amour, résonne encore plus peut-être en nous, nous irradie par cette chaleur et cette beauté. Ce bleu et ces lettres manuscrites magnifient plus encore ces mots, donnent encore plus de force à chaque phrase, la rendent encore plus belle, majestueuse, si poétique.

Plusieurs fois j'ai ralenti ma lecture pour ne pas arriver à la dernière page trop rapidement, pour rester le plus longtemps dans cet espace-temps si rare et doux. Là aussi, le temps ralenti est nécessaire pour mieux savourer, pour mieux appréhender les choses. Plusieurs fois, j'ai relu des lignes pour me délecter du rythme, pour m'imprégner plus encore de la portée de ces mots, du pouvoir enchanteur qu'ils avaient sur moi. C'est un mantra, un rappel à l'optimisme et aux sourires, un rappel qu'il faut aller vers ce qui nous touche, nous transporte, nous anime, nous fait nous sentir vivants. L'homme-joie nous invite à trouver ces instants de bonheur qui existent par et pour ce qui nous entoure, par ce qui est en nous. Au plus profond de nous.



En écrivant ces mots, j'entends Arthur H dans « Confessions nocturnes » qui demande pourquoi la vie est si belle. Ecouter la voix de Brel, Brassens, Bashung et tant d'autres pourrait provoquer le même sourire, les mêmes ébranlements de l'âme. Ou encore écouter la voix de Nina Simone nous chanter combien elle se sent bien. Ecouter cette chanson en boucle. Immobile, hypnotisée devant un tableau, être touchée sans trop savoir pourquoi. Miser uniquement sur le 9 à la roulette comme ça, juste pour le fun, juste pour l'insolence de se sentir vivre et sentir battre le sang contre ses tempes et éclater de rire, d'un rire peut-être fou. La douceur de l'instant, une chaleur qui se répand, un sourire qui s'élargit, presque aussi grand que l'horizon, la tête dans les étoiles… Feeling good…

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Les Ruines du Ciel

Au prétexte de la poésie, des destins se croisent et foncent au même endroit : L'Outremort ou le Paradis. Appelez-le comme vous voulez. L’Outremort me plaît beaucoup, elle rejoint l'Outrenoir de Pierre Soulages, son ami.



Plus le temps passe, plus je lis Christian Bobin, plus je vois une grande similitude dans l'œuvre de ces deux quêteurs.



Lire un Bobin c'est comme regarder la lumière d’un tableau de Soulages : Les phrases parfois éclairent, parfois éblouissent. Parfois de façon précise, parfois moins.



Ce sont toutes des touches de lumière, des touches de couleurs, des frissons.

Au fur et à mesure que nous lisons, les formes se précisent. Nous prenons du recul et lorsque le livre est clôt, le tableau apparaît dans toute sa beauté. C'est ça un Bobin.

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Le plâtrier siffleur

Quand j’ai lu ce texte d’une brièveté surprenante, que je verbalisais les lignes, j’entendais dans ma tête, dans mon cœur, la voix de Christian Bobin.

C’est fou, non ?

Pas la mienne habituelle, non, la sienne avec ses intonations.

Les quinze minuscules pages du plâtrier siffleur ne sont pas un exemple de l’écriture minimaliste de l’auteur puisqu’il n’a pu travailler cette entrevue retranscrite par Françoise Lemarchand pour sa revue « Canopée » (revue de son entreprise, Nature et découverte).



Qu’importe. Son esprit est bien là et la modestie de l’ouvrage elle-même est gage de ses idées.



Aller à l’essence, au minime, au « très bas » pour atteindre l’être essentiel.

« tendre le langage » à l’extrême pour atteindre la poésie.



Pour comprendre ce récit, finalement, son titre suffit :

Le plâtrier siffleur.

Plâtrier, certes….mais siffleur. Là est la différence







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Le Très-Bas

Que ce texte est beau !

Christian Bobin, d'une écriture chargée de poésie nous conte la vie de saint François d'Assise.

Mais il nous parle aussi et beaucoup de Dieu.

Que l'on soit croyant ou pas ne change rien à l'affaire, le verbe est beau, les propos de l’auteur sont "lourds" de divin. Pas de religion, mais bien de divin.



Au-delà d’un banal traité d’histoire, la vie de Saint François d’Assise qu’il nous livre est imprégnée de spiritualité, d'interprétation poétique aussi. Les mots de l’auteur se faufilent dans notre esprit pour nous faire entrevoir l'inimaginable Amour de cet homme.



Il nous livre également de vraiment belles pages troublantes et envoutantes sur la nature mystique de l'être humain, de la mère, de l'enfant.

Mais aussi, comment dire, sur la nature" humaine" de Dieu, non pas trônant aux cieux et jugeant les hommes, mais près d'eux et les aimant infiniment.



Tout cela ennobli et éclaire la vie de François, homme devenu humblement pauvre et si riche d'Amour ; devenu le serviteur et l'ami du Très-Bas : la part de Dieu qui aime et vit parmi les petits, ceux qui comptent peu, La part de Dieu qui nourrit le Très-Haut.



Le plan de Christian Bobin est simple et efficace :



D’abord il nous dresse en douceur un portrait psychologique du XIII ème siècle en Italie et en Provence, imprégné de la Bible, inondant et modelant les esprits, source intarissable et silencieuse de toutes les réponses :

« Tu es là parce que je t'aime; avant tu étais en Moi, après tu me rejoindras. »



Et le message qui exfuse de la bible est l'Amour :

« Je t'aimais bien avant que tu sois né. Je t'aimerai bien après la fin des temps. Je t'aime dans toute éternité ». Car l'Amour transcende tout, même Dieu, baigne ce siècle et lui donne sa tonalité.

La misère aussi imprègne ce monde.

Et c’est là que François naît.



Puis il nous parle d’Amour. L’Amour, souffle et expression de Dieu, présent dans l'enfant, dans la fleur promesse de fruit ; l’Amour insufflé par Dieu à la mère, son mystère et sa beauté infinie qui naît et grandi sans limite avec son enfant.



Enfin, il nous parle brièvement, comme pour insister sur son humilité, de François qui cherchera à vivre si près de l’humus – de l’humble- qu’il en perdra toute épaisseur afin de se glisser entre le verbe et Dieu, entre l'Amour et Dieu, et dont la sainteté viendra de l'imitation de cet Amour maternel et divin pour le minuscule, pour tout ce que Dieu habite. Car Dieu est dans le petit, l'humble. Dieu est aussi le très-bas.
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Une petite robe de fête

Christian Bobin…

Ca fait longtemps que cet homme sait me toucher là où ça émeut, émerveille, rend joyeux ou mélancolique. Les voyages à ses côtés sont toujours passionnants, riches en paysages colorés, en rencontres marquantes, en émotions vibrantes.

Une petite robe de fête est un livre qui se lit lentement.

Il se déguste, délivrant des saveurs orientales, sucrées-salées, du terroir ou exotiques.

Il se dévore des yeux, les mots se répondant, les phrases se bousculant, les retours à la ligne nous apaisant.

Il se touche, laissant mes mains parcourir les lignes, les visages, les feuilles des arbres ou les nuages.

Il s’écoute, m’invitant à la fête ou au silence, à l’introspection ou aux mélodies joyeuses de la Vie qui s’épanche et déborde.

Il se sent, délivrant les parfums d’automne, de champignon, d’océan, de chagrin, de rose ou de désir.

Il se ressent, provoquant en moi larmes, frissons, douceur et papillons, envie et passion.



J’ai eu un immense coup de cœur pour « Terre promise », un texte sur l’écriture, sur la lecture, sur ce qui fait l’essence d’une vie.

Une vocation.

Un appel à rejoindre ce qui me met en marche.

Un appel à oser !



Christian Bobin… Un homme à l’écriture poétique d’une simplicité désarmante qui ne cesse de me rejoindre là où je souhaite la compagnie des mots.

Une merveille !

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Les poètes sont des monstres

Vendredi 16 décembre 2022/ Librairie Chantelivre



Gros...gros moment d'émotion et de peine !



Alors que tant de lecteurs fidèles,assidus des écrits de cet écrivain poète,( dont je fais partie) pleurent sa toute récente disparition...chaque mot de ce tout dernier texte...a tout d'un message, d'un testament....déplorant notre monde plongé dans sa propre fin...



Ce monde des hommes en voie d'effacement ,les machines et la technologie ,devenant ces " choses" voraces et toxiques....la prolifération de la barbarie et des tyrans...et cet hommage absolu à l'arme de la Résistance : la Poésie !



Infime texte, où plus que tous les autres

( puisque l'ultime !) rend hommage à cette terre russe qui a abrité tant de poètes et de poétesses ayant lutté, au péril de leur vie, contre la folie de leurs tyrans, dont la figure redoutable de Staline !



"Nadja Mandelstam s'approche à son tour, autre amie d'Anna.La mort a enregimenté son homme.Elle continue de vivre en lui, pour lui, par lui.Elle a appris par coeur son oeuvre entière. (...)

Les polices mandatées par le tyran ne pourront jamais chercher jusque-là les poèmes qui les anéantissent."



En cette actualité présente tragique depuis 10 mois interminables , où l' Ukraine se bat contre ce bien " curieux grand frère "...qui a une idée fort singulière idée de "la Fraternité "!...Christian Bobin nous exprime encore et encore la force des mots...et pas n'importe lesquels: ceux des poètes...ces dissidents essentiels !



Hommages plus appuyés à Anna Akhmatova ainsi qu'à Nadja Mandelstam ....



"Les poètes sont des monstres.Ils n'aiment pas vos machines.Ils ne les aimeront jamais.Une bouilloire- antique grosse pomme de fer talée- est toute la technologie qu'ils supportent. Ils aiment trop la vie pour prétendre " l'augmenter""
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Un bruit de balançoire





Une balançoire. Souvenirs d’enfance qui ressurgissent. Sans aller jusqu’au bout du monde, sans même quitter son fauteuil, l’invitation au voyage dans le temps et l’espace.



Avec en toile de fond l’écriture de Ryokan, Christian Bobin s’arrête pour regarder l’infime. Mêlant sans cesse le bonheur, la vie et la mort, il porte son regard autour mais surtout au plus profond du corps et de l’esprit. Un retour vers l’essentiel.



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L'inespérée

Rien, il ne se passe rien dans cet ouvrage. Mais tout, tout y est perçu.

Encore plus intensément que dans la lumière crue des mots, c'est dans le gris, le demi-ton de la phrase que se révèle la noblesse de l'écrit, la puissance évocatrice du verbe de Christian Bobin.



Recueil de nouvelles abordant des thèmes aussi variés que la lumière, l’ignominie des journalistes de la télévision, la nostalgie du « chez soi », du « faire rien » qui nous prend dès que nous sommes ailleurs, la solitude féconde, la perception de la mort, la peur, la foi fugace devant la souffrance.



Les mots de Christian Bobin trouvent le chemin parfait dans les circonvolutions de l'esprit du lecteur. Les phrases sont concises, claires et percutantes. Je les adore pour le simple plaisir de les lire, de constater combien elles me touchent. Il faut les lire vite, en état de lucidité et d’attention parfaits puis laisser faire….

Il reste les images qui imprègnent notre esprit buvardeux et l'éclairent confortablement, plaisamment.
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La folle allure

Elle s'appelle Lucie, ou Irène, ou Prune, ou Marilyn. Elle adore s'inventer un nouveau nom, une nouvelle adresse, une nouvelle histoire qu'elle raconte à chacune de ses fugues. Car même la vie itinérante du cirque dans lequel travaillent ses parents ne suffit pas à calmer ses envies de liberté, d'ailleurs. Chaque évasion est accueillie par le silence courroucé du père et les éclats de rire de la mère qui sait bien, elle, que rien ne peut retenir les élans de sa fille amoureuse d'un loup à deux ans et d'un fils de notaire à dix-sept ans. En toute chose, Lucie suit son instinct, ou plutôt ce qu'elle appelle son "ange", se laisse guider par cette force qui la mène dans la cave d'une cité à Créteil, dans les bras de son voisin à Paris, sur les plateaux de cinéma ou dans une chambre d'hôtel du Jura. Libérée de toute contrainte, elle n'a qu'une devise : "On verra bien...".





Seule dans sa chambre d'hôtel, Lucie se raconte, de ses premiers émois à sa dernière extravagance, une vie riche d'expériences, une vie sans contraintes, sans concessions, une vie qu'elle s'est forgée en suivant ses envies, ses coups de coeur, ses impulsions. Sous la plume délicate mais acérée de Christian BOBIN, Lucie, héroïne libre et flamboyante, prend naissance dans la cage d'un loup, grandit dans un pensionnat catholique, se révèle dans l'écriture, sous les yeux d'un père taiseux, perfectionniste, exigeant, et d'une mère, belle et folle, joyeuse, amoureuse de la vie.

Un livre magnifique, une leçon d'optimisme, de liberté, de légèreté dans les pas d'une jeune femme qui aime la grande musique, les livres très épais, les robes d'été au coeur de l'hiver, la vie, les gens. Christian BOBIN aligne les jolies phrases, les pensées profondes, les leçons de vie, sans avoir l'air d'y toucher...Un auteur à découvrir et à aimer.
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Autoportrait au radiateur

"La vie, je la trouve dans ce qui m'interrompt, me coupe, me blesse , me contredit. La vie, c'est celle qui parle quand on lui a défendu de parler, bousculant prévisions et pensées, délivrant de la morne accoutumance de soi à soi"



Cette phrase me semble assez bien résumer l'essence de ce livre au titre très énigmatique.

En effet, pourquoi au radiateur ?

Dans ce roman, sous forme d'un journal, courant de Pâques 1996 à Pâques 1997, Christian Bobin nous parle surtout d'un deuil. Il a visiblement perdu une compagne chère peu avant l'écriture de ce roman.

On sent que l'auteur s'accroche à la vie pour surmonter cette épreuve. Des points d'orgue dans son esprit, avec lesquels il a toujours vécu, ainsi il nous parle de la beauté, de la beauté du monde. Et, pourquoi pas, déjà, la ressentir dès le matin, dans la contemplation de fleurs coupées qu'il achète chaque semaine. Il leur impute de très belles phrases et de très belles pensées.

Pour le reste, cette suite de jours s'accompagne de cafés, de cigarettes, de visites des enfants de cette femme décédée.

Malgré une indéniable poésie dans son écriture, je dois dire avec regret que je me suis ennuyée. Ses longues assertions sur l'amour ne m'ont pas convaincue. Il y a un quelque chose d'indefinissable qui ne prend pas, ne me touche pas.
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Pierre,

« Dans le donjon blanc vit l'amant du noir. »



Quoi de plus fort qu'un livre dont le titre est un prénom suivi d'une virgule, pour mieux rendre hommage à son ami centenaire ?

Christian Bobin écrit son roman comme s'il commençait une lettre.

C'est beau. Simplement beau.

Sa plume ondule comme un envol au souffle de son auteur.



« Il me reste quelques heures pour t'apporter la nuit du coeur. Tu passes dans ce livre comme au ciel les nuages que j'aime tant. »



La nuit du coeur a double sens, puisqu'il s'agit d'un ouvrage de l'auteur, dans lequel il a séjourné dans un hôtel donnant sur une abbaye où les vitraux sont signés Pierre Soulages.

En dehors de leur beauté, les textes de Bobin sont chargés de références. Il n'est cependant pas essentiel de bien les connaître pour apprécier la lecture. La preuve, je ne suis pas une puriste et j'ai pourtant passé un somptueux moment.



Hormis quelques citations saisies au hasard, Pierre, est le premier ouvrage que je lis de l'écrivain.



Comment le décrire ? Bobin se situe entre l'essai philosophique, la prose poétique et le journal touchant l'intime. Méditatif et rêveur...



« D'être seul fait devenir tout. » Vous avez quatre heures…



Qu'en est-il de son lien avec Pierre Soulages ?

Christian Bobin a du peintre la fièvre du vernissage. Il dévoile ses mots tels des fragments de lune, des pages gorgées d'étoiles. Il le dit lui-même « La grâce est dans les intervalles. »

Auteur contemplatif, son écriture s'apprécie comme une toile.

Pierre, ce sont plein de petits tableaux suspendus aux pages. Prenez vos billets d'entrée, l'exposition commence.



« Il m'est arrivé d'accrocher mon âme à des buissons. »



Pierre, pourrait se découvrir par la fin ou se déguster par échantillons. Ce livre a le désir de m'accompagner n'importe où, avec le plaisir de pouvoir être ouvert au hasard, pour en lire un court passage le temps d'un moment.

Pierre, n'est pas loin de me cueillir pour une séance de relaxation. J'adorerais entendre les textes de Christian Bobin repris en musique par nos meilleurs chanteurs et chanteuses francophones.



Inspirant, son style est sonore et visuel.



Pierre, c'est aussi l'appréciation de l'instant présent.



La virgule témoigne,

La virgule soulage,

La virgule aime,

Elle ondule et se balance la virgule,

Pierre, la virgule épouse la majuscule,

Noctambule, elle déambule...



La nuit, parlons-en… Christian Bobin souligne l'importance du noir. Ainsi la profondeur de la nuit est mise en lumière, tel un doux clair-obscur…



« La poésie est le noir du langage sur lequel passent les griffes de la lumière. »



Nous pouvons y voir des reflets de poussière dans le vent. Des étincelles d'étoiles.



« Un train m'attendait. Il avait passé la nuit dans une écurie de fer. Une lassitude l'empoussiérait. Les trottoirs écaillés, gris mouette, étaient signés Soulages. Je voudrais écrire un éloge de la poussière. »

« Le vent est la poussière de la lumière. »



La religion tient également un place importante, l'auteur rendant visite à Pierre Soulages le 24 décembre, en voyageant par train la nuit précédant l'anniversaire de son ami.



« Il y a une présence qui a traversé les enfers avant de nous atteindre pour nous combler en nous tuant. »



À plusieurs reprises, l'écrivain se confie en évoquant son père, continuant à vivre à travers son regard, pour marquer le contraste de la vie face à la mort. La lueur face à la pénombre.

Pierre Soulages ayant dépassé les cent ans, c'est aussi une façon d'aborder la fin avec sérénité. Oriflammes du deuil...



« Les yeux de mon père étaient la chambre du soleil. Je l'ai puissamment habitée. Ces yeux sont désormais les miens. Je vis de leur éternité. »

« Il y avait assez d'air entre les mots, assez de nuit sur la toile pour que quelqu'un se saisisse de sa propre vie inachevée. »



À trop chercher la voie lactée, Pierre Soulages finira par voler...



« Un geste me rassure dans cette vie, un seul, c'est appuyer ma main droite contre le tronc d'un arbre, où la faire glisser sur le crâne rasé d'un livre. Dans cette nuit conventionnellement sainte de Noël, inaperçu de tous, j'appuie ma main sur quelques outrenoirs. Ce geste est interdit dans les musées. C'est un blasphème. Son auteur mérite la peine de mort. Je ne respecte rien, Pierre. J'aime. »



Christian Bobin a versé pour vous quelques perles de nuit et de silence. Les silences de pierre.

Je lui laisse la conlusion.



« Tu te tais comme une forêt respire la nuit. »





Lu en août 2021
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Tout le monde est occupé

Cela faisait longtemps que je voulais lire un roman de Christian Bobin. J'avais lu pas mal de belles et bonnes critiques sur ses livres et me faisait un plaisir d'en lire un. Malheureusement pour celui-ci cela n'a pas fonctionné. L'écriture est agréable, bienveillante, poétique, insouciante et un peu absurde ce qui n'est pas pour me déplaire mais je m'y suis ennuyée. Je veux bien réessayer d'en lire un ...si vous avez des suggestions ?
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Un bruit de balançoire

Les livres de Christian Bobin ont ce pouvoir de nous donner envie de les lire, les feuilleter à nouveau, sans se lasser. Sa poésie est intemporelle, elle nous apaise et ouvre notre regard au monde, qu’il soit intérieur ou extérieur.



Dans « un bruit de balançoire » c’est par le truchement de lettres fictives que l’auteur nous parle de la vie, de l’intime et du plaisir d’écrire. Tout est parti de Ryõkan, et les lettres font écho aux courts poèmes de ce moine poète japonais du 18e siècle.

Ces courtes missives s’adressent tout aussi bien à des proches comme sa mère, ou bien à des inconnus ou un forestier croisé sur le chemin d’une forêt. Il s’adresse aussi au nuage pour évoquer la beauté :

« Aucun chef-d’œuvre ne m’a donné autant de paix -à part toi, petit nuage, à part toi »



Ainsi Christian Bobin nous parle de ces choses qu’on ne peut voir qu’avec le cœur, ces petits riens invisibles qui nous font frémir : un nuage qui devient un chef-d’œuvre, la fraicheur blanche de la neige, l’odeur des arbres coupés, un scarabée qui boite, des moucherons dans la lumière comme des notes de Bach.

L’auteur célèbre la vie et le bonheur d’exister mais la mort est aussi très présente dans chacun des textes, et se mêle à la vie. Mais le poème, lui, restera toujours. « La vie écrit au crayon. La mort passe la gomme. Le poème se souvient »



La sobriété du texte voisine avec la virtuosité de l’écriture et c’est beau, d’une beauté qui déclenche l’émotion.



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L'épuisement

Ecrire un billet sur ce livre, c'est comme si j'essayais de faire rentrer un nuage dans une bouteille en verre pour le conserver, l'admirer, en faire un refuge. Ce serait peine perdue car le nuage perdrait son essence, son coté duveteux, sa douceur, sa féerie. Tout comme l'enfermement dénaturerait le nuage, le billet abîmerait la parole de ce livre.



Alors, je ne vais pas essayer de partager ma lecture, pour dire ce qu'elle m'a apportée, pour une fois, je vais jouer les égoïstes des sensations générées par les mots, je vais les taire, les conserver soigneusement dans mes pensées comme un élixir de sérénité.



Mais alors, comment vous donner envie d'ouvrir ce bel objet ?

Juste en évoquant l'oiseau de la couverture , celui qui m'a prise dans ses ailes du haut de l'étagère où je l'ai trouvé entre mille livres d'occasion,

peut-être en pariant que vous aurez envie de voir ou de revoir "Gertrud" de Dreyer ou "Mon Oncle" de Jacques Tati, au fil des pages lues,

en imaginant que vous aurez envie, comme moi, de lire André Dhotel, Antonin Artaud ou Nazim Hikmet, parce qu'ils ont surgi des phrases,

en vous conviant à vous installer confortablement au milieu de coussins pour écouter Glenn Gould au piano.



Ce livre lu au moment opportun vaut tous les trésors : je voudrais de grandes poches pour l'y glisser chaque matin, pour avancer au fil du temps car j'ai besoin des phrases qui y sont écrites pour accepter les émotions du quotidien.

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La plus que vive

La plus que vive est un tournant dans l'oeuvre de Christian Bobin.

L'auteur se retourne vers la mort pour voir celle-ci qui emporte l'amie, l'être aimée. Mais à la différence d'Orphée, celle qui est partie ne s'éloigne jamais, se rapproche encore plus près de celui qui tend la main, ne veut pas la perdre, l'aime plus que jamais, continue de vivre avec elle.

« L'événement de ta mort a tout pulvérisé en moi

Tout sauf le coeur ».

C'est tout d'abord une mort qui foudroie. Lorsque la mort vient, souvent elle frappe par deux fois. Ici l'homme qui parle, l'homme aimant, qui aime celle qui est morte, est foudroyé, mais il parle, donc il vit encore. Il survit peut-être. Il nous parle, nous écrit.

Le chagrin apaise, guérit, apprend à vivre. Je ne sais pas ce qui m'a fait connaître Christian Bobin. Je crois parfois que ce sont les livres qui nous choisissent.

Lorsqu'un jour j'ai fini par ouvrir ma fenêtre, ce livre est entré et s'est posé près de moi comme un oiseau.

Il m'a tout d'abord parlé du manque, de l'absence.

Puis des vivants et des morts.

Et aussi de ceux qui croient et de ceux qui ne croient pas.

Le chagrin n'est pas la tristesse. Au contraire, peut-être…

A l'inverse d'Orphée, Christian Bobin peut-être ne s'est jamais retourné vers la mort.

Il a accompagné l'être aimée là où sa mort devait l'amener, déjà dans ce livre. Là… Puis ailleurs, là où à chaque instant quelque chose nous rappelle un souvenir, où il faut revenir, aller, dans la lumière plus que vive du jour, dans le chant des oiseaux et l'odeur des fleurs…

L'auteur dit la mort, par-delà la mort. Il dit la vie. Croyants ou non-croyants, peu importe car tous se posent la même question face à la mort, lorsqu'elle arrive chez un être cher. Pourquoi ? Ce sont les réponses qui diffèrent. Quoique…

Les réponses de Christian Bobin ne se situent pas dans ce clivage souvent irréconciliable.

Il propose d'autres réponses par-delà les chemins trop bien appris.

Il dit d'autres mots. Il le dit avec ses mots, avec le chant des cigales et du rossignol. Il le dit dans la joie.

Plus tard, nous sommes apaisés. Si nous n'avons pas obtenu de réponses à nos questions, ce n'est pas grave. Ce texte nous a apaisé, bien que nous sentions encore dans le frémissement des pages la douleur de celui qui les a écrites.
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L'homme-joie

On peut apprécier les écrits de Christian Bobin, être sensible à la profondeur de sa pensée, à son humanité, sans pour autant partager ses convictions religieuses. Les mots de Bobin , en effet, par leur simplicité , leur justesse , leur poésie, nous vont droit au coeur, interpellent notre âme. Cet ouvrage, dans lequel l' auteur réalise une sorte de condensé des moments forts de son existence, ne fait pas exception à la règle, avec toutefois - en dépit de son titre- un peu plus de mélancolie et de gravité que d' ordinaire : il y aborde , entre autres , des sujets tels que la fin de vie. L' homme- joie est aussi un très beau livre -objet avec des passages manuscrits - dont le carnet bleu central consacré à sa compagne disparue prématurément : "la plus que vive"- qui renforcent cette sensation d' intimité avec le lecteur.
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L'inespérée

Une petite pensée pour dancinqbrave qui se délecte aussi de la beauté des mots de Bobin. Des nouvelles diverses qui ne se racontent pas mais qui se savourent. Je continue de penser que Bobin, c'est comme un grand vin, il faut choisir les occasions pour déguster ses paroles et se sentir ainsi mieux face à la vie, surtout celle actuelle.
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